Amadou Haya Sanogo : Le méa-culpa

Alors que son procès,  qui avait été renvoyé aux assises de mars 2017, tarde à reprendre, le général Amadou Haya Sanogo écroué depuis plus de trois ans s’est laissé aller à des confidences à son avocat, celles d’un homme cherchant repentance.

Des révélations en forme de mea-culpa d’Amadou Haya Sanogo ont été publiées ce matin. Suite à une conversation avec son avocat, Me Harouna Toureh, l’éphémère chef de l’Etat semble éprouver des regrets. Après avoir toujours clamé son innocence et nié les accusations portées à son encontre sur l’assassinat de 21 bérets rouges en 2012. « Ce qui s’est passé dans la nuit du 2 au 3 mai (2012) n’était que le fruit d’une multitude de circonstances dramatiques, des mauvaises appréciations des faits de guerre, d’influences négatives de l’extérieur de l’armée, c’était pour certains une simple question d’instinct de survie, qui après plusieurs jours de fortes tension psychologique et moral, sans sommeil ni repos au bord de l’épuisement physique, intoxiqués par des rumeurs d’arrivée massive contre eux de mercenaires venus de l’étranger, ont fini par craquer et faire le choix malheureux qu’on connait » a-t-il annoncé. Avant d’ajouter « pour avoir pris en mains les destinées de notre pays un laps de temps, j’ai conscience que ma responsabilité morale peut être engagée ». Des déclarations aux antipodes de la ligne de défense habituelle du l’ex-chef de la junte, qui niait tout en bloc et menaçait même de faire des révélations fracassantes lors de son procès.
« J’imagine combien sera vain le moindre mot compatissant de ma part à l’endroit des parents, veuves, enfants… des victimes de cette nuit de grande perte pour la nation et pour l’armée malienne… Je prie notre Dieu tout miséricordieux et tout compatissant afin qu’il apaise la douleur de chacun et qu’il ne laisse dans le cœur des parents, veuves, orphelins, de toutes les victimes de ses sombres jours que le tendre souvenir de leurs chers disparus » souhaite-t-il.

Des débuts d’excuse que semble bien accueillir le Colonel Coulibaly de l’association des parents et épouses des militaires bérets rouges assassinés (APEMBRA). « Dans tous les pays du monde, une faute reconnu et sur laquelle on demande des excuses est à moitié pardonné, ça ne réveillera pas nos morts, et c’était écœurant de le voir nier les faits, à cette époque rien ne pouvait se faire sans son aval, mais ces excuses peuvent calmer les esprits » soutient-il.

Pour l’heure nous ne savons pas si la conversation entre Sanogo et son avocat a malencontreusement fuité ou si c’est un coup délibéré, si c’était le cas, cela ne semble pas faire avoir été fait de manière consensuel. Me Tiéssolo Traoré, un des avocats de Sanogo, affirme avoir appris la nouvelle ce matin dans la presse. « Je l’ai vu il y’a deux semaines, et je n’ai pas senti en lui une envie de faire des révélations, j’ai été surpris de voir cela, ce ne m’a pas du tout plût, et je ne cautionne pas » conclut-il.

Procès Sanogo : l’audience renvoyée à la session de 2017

Après plusieurs suspensions, le procès Sanogo a finalement été reporté à la session prochaine des assises. La Cour a rejeté la demande de liberté provisoire des accusés et à ordonner une nouvelle expertise médicale des corps des victimes dans l’affaire dite des bérets rouges.

C’est officiel la cour d’assise en transport à Sikasso dans le cadre du procès Sanogo a renvoyé l’audience à la session prochaine des assises dont la date n’est pour l’instant pas connue. La cour a également rejeté la demande de liberté provisoire de la défense.

En d’autres termes, le général Haya Sanogo et les 17 autres accusés restent en prison en attendant l’annonce de la nouvelle date des assises. Selon Me Abdoulaye Sidibé, avocat à la cour, le délai minimum est entre 3 ou 4 mois pouvant aller jusqu’à 6 mois.

En attendant, la cour a ordonné une nouvelle expertise médicale au laboratoire Mérieux de Bamako dans un délai de 45 jours afin d’identifier à nouveau le corps des 21 bérets rouges. On rappelle que c’est la seule exception de procédure qui a été retenue par la cour sur les quatre soulevées par la défense.

 

Procès Sanogo : la demande de renvoi de la défense rejetée

 

L’audience du mercredi 7 décembre 2016 du procès Sanogo a été suspendue après plusieurs échanges entre avocats des parties (défense et partie civile), le parquet et le juge Mamadou Berthé. L’audience a été suspendue. Elle reprend demain à 11 heures.

La quatrième journée de l’audience du procès Sanogo a démarré ce mercredi avec seulement 15 témoins présents sur les 23. Les avocats de la défense et ceux de la partie civile ainsi que les accusés étaient tous présents dans la salle d’audience. Après la traditionnelle vérification effectuée par le juge Mamadou Berthé, président de la Cour, la défense a souhaité le renvoi pur et simple du procès à la session prochaine. Une doléance considérée comme inacceptable pour la partie civile et le parquet. Pour ces derniers, l’audience pouvait bel et bien être maintenue avec les 15 témoins de la défense et la vingtaine des témoins de la partie civile (présent à Sikasso depuis le début du procès le 30 novembre dernier).

Après une brève suspension la Cour a rejeté la demande de renvoi de la défense laissant place aux discussions.

Exceptions au menu. Comme annoncé les avocats ont attaqués pendant plusieurs heures sur la forme, l’audience. Selon ces derniers, la cour d’assise est incompétente matériellement et personnellement à conduire ce procès. Son argumentation repose en majorité sur le fait que les accusés sont militaires. L’organisation du système judiciaire du Mali prévoit des juridictions spéciales telles que le tribunal militaire pour se prononcer sur des infractions commises par des militaires. C’est le cas du procès Sanogo.

Autre aspect sur lequel est revenue la défense, le cas Yamoussa Camara. Ministre de la défense au moment des faits, la défense affirme que Yamoussa Camara devait être jugé par la haute cour de justice habilité à juger les ministres et le président de la République.

Les débats ont duré plusieurs heures avant que le juge Mamadou Berthé ne suspende l’audience. Elle reprendra demain à 11 heures.

Procès Sanogo Jour-3 : les témoins de la défense introuvables

Aucun des témoins de la défense n’a répondu présent en ce troisième jour du procès Sanogo. Les avocats de la défense estiment que c’est l’expression d’une mauvaise organisation.

La troisième journée du procès Sanogo s’est ouvert ce lundi 5 novembre comme prévu. Après avoir vérifié que les accusés soient tous présents dans la salle d’audience, Mamadou Berthe, président de la cour se rend compte que la vingtaine de témoin de la défense est absente. Une belle opportunité pour les avocats de la défense qui depuis l’ouverture du procès semblent vouloir un report pure et simple de l’audience. « Monsieur le président, seul l’honorable Oumar Mariko est présent », affirme un avocat sans s’être assurée de la présence de ce dernier dans la salle. Lorsque Mamadou Berthe, demande qu’ Oumar MARIKO se lève, on constate également l’absence de celui-ci.

