A quoi va ressembler l’ère post-Giresse ?

 

Après les années Giresse et leurs turbulences, le Mali ouvre un nouveau chapitre de son histoire footballistique avec la nomination d’un entraineur local, pour la seconde fois après Mamadou Kéita Capi. Une ère nouvelle, que nombre de Maliens espèrent enchantée, avec une équipe nationale tirée vers le haut.

Le 6 octobre, le Mali va disputer son premier match post-Giresse face à la Côte d’Ivoire. Même si, au vu du classement, les Aigles ont des chances de qualification fortement hypothéquées, ils se devront de réaliser une belle rencontre, non seulement pour le prestige de battre le voisin ivoirien, mais également pour se réconcilier avec leur public, qui a perdu confiance en eux. Des défis déjà énormes pour le sélectionneur intérimaire Mohamed Magassouba, épaulé dans sa tâche par l’ex-international Fousseyni Diawara. « Le nouveau staff doit gérer avec intelligence et nous sortir une équipe dans laquelle tout le monde se reconnaitra, dans laquelle ceux qui le méritent sont alignés. Je crois que Magassouba a cette capacité et Fousseyni est en phase avec les joueurs, il les connait bien », analyse Baba Cissouma, Directeur de publication du journal ‘’Match’’.

Quelle équipe ?

Elle devrait garder une certaine ossature et être structurée autour de joueurs tel qu’Yves Bissouma et le capitaine Yacouba Sylla, qui en sont les porte-étendards. En dépit du début de saison délicat de son équipe (Lille, 18ème), Bissouma est un élément important du dispositif de Marcelo Bielsa. Il devrait faire parler sa technique pour distiller de bons ballons aux attaquants, dont Marega. En sept matchs disputés cette saison avec les « Dragons », l’international malien a déjà inscrit cinq buts. Il pourrait être associé en attaque avec le Troyen Adama Niane, meilleur buteur de Ligue 2 la saison dernière avec 23 réalisations, mais qui n’a marqué qu’une seule fois dans l’élite cette saison.  Le sélectionneur fera face à un problème d’excès de richesses dans le choix du gardien de but. Lors du match retour du Mali face au Maroc, le 5 septembre 2017, le portier du Stade malien a été impressionnant, et les supporteurs et les observateurs réclament qu’ils soient désormais le n°1 dans les cages, même si Mamadou Samassa a été crédité d’une belle prestation lors de la septième journée de Ligue 1, étant même retenu dans l’équipe type de la journée.

Giresse démissionne !

 

Critiqué pour ses choix qui impactent les performances de l’équipe du Mali, le sélectionneur Alain Giresse a démissionné de son poste de sélectionneur du Mali.

Les supporteurs le réclamaient, Alain Giresse s’est exécuté. Le tant décrié sélectionneur des Aigles, a démissionné de ses fonctions à seulement deux mois de la fin de son contrat. « Il m’a remis sa lettre de démission hier (mercredi 6 septembre) » confirme le président de la fédération malienne de football. La vindicte des supporteurs dont une grande frange a boycotté le match du mardi 5 septembre face au Maroc, et les piètres prestations de l’équipe ont finalement eu raison du français, qui sort par la plus petite des portes.

Héros à zéro En 2010, Alain Giresse prend les rênes de la sélection nationale, après avoir réalisé de belles choses sur le banc gabonais. Lors de la CAN 2012, il termine sur le podium avec une équipe séduisante. Une première pour le Mali, depuis 1972, dès lors naissent des espoirs grandeur nature pour cette équipe. L’équipe et le sélectionneur sont accueillis en rock-star à leur retour à Bamako. La même année, suite à des problèmes avec la fédération malienne de football, il décide de ne pas renouveler son contrat, et quitte donc son poste d’entraîneur. Les supporteurs qui vivent mal cette décision, le soutiennent et prennent à parti la FEMAFOOT. Il revient en 2015, après une expérience ratée au Sénégal. Le retour de l’enfant prodigue. Un come-back totalement manqué, puisque d’année en année, les performances de l’équipe ne cessent de décliner. Lors de la CAN 2017, le Mali est éliminé dès le premier tour, avec un seul but marqué et aucune victoire. Pour les qualifications à la Coupe du monde 2018, le Mali est dernier de son groupe, avec zéro victoire au compteur, et des performances indignes. L’équipe s’est même pris un 6-0 face au Maroc, un tel écart n’était plus arrivé aux Aigles depuis 30 ans. Déjà, après la CAN 2017, la fédération avait tenté de le faire partir, mais le ministère des sports, qui paye Giresse, ne pouvait pas s’aligner sur les indemnités de départ du français. Cette fois-ci, c’est l’intéressé lui-même qui a décidé de s’en aller, enlevant une épine du pied à tous.

 

 

Mali-Maroc : Le match nul

Le Mali et le Maroc se sont quittés sur un score nul et vierge, au terme d’une rencontre qui ne restera  pas dans les mémoires. Avec zéro victoire dans son groupe, le Mali est au bord du gouffre.

