FAMa : l’armée repousse deux attaques djihadistes « complexes »

Six soldats maliens ont été tués et 18 blessés, dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 janvier, dans le centre du pays, dans deux attaques djihadistes, a indiqué dimanche l’armée dans un nouveau bilan.

« Le bilan est de six morts et 18 blessés » parmi les soldats visés par ces attaques contre « deux postes de sécurité » à Boulkessi et Mondoro (centre), entraînant une riposte qui a fait « une trentaine de morts côté terroristes », a écrit l’armée dans un communiqué publié sur Facebook. Un précédant bilan de sources de sécurité avait fait état de trois soldats tués. Le communiqué a salué la promptitude des réactions et la coordination efficace entre les FAMa et Barkhane qui ont mis en déroute les assaillants.

Cessez-le-feu au centre : Vers la fin des violences?

Le 1er juillet, deux groupes d’autodéfense peulh et dogon ont signé à Sévaré  un document actant leur volonté d’aller vers un cessez-le feu. Les derniers massacres dans la région de Mopti interpellent la conscience de tous les acteurs. Ce pas en avant est-il synonyme de la fin des violences dans cette zone ?

Après les différents massacres qui ont particulièrement endeuillé la région de Mopti, les différentes milices qui y sont actives se mobilisent pour éviter de nouvelles tragédies. Deux groupes d’autodéfense peul et dogon, le MSA et Dana Ambassagou, convergent pour le retour de la paix dans la région. C’est dans ce cadre que les responsables de ces mouvements ont signé le 1er juillet un communiqué conjoint, qui est un préliminaire à la signature d’un accord de cessez-le feu. « Ce n’est pas un cessez-le-feu qu’on a signé, c’est juste que l’on va s’abstenir d’agir pour aller vers la signature d’un accord. Pour le moment, nous n’en sommes pas à l’accord lui-même », précise Marcellin Guengueré, porte-parole de Dana Ambassagou. La rencontre a été l’occasion d’amorcer les bases d’une accalmie dans cette partie en crise humanitaire. « Nous avons dit que désormais il faut que chacun, de son côté, reste dans son coin. Que personne ne se déplace pour attaquer. Toute paix commence par cela. S’il n’y a pas d’attaques, il n’y aura pas de ripostes et le calme reviendra », souligne le porte-parole, ajoutant « il faut d’abord faire taire les armes et ensuite négocier sur les conditions qu’il faut pour aller à la paix ».

Pour l’analyste politique Boubacar Bocoum,  ce communiqué conjoint ne signifie pas forcément la fin des hostilités, « parce que ces deux mouvements ne contrôlent pas toute la zone et ne sont pas suffisamment structurés ». Il ajoute aussi que « derrière ces attaques il y a du banditisme organisé. Il y a des gens qui étaient dans la logique de l’autodéfense et en même temps d’autres qui profitent de la situation d’insécurité et de l’absence de l’État pour créer le désordre », estime-t-il.

Cette entente est intervenue deux jours avant le déplacement pour cinq jours du Premier ministre, Dr Boubou Cissé, dans la région. Il y a annoncé le redéploiement  prochain de 3 600 hommes supplémentaires pour sécuriser les populations. Cette visite du chef du gouvernement, accompagné de plusieurs de ses membres, est perçue comme une « avancée ».

Oumar Aldiana : « Avec Sobame, nous avons atteint un nouveau seuil »

Après deux semaines de captivité, Oumar Aldiana a été libéré début juin par ses ravisseurs. Membre actif de la communauté peul, adhérent du MNLA et ancien chef d’un éphémère mouvement armé, Aldiana se présente comme un « acteur majeur » du Centre. Dans cet entretien, il revient sur sa captivité, la situation dans le centre et la possibilité de négocier avec les djihadistes.

Vous avez été enlevé par des hommes armés dans la nuit du 19 au 20 mai, avant d’être libéré deux semaines plus tard. Qui étaient vos ravisseurs ?

C’étaient des individus qui sont venus à motos et qui parlaient peul.

Pourquoi avez-vous été ciblé ?