Pour rappel, Oumar MARIKO est le dernier a être ajouté à la liste des témoins de la défense. Il était présent le vendredi dernier.

Mauvaise organisation Alors même que les avocats de la défense s’apprêtaient à avancer des exceptions de procédure avant les débats, Mohamed Najim, avocat général représentant le ministère Public offre une nouvelle arme de défense à l’accusation, « il faut vérifier si les témoins sont présents », demande-t-il au juge. Visiblement étonné de cette réaction, Mamadou Berthe, une fois de plus passe en revue la liste des témoins. Résultat, aucun n’est présent. « On est dans un amateurisme total, un sabotage du procès », déclare à la barre Me Konaré, avocat de la défense. Et d’ajouter que c’est l’expression d’une mauvaise organisation. Me Harouna Toureh, avocat principal de la défense  explique que la déclaration du parquet est un « aveu de désorganisation ». Il martèle ensuite, « c’est inconcevable qu’une assise se tienne sans témoins.

La loi prévoit que le parquet s’assure d’abord de la présence de tous les témoins à l’audience. Ensuite le parquet doit les prendre en charge. Enfin, la loi permet au parquet de faire comparaître de force chaque témoin qu’il estime nécessaire. Pourtant, rien ne semble avoir été fait en ce qui concerne cet aspect.

Bien que le parquet n’ai pas encore requis au renvoi du procès Sanogo, tout porte à croire pour l’instant que c’est une alternative fort possible.

L’audience a été suspendue, le temps de permettre au juge et ses assesseurs de prendre une décision.

Cheick Oumar Keita : « Cette affaire est une pure manipulation politique, cela sera démontré dans le procès »

Enseignant et père de trois enfants, Cheick Oumar Keita, président du club de soutien au général Amadou Haya Sanogo revient sur les raisons de la création d’un tel club. Il est convaincu que Haya Sanogo est innocent et souhaite que la justice soit faite.

Quel est l’intérêt de la création d’un tel Club ?

Le club de soutien au général Amadou Haya Sanogo existe depuis trois ans. Il est composé de personnes qui ont approuvé toutes les actions du général depuis le coup d’État de 2012 à ce jour. Le club n’a aucun autre intérêt que de soutenir et accompagner Haya Sanogo qui est pour nous un héros et un guide.

Quelles sont concrètement les raisons qui motivent votre amour pour le général Haya Sanogo ?

Après le coup d’État en 2012, nous avons approché Haya Sanogo. Nous l’avons écouté, analysé ses propos et compris que le putsch avait pour but de redresser les institutions de la République. Son souhait était de changer un système qui avait échoué à apporter la paix aux Maliens. Haya Sanogo a également contribué à mettre en place des autorités démocratiques légales et légitimes après le coup d’État. C’est pourquoi nous sommes convaincus que le général Haya Sanogo aime le Mali. Chaque décision, chaque acte qu’il a eu à poser, il l’a fait dans le seul intérêt de la nation. Aujourd’hui plus que jamais, le général a besoin de ses amis, parents pour qu’enfin justice soit faite.

Certaines familles de victimes estiment que Haya Sanogo est impliqué dans l’assassinat des 21 bérets rouges. L’idée que vous soutenez un assassin ne vous choque-t-elle pas ?

Si réellement le général Haya Sanogo a pris part à ce massacre, nous souhaitons que justice soit faite. Pour la simple raison que la vie humaine est sacrée. Mais, je peux vous assurer, que tout ça n’est que pure manipulation politique. Cela sera démontré dans le procès.

Vous avez rencontré Haya Sanogo. Comment se porte-t-il ?

Le général a énormément maigri mais c’est normal car il est privé de liberté. Sinon physiquement et moralement, il se porte très bien. C’est un homme décontracté qui garde le moral. Il a toutes ses facultés en place. Et il est prêt à dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Sa famille serait ici à Sikasso avec lui. Qu’en est-il ?

Ce n’est pas vrai. Présentement, il n’y a que sa tante et son oncle qui représente ses parents proches. La grande sœur de sa femme également est là. C’est tout.

Que ferez-vous si Haya Sanogo venait à être condamné ?

S’il est condamné sous la base de la vérité, nous l’accepterons car la justice aurait été rendue. Sinon nous ne resterons pas les bras croisés face à une quelconque machination politique.

 

 

Procès Sanogo : une salle internet pour les avocats

La trentaine d’avocats (défense et partie civile) du procès Sanogo et le ministère public ont trouvé un terrain d’attente après une journée déchaîné ce samedi. Une salle connecté à l’Internet et un pupitre sont prévus pour lundi 5 décembre, date de la reprise du procès.

Après une journée entière d’échange entre les avocats (défense et partie civile) et le ministère public, un compromis a finalement été trouvé.  Une salle équipée avec connexion internet a été aménagée au sein même de la salle d’audience pour les avocats. Elle permettra de se connecter sur place et de laisser par la suite les téléphones portables point de litige entre les avocats et le ministère public. Des gardes assureront la sécurité du matériel.

Autre nouvelle mesure, un autre pupitre est prévu uniquement pour les avocats de la défense. Pour rappel, un seul pupitre n’existait dans la salle Lamisssa Benghaly pour les 17 avocats de la défense et les six avocats de la partie civile. Les accusés et les témoins s’en servaient également pour échanger avec le juge Mamadou Berthé, président de la Cour.

Selon nos sources, le procès pourra donc reprendre le lundi comme prévu. Les avocats de la défenses avanceront plusieurs exceptions de procédures qui pourraient sans nul doute contribuer au renvoi du procès.

Me Harouna Toureh : « leurs desseins c’est peut-être d’éviter que le procès ait lieu »

Pour ce deuxième jour d’audience, le procès Sanogo à été suspendu jusqu’au lundi 5 décembre, car les avocats refusaient de travailler sans pouvoir utiliser leurs téléphones portables. Me Harouna Toureh, avocat du général Sanogo, a expliqué au Journal du Mali, les raisons de la fronde des avocats de la défense comme de la partie civile.

Ce matin les avocats sont restés dehors et ont refusé de rentrer dans la salle, pour quelle raison ?

Ils sont restés dehors certes mais ils n’ont pas refusé de rentrer dans la salle d’audience. Nous avions demandé que des conditions de travail auxquels nous avons droit soient remplies purement et simplement. Nous souhaitions qu’une salle soit mise à notre disposition avec internet et ordinateur, tout ce qu’il faut, dont un secrétariat comme si nous étions dans nos cabinets. Pouvoir travailler, produire, échanger c’est important, pour les avocats de la défense et de la partie civile que nous sommes. Cet espace ne nous a pas été accordé, nous l’avons demandé dès le début du procès, bien avant même de quitter Bamako. À l’ouverture du procès, nous avons pu accéder à la salle avec nos smartphones, mais aujourd’hui on nous a refusé de les prendre.

