Sociétés de sécurité : S’adapter pour faire face

Les attaques terroristes et autres braquages sanglants, à Bamako comme ailleurs au Mali, ont laissé de véritables traumatismes au sein de la population et obligé les sociétés de sécurité à adapter leur offre, à la demande d’une part, aux nouveaux impératifs sécuritaires, d’autre part. Dans la plupart des cas, c’est en effet bien souvent les faiblesses du dispositif sécuritaire qui sont mises en avant, « même si le risque zéro n’existe pas », explique une source sécuritaire. Depuis, « beaucoup de choses ont évolué », selon le directeur général de Mali Guard, Aly Yatassaye. Sa société équipe désormais ses agents de taser, de bombe de self défense, en plus des matraques. Des efforts qui peuvent paraître dérisoires face à l’arsenal de potentiels assaillants. « Ce n’est pas de notre fait. Au Mali, c’est celui qui contracte une société de sécurité qui doit faire la demande pour le port d’une arme à feu. Nous la transmettons au ministère de la Sécurité qui délivre alors un permis. », explique Traoré Ramata Barry, chef de service à Mali Guard. De nouveaux textes sont en cours d’adoption  pour adapter la réglementation à la nouvelle donne sécuritaire. Mais en attendant, la profession est toujours régie par la loi n° 96-2020 de février 1996. Ce texte, dont le décret d’application date également de la même année, est assez restrictif en ce qui concerne les prérogatives desdites sociétés et sur leur champ d’action.

À ce jour, seuls les convoyeurs de fonds sont autorisés à porter des armes, une situation que déplore Mohamed Moghrabi, directeur de la société Escort, dont les agents assuraient la sécurité du Radisson Blu de Bamako au moment de l’attentat de novembre 2015 . « Pas un seul site ouvert au public ne dispose d’un dispositif antiterroriste. Nous en sommes encore à mener des fouilles manuelles, à utiliser des miroirs de détection pour chercher des explosifs sous les voitures. Or, la menace a évolué. On n’a pas voulu le voir ». Pour palier l’insuffisance d’équipements, les sociétés mettent l’accent sur les formations. Chez Mali Guard, une salle dédiée à même été créée à cet effet. « Nous avons une équipe de formation très qualifiée. Nous travaillons avec des israéliens, mais aussi des français, qui nous prodiguent de précieux conseils », conclut Yatassaye.

 

Hôtels et restaurant : Sécurité maximale

Tirant les leçons des attaques sanglantes contre le restaurant la Terrasse et les hôtels Byblos de Sévaré et Radisson de Bamako (respectivement en mars, août et novembre 2015), les établissements ont tous vu leur sécurité renforcée. De Radisson Blu, à Onomo Hotel, en passant par les hôtels du Groupe Azalaï, il n’en existe presque plus sans portique de sécurité, grilles de protection et agents à l’entrée. Même si les moyens ne sont pas les mêmes partout, force est de constater que de gros efforts ont été faits. Outre les infrastructures physiques, visibles ou non (caméras de surveillance), les hôtels ont également procédé au recrutement de personnes de sécurité supplémentaires.

L’imperméabilité du dispositif reste l’objectif affiché et tout est mis en œuvre pour l’atteindre. Fouille des bagages, passage au détecteur, fouille des personnes et des véhicules, un dispositif auquel les clients se plient volontiers. « Depuis l’attaque de l’hôtel Radisson et du restaurant la Terrasse, les membres du personnel ont à nouveau été obligés de passer par un détecteur de métaux et de soumettre leurs bagages à la fouille. Par ailleurs, les agents de sécurité que nous recrutons reçoivent une formation qui permette de s’assurer qu’ils comprennent les règles juridiques applicables à la fouille », explique un responsable d’hôtel. « Nous avons également pris la décision de déployer une force opérationnelle, en coopération avec le département de la sécurité, pour faire face à toute éventualité. C’ est un élément clé de notre dispositif sécuritaire », ajoute-t-il.

