Économie numérique : Impulser la dynamique

Le Mali ne se développera pas sans les technologies de l’information et de la communication (TIC). C’est la conviction de nombreux acteurs et celle des autorités, qui semblent avoir pris la mesure de l’enjeu. Pourtant, malgré l’existence d’une politique nationale en la matière et une stratégie de mise en œuvre, le secteur peine à s’épanouir. Manque de vision claire ou mauvaise coordination des actions et des structures d’encadrement, les obstacles sont encore nombreux pour impulser une véritable économie numérique.

« Le Mali tarde à développer l’économie numérique par qu’il y a un problème de leadership et de vision. Les politiques n’ont pas les mêmes visions que les techniciens », affirme M. Hamed Salif Camara, directeur général de l’Agence des technologies de l’information et de la communication (AGETIC). En effet, ce serait plus un manque de convergence entre les techniciens, chargés  de mettre en œuvre la politique nationale des TIC ainsi que sa stratégie, jugées plutôt « bonnes », et les politiques qui expliquerait l’absence de mise en œuvre. Il importe donc de « repenser la stratégie », estime M. Camara.

Parmi ces changements stratégiques, la récente création d’un ministère de l’Économie numérique, associée à la prospective, est saluée comme une avancée. Parce qu’auparavant ce ministère, qui était lié à la communication, donnait plus de place à la « communication gouvernementale », relève M. Camara.

Pour développer le secteur économique autour du développement des outils technologiques, il faut prendre un certain nombre de mesures, parmi lesquelles celle qui consiste à assurer davantage la connectivité du Mali, le développement des infrastructures de communication et la dématérialisation de certaines tâches, ce qui pourrait apporter des recettes supplémentaires au pays, assure le responsable de l’AGETIC.

Changer de dynamique

Si le secteur a besoin d’une dynamique nouvelle, il est réel que « de plus en plus d’entrepreneurs se lancent dans ce domaine », constate M. Mohamed Kéïta, directeur de l’incubateur Impact Hub. Une dynamique enclenchée depuis quelques années qui n’occulte pas cependant les difficultés, au nombre desquelles les questions de financement et les ressources humaines. Parce que développer un projet dans le numérique nécessite des compétences qui ne sont pas toujours disponibles au Mali, déplore M. Keïta. Parmi les profils recherchés, il y a notamment les développeurs, pour développer des applications et concevoir les sites internet, entre autres. Ce facteur indispensable constitue « un gros blocage, même plus que le financement », ajoute M. Keïta.

Cet engouement pour le numérique se fait aussi souvent, malheureusement, au détriment des besoins réels du marché. En effet, certains entrepreneurs se lancent et  développent des solutions « dont personne ne veut », déplore M. Keïta. Sur le plan institutionnel, si la création du ministère de l’Économie numérique et d’une direction dédiée constitue un début, sur le plan des initiatives les entrepreneurs « restent sur leur faim », note M. Keïta.

Cette absence d’impact résulte, selon les acteurs, d’un manque de coordination et même d’une confusion des rôles entre les différentes structures de l’administration.  Créées par l’État lui-même, elles « se chevauchent et marchent les unes sur les autres, ce qui crée une cacophonie énorme en matière de développement des technologies, de services à l’administration et de services aux usagers », regrette le directeur général de l’AGETIC.

 Cette « structure mère en matière de technologies », qui a succédé en 2005 à la Mission pour les nouvelles technologies de la communication, a bénéficié des réalisations de cette mission, ajoute M. Camara de l’AGETIC. Cependant, l’un des projets-phares de cet ancêtre n’a pu encore être traduit en réalité.

C’est ainsi qu’en 2000 « les autorités ont lancé un projet de connexion des 703 communes du Mali. De 2000 à maintenant, les ressources n’ont pas suivi, les moyens n’ont pas été mis en place, la stratégie de connectivité n’a pas été développée, le renforcement des capacités n’a pas été fait et le recrutement conséquent non plus ». Ainsi, cette vision assez révolutionnaire n’a donc pu être mise en œuvre faute de moyens.