Il fallait impérativement gagner pour le Mali pour garder une lueur d’espoir en vue d’une qualification pour le mondial 2018. Une victoire, passe par un but, et le Mali n’a pas créé les conditions pour en marquer. Au terme d’une rencontre insipide, où la première période ressemblait plus à un match entre amis, qu’à une rencontre à enjeu, les deux équipes ont offert un spectacle indigne. Le Maroc, victorieuse 6-0 à l’aller n’était clairement pas venu pour prendre des risques pour gagner, rien d’étonnant. C’est le Mali, qui giflé devait se reprendre pour laver l’affront subi à Rabat. Pour cela, il fallait montrer plus d’envie et faire le choix de l’attaque. Raté. Avec le seul Moussa Marega, en pointe, le jeu offensif malien était inexistant, les latéraux trop timides n’apportaient pas grand-chose, seul Moussa Doumbia se démenait, mais seul, ses actions restent vaines. C’est dans ce marasme collectif, que les deux équipes regagnèrent le vestiaire pour la mi-temps, sans que le stade du 26 mars, le trois quart vide n’eut l’occasion de vibrer.

En seconde période, aucun sursaut. Elle a même été pire que la première mi-temps. On a assisté à un vilain kick and rush, un football d’un autre siècle, qui là non plus n’aboutit à rien. La défaite à même été évité de peu. A la 70ème minute de jeu, Mamoutotu N’Diaye se rend coupable d’une faute sur Boussoupha dans la surface, penalty pour le Maroc. Le jeune gardien Djigui Diarra, stoppe la tentative de Ziyech, et maintien l’équipe à flot. Six minutes, suite à une grossière erreur d’une défense loin d’être rassurante, l’attaquant Tannane se présente seul face au gardien, mais dévisse trop sa frappe qui manque le cadre. Au final, les deux équipes se quittent sur ce nul qui arrange plus le Maroc, moins le Mali qui pointe à la dernière place du groupe, avec deux points et toujours aucune victoire.

 

Alain Giresse : « Je ne suis pas à attendre la régularisation de la situation »

Le sélectionneur de l’équipe nationale, Alain Giresse, en chômage technique depuis la suspension du Mali, revient sur la situation actuelle et livre sa part de vérité sur certains aspects de la crise du football malien.

Comment vivez-vous la suspension du Mali ?

Je suis dans ma fonction : préparer l’échéance de l’équipe nationale. Je suis donc dans tout ce qui en représente la mise en place sportive. Je ne suis pas sans rien faire à attendre la régularisation de la situation.

Vous avez un temps été annoncé du côté du Zamalek Égypte et comme sélectionneur de la Tunisie. Avez-vous des envies d’ailleurs ?

Les bruits, les informations vraies ou fausses circulent dans le monde du football. C’est comme ça. Ma suite dépend du dénouement de la situation ici au Mali.

Quelles sont vos relations avec le Comité de normalisation (CONOR) ?

Je n’ai pas de contact direct avec le comité étant donné que je ne suis pas un administratif. Le comité sait que je suis dans mon domaine, le sportif, et que je remplis ma fonction de sélectionneur.

Si Boubacar Baba Diarra venait à récupérer son poste, seriez-vous disposé à retravailler avec lui après sa dernière sortie médiatique vous concernant (impossibilité à assurer votre sécurité, votre démission) ?

Je n’ai pas eu, à cause des évènements, d’échange avec le président de la FEMAFOOT. Cela sera donc effectivement nécessaire, dépendamment des évolutions futures de la situation.

Si tout venait à rentrer dans l’ordre et que la suspension soit levée, comment ferez-vous pour présenter une équipe compétitive ?

Il faudra être rapidement opérationnel, dans tous les domaines, logistique et sportif.

Au regard d’une de vos récentes interviews, vous paraissez être en phase avec vos joueurs, mais cela ne semble pas être le cas avec de nombreux supporteurs qui réclament votre démission. Y avez-vous songé ?

Je comprends que les supporters aient été déçus des résultats de la CAN 2017. Mais il faut analyser objectivement la performance et répartir les responsabilités. Nous avons une équipe en transition, encore immature pour le très haut niveau. Il faut accepter le travail de construction qu’il y a à faire.

 

Giresse doit-il plier bagage ?

« Ma démission n’est pas à l’ordre du jour » déclarait Alain Giresse au soir de l’élimination des Aigles, dès le premier tour de la CAN 2017. Sauf que la question mérite une attention particulière après les mauvais résultats de l’équipe et des prestations sans gloire. La porte devrait être ouverte pour le français qui s’illustre par son incapacité à faire décoller cette équipe. Décryptage d’un retour manqué.