Sécurité : répondre à la menace

Au Mali, le défi sécuritaire reste un challenge important à relever sur l’ensemble du territoire. Depuis quelques mois, à Bamako, force est de constater que la situation sécuritaire a connu une nette amélioration. Une présence accrue des forces de police et des agents de sécurité, un renforcement des contrôles dans les bâtiments publics, les hôtels et les restaurants de la capitale y est notable. Mais si la situation semble s’améliorer, beaucoup reste à faire, dans la capitale comme dans le reste du pays.

Depuis quelques mois, ils sont de plus en plus présents dans l’espace public. Dans les supermarchés, à l’entrée des banques, devant le siège des grandes entreprises, devant les hôtels et restaurants huppés, aux carrefours de la capitale. Les fouilles et contrôle physique ou via des portiques de sécurité sont systématiques, les forces de police et les agents privés sont là en barrage, ou pour fournir un appui contre l’insécurité galopante qui s’est installée depuis quelques années.

Après le sommet Afrique-France qui accueillait une trentaine de chefs d’État dans la capitale malienne et qui a démontré la capacité du Mali à héberger pareil événement, le défi sécuritaire reste grand, mais le pays est néanmoins en marche pour tenter d’endiguer le banditisme et les attaques terroristes, contre les institutions de l’État, les forces militaires et les civils, devenues monnaie courante.

Défense nationale Si au Mali, une stratégie de réforme exhaustive de la sécurité est restée longtemps lettre morte, depuis quelques années et conformément à la Loi quinquennale d’orientation et de programmation militaire (LOPM), le pays est lancé dans le renforcement de son outil de défense. Les effectifs de l’armée nationale sont passés, en l’espace de 3 ans, de 8 200 soldats réguliers à environ 10 000 aujourd’hui, et une campagne de recrutement à été lancée, en janvier, par le ministère de la Défense afin d’enrôler 5 000 jeunes dans tout le pays et dans plusieurs corps de l’armée. Il s’agit ainsi de reconstituer une force nationale capable de défendre le territoire et de répondre aux menaces à l’intérieur, comme à l’extérieur du pays.

Ces militaires, formés par la Mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM Mali), ont déjà constitué huit bataillons de type GTIA (Groupement tactique interarmes) entraînés et prêt à être déployés sur différents théâtres d’opération. Les chefs militaires et les instructeurs de ces contingents sont actuellement en phase de formation, notamment en matière de commandement et de leadership, avec l’objectif que cette armée soit opérationnelle à l’horizon 2019.

Cette volonté affichée de renforcement du secteur de la défense et de la sécurité s’applique non seulement aux forces armées, mais aussi à la police, au niveau local et national, ainsi qu’aux services de douanes, avec l’objectif futur d’obtenir un service de sécurité de qualité assurant la protection physique, matérielle et morale des populations, ainsi que la souveraineté des institutions et du territoire. Principales difficultés auxquelles seront confrontées ces forces de sécurité : l’étendue du territoire et la guerre asymétrique menée par les assaillants, qui peuvent se fondre dans la population et traverser une frontière. Le pays est en marche mais la route pour parvenir à destination est encore longue.

L’essor de la sécurité privée Alors que le gouvernement s’attèle à renforcer les capacités de l’armée et des forces de l’ordre, la demande de sécurité est en augmentation au Mali. La progression du banditisme et du terrorisme ont favorisé l’explosion du secteur, qui affiche une croissance continue depuis plusieurs années avec une clientèle composée de particuliers, comme d’entreprises. « Le climat sécuritaire actuel est préoccupant et pour 2017 nous ne sommes pas à l’abri d’un autre attentat dans la capitale. Il est clair que cette prise de conscience profite aux affaires », indique ce patron d’une société de sécurité privée de la capitale.