Car il ne sert à rien d’avoir « une multitude d’acteurs de la même administration avec des missions similaires et des projets similaires pour les mêmes populations », déplore le responsable de l’AGETIC. Les ressources de l’État sont donc gaspillées et le manque de coordination persiste. Ce qu’il faudrait, c’est une « vision d’ensemble », afin que les structures soient complémentaires. Enfin, comme dans tous les secteurs, en matière de développement les actions doivent s’inscrire dans la durée et se réaliser selon un long processus, qui dépasse celui de l’action politique.

Des actions sur la durée

Le Mali pourrait se passer rapidement de l’aide budgétaire s’il développait l’économie numérique, affirment les spécialistes. Le développement des outils technologiques peut permettre de recouvrer le maximum de ressources, de lutter efficacement  contre la corruption et de créer la transparence et la traçabilité des processus.

Si l’on regarde ce qui est vraiment possible, l’État malien peut aller beaucoup plus loin que cela. Encore faut-il faire du numérique une priorité absolue, d’autant que ce domaine est transversal. Parler du numérique, c’est parler simplement de développement. Toutes les technologies du « futur » ont une application dans chaque domaine de la société, comme la santé, les transports ou l’économie tout court. L’une des pistes à explorer par les autorités passe par la fiscalité des entreprises du numérique, auxquelles les gouvernants doivent accorder une attention particulière. En plus de ces actions, les dirigeants doivent soutenir « la formation de talents » et investir dans la recherche et le développement afin que le Mali puisse promouvoir ses innovations et déposer des brevets pour être en pointe. Les ressources humaines de qualité, le cadre réglementaire et le financement sont donc les leviers sur lesquels doivent s’appuyer les autorités pour booster le secteur.

Un secteur privé crucial

L’État doit mettre en place les conditions nécessaires à l’épanouissement du secteur privé, mais c’est ce dernier, véritable créateur de richesses, qui doit s’investir le plus possible. Regrettant que la plupart des projets soient gérés par des sociétés étrangères, le directeur général de l’AGETIC estime que le secteur devrait être mieux organisé. « Les jeunes entreprises doivent se mettre ensemble. Alors seulement elles offriront de meilleurs services ».

Le rôle de satisfaction des besoins du marché qui incombe au secteur privé peut être accompli à travers l’utilisation par « les grandes structures de ces technologies ». Ces grandes entreprises doivent donc collaborer avec les start-up qui développent les solutions innovantes afin de mettre en œuvre « la co-création », ajoute M. Keïta, le responsable d’Impact Hub.

Les types de collaborations que permet la technologie peuvent par exemple permettre à des institutions bancaires, à travers une réflexion avec des start-up, d’étendre leurs activités sur des parties du territoire où elles ne disposent pas de représentations physiques. Cette digitalisation des services favorisera ainsi l’inclusion financière et contribuera à la sécurité des transactions.

Dans le même sens, ces offres innovantes peuvent permettre d’accroître la transparence dans certaines actions publiques, comme par exemple les subventions. La technologie blokchain est à cet effet la solution idéale pour que les vrais bénéficiaires des subventions reçoivent de façon effective la quantité qui leur est destinée. Un gage de fiabilité, qui rend ce genre de circuit infalsifiable, en garantit la transparence et évite les détournements, fréquents dans ce domaine. Il faut donc encourager cette forme de collaboration avec les grandes structures et les organisations de développement.

Malgré les défis, les perspectives sont bonnes dans le secteur des technologies, qui se développe, estiment les acteurs. Mais les  efforts  pour rendre  plus accessible la technologie internet doivent se poursuivre, notamment au niveau de la desserte et des coûts. Ce qui aboutira à un meilleur ancrage de l’utilisation de ces technologies par le plus rand nombre.

Le numérique est un outil indispensable pour que les missions régaliennes de l’État soient menées à bien, assurent ses acteurs. « La dynamique va se poursuivre, mais il faut l’accompagner », conclut M. Keïta.

Hamed Salif Camara, DG AGETIC : « Il n’y a absolument aucun problème à notre niveau»

A deux jours de la présidentielle, la polémique autour du fichier électoral ne cesse d’enfler. Bug informatique, problème technique, les regards se sont tournés vers l’AGECTIC qui héberge le fichier. Le directeur général de la structure, Hamed Salif Camara, répond aux accusations.