Je crois que c’était une erreur. Ils sont venus vers une heure du matin. J’étais couché avec famille. J’ai entendu une kalachnikov engager une balle. J’ai éloigné mon épouse de moi. Directement j’ai pensé que c’était des personnes qui venaient pour me tuer. Ils m’ont touché afin que je me réveille, car je faisais semblant de dormir. Celui qui essayait de me réveiller m’a dit de ne pas avoir peur, qu’ils souhaitaient simplement me poser des questions. Je me suis donc levé, je les ai suivis et une fois devant la porte ils m’ont demandé si je savais qui m’arrêtait. J’ai rétorqué que non et ils m’ont dit qu’ils étaient d’Al Qaeda. Nous avons pris la route et traversé un petit fleuve, jusqu’à arriver dans une forêt. Une fois là-bas, ils m’ont bandé les yeux et ligoté. Nous avons été dans trois localités. Dans la troisième, j’ai été présenté à un homme qui m’a posé la question de savoir si j’avais connaissance du motif de mon arrestation. J’ai dit non. Il m’a demandé si je connaissais une certaine personne, j’ai répondu « oui, de vue je le connais ». « Quel lien avez-vous ? » a-t-il rebondi. « Nous nous rencontrons chez certains doyens peuls à Bamako. La dernière fois, je l’ai vu au lancement du DDR de Mopti ». « Il a été arrêté avec son accompagnant » m’a-t-il coupé. « Lors de son interrogatoire, il a parlé de toi concernant le DDR ». Il a ajouté qu’ils allaient me donner l’audio afin que je puisse écouter moi-même. Ils m’ont assuré qu’ils n’allaient ni me torturer, ni me faire mal d’une quelconque manière. Toutefois, mon interlocuteur a précisé qu’aucune intervention ne saurait me libérer et qu’il ne me fallait que dire la vérité. Ils m’ont ensuite transféré ailleurs. Au fur et à mesure que les jours passaient, mes conditions de captivité s’amélioraient. Ils ont même fini par me donner une couverture, seule la nourriture ne me plaisait pas. Au bout de ma deuxième semaine de captivité, l’un de leurs agents de liaison est venu me voir. Il m’a fait savoir que le motif qui m’avait été donné comme ayant conduit à mon arrestation n’était qu’un prétexte. « C’était autre chose ». Ils ont fait des vérifications et se sont rendu compte qu’ils s’étaient trompés et qu’en aucun cas je ne m’étais mêlé de leurs activités. Mes liens m’ont été enlevés. J’ai essayé de savoir quel était réellement le motif de mon arrestation mais je n’ai pas eu gain de cause. J’ai été escorté vers un village voisin. Je voulais qu’ils m’emmènent ailleurs, mais les ordres reçus ne le permettaient pas. Ils m’ont remis 20 000 francs CFA pour le transport. J’ai donc pris la route pour arriver chez moi le lendemain.

Des négociations entre votre famille et les ravisseurs auraient-elles abouti à cette libération ?

Je ne pense pas que les négociations de la famille puissent changer quoi que ce soit avec ces gens. La seule chance que j’ai eu, c’est que je n’avais rien fait. Lors de mon arrestation, l’un de mes frères a assisté la scène. Ma femme ne dormait pas non plus. Mes frères ont appelé les médias, envoyé des messages dans différents groupes WhatsApp. Il n’y a pas eu de négociation, aucune rançon, rien de tout cela.

En 2016, vous avez lancé un mouvement politico-militaire pour la sauvegarde de l’identité peule, avant de déposer les armes la même année. Au regard de la situation actuelle, le regrettez-vous?

Non, je ne le regrette pas. Je n’ai jamais été sur le plateau dogon. Je n’ai jamais eu de problème avec les Dogons, ce sont mes frères. Depuis que le conflit intercommunautaire a débuté, je n’ai jamais rien commenté. Je suis le fils d’un chef de canton qui regroupe plusieurs communautés. Je ne peux pas prendre position pour une d’entre elles. Je n’ai jamais tiré sur un Dogon. L’État doit savoir qu’entre nous, Peuls et Dogons, il n’y a aucun problème. Je veux même organiser une rencontre intercommunautaire à l’intérieur du Macina, pour mettre tout le monde ensemble.

Comment en est-on arrivé à une situation aussi explosive dans le centre ?