Un membre du comité d’organisation a parlé d’une fuite, des gens ont-ils filmé ou retransmis le procès en directe ?

Ce n’est pas ce qui nous a été dit. Officiellement, le parquet général nous a dit que c’était pour nous permettre d’être en sûreté ainsi que le publique, à ce moment il aurait fallu simplement qu’ils aient les moyens technologiques pour vérifier que les téléphones que nous avons ne constituent aucun danger pour nous même et pour le public.

Si on ne donne pas suite à ce que vous voulez, que comptez vous faire ?

On est là, on attend que les conditions de travail soient remplies pour que nous puissions accéder à la salle, tous, avocats des accusés comme avocats des parties civiles. On est tous d’accord que tant que les conditions ne sont pas réunies on ne pourra pas faire notre travail.

Donc vous prenez le procès en otage ?

Non, qui prend le procès en otage ? C’est ceux qui ne veulent pas mettre les conditions de travail à notre disposition qui prennent le procès en otage, peut être que leurs desseins c’est d’éviter que le procès ait lieu.

À qui faites-vous allusion ?

Mais ceux qui ont organisé le procès, le parquet général, le ministère de la Justice, ils savent que les avocats vont toujours exiger d’être mis dans les meilleures conditions pour faire leur travail, il ne s’agit pas de deux ou trois avocats il s’agit dune trentaine d’avocats avec des accusés et des parties civiles. On a discuté avec le procureur général, on a discuté avec le premier président de la Cour d’appel mais on n’a pas encore trouvé la solution.

Procès Sanogo Jour-2 : Manifestation pro-Sanogo

Le 2ème jour du procès du général Amadou Haya Sanogo a Sikasso a été suspendu. En cause, les avocats des différentes parties qui refusaient de rentrer dans la salle d’audience sans leurs téléphones portables. Le juge Mamadou Berthe a prononcé une suspension du procès jusqu’au lundi 5 décembre. À l’issue de cette annonce, alors que le général Sanogo quittait le procès en voiture, une foule massive s’est massée à l’extérieur, en scandant ‘‘Libérez-Haya’’.

Procès Sanogo jour 2 : audience suspendue jusqu’au lundi 5 décembre

Le procès du général Sanogo censé reprendre ce vendredi 2 novembre à 9 heures est suspendu. Devant le refus des conseils des parties de rentrer dans la salle d’audience sans leurs téléphones portables, une suspension a été décidée par la juge Mamadou Berthe jusqu’au lundi 5 décembre.

Les 17 avocats de la défense ainsi que les six avocats constituant le collectif de la partie civile ne sont pas encore dans la salle d’audience. « On nous demande de laisser nos téléphones portables à l’entrée. Ce que nous refusons car c’est un outil de travail », explique un avocat de la défense. En ce deuxième jour de procès, la sécurité semble avoir été renforcée. Plusieurs soldats cagoulés, les armes accrochées à l’épaule sillonnent la salle d’audience. Le général Amadou Haya Sanogo, l’ancien ministre de la Défense, Yamoussa Camara et le chef d’État-major Dahirou Dembele sont installés à leur place depuis 8h37 minutes. Dix minutes plus tard, les autres accusés font également leur entrée. Mais les avocats eux, restent hors de la salle d’audience.

Regroupés devant le grand portail de l’hôtel Cinquantenaire, les avocats n’ont pas encore trouvé une entente avec le ministère public représenté par Mamadou Lamine Coulibaly, Procureur général près la Cour d’appel de Bamako. Ce dernier essaie tant bien que mal de trouver une solution avec les avocats qui semblent intraitables sur cette question.

Pourtant, les avocats étaient rentrés avec les téléphones portables lors du premier jour de l’audience. Selon un membre de l’équipe d’organisation, il y aurait eu fuite ce jour-là, « quelqu’un a retransmis l’événement en direct depuis la salle d’audience », affirme-t-il.

La tension monte d’un cran, Mamadou Lamine Coulibaly déambule de la grande cour à la salle d’audience le téléphone vissé à l’oreille sans être inquiété. « Il est continuellement en contact téléphonique avec le ministre de la Justice », affirme un avocat de la défense. Le Juge Mamadou berthe, devant le refus des avocats d’accéder à la salle d’audience sans leurs téléphones, a prononcé une suspension du procès jusqu’à lundi prochain 5 décembre. À l’issue de cette annonce alors que le général Sanogo s’apprêtait à quitté la salle d’audience , une foule massive s’est massé aux alentours de la salle Lamissa Benghaly en scandant ‘‘Libérez-Haya’’.

 

Zeïnabou A. Touré : « C’est Fouss qui a assassiné mon fils ! »

Âgée de soixante ans, Zeinabou Abdoulaye Touré fait partie des familles de victimes présentes au procès Sanogo. Aliou Boncana Maiga, son fils fait partie des 21 bérets rouges dont les corps ont été découverts en décembre 2013 à Diago. C’est dans sa chambre d’hôtel au Kaaky Palace qu’elle nous a reçu. 

Journal du Mali : Vous faites partie des familles de victimes, pouvez-vous nous raconter votre histoire ?
Zeïnabou Abdoulaye Toure : je suis la mère de Aliou Boncana Maiga, soldat béret rouge de 2ème classe. J’étais chez moi à Mayena dans le cercle de Bafoulabe du 30 au 1er mai 2012 lorsque j’ai vu à la TV mon fils aux mains d’un soldat béret Vert qui le questionnait. Je n’ai pas compris pourquoi Aliou se trouvait dans une telle situation. J’ai donc appelé immédiatement son père au téléphone pour lui demander d’allumer la télé. Le lendemain j’ai appelé ma petite sœur à Bamako chez qui Aliou vivait quand il n’était pas au camp. C’est comme ça que j’ai eu la confirmation de son arrestation. La veille Aliou avait quitté la maison de sa tante pour ses cours d’anglais. Il a été arrêté lors d’une fouille dans un Sotrama alors qu’il rentrait à la maison. Ne pouvant plus d’attendre, j’ai décidé de me rendre à Bamako. Entre temps ses frères ont visité les commissariats et gendarmeries de Bamako. L’un des frères d’Aliou, un béret vert, a été jusqu’au camp de Kati pour dire quAliou ne faisait pas partie des militaires qui ont participé au coup d’État. Malgré cela, il n’a pas été relâché. Je me suis rendu sur place. J‘ai rencontré au camp un garde du corps de Haya Sanogo. Il se faisait appeler Rougeo. J’ai demandé à rencontrer Haya. Après une altercation entre moi et Rougeo, Haya est finalement sorti de son bureau. Je lui ai fait part de l’objet de ma visite. Il ma répondu en ces termes, « maman votre fils va bien ainsi que tous les autres. Rentrez vous reposer et tranquillisez-vous ». J’ai demandé à parler à mon fils au téléphone, il a refusé. Le lendemain j’ai été à Konna ensuite à Sikasso à la recherche de mon fils. Lorsque le charnier de Diago a été découvert, j’ai rejoins le juge Yaya Karembé ainsi que d’autres familles des victimes. On a été entendu. Ensuite nous avons effectué un test ADN avec les corps des soldats morts. Aliou se trouvait parmi les 21 soldats assassinés. Depuis, je ne dors plus.