Un bug informatique à votre niveau serait la cause du fichier parallèle, d’où vient-il ?

Il était important pour nous tout d’abord de situer les responsabilités lorsque cet incident malheureux est arrivé. Nous avons procédé à un audit complet du système. C’est pour cela que suis très à l’aise pour apporter un démenti formel sur tout ce qui est bug informatique, ou problème technique au niveau de l’AGETIC. Il n’y a absolument aucun problème décelé à notre niveau quant à la mise en ligne du fichier électoral. Il n’y a pas eu non plus d’intrusion dans notre système d’information, ni dans notre réseau, parce que nous les sécurisons de la manière la plus efficace possible. Naturellement, nous ne disons pas que la sécurité est à 100%, mais au jour d’aujourd’hui nous n’avons pas connu d’incident. Il y a éventuellement eu un problème de communication. Lorsque le problème est survenu, le Premier ministre nous a interpellés. Nous avons travaillé avec la DGE, avec le délégué adjoint pour être précis, puisqu’en ce moment le délégué général lui-même était en déplacement. A son retour, il semblerait qu’il est fait des déclarations sans pour autant nous consulter. Ces déclarations d’après la presse, font état du fait qu’il y aurait eu un problème à l’AGETIC. Il n’y en a jamais eu, je suis formel.

Vous estimez que l’on veut vous faire porter le chapeau ?            

Je ne dirai pas. Je pense simplement que les gens n’ont pas l’information, ils n’ont pas fait les investigations nécessaires avant de se prononcer. Nous ne sommes pas responsables, ni en amont, ni en aval. Nous avons fait l’audit du système dans sa globalité, fait un rapport par la suite que nous avons transmis à qui de droit. L’AGETIC ne peut être accusé de rien du tout.

L’opposition demande à ce que ces experts analysent le fichier, êtes-vous prêt à collaborer ?

Cette requête est venue du Premier ministre lors de la réunion avec Tiebilé Dramé. Le chef du gouvernement a donné des instructions fermes pour la création d’un cadre permanent de consultation autour du fichier électoral à travers l’AGETIC et la DGE. Dès ce jour, nous avons créé au sein de l’AGETIC un cadre permanent de consultation du fichier électoral. J’ai personnellement adressé un courrier à l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle pour les inviter à venir vérifier la véracité du fichier électoral qui est en notre sein. Nous n’avons reçu que le représentant du candidat Choguel Maiga. Au-delà de ce dernier, nous avons reçu dans nos murs, un expert TIC en la personne du Dr Anasser Ag Rhissa. Nous lui avons démontré que nous avons un seul fichier qui contient 8 000 462 électeurs. Nous avons également reçu une commission de l’Union européenne  à qui nous avons donné les informations que nous avions, avant de les orienter vers la DGE qui est le principal responsable des données qui sont en ligne. Pour ce qui concerne la mise à disposition, nous ne sommes pas la structure habilitée. Nous avons une copie du fichier, le fichier lui-même est avec la DGE. Cette copie là ne saurait être partagée avec personne. Par contre tout citoyen, au-delà des candidats qui veut savoir la vérité, nous lui ouvriront volontiers nos portes afin de lui donner la bonne information

Haro sur les papiers

 

 

Le 25 octobre est consacré journée mondiale sans papier. Des journées mondiales il y’en a beaucoup. Si certaines peuvent s’avérer fantaisistes ,  cette journée pose une vraie problématique.