L’État a fait de son mieux, mais il a été incomplet. L’État reçoit de nombreuses informations mais il n’arrive pas à les trier. Il invite les maires, les élus locaux et beaucoup d’autres acteurs. Il y a eu plus de 1 000 rencontres. Si je t’appelle pour résoudre un problème dans ta localité et que tu n’y arrives pas, je te mets de côté et je chemine avec un autre acteur, plus actif. Mais non, l’État ne change pas l’équipe qui échoue. C’est cela le problème. Un adage peul nous apprend « au lieu de donner à celui supplie celui qui te frappe, donne directement à ton tortionnaire, il arrêtera ».  C’est ce que l’État fait, donner à celui qui supplie. Il y a certains grands acteurs dans le centre auxquels aucun groupe n’oserait toucher et qui bénéficient de crédit, mais ils disent que s’ils ne sont pas mandatés par l’État ils ne bougeront pas. Je connais tous les acteurs qui œuvrent sur le terrain. Quand la zone a été désertée, j’y étais encore. Les populations du centre ont été laissées à l’abandon. Je l’ai dit à l’Assemblée nationale : les méthodes des djihadistes plaisent plus aux populations que celles de l’armée. Ils viennent pour prêcher, en disant que c’est ce que le Prophète a dit, et cela va droit au cœur des populations, puisqu’elles sont musulmanes. Quand l’armée vient dans la zone, c’est pour les impôts, c’est pour torturer, c’est pour tuer. Le pire pour un peul c’est l’humiliation. Lors de certaines rencontres, l’État procède même à des arrestations dans la salle. Et cela lui fait perdre du crédit. Il y a également un manque d’honnêteté de la part de beaucoup. De fait, lorsque certains viennent à ces rencontres et que des questions leur sont posées, ils rechignent à répondre, car après ils doivent retourner chez eux. Ce n’est pas dans une salle avec des officiers et des hommes en armes qui les gens auront le cœur de parler. La MINUSMA est dans le Centre. Lors d’une rencontre avec Annadif, j’ai eu l’occasion de lui dire que le Peul était très méfiant. Il ne parle pas à un inconnu, il ne fait pas confiance à des inconnus. Il n’est donc pas crédible de mandater des Congolais ou d’autres pour parler avec cette communauté, mieux vaut avoir des acteurs venant de la zone. Et le centre ce n’est que pas que Mopti ville, les rencontres ne devraient pas s’y tenir.

International Crisis Group préconise de dialoguer avec les djihadistes. Estimez-vous que la solution passe par ce dialogue ?

Oui. Un adage peul dit « quand tu ne peux pas, tu encaisses ». Ils sont nombreux, lourdement armés, très bien équipés, et, c’est le plus important, déterminés. Ils ont aussi une apparence trompeuse. Ils portent la même tenue que les civils. En aucun cas je ne vois pas comment l’armée malienne, qui est une armée composée de toutes les communautés, peut mener des assauts dans le Macina si ce n’est pour tuer des civils. Puisque c’est comme cela, mieux vaut négocier. Et le faire avec prudence, intelligemment et lentement. Il faut savoir qui épauler. Je soutiens à 100% la négociation avec eux. Si l’Occident, la France ou tout autre pays, nous dit de ne pas négocier, je comprends sa position. Et je pense qu’aucune négociation n’a eu lieu pour leurs otages. Ils ont été tranquillement réacheminés chez eux. Pour le Mali, il est bon de négocier. Il a déjà un point en commun avec ces gens : ils n’ont jamais voulu la division de ce pays. La Charia, c’est le mot arabe qui renvoie à la justice. Qui dit justice dit clarification. Si tu veux la clarification et moi aussi, pourquoi un conflit ? L’État doit s’engager en toute dignité à parler avec ses fils en tête-à-tête. Sans la médiation de l’Algérie, de la Guinée ou du Burkina. À continuer ainsi, la situation risque de lui échapper.

N’est-ce pas déjà le cas ?

Après ce qui s’est passé le 10 juin, nous avons atteint un nouveau seuil. Les Peuls disent que Dana Ambassagou a été épaulé, financé, formé par l’État pour les massacrer. Le même discours est repris par Dana Ambassagou. L’État, c’est qui alors ? Sur quel pied danse-t-il ? Que gagnerait l’État à faire massacrer ses fils ? Ça n’a pas de sens.

Comment dialoguer quand les positions sont aussi tranchées ?

C’est une question complexe. Les terroristes ne peuvent pas imposer à tout un État ce qu’ils veulent, mais l’État non plus ne pas leur imposer toutes ses conditions. Ils définissent la Charia comme étant la justice. Dans la Constitution, il peut y avoir le respect de la justice. Pas la Charia, mais le respect de la justice.