Quel genre d’homme était Aliou ?
Il avait 28 ans lors de son arrestation. Il était grand et costaud. Il a été tué alors qu’il était fiancé. Aliou a une fille. Elle a sept ans aujourd’hui. J
e n’ai appris son existence qu’après sa mort. Aliou a quatre frères et quatre sœurs. Il était le cadet des garçons. C’était un jeune homme poli, respectueux et gentil. Il n’aurait pas faire de mal a une mouche. Il a été lâchement abattu par des individus mal intentionnés.

Après l’ouverture du procès hier et sa suspension de 48 heures, quelles sont vos impressions sur le procès à ce stade ?
Les avocats de la défense ne savaient pas que le procès atteindrait un tel niveau. Le délai de 48 heures demandé par la défense signifie beaucoup pour nous car ils savent que les victimes représentés par le collectif des avocats de la partie civile sont prêts à aller jusqu’au bout. Ils n’ont pas demandé deux jours de suspension pour rien. Ils savent ce que nous avons comme preuve.

Quelles sont vos attentes dans ce procès ?
Que justice soit faite. Que les coupables soient condamnés.

Pensez-vous que l’assassin de votre fils se trouve parmi les 18 accusés ?
Je le sais et j’ai les preuves. Un soldat nous l’a dit. Je suis certaine que c’est Fousseni Diarra dit Fouss.

Si vous étiez amenée à rencontrer une fois de plus Amadou Haya Sanogo. Que lui diriez-vous ?
Je lui dirais juste que lorsqu’il m’a dit que mon fils et les autres sont en parfaite santé, ils le sont maintenant. C’est tout. Il comprendra.

 

Procès Sanogo : les 17 accusés

L’auteur du coup d’Etat du 22 mars 2012, Amadou Haya Sanogo et les 17 autres militaires accusés d’enlèvement de personnes, assassinat et complicité comparaissent depuis hier devant la Cour d’assise en transport à Sikasso. Si on connaît bien le général Sanogo , ceux qui sont accusés avec lui dans l’affaire dite des «Bérets rouges», le sont un peu moins. Ci-dessous la liste des militaires qui devront répondre de leurs chefs d’accusations devant la Cour d’assise :

Enlèvement et assassinat

Fousseni Diarra dit Fouss, Ajudant-chef

Mamadou Kone, Ajudant

Tiemoko Adama Diarra

Lassana Singare, Sous-lieutenant

Cheickna Siby, Sous-lieutenant

Issa Tangara, Capitaine

 

Complicité d’enlèvement et d’assassinat

Amadou Haya Sanogo, Général 4 étoiles

Bloncoro Samake

Amassongo Dolo (décédé)

Siméon Keita, Ajudant-chef de la police

Oumarou Sanafo dit Kif Kif, Sous-lieutenant

Soïba Diarra, Sous-lieutenant

Christophe Dembele, Capitaine

Amadou Konare, Capitaine, numéro 2 de la junte

Mohamed Issa Ouedraogo

Ibrahim BOUA Kone
Complicité d’assassinat

Yamoussa Camara, Général, ex-ministre de la Défense

Ibrahim Dahirou Dembele, Général, ancien chef d’état-major général des armées

Procès Sanogo : audience suspendue jusqu’au 2 décembre

Le procès du général Sanogo qui s’est ouvert ce mercredi 30 novembre 2016 à Sikasso a été suspendu pour 48 heures à la demande des avocats de la défense. L’objectif : mieux préparer la défense des accusés et veiller à ce que le procès soit équitable.

Après des heures d’échanges, le procès d’Amadou Haya Sanogo, chef de l’ex junte malienne poursuivi pour enlèvement et séquestration, assassinat et complicité d’assassinat a été suspendu pour 48 heures à la demande des avocats de la défense. Le débat fut houleux à la reprise de l’audience ce mercredi 30 novembre 2016 dans la salle de spectacle Lamissa Benghaly à Sikasso, situé à 370 km au sud-est de Bamako, transformé pour l’occasion en salle d’audience du procès du général Sanogo et les 17 autres accusés dans l’affaires dite des « Bérets rouges ». Constitué de six avocats venus de divers horizons (France, Côte d’Ivoire, Sénégal…) et affilié à la Fédération Internationale des Droits de l’Hommes (FIDH), le collectif des avocats de la partie civile sous la houlette de Me Mariko, président de l’Association Malienne des Droits de l’Homme a rappelé défendre les droits de l’ensemble des participants notamment les victimes dans ce procès. « Nous sommes satisfaits de l’ouverture de ce procès. Le discours de l’avocat général près la Cour d’Appel de Bamako est à la hauteur des attentes de ce procès historique », estime Clemence Bectarte, avocate à la Cour et Coordinatrice du groupe d’action judiciaire (GAJ).

A la barre, après lecture des charges des accusés, Me Mariam Diawara, porte-parole du Collectif des avocats du général Sanogo demande une suspension de l’audience pour 48 heures, « nous sommes dans un désordre organisé. Les deux jours nous permettront d’échanger avec nos clients afin de mieux préparer leur défense », explique Me Konaré, autre avocat de Sanogo, à la barre. « Nous analysons cette demande de suspension de la défense comme une demande de renvoi qui ne dit pas son nom. Nous ne sommes donc pas opposés par principe que les droits de la défense soient respectés. Le fait que la Cour est donné droit à la demande est la preuve que ce procès prend la forme d’un procès équitable », argumente Clemence Bectarte. Et d’ajouter que « nous espérons qu’il ne s’agit pas d’une demande qui en précédera d’autres et qui viserait à reporter l’ouverture au fonds des débats ».

Mohamed Maouloud Najim, Avocat Général près la Cour d’appel de Bamako qui a remplacé Mamadou Lamine Coulibaly, Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako au fauteuil du ministère public estime que le délai de suspension est beaucoup trop long, « la partie civile et les accusés ici présents ont attendu avec impatience ce jour », dit-il. Pour rappel, dans sa réquisition Najim avait proposé une suspension de 30 minutes. « J’accepte la décision du juge parce que le droit de la défense est sacré », a-t-il conclut.

Hourrah pour Sanogo Invité à la barre d’audience pour la lecture des charges, le général Sanogo, un bidon d’eau minéral dans les mains se dirige vers le micro à l’appel du juge Mamadou Berthé. Il se présente fièrement et de façon audible. Un fait qui a valu une acclamation de ses partisans installés vers la sortie ouest de la salle d’audience. « Nous ne sommes pas dans une salle de spectacle. Si une scène pareille se reproduit, je viderais immédiatement la salle », met en garde le juge Mamadou Berthé.