Comment réduire notre consommation de papier pour préserver notre environnement? Au-delà de ces préoccupations environnementales, avoir moins recours au papier peut faire d’énormes économies pour les entreprises. AGETIC, espère profiter de l’occasion pour sensibiliser les différentes structures du pays, pour qu’elles puissent adhérer au ‘’sans papier’’. « Réduire la consommation de papier dans nos structures est important, ce qui de facto réduira l’utilisation des consommables et fera des économies pour nos entreprises » explique le directeur général adjoint de l’AGETIC Nouhoum Kamaté. La structure étatique montre elle-même l’exemple, depuis 2015, tous les courriers sont traités électroniquement. « Nous avons développé des applications qui nous permettent de réduire ces consommations, en clair, tous nos courriers depuis l’entrée jusqu’à la sortie, le traitement se fait sans papier ».  Gain de temps, d’énergie, et d’argent, le concept semble avoir séduit. Des entreprises auraient manifesté leur intérêt pour sortir du ‘’tout papier’’ et se numériser, selon Samba Kanté, chef de division formation de l’AGECTIC. La cour constitutionnelle est l’une d’elle, elle a adhéré au système d’archivage des documents initié par l’AGETIC.  « Je pense que si nous arrivons pour l’année prochaine à réduire de 50% la consommation de papier, ce serait déjà un pari gagné » aspire Kanté.

 

 

Six nouvelles applications de l’AGETIC pour booster la performance de l’administration.

 

 

A travers un workshop qu’elle a organisé le 6 octobre, l’AGETIC a présenté six nouvelles applications destinées à améliorer l’efficacité des services de l’administration malienne.

Vous en avez assez des longues files dans les administrations pour pouvoir retirer un document, vous n’en pouvez plus de faire des va et viens incessants à cause d’un dossier incomplet, ces maux ont désormais un remède. ‘’Démarches administratives’’ est une application développée par l’agence des technologies, de l’information et de la communication (AGETIC) pour rendre les services publics plus accessibles et plus fluide à la population. Depuis votre téléphone mobile désormais, vous pourrez avoir toutes les informations sur les documents à fournir, pour un permis de conduire ou pour un casier judiciaire. « Nous avions déjà lancé le site internet dédié, mais nous n’avons pas ressenti un engouement pour le site, la plupart des personnes utilisent plus leurs téléphones, nous avons donc lancé la version mobile disponible pour les Android, et à partir de maintenant vous avez toutes les informations sur les démarches administratives à portée de mains » explique le directeur général de l’AGETIC, Hamed Salif Camara. Du vrai pain béni, pour nombre de maliens qui se plaignent de la lourdeur dans les services publics.

L’application permettra également au citoyen, d’avoir accès à tous les textes (codes, lois, décrets) et à toute actualité liée à l’administration malienne en temps réel.

Au-delà de cette application qui sert un petit peu tout le monde, l’AGETIC a développé d’autres outils permettant une interconnexion entre les différents services de l’État. Parmi lesquels, le E-GESCO, qui est une application de gestion de courrier rapide et sécurisée. « Grâce à cette application, il n’y aura plus de circulation de papier entre les services de l’administration, tout l’argent que nous mettons dans les photocopies, les impressions, ça va être fini bientôt, c’est un gain énorme qui permettrait de financer des projets » assure Camara.

L’absentéisme récurrent dans certains services publics, devrait bientôt prendre fin, ou du moins être sanctionné. L’Office Manager, permet de gérer les informations relatives aux différents agents dans les structures, une manière d’avoir des informations précises sur leurs présences et une traçabilité de leurs activités.

Archivage électronique et appel d’offre transparent

Trouver des documents qui datent de l’indépendance ou d’avant s’apparente à une vraie mission dans un capharnaüm. L’application AGIC qui offre un service d’archivage électronique,  assurera un énorme gain de temps pour les services concernés. « Pour lutter contre la délinquance financière, nous avons développé le ‘’Core’’, une application qui assure transparence et fiabilité dans la création et la gestion d’appel d’offres » décrit le directeur de l’AGETIC.  De nombreuses innovations donc qui devraient à terme améliorer les services fournis par les administrations.

 

L’AGETIC forme des agents du G5 Sahel

19 agents du G5 Sahel ont bénéficié d’une formation en informatique délivrée par l’AGETIC pour leur permettre de mieux communiquer avec leurs voisins. Objectif,  optimiser la communication pour mieux coordonner leurs actions des différents pays dans la lutte contre le terrorisme.