Des choix discutables

Lors de cette CAN et pas seulement, le sélectionneur s’est distingué par ces choix plus que douteux. Tout d’abord son onze de départ. Sambou Yattabaré (rétrogradé en réserve dans son club) et Bakary Sako (4 matchs disputés avec son club, tous en étant remplaçant) ont fait des matchs insipides lors de la première sortie des Aigles face à l’Egypte, or sur le banc, des jeunes joueurs plein d’envie et explosifs attendaient patiemment leur heure de flamber. D’ailleurs, lors du dernier match des Aigles face à l’Ouganda, les jeunes Moussa Doumbia et Yves Bissouma se sont montrés à leur avantage, le second marquant même un sublime coup-franc des 30 mètres. Le constat qui ressort le plus souvent, c’est que l’entraîneur n’a pas la moindre idée de ce qu’il peut ou doit faire.

Giresse c’est aussi et surtout la stratégie du « je meurs avec mes idées » aussi contestables soient-elles. Il s’est aussi entêté à faire jouer un latéral droit sur la gauche. Nul doute que les prestations, néanmoins bonnes, d’Hamari Traoré en latéral gauche, poste inhabituel pour ce joueur, aurait été meilleur à son véritable poste. « Je suis obligé de composer une équipe avec ce que j’ai, on a des blessés, et cela n’est pas de mon fait » justifie le sélectionneur. Sauf que Youssouf Koné, non utilisé lors de la CAN aurait pu jouer à gauche qui est son poste et où il avait montré de belles prédispositions.

Un important vivrier inexploité

L’équipe du Mali est avec le Congo et le Nigeria est l’une de celle qui a le plus grand potentiel chez les jeunes. L’année dernière les sélections juniors et cadettes du Mali avaient respectivement disputées les demi-finales et la finale de coupe du monde dans leurs catégories. Sauf qu’au moment de faire sa liste, Giresse a préféré se passer du talentueux, Diadié Samassekou, qui rayonne au milieu de terrain et qui a joué quelques matches d’éliminatoires. « Nous avons de bons jeunes, certes mais la sélection A est un tout autre challenge, on veut les intégrer progressivement pour qu’ils soient efficaces ».

Manque de poigne

Le Français laisse transparaître l’image d’un entraîneur à la faible personnalité. En 2012, Sambou Yattabaré avait décidé de quitter la sélection en pleine CAN car il ne bénéficiait pas de temps de jeu. Cinq ans plus tard, il est l’un des hommes de base de Giresse. L’affaire Maiga-Sako met également en exergue les difficultés du sélectionneur à se faire respecter. Une brouille entre les deux joueurs autour du flocage de numéro 10, aurait amené Sako a systématiquement décliné les convocations pour jouer avec le Mali. Officiellement pour des raisons de blessure. Alors oui, Sako a participé à l’édition 2017, mais, à mon avis, c’est parce que Maiga n’était pas retenu, avouez que la coïncidence tombe plutôt à point nommé. Lors de la dernière rencontre disputée par le Mali, à Bamako, Modibo Maiga était non seulement titulaire mais aussi capitaine. Il était sorti à l’heure de jeu après que la vindicte du public à son encontre était devenu pesante.

Une expérience d’entraîneur mitigée

Giresse a été un joueur de génie durant sa carrière, mais son virage sur les bancs tourne au vinaigre. Giresse c’est quatre sélections nationales entraînées dont trois africaines. Une première expérience au Gabon, où il s’est fait éliminé au premier tour de la CAN en 2008. La seconde à la tête du Mali, il termine sur le podium, une première pour le pays de 1972. Pour cause de différends financiers, il quitte son poste et s’installe 1200 km plus loin, chez le voisin sénégalais. L’expérience est un nouvel échec. Malgré des joueurs de renom, les Lions de la Teranga quittent prématurément la CAN 2015, Giresse ne résiste pas à la déferlante de critiques qui s’abat sur lui et il est démis de ses fonctions. C’est ensuite un retour dans le nid des Aigles, la terre des son unique exploit. Un retour manqué, pour le Mali qui est dernier de son groupe de qualification pour la coupe du monde 2018, et est éliminé dès le premier tour de la CAN avec zéro victoire au compteur et surtout un seul but marqué.

Quid du sélectionneur local ?

A l’instar de certaines sélections tel le Congo, le Nigéria ou encore le Sénégal, le Mali devrait sérieusement réfléchir à confier les rênes de l’équipe à un entraîneur local. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a de quoi faire avec Fagneri Diarra, ou encore Baye Bah qui ont entraîné les sélections de jeunes avec à la clé des succès. Ou à contrario, trouver un entraîneur étranger qui même hors d’Afrique pourrait trouver du boulot ou qui a déjà fait ses preuves. C’est la stratégie qu’a adopté l’Egypte avec Hector Cuper qui a conduit l’équipe de Valence deux fois en finale de la ligue des champions.

Sinon un sélectionneur local, c’est aussi l’assurance d’une meilleure santé financière pour la fédération et une meilleure connaissance du potentiel local du Mali.