En attendant vendredi 2 novembre, date de la reprise de l’audience, les avocats de la défense s’entretiennent d’ores et déjà avec leurs clients pour une meilleure défense.

 

 

Procès Sanogo: l’audience a commencé

Le procès Sanogo a débuté ce matin dans la salle Lamissa Benghaly de Sikasso. L’audience a été présidée par le juge Mamadou Berthe, 1er président de la Cour d’appel de Bamako. Arrivés aux environ de 8h 30 dans la salle, les 17 accusés dont le capitaine Sanogo ont été conduits dans la salle d’audience, à l’exception d’Amassegue Dolo, un des accusés, décédé lors de sa détention.

Souriant et détendu, le capitaine Sanogo suivi de deux militaires salue l’assemblée avant de trouver son siège. Pourtant personne ne le reconnaît. « Il a dépéri, c’est fou qu’il a changé », laisse entendre un membre du staff. Les yeux grands ouverts, le crâne rasé, le teint pâle, le capitaine Sanogo est méconnaissable. Nombreux sont les personnes qui se demandent toujours si c’est bien lui.

Assis au siège Numéro 535 vêtu d’un costume brun clair et d’une cravate bordeaux, Amadou Haya Sanogo, le visage serein discute avec Yamoussa Camara, ex-ministre de la Défense. À sa droite on peut voir Dahirou Dembele, chef d’état major et son homme de main Amadou Konaré, porte parole du CNRDE, tous deux co-accusés du capitaine Sanogo.

À 9h 20, l’audience des travaux supplémentaires de la cour d’appel de Bamako en transport a Sikasso commence avec l’entrée des juges suivi du greffier en chef et du ministère public. Après la prestation de serment des assesseurs, ce sont finalement quatre assesseurs et trois juges professionnels qui assureront les débats. La salle Lamissa Benghaly comporte 1000 places dont 150 pour la presse. Des bureaux soigneusement installés font office de salle d’audience spéciale. Au centre le juge Mamadou Berthe et ses assesseurs, à gauche Mamadou Lamine Coulibaly, Procureur Géneral près la cour d’appel de Bamako représentant le ministère public, les avocats généraux et à droite le greffier en chef.

Mamadou Lamine Coulibaly, prononce son réquisitoire. Il fait un rappel des faits sur l’affaire dite des « Bérets rouges » avant d’appeler les avocats de la défense et le juge a plus de professionnalisme. Me Harouna Toureh, avocat principal de la défense prend la parole, « Monsieur le Procureur général vous défendez la vie, nous nous défendons la vie et la liberté et la défendrons jusqu’au bout », conclut-il.

Après une série d’actes et de faits observés par le juge. L’audience est suspendue pour 30 minutes ».

La France derrière le procès Sanogo ?

 

Les Clubs de soutien au général Amadou Aya Sanogo et le MP22 ont organisé une conférence de presse conjointe au sein de la maison de la presse. Le but étant de faire le point sur le procès à venir des membres du CNRDRE le 30 novembre prochain.

C’est la France qui serait l’instigateur du procès Amadou Aya Sanogo et compagnie. Tel serait brièvement résumé l’argumentaire avancé par lors de la conférence de presse organisée par les soutiens du général.

Le secrétaire général du MP22 Pérignama Sylla affirme que le procès serait orchestré par la France. Le gouvernement Hollande aurait mis un coup de pression sur l’Etat malien pour qu’il fasse passer Sanogo devant les assises avant le début du sommet Afrique-France de janvier prochain. « La France ne peut accepter que son président vienne sur le sol malien sans que cette affaire soit d’abord réglée » lance Sylla.

Loin des théories complotistes, Me Tiessolo Konaré, l’un des avocats de Sanogo sur les quinze qui constituent le collectif, dénonce lui un non respect des procédures. « La loi dit que nous devions recevoir les notifications de comparution 30 jours avant le procès, mais nous l’avons reçus le 11 de ce mois, voyez que le délai n’as pas été respecté ». Un néologisme aurait même vu le jour selon lui quant au procès. « Ils parlent d’audience supplémentaire, nous avons jamais entendu parler de ca, audience foraine oui, mais là c’est de la pure création ». L’avocat demande milite aussi pour que le procès soit public. « Le monde entier a vu le charnier de Diago dont nos clients sont accusés d’en être les instigateurs, pourquoi on empêchera ce même monde d’assister au procès » s’indigne t-il.

Me Konaré s’est aussi montré critique envers le choix de Sikasso. « J’ai entendu que les 1500 places de la salle d’audience seraient déjà toute prises, si ils tiennent vraiment à le faire là-bas, qu’ils louent le stade Macoro Sissoko » ironise t-il.

Son confrère Me Issa Coulibaly abonde dans le même sens que lui. Il estime qu’aucun de leurs clients n’auraient été entendus lors de l’enquête préliminaire et qu’ils auraient été directement mis en geôle. Avant d’évoquer le cas des bérets rouges dont l’instruction trainerait en longueur. «L’instruction des bérets rouges a commencé avant celle d’Aya, mais aucun d’eux ne s’est retrouvé devant un juge » accuse t-il. A ses dires, il y’auraient 36 morts recensés à l’hopital Gabriel Touré au lieu de 21, dont des civils. Visiblement tous remontés contre la « délocalisation » à Sikasso, Me Coulibaly regrette que le procès ne se passe pas à Bamako. « Aucune partie du Mali ne peut garantir la sécurité, de Kayes à Kidal, au moins dans la capitale il y’a plus d’espace ».

Le volubile Me Konaré clôtura la conférence en annonçant avoir cité comme témoins 18 personnes dont le député Oumar Mariko qui serait l’un des témoins capitaux.

 

Procès Sanogo : 3 questions à Mohamed Maouloud Najim, avocat général à la Cour d’appel de Bamako

Ce procès est attendu depuis longtemps. A-t-on toutes les assurances qu’il se tienne bien le 30 novembre ?

Actuellement nous sommes en train de mettre les dernières touches pour finaliser la tenue du procès. Toutes les formalités en amont ont été remplies. Des notifications claires ont été envoyées aux prévenus pour leur comparution. Tous les ont reçues et le procès se tiendra bien à la date indiquée.

Pourquoi avoir choisi Sikasso ?

C’est un choix à la fois politique et sécuritaire. Le pays traverse des turbulences et un procès comme celui-là suscite beaucoup d’intérêt et de remous. En raison de l’enjeu et pour qu’il y ait une certaine sérénité dans la tenue du procès, le choix s’est porté sur Sikasso. Ça aurait pu être Ségou ou ailleurs, mais la cour de Sikasso fait partie du Parquet général de Bamako et la ville réunissait toutes les conditions. Si on avait voulu le faire à Mopti, des questions légitimes se poseraient, mais là ce n’est pas une véritable délocalisation.

Comment expliquez-vous le temps pris pour juger le capitaine Sanogo et ses compagnons ?