La Force Conjointe du G5 Sahel prend corps. Après l’inauguration du quartier général de la force par le président IBK à Sévaré, 19 militaires maliens ont bouler en fin de semaine dernière une formation spécialisée sur les outils de transmission pour la force sahélienne. Outiller ces militaires pour qu’ils puissent mieux communiquer avec leur homologues des autres pays de la force, et ainsi permettre une meilleure coordination dans la lutte contre le terrorisme, tel était le principal objectif de cette formation qui s’est déroulée en deux volets. « Nous avons d’abord initié ces militaires à l’informatique de base lors du premier volet, avec traitement de texte, après nous avons effectué un test, à la suite de laquelle neuf agents ont été retenus, et ils ont bénéficié d’une formation plus pointue » explique Massa Souleymane Sidibé, responsable en charge de la formation des agents de transmission du G5 Sahel.

Les militaires formés ont assuré par la voix de leur porte-parole que cette formation leur sera d’une inestimable aide dans la lutte contre les djihadistes. « Cela nous servira grandement pour nos missions futures » assure Sissoko Makan.

« Nous avons été contacté par le Général Didier Dacko, pour installer des équipements automatiques, nos ingénieurs ont donc mis en place un réseau sécurisé, ces installations sont couronnées par une formation de certains éléments. D’abord dans l’utilisation de ces outils et aussi dans la maintenance », détaille Hamed Salif Camara, Directeur général de l’AGETIC.

 

AGETIC, la formation pour leitmotiv

Depuis le début de l’année 2017, l’Agence des technologies et l’information et de la communication (AGETIC) a entrepris un grand chantier de renforcement des capacités, d’abord de ses agents, puis de tous les acteurs des TIC des structures étatiques et parapubliques, faisant de la formation un axe fort de ses missions.

« Nous avons fait des formations sur la conception d’application, de design de sites web, etc… Puis, avec la création il y a peu du département de cybersécurité, nous avons entrepris de renforcer les ingénieurs et les administrateurs réseaux avec une formation dispensée par un expert français et qui a été ouverte au public », explique Hamed Salif Camara, directeur général de l’AGETIC. Une occasion qui a permis aux initiateurs de se rendre compte de l’existence d’une demande assez importante de formation, les ingénieurs qualifiés de la place éprouvant le besoin de s’adapter aux évolutions de leur secteur.

D’autres modules sont prévus et dans le cadre d’un partenariat avec un prestataire local, l’AGETIC va former son personnel afin d’avoir à l’interne des développeurs et de se doter de ressources humaines compétentes pour développer des logiciels, faire des sites web ou travailler sur la cybersécurité. Depuis le début de l’année, plusieurs centaines d’agents de l’État ont été formés à l’utilisation des produits que l’AGETIC est désormais en mesure de proposer, tels qu’une application de gestion de courrier qui est en cours d’implémentation.

La question de la sécurité est également un axe central dans la politique de formation de la structure. « Nous venons de terminer une session avec les agents des ministères pour leur apprendre les bons réflexes sur, par exemple, quelle attitude adopter quand on se rend compte qu’on est victime d’une attaque informatique pour éviter de contaminer les autres personnes qui sont dans le même réseau », conclut Hamed Salif Camara.

 

3 questions à Hamed Salif Camara, Directeur général de l’AGETIC

En tant que nouveau directeur de l’AGETIC, quelles sont vos priorités? 

Il faut renforcer les capacités d’intervention de l’AGETIC tant sur le plan organisationnel que fonctionnel. La priorité est la modernisation de l’administration malienne et pour ce faire, il nous faut concevoir d’abord la cartographie de Bamako appelée « Base Map » qui sera mutualisée entre l’ensemble des acteurs de l’administration et du secteur public. Ensuite, il s’agira de l’étendre à l’ensemble du territoire afin d’atteindre progressivement la mise en place du concept de « Smart City » en droite ligne avec le Plan Mali Numérique 2020.

Plusieurs projets sont en cours dont la fameuse fibre optique. Où en est-on ?

Les travaux sont terminés et une réception provisoire avec quelques réserves a été prononcée le 10 juin 2015. Un important volet de formation a été effectué en local en mars 2015 puis en Chine en juillet 2015. Elle a concerné douze d’agents dont cinq de l’AGETIC. Ces réalisations ont contribué à améliorer l’efficacité et la modernité de l’administration par des échanges d’informations sur un support de transmission fibre optique.