Pendant l’occupation du nord, ce n’était pas vraiment cela leur conception de la Charia…

Il est bon d’essayer de privilégier le dialogue. Ceux que je connais parmi eux ne coupent pas les mains et ne tabassent pas non plus. Si ce n’est durant ma captivité, je n’ai jamais été dans leurs bases. Je ne pense qu’ils soient à ce niveau. Négocier avec eux va soulager le pays

Talataye : Vivre dans la peur

Depuis une dizaine de jours, la commune rurale de Talataye, une localité isolée située dans le cercle d’Ansongo, est en proie à de vives tensions. Terrorisme ou conflit interethnique, enjeu sécuritaire et jeux d’intérêts entre groupe armés, ont installé un climat délétère dans cette commune, restée longtemps dans le giron de la CMA et qui vit depuis des années comme repliées sur elle-même.

En ville, quand ils sortent, les gens ne s’attardent plus, le marché de Talataye d’habitude très fréquenté qui attire les samedi, forains, éleveurs et commerçants des alentours, comme du Niger et de l’Algérie a désempli, la peur et l’incertitude ont gagné la population depuis l’attaque par des hommes armés non-identifiés, le 2 février dernier, du village voisin d’Inwelane, qui a fait 4 victimes, dont l’imam de la mosquée pris en otage puis égorgé par les assaillants. La présence d’un important contingent du Mouvement pour le Salut de l’Azawad ( MSA ) épaulé par le GATIA ( Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés ), qui ont pris en chasse ces hommes armés qualifiés de djihadistes, au lieu d’amener la sécurité et l’apaisement semble avoir exacerbé les tensions. « Le MSA, après avoir pourchassé les présumés djihadistes, est revenu en armes à Talataye quatre jours plus tard. Ils nous ont dit que ceux qui ont attaqué Inwelane étaient des djihadistes et qu’ils avaient été guidés par des gens de Talataye. Ils cherchaient 5 personnes, mais ils ne les ont pas trouvées, car la plupart des hommes apeurés ont quitté le village ne laissant que les femmes et les enfants. C’est là que le harcèlement, les arrestations et les violences ont commencé et ont duré 3 jours », confie amèrement ce commerçant, affecté psychologiquement et qui songe depuis ces événements à quitter la commune. Pour le MSA, dans cette localité où l’on tient à la mosquée des prêches rigoristes, où on contraint les femmes à ne pas se rendre au marché et à se vêtir convenablement, la proximité de certains habitants avec les djihadistes ne semblait faire aucun doute.

Pourtant, dans la commune, bien que l’on ne sache pas réellement qui sont les assaillants, la thèse d’une attaque commise par des éléments djihadistes ne convainc pas vraiment. Les regards se tournent plutôt vers Inwelane où quelques semaines auparavant un éleveur peul a été assassiné et son bétail volé par des hommes armés du village, un état de fait loin d’être rare dans la zone.

Djihadistes ou conflit interethnique ?

« Les gens d’Inwelane et de Talataye appartiennent à la même communauté, les Daoussahak. La majorité des combattants du MSA viennent du village d’Inwelane et ils sont tous armés là-bas. Les gens de Talataye ont désapprouvé l’assassinat de ce Peul, ils en ont même appelé à la justice pour dire qu’ils ne veulent pas de ça chez eux, qu’ils ne veulent pas de problème avec d’autres communautés, une position qui n’a pas vraiment été appréciée à Inwellane. Je pense que cette attaque était surtout un règlement de compte. Si le MSA préfère dire que ce sont des terroristes, c’est peut-être qu’en disant cela ils pensent pouvoir obtenir un soutien du gouvernement ou de la communauté internationale», affirme cet habitant de la commune sous anonymat.

Un avis partagé par Salah Ag Ahmed, le maire de Talataye : « Je ne peux pas dire que ceux qui ont attaqué Inwelane sont des terroristes. Mais ils étaient majoritairement composés de Peuls et malheureusement les gens, dans l’ignorance, considèrent que tous les Peuls sont avec les terroristes. Quand les gens ont appris qu’un Peul avait été assassiné et volé, ils ont tout de suite su qu’il y aurait une réaction et ça n’a pas tardé », explique-t-il.

En dehors de cette attaque qui semble être à forte connotation ethnique, un autre enjeu, en forme de bras de fer, oppose la population de Talataye au MSA : la sécurisation de la commune, dans laquelle le mouvement armé aimerait implanter un poste de sécurité.

Sécurité et jeux d’intérêts

À Talataye, on voit d’un très mauvais œil l’installation d’une force armée dans le village, qui pourrait remettre en question la paix relative qui règne dans la commune. « La population de Talataye était en parfaite entente avec tous ses voisins, l’arrivée d’un groupe armé va créer plus de problèmes. S’il y a des attaques, la population dans sa grande majorité préfère que ce soit résolu d’une autre manière que par la force, parce qu’avec la force des représailles s’ensuivront. », soutient le maire de la commune. « Je n’ai aucune confiance dans les groupes armés, car ils sont comme les terroristes, ils ne suivent aucune loi, ils font ce qu’ils veulent », assène cet autre habitant.