Il y a des tonnes de dossiers en attente de jugement. Certains peuvent prendre 2,3, voire 10 ans mais tôt ou tard, tous passeront devant la justice. Il y a tout un travail en amont qui doit être fait avant la tenue d’un procès. Plus l’instruction est complexe plus ca devient long. Et, il faut prendre en compte que ce n’est pas un procès ordinaire.

Procés Sanogo : la longue attente des familles des victimes

Tous les regards seront tournés le 30 novembre vers la capitale de la troisième région, Sikasso. Les conditions strictes d’accès ne permettront pas à tous de suivre le procès Sanogo et consorts, mais pour les familles des victimes, l’essentiel est que justice leur soit rendue.

Ce procès répond à une exigence des familles des 21 bérets rouges dont les corps ont été découverts à Diago dans le cercle de Kati, tués entre le 30 avril et le 1er mai 2012, dans une tentative de contre-coup d’État. Ces familles réclament depuis le 4 décembre 2013, date de découverte du charnier, que la lumière soit faite sur les conditions de leur mort. Pour le colonel-Major Coulibaly, dont le fils fait partie des victimes, il faut que justice leur soit rendue. Selon lui, l’amertume est grande dans les familles où l’on pense que « l’assassin est dans un confort supérieur au nôtre, qui sommes en liberté ». Réunis au sein de l’Association des parents et épouses des bérets rouges assassinés (APEMBRA), les familles n’ont cessé de réclamer d’abord l’arrestation et depuis celle-ci, le jugement de celui qu’elles considèrent comme le « bourreau de nos enfants ». Mais « nous voulons surtout un procès équitable », souligne M. Coulibaly. « Aujourd’hui, Dieu merci. Depuis 3 ans, nous attendons ce procès et nous croyons aujourd’hui aux propos du chef de l’État qui disait que nul ne saurait être au-dessus de la loi.

Faire le deuil Tout ce qu’on demande à Sanogo, c’est de reconnaître les faits et nous présenter ses excuses publiquement », explique Sagara Bintou Maïga, présidente de l’APEMBRA. « Je suis très contente de l’ouverture de ce procès. J’attends avec beaucoup d’impatience la comparution de l’homme qui m’a enlevé mon mari. Aussi, je demande au chef de l’État de veiller scrupuleusement au bon déroulement de ce procès, afin qu’il ne soit pas politique », ajoute une veuve de béret rouge, ses deux enfants dans les bras. Pour beaucoup d’autres parents de victimes, à l’image de Mme Diarra, il s’agit là d’un pas sérieux qui vient d’être franchi dans le dossier des disparus de l’armée malienne, un gage de la volonté politique de faire la lumière sur cette page qui appartient à l’histoire du Mali. « Quoi qu’on fasse, ce procès ne peut nous ramener nos enfants, nos pères et maris. Mais, il permettra tout de même de situer les responsabilités pour que les âmes des disparus puissent afin reposer », conclut-t-elle.

 

 

Affaire Sanogo et consorts : l’heure de vérité

Après 3 années de détention, Amadou Haya Sanogo, ex-chef de la junte de Kati, responsable du coup d’État du 22 mars 2012, comparaît aujourd’hui devant la cour d’assises à Sikasso, pour répondre de supposés crimes perpétrés contre 21 bérets rouges. Ce procès explosif, qui risque de faire trembler jusqu’aux plus hautes sphères de l’État, est le plus attendu de l’année et promet de rouvrir les pages sombres d’une histoire malienne qui commence à peine à cicatriser. La juridiction criminelle devra faire la lumière sur de nombreuses zones d’ombre et répondre aux questions que se posent les Maliens et les familles des victimes pour qui le souvenir de ces événements tragiques reste toujours aussi vivace.

Le procès Sanogo s’ouve aujourd’hui, le général 4 étoiles Amadou Haya Sanogo ainsi que 17 co-accusés, dont les généraux Yamoussa Camara, ancien ministre de la Défense, et Dahirou Dembélé, ex-chef d’état-major général des armées, vont comparaître dans l’affaire dites des « Bérets rouges ». Les corps de 21 militaires pro-ATT, auteurs d’un contre-coup d’État sanglant survenu entre le 30 avril et 1er mai 2012, avaient été découverts dans un charnier à Diago. Formellement reconnus membres du régiment des parachutistes, ils avaient été menottés et froidement abattus. Le capitaine Sanogo et ses hommes devront répondre de 4 chefs d’inculpation : enlèvement de personne et séquestration, assassinat et complicité d’assassinat, dans ce procès qui devra établir qui a fait quoi, qui a donné l’ordre de tuer ces bérets rouges et surtout déterminer si les accusés sont coupables des faits qui leur sont reprochés. Selon la loi malienne, si la culpabilité d’Amadou Haya Sanogo et de ses co-accusés était établie, c’est la peine capitale qui leur serait réservée.

La main de l’étranger Ce lundi 30 avril 2012 au crépuscule, juste quelques jours après la conférence des chefs d’État de la CEDEAO à Abidjan, l’ORTM, le QG de la junte militaire de Kati et l’aéroport de Bamako Sénou sont attaqués par des bérets rouges restés fidèles à ATT, menés par le colonel Abidine Guindo. « Ils ont déclenché une attaque en règle contre le Mali ! Ils ont fait appel à des forces étrangères du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire. Lors de l’attaque de l’aéroport, un avion Cargo avec des renforts a voulu atterrir à Bamako, mais il en a été empêché par les soldats du capitaine Sanogo », déclare Oumar Mariko, secrétaire général du parti SADI et créateur, au lendemain du coup d’État, du mouvement populaire du 22 mars (MP22), favorable aux putschistes. Le bilan de ces affrontements a fait des dizaines de victimes militaires et civiles. Au lendemain de ce contre-coup d’État, personne ne savait exactement pourquoi le colonel Abidine Guindo, chef des bérets rouges, avait décidé de passer à l’action. Pour Pérignama Sylla, secrétaire général du MP22, le pilotage de cette tentative par des nations étrangères ne fait aucun doute. « La proximité des putschistes avec les révolutionnaires, cela a vraiment fait peur à l’Occident. Le capitaine Sanogo avait humilié la France pendant la transition. Avant le coup de force du 30 avril, les services secrets français avaient envoyé 3 barbouzes de Ouagadougou à Bamako, chargés de repérer des points stratégiques pour faire des sabotages et mener une propagande anti-militaire. Le capitaine Sanogo et ses hommes les ont intercepté et interrogé, puis ils les ont remis à l’ambassadeur de France, alors qu’ils auraient pu les fusiller. C’est dans cet espace-là que s’est préparé le coup du 30 avril », assure-t-il. Les pressions continueront d’ailleurs bien plus tard, selon lui. Elles s’exerceront jusque dans le bureau du procureur général en charge du dossier Sanogo, Daniel Tessougué, qui reçut la visite d’un diplomate européen voulant s’assurer qu’il travaillerait avec le même zèle que le magistrat Yahya Karambé qui a inculpé le capitaine Sanogo.