Quelles sont les perspectives dans la promotion des TIC au Mali ?

Elles ont pour noms, investissement soutenu, formation appropriée en ressources humaines et capacité à les maintenir dans l’administration, construction du siège de l’AGETIC et mise en œuvre de Mali Numérique 2020 après adoption par le Gouvernement. De grands chantiers nous attendent à court, moyen et long termes.

Numérique : lentement mais sûrement…

Présenté en Conseil des ministres le 21 mai 2015 et approuvé par décret le 15 février 2016 avec pour objectif d’assainir, redresser et développer le secteur des Technologies de l’information et de la communication (TIC) au Mali, le Plan numérique Mali 2020 est, selon son coordinateur Boubacar Coulibaly, une vaste stratégie qui traduit l’ambition du Mali de devenir une nation émergente dans le domaine des TIC. Malgré le fait que sa mise en œuvre n’ait pas encore officiellement commencé, des actions concrètes sont déjà à mettre à son actif. De leur côté, les opérateurs privés multiplient les initiatives pour que les TIC et leurs applications soient plus accessibles et surtout, aient un impact concret dans la vie des populations.

Peut mieux faire Plus que quatre années pour réaliser ce plan qui fera du Mali une puissance numérique où l’utilisation des TIC se traduira par l’amélioration du quotidien des citoyens, aussi bien pour la communication et l’information que pour l’éducation et la santé. Ce sont, entres autres, « la campagne d’identification des abonnés aux réseaux de télécoms et le projet fibre optique en cours », explique M. Coulibaly. En ce qui concerne la « gouvernance du plan lui-même, il est prévu de créer des comités de mise en œuvre et une direction nationale de l’économie numérique. Ces instances, qui doivent gérer la mise en œuvre de « Mali Numérique 2020 », attendent l’adoption de leurs textes de création par le gouvernement. Cela freine encore la mise en œuvre du plan », conclut notre interlocuteur. Les chantiers sont donc encore nombreux. Récemment nommé, le Directeur général de l’Agence des technologies de l’information et de la communication (AGETIC), Hamed Salif Camara, se montre optimiste face à l’ampleur de la tâche. Pour lui, la volonté politique affichée est maintenant à traduire en actes. Ceux-ci sont notamment la poursuite des investissements, la mise en œuvre des six axes la stratégie, la mise en place d’un dispositif d’hébergement de sites performants, la mise en place d’un site de back-up pour l’administration, la mise en place de systèmes d’information géographique (SIG) et la promotion du E-learning et des TIC en général, à travers le développement de contenus, le développement de l’activité de gestion de nom de domaine, ainsi que la vulgarisation à travers les associations de jeunes, femmes et ONG. Il s’agira de faire toucher du doigt aux populations, l’apport inestimable des TIC en termes de gain de temps, d’efficacité et de productivité. Par exemple, avec l’appui de l’AGETIC, le Commissariat au développement institutionnel (CDI) a mis en ligne à la disposition du grand public, un site internet dénommé « l’Administration à votre service », qui propose au citoyen toute une série d’informations.

Fibre d’État ? Revenant sur le projet fibre optique, son coordinateur Ibrahima Guindo, explique que l’État du Mali a obtenu en 2011 auprès de ses partenaires, le financement de 3 projets à hauteur de 155 millions de dollars américains pour la construction d’un réseau propre de câbles à fibre optique d’environ 3 000 kilomètres.Concernant les informations faisant état de duplication de la couverture déjà effectuée par les opérateurs privés, il explique qu’il « n’en est nullement ainsi. L’État a pris de l’avance et à desservi les zones non couvertes par les opérateurs vers le nord et le sud. Et aussi pour aller en direction des capitales régionales comme Alger, Conakry, Nouakchott, Abidjan, Ouagadougou dans le cadre de l’intégration sous-régionale ». Mais pourquoi ne pas laisser les opérateurs télécoms couvrir tout le réseau et ainsi faire des économies ? M. Guindo répond, catégorique, que « tout État responsable, dans le contexte actuel d’insécurité, se doit d’avoir son propre réseau ». La fibre optique au Mali avance lentement mais sûrement, rassure-t-il. « Il y a des difficultés, elles sont d’ordres structurel et financier. Car une chose est de réaliser des infrastructures, c’en est une autre de les entretenir, les maintenir, et les exploiter de façon optimale », explique le technicien. Selon l’AGETIC, on peut d’ores et déjà mettre au compte des réalisations de ce projet, la réalisation d’un backbone fibre optique de 915 km allant de Bamako à Ségou en passant par Koutiala et Bla ainsi que l’interconnexion à Bamako de 27 structures de l’administration par fibre optique, ce qui a fait économiser  l’État 600 millions de francs CFA par an, autrefois payés à Sotelma pour la location de sa fibre.