 Le secteur de la sécurité privée, encore archaïque, a en moins de cinq années, connu un accroissement de ces acteurs qui dépasseraient aujourd’hui, selon une statistique non officielle, le nombre de 250. Ces sociétés commerciales, bénéficiant d’un agrément du ministre chargé de la Sécurité, sont régies par des règles propres. Elles proposent des prestations de surveillance, gardiennage, transport de fonds, et de protection des particuliers et des sociétés, et sont règlementées par la loi N° 96-020/AN dont le décret d’application date du 29 février 1996. Des sociétés comme Securicom, G4S, Axesm ou Mali Guard, entre autres, se sont imposées et se partagent ce marché porteur, essentiellement composé d’institutions bancaires, de grands groupes, de représentations d’organisations internationales, de commerces ou encore de particuliers.

Un nécessaire encadrement Néanmoins, ces sociétés qui peuvent s’avérer de précieux auxiliaires pour maintenir la sécurité à Bamako et qui jouent un rôle de service public, ont besoin de se professionnaliser. « Le secteur manque d’organisation. Au niveau de l’État, il n’y a pas d’homologation, les niveaux de paie sont insuffisants et la formation n’est pas satisfaisante », résume cet ex-colonel de l’armée qui travaille dans la sécurité privée depuis 5 ans et regrette que le secteur ne soit pas plus encadré.

Concédé par l’État aux privés pour répondre au besoin de sécurité, le secteur est encore majoritairement informel et non professionnel. La plupart des agents qui travaillent pour ces sociétés n’ont pas de réelles aptitudes pour ce travail et ne sont pas armés pour faire face à toutes les menaces. « J’utilise des gendarmes qui sont armés pour la surveillance de sites sensibles, notamment en cas d’interventions. Certaines sociétés comme Securicom font appel à des policiers, car nous ne pouvons nous permettre de confier des armes à des agents qui manquent de formation », explique ce consultant en sécurité de la place. Cette absence de véritable contrôle de la profession met ces agents en danger et encourage les dérives, notamment salariales.

Malgré tout, en complément des forces conventionnelles, ces compagnies privées qui continuent à se multiplier dans ce nouveau marché concurrentiel, jouent leur partition et se démarquent en diversifiant leur offre de services : géolocalisation, vidéosurveillance, audit de sécurité, sécurisation d’événements, etc., prouvant s’il en était encore besoin, que le secteur de la sécurité a encore de beaux jours devant lui.

 

 

JO de Rio 2016, des défis sportifs et surtout sécuritaires

Du 5 au 21 août se tiendront les jeux olympiques de Rio 2016. Cet évènement sportif mondial aura lieu dans un contexte sécuritaire international particulier dû aux attaques de groupes terroristes transnationaux comme l’ État Islamique. Sur Place, un dispositif sécuritaire impressionnant devrait normalement garantir un bon déroulement des jeux.

Les jeux olympiques de Rio 2016 qui s’ouvriront ce vendredi 5 août et qui s’achèveront le 21 août prochain, verront affluer au Brésil environ 1 demi-million de visiteurs en provenance du monde entier. Le pays qui sera à l’occasion de ces jeux sous le feu des projecteurs internationaux, devra gérer un défi sécuritaire de taille pour assurer le bon déroulement et la sécurité des 10 500 athlètes, des personnalités et touristes, qui durant les 15 jours viendront célébrer les olympiades.

Ces défis, que sont les risques d’attentats terroristes, la criminalité et la violence de rue, en augmentation ces derniers temps dans le pays et notamment dans l’État de Rio, font l’objet d’une préoccupation particulière des autorités qui tentent de tout mettre en œuvre pour que le déroulement de ces jeux ne connaissent pas d’accroc majeur.