Zones d’ombre La découverte du charnier de Diago début décembre 2013 aura en tout cas scellé le sort de capitaine Sanogo. Pourtant, selon des sources proches du dossier, l’exhumation des corps pour pratiquer des autopsies et procéder à des identifications, n’aurait pas respecté toutes les procédures et le conditionnement des corps a empêché la reconstitution complète des squelettes de manière individuelle, ce qui a rendu difficile une identification formelle. Les 21 corps ont pourtant été catégoriquement identifiés comme étant ceux des bérets rouges. Autre source de polémique, la non inculpation des hommes de l’autre camp de l’époque. Après l’arrestation des instigateurs du contre-coup d’État et de leurs hommes, une instruction avait pourtant été ouverte en mai 2012. Mais le 30 janvier 2013, contre toute attente, 29 prisonniers, dont 26 « bérets rouges » sont libérés, parmi eux le colonel Abidine Guindo, parce que leurs mandats de dépôt n’ont pas été renouvelés à temps. « Il y a des officiers qui ont tué. Ils sont aujourd’hui en liberté provisoire et travaillent dans le pays ou à l’extérieur. Si vous croyez en la justice malienne, dites-vous qu’ils sont tous aux ordres de ces politiciens », s’indigne Oumar Mariko. Pour l’instant, le jugement des bérets rouges n’est pas d’actualité. Pour Mohamed Maouloud Najim, avocat général à la Cour d’appel de Bamako, le dossier suit son cours et on ne saurait « dire combien de temps ça prendra. Il n’y a aucun motif juridique empêchant leur jugement, donc les instructions continueront », explique-t-il.

Procès ou feuilleton judiciaire ? Les sept avocats de Sanogo et ses co-accusés sont prêts pour assurer la défense de leur client. Ils ont publié à la mi-novembre un communiqué qui laisse présager la ligne de celle-ci. Dans le document, ils se disent étonnés de la médiatisation du procès, alors que la citation à comparaître n’a pas été faite dans le délai minimal légal. Pourquoi Sikasso s’interrogent-ils, alors qu’aucun motif sérieux sécuritaire ne soutient cette délocalisation ? Pour eux, il se prépare une « parodie de justice qui se trame au préjudice de leurs clients ». Tidiane Tangara, journaliste qui suit le dossier depuis ses débuts, partage ce point de vue. « Ce procès est faussé, il va être le plus grand scandale de la République. Je suis convaincu qu’ils ne vont pas faire le procès à Sikasso et qu’ils vont le renvoyer », assure-t-il. Pourtant, à la Cour d’appel de Bamako, on se veut serein. « Ce n’est pas la justice qui a inventé les enlèvements et les morts retrouvés dans le charnier de Diago. Ceux qui pensent que c’est un coup politique sont sûrement dans leur droit, c’est la liberté d’expression, mais nous sommes nous aussi dans notre droit de poursuivre des personnes accusées d’actes contraires à la loi », déclare l’avocat général de la Cour d’appel de Bamako. Le principal accusé, Amadou Haya Sanogo, est arrivé à Sikasso hier soir et selon ses proches, il serait prêt à s’expliquer, car sûr de son innocence. De leur côté, les familles des victimes des bérets rouges se réjouissent de le voir « enfin jugé», selon Amadou Kanté, un des responsables de leur association, au micro de l’AFP. Des réponses pour les uns, la justice pour les autres, devraient jaillir lors de ce procès explosif dont on ne sait pas encore si le pays, au terme d’une séquence judiciaire qui s’annonce longue, sortira indemne.

 

Veut-on juger Amadou Haya Sanogo ?

Le général Amadou Haya Sanogo est emprisonné depuis 2 ans et demi pour son rôle présumé dans l’assassinat d’une vingtaine de bérets rouges le 30 avril 2012. L’instruction est bouclée et l’affaire a été renvoyée devant la Cour d’assises fin 2015. Plusieurs mois après, les familles des disparus, comme celles des accusés ainsi que leurs avocat s’impatientent.

« L’instruction est terminée depuis novembre 2015, c’est la programmation devant la Cour d’assises que nous attendons. Dans les tribunaux, ils nous disent que ce sera fait en mai, puis en juin, puis en juillet. Nous n’avons franchement aucune idée de quand aura lieu le procès », explique Maître Diawara, l’un des sept avocats du général Sanogo. Prévu pour le 2 mai, ce procès a été reporté « pour raisons de sécurité », explique-t-on au ministère de la Justice. Une date ultérieure devait être annoncée, mais depuis, rien. « Ça ne doit pas trainer de la sorte, quand il y a des gens détenus, c’est un principe en matière correctionnelle et criminelle », souligne Maître Issa Coulibaly, autre conseil du général déchu.

Pour lui éviter les assises, ses avocats ont lancé devant la Cour suprême une procédure, qui a été rejetée. Puis en avril, au niveau de la Cour de justice de la CEDEAO, pour demander sa libération pour violation des droits de l’Homme, sans succès. « Lorsque nous avons lancé cette procédure due aux conditions de détention du général et de ses camarades, dont nous avions des preuves, l’État s’est précipité pour le transférer de Manantali à Sélingué, afin de  montrer que ses conditions de détention étaient bonnes. Ils ne se sont pas contentés de leur avocat national qui gère le contentieux de l’État, ils ont pris un avocat privé, et pas des moindres, pour défendre le dossier. Quand la décision est tombée, nous avons compris que c’était un jeu », ajoute Me Diawara.

Pour le pool d’avocats, la lenteur ou la rapidité de cette procédure dépendrait de l’état d’orientation du parquet, et la non-programmation du procès n’est imputable qu’à la responsabilité du procureur général. « Il y a une peur de juger Sanogo ! Ceux qui veulent le juger savent que c’est sensible. S’ils jugent cette affaire, en vérité, ils se feront du mal eux-mêmes. Le dossier est vide. Techniquement il est très léger. C’est un montage pur et simple et c’est établi que c’est politique », affirme Me Coulibaly. Et d’ajouter que « certains de ses camarades ont eu leur première comparution devant le juge et plus rien, alors que les mandats n’ont pas été renouvelés. La procédure pénale est pourtant claire là-dessus : quand le mandat n’est pas renouvelé c’est la libération », conclut-il. Les regards se tournent maintenant vers la Cour pénale internationale qui pourrait se saisir du dossier, si Bamako continue d’hésiter à juger ce prisonnier, devenu encombrant dans le contexte actuel de réconciliation nationale.

Amadou Haya Sanogo : en attendant la justice

Deux ans jour pour jour après son arrestation, le sort d’Amadou Haya Sanogo, reste indéterminé. L’instruction judiciaire peine à se mettre en place, au moment où le pool d’avocats qui le représente, vient d’adresser une lettre ouverte au Président de la République.