Enfin, en ce qui concerne le passage au numérique dans le secteur de l’audiovisuel, l’avènement de la TNT est « ralenti par une question de financements », explique Moustapha Diawara, chargé de communication au ministère de l’Économie numérique, de l’Information et de la Communication (MENIC). « Le gouvernement a donc décidé en septembre 2015 de la création d’une Société malienne de transmission et de diffusion (SMTD) dont l’un des objectifs principaux est de trouver le financement pour la mise en œuvre du projet de transition numérique ainsi que sa gestion », poursuit-il.

Accès aux TIC pour tous Selon les chiffres de la Banque Mondiale, moins de 10% des Maliens ont accès à Internet (2014), tandis que l’utilisation du téléphone portable dépasse les 100% de la population. L’accès à Internet demeure donc un défi majeur. Les deux opérateurs de télécommunications Orange et Malitel peinent encore à améliorer la qualité de leur offre et la 4G, que les consommateurs appellent de leurs vœux « est à l’étude en ce moment pour déterminer les conditions de sa mise en œuvre », explique-t-on du côté de l’Agence malienne pour la régulation des télécommunications et de la poste (AMRTP). Quant au coût de la connexion, il est encore rédhibitoire pour bon nombre de Maliens. Le haut débit par satellite n’est accessible qu’aux grandes entreprises et organisations d’envergure qui peuvent en couvrir les charges. Pour démocratiser l’usage des TIC et particulièrement d’Internet, « il faudra que l’État fasse pression sur les opérateurs pour réduire les prix », assure Boubacar Diallo, étudiant. Pour le jeune homme, qui suit des cours en ligne, « l’annonce du 3èmeopérateur avait donné de l’espoir, pour que les prix diminuent grâce au jeu de la concurrence. Mais depuis rien, alors, en attendant, on est livré à la merci d’Orange et Malitel ». Antoine Diarra, Directeur général de Arezys, une société qui vend de l’Internet satellitaire, recadre les choses. « Ce n’est pas pour prendre la défense des opérateurs mais il faut aussi comprendre que le prix de l’Internet dépend de la demande. Celle-ci augmente, depuis ces deux dernières années mais elle n’est pas encore assez conséquente pour permettre de rendre accessible l’offre », explique t-il. Mais il ajoute que ces mêmes opérateurs gagneraient à donner accès à plus de bande passante à moindre coût, pour stimuler la demande, avoir plus de clients et donc maximiser leurs profits.

Le boom des start-ups Depuis quelques années, les jeunes entrepreneurs maliens s’intéressent de plus en plus aux TIC et proposent des solutions faciles d’accès et utiles dans de nombreux domaines de la vie, que ce soit le e-commerce, la santé ou encore les loisirs. Mohamed Kéïta, co-fondateur de Impact Hub Bamako, et propriétaire de Neliö 8, deux incubateurs d’entreprises innovantes et durables, croit que ce sont ces petites sociétés à faible investissement de départ et flexibles grâce à l’usage d’Internet et de ses applications, qui pourront créer des emplois et booster la croissance au Mali, comme cela a été le cas ailleurs dans le monde. Reste à leur apporter le soutien dont elles ont besoin, surtout en terme de financements. Il est donc à espérer qu’Internet devienne dans un futur proche, la chose la mieux partagée au Mali.