Un dispositif sécuritaire inédit

Pour faire face aux potentielles menaces, 65 000 policiers et 20 000 soldats seront mobilisés pour assurer la sécurité et les contrôles. En comparaison, cette mobilisation des forces de sécurité représente le double des effectifs des jeux olympiques de Londres en 2012. 3200 réservistes pourront être, si la situation l’exige, mobilisés à tout moment.

De nombreux exercices de simulation d’attaque en milieu urbain, ont préparé les forces à faire face à divers scénarios.  Les sites olympiques seront contrôlés par la Garde nationale, appuyés par des groupes tactiques pour des interventions rapides et efficaces en cas de débordements. La sécurité sera particulièrement renforcée autour du stade de Maracana, qui accueillera les finales de football et les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux, ainsi que des stades situés non loin des quartiers défavorisés, les favelas.

Dans ce pays auparavant peu inquiété par la menace terroriste, le contexte sécuritaire international et les récentes attaques survenues en Europe, notamment à Nice, ont poussé les autorités à renforcer leur dispositif. Des agents des services brésiliens ont effectué des séjours techniques à l’étranger et le pays accueillera sur son sol, une centaine de membre des services de renseignements étrangers, pour mutualiser les pratiques et détecter l’infiltration éventuelle de « loups solitaires ».

La force Aérienne brésilienne sera aussi mobilisée avec l’engagement de 80 avions dont des chasseurs F-5, qui auront la charge de surveiller l’espace aérien de la capitale brésilienne, qui pourra être fermé à tout moment si la situation l’exige. Les survols des enceintes sportives seront interdits pendant les compétitions et 188 aérodromes seront fermés car ne répondant pas au plan de sécurité aérien en vigueur pendant les jeux.

Malgré le dispositif impressionnant mis en place, la préparation de ces jeux a été émaillée d’incidents notables qui ont pu faire douter de la réelle maîtrise sécuritaire brésilienne pour cet événement. Tout d’abord, les problèmes sociaux et économiques du pays se sont invités dans la préparation des jeux via des manifestations dont celle d’une centaine de policiers, il y a un mois, à l’aéroport international de Rio, pour interpeller l’opinion publique sur leurs conditions de travail et leurs salaires, et qui décrivaient une situation sécuritaire déplorable à la veille des jeux. Des fonds rapidement débloqués ont pu calmer la grogne de ces fonctionnaires qui aurait pu faire tâche dans la préparation de cet événement sportif mondial

Plusieurs menaces d’attentat ont été déjoué par les services brésiliens dont le dernier en date, ce mois-ci, qui a permis l’arrestation d’une dizaine de jeunes qui avaient prêté allégeance à l’État Islamique et qui planifiaient des attaques terroristes durant la compétition. C’est grâce à une note du FBI que ce groupe qui se faisait appeler «Défenseurs de la charia », a pu être appréhendé par les forces de sécurité brésilienne, mettant en doute la capacité des services brésiliens à pouvoir détecté ce type d’attaque, notamment par la mise en œuvre d’une surveillance accrue des réseaux sociaux.

Un risque d’attaque « minimal »

Le gouvernement brésilien a cependant affirmé « placé la sécurité au cœur de leurs préoccupations » et a martelé, ces dernier mois, que le risque d’attaque durant ces jeux reste « minimal », même si l’inquiétude reste palpable. On se souvient que les précédents jeux d’hiver à Sotchi ou ceux de Pékin avaient aussi déclenché des interrogations quant à l’aspect sécuritaire.

Rio a néanmoins su démontrer son savoir-faire en matière de sécurité lors du dernier Mondial de football ou du sommet pour l’environnement qui étaient des événements d’ampleur.

Le principale problème pour les autorités, reste, en dehors d’une éventuelle attaque terroriste, la récession économique qui frappe le pays, rendant le gouvernement impopulaire et qui a attisé la grogne de la population, exaspérée par les scandales financiers, dont celui retentissant de l’affaire Pétrobras, qui a vu l’éviction récente de Dilma Roussef, de son siège de présidente de la République.