22 mars 2012. Un homme en treillis tient un bâton « magique » à  la main. Pas très grand, il sort de la pièce aménagée au premier étage d’un vieux bâtiment du camp Soundjata Keita de Kati, se met au balcon et salue la foule massée là, curieuse de voir à quoi ressemble celui qui a renversé Amadou Toumani Touré (ATT) et balayé les institutions d’un pays. Interpellé, Amadou Haya Sanogo, le nouvel homme fort du Mali, se laisse aller à  la gloire éphémère d’une après-midi de mars et répond à  ses hôtes d’un signe de la main.

Un règne bref mais agité Quelques mois après cette scène mémorable, l’ex-président du Comité national de redressement de la démocratie et de la restauration de l’État (CNRDRE), aura rétabli la constitution malienne sous la pression de la CEDEAO et de la communauté internationale, dès le 1er avril 2012, sans pour autant abdiquer son nouveau pouvoir. Son règne sans partage aura laissé des traces indélébiles : les arrestations extra-judiciaires d’hommes politiques proches du régime d’ATT ou de journalistes, et le pillage par ses hommes des régies financières de l’État et de certaines sociétés publiques. Plus grave, l’entrée en scène de la junte aura précipité la chute du Nord du Mali aux mains des rebelles et des djihadistes en avril 2012. Quant à  l’agression subie par le président de la Transition, Dioncounda Traoré, le 21 mai 2012, elle demeurera l’un des épisodes les plus noirs de l’histoire politique du Mali.

Sa vie de prisonnier Pourtant, la junte a été amnistiée et pardonnée. Ce qui vaut à  son ex-chef d’être incarcéré, C’est son rôle présumé dans l’assassinat d’une vingtaine de bérets rouges le 30 avril 2012, lors de la tentative de contre coup d’état perpétrée par ces derniers, de même que la disparition de plusieurs militaires bérets verts en octobre 2013. Amadou Haya Sanogo, promu général à  la fin de la Transition, a été cueilli le 27 novembre 2015 à Bamako, avant d’être emprisonné à  Sélingué à 160 km de la capitale. Il sera ensuite transféré à Manantali dans le sud-ouest du pays en décembre 2014. Dans cette localité de la région de Kayes, il vit dans des conditions spartiates. Cela dit, « il n’est pas confiné dans une cellule, mais dans un camp et surveillé par une dizaine d’éléments de la gendarmerie nationale. Il dispose d’une télévision, reçoit des visites régulières de ses proches, dont sa femme, et prie beaucoup. De temps à  autres, il lui est permis de faire quelques exercices sportifs et de jouir de la climatisation », précise un porteur d’uniforme sous anonymat. Pour ce qui est de son alimentation, il ne serait pas en privation et recevrait régulièrement des plats envoyés par sa famille depuis Bamako. Si quelques articles de presse ont fait état de problèmes de santé, évoqués par l’une de ses avocates comme une violation flagrante des droits de l’Homme, un autre avocat du pool, joint par téléphone et qui se rend à  Manantali à la demande, déclare : « Il va bien, il a le moral » !

Sa stratégie de défense Sur le plan judiciaire, Sanogo et une dizaine de ses compagnons, dont le capitaine Amadou Konaré et l’adjudant-chef Seyba Diarra, sont poursuivis pour « assassinat, complicité d’assassinat, enlèvement de personnes et séquestration », suite aux affrontements qui opposèrent bérets rouges, les commandos parachutistes restés fidèles à  l’ancien président ATT, et les bérets verts dont est issue l’ex-junte. La découverte d’un charnier à  Diago d’où furent exhumés les corps de 21 soldats, menottés et froidement abattus, scella le sort du général et de ses acolytes. C’est la chambre d’accusation de la cour d’appel de Bamako, qui examine actuellement le dossier, qui aura à  valider ou pas les conclusions de l’instruction. Son verdict est attendu pour le 22 décembre. S’ensuivra un probable envoi devant la cour d’assises, à  qui il appartiendra de statuer sur leur culpabilité lors d’un procès. Quant aux hauts gradés détenus pour la même affaire, les généraux Ibrahim Dahirou Dembélé, chef d’état-major général des armées au moment des faits, Yamoussa Camara, ministre de la Défense, et Sidi Alassane Touré, directeur de la Sécurité d’État, ils devraient bénéficier d’un non-lieu, faute de preuves de leur culpabilité. À Manantali, l’ex-putschiste de 43 ans prépare patiemment sa riposte, appuyé par les sept avocats qui assurent sa défense. Dans une lettre datée du 16 novembre 2015 et destinée au Président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keita, que Journal du Mali a pu se procurer, ils reviennent sur l’interpellation du Général Sanogo et insistent sur un « manque de justice et d’équité » dans le traitement du dossier de leur client. Pour eux, il est anormal que lui et ses camarades soient toujours incarcérés, alors que le colonel Abdine Guindo, chef des bérets rouges au moment de la tentative de contre coup d’état, et ses compagnons ont été libérés, leurs mandats de dépôts n’ayant pas été renouvelés à  temps. « Plus d’une trentaine de personnes ont été tuées par les balles des éléments bérets rouges opérant sous la direction du Colonel Abdine Guindo. Nous ne comprenons pas pourquoi, à ce jour, ce dossier n’est toujours pas sur la table de la chambre d’accusation de la cour d’appel de Bamako », explique Me Mariam Diawara, porte-parole des avocats de Sanogo. « Vouloir programmer un jugement des bérets verts sans celui des bérets rouges d’abord, n’est pas juste », ajoute-t-elle. Autre fait notable, la lettre indique qu’aujourd’hui tous les militaires poursuivis dans le groupe d’Abdine Guindo sont en liberté provisoire et déployés dans des services, à  l’intérieur ou à  l’extérieur du pays, en violation de la procédure pénale qui concerne les militaires. À titre d’exemple, Mohamed Lamine Konaré, dit Mala, fils de l’ancien président, à  l’Union africaine ; le colonel Baba Abdel Kader Coulibaly inculpé, en liberté provisoire, est attaché militaire à  l’ambassade du Mali au Maroc ; le Colonel Abdoulaye Cissé, inculpé, en liberté provisoire, est en service en République Centrafricaine. Tous trois « sur décret présidentiel », est-il précisé. « Le Général Amadou Haya Sanogo et les parties civiles sont méprisés dans cette procédure, estime encore Me Diawara, selon qu’on est proche du régime de l’ex-président démissionnaire ou pas, on sera plus ou moins mieux traité ou mal traité ».

En conclusion de leur missive, le collectif des avocats, qui n’a toujours pas obtenu de réponse officielle, dit réclamer plus de « justice et d’équité dans le traitement des dossiers des deux groupes de militaires, pour l’honneur et la dignité de tous ». Ils espèrent « qu’au Mali, certains Maliens ne sont pas au-dessus de la loi ». Reste à  savoir si une défense pour l’instant axée sur la différence de traitement entre les deux parties qui étaient en conflit suffira à  disculper le général. Victime ou bourreau ? Le procès à  venir permettra à la justice de trancher.