Reste que la commune de Talataye demeure une zone convoitée par les groupes armés car elle est en quelque sorte une plaque tournante entre l’Algérie et le Niger. Le marché y est très important d’un point de vue économique et ces retombées conséquentes pourraient permettre à ces groupes de financer certaines de leurs activités. « C’est une zone qui a longtemps échappé au contrôle des mouvements armés qui sont vers Ménaka, le GATIA et le MSA , ça devient même un défi pour eux de la contrôler », explique Salah Ag Ahmed

« Moussa Ag Acharatoumane, le Général Gamou, Alghabass Ag Intalla, ils sont tous venus à Talataye, ils ont fait des réunions avec les responsables de la localité. ils veulent avoir leur part dans la gestion de la commune, car c’est une zone importante. Je pense que la population préférerait être sécurisée par le HCUA ( Haut conseil pour l’unité de l’Azawad ) puisque le maire est de ce mouvement. Il habite à Kidal et vient très rarement ici. Il doit certainement y avoir une rivalité entre la CMA ( Coordination des mouvements de l’Azawad ) et le MSA pour contrôler la zone », ajoute cet élu d’un village voisin.

À Talataye, un des villages où le drapeau du MNLA ( Mouvement national de libération de l’Azawad ) a flotté pour le première fois avant même l’éclatement de la rébellion, cette question de la sécurisation de la commune a pour le moment engendré un statu quo. Le MSA est parti avec armes et bagages, en début de semaine, en direction d’Indelimane, mais la population sait déjà qu’ils reviendront. La gestion de cette petite localité du cercle d’Ansongo reste un enjeu pour ces groupes armés qui ne semblent considérer la population que comme un faire-valoir à sécuriser, posant par la même des questions qui pour le moment restent sans réponse : peut-on protéger une population contre son gré ? et qui protégera cette population de ses protecteurs ?

Musulmans et Chrétiens : Maintenir le dialogue

Au Mali la coexistence entre différentes croyances est garantie par la Constitution. Et, dans la pratique, elle se manifeste à différents niveaux. En famille, au travail ou à l’école, Chrétiens et Musulmans cohabitent depuis toujours. Un équilibre qui ne saurait être remis en cause par des actes marginaux, selon plusieurs spécialistes.

« Les attaques contre les églises, partout dans le monde et ici au Mali, sont des actes condamnables. La cohabitation entre Musulmans et Chrétiens est très ancienne », note Youssouf Diagouraga, islamologue. Il ajoute que le Prophète de l’Islam Mohamed (PSL), lorsqu’il est arrivé à Médine, y a trouvé des Chrétiens et des Juifs, à qui il a laissé la liberté d’exercer leur religion, interdisant à ses disciples de leur faire du mal. Ceux qui commettent ces agressions contre les églises et les justifient au nom de l’islam n’agissent pas conformément à cette religion, car « l’islam bannit toute violence à l’égard de qui que ce soit », poursuit M. Diagouraga.

Les fondements mêmes de la société malienne facilitent la cohabitation. Les mariages entre différentes communautés, des valeurs comme le sinankuya et le respect dû à l’autre contribuent à cet équilibre, selon Thierno Hady Thiam, Vice-président du Haut Conseil Islamique du Mali. « Ces attaques font mal au cœur et ne peuvent être attribuées à l’Islam, qui reconnaît d’autres religions dans plusieurs versets ».

Pour ne pas remettre en cause une coexistence séculaire, M. Thiam préconise une anticipation. Il ne faut pas attendre que les problèmes surgissent pour essayer de les résoudre. Tous les acteurs ont un rôle à jouer. Il revient aux religieux « d’enseigner que la cohabitation fait partie de la religion », et à l’Etat d’organiser ce cadre et de « faciliter le rapprochement entre les religions ». Les périodes de tension n’étant pas les plus favorables au dialogue, il faut maintenir les ponts et se retrouver autour de l’essentiel. Nous « avons le devoir de défendre et de protéger notre pays », conclut le leader religieux.

Curé de la Cathédrale de Bamako, l’Abbé Timothée Diallo avoue n’avoir aucun problème avec les Musulmans, avec lesquels il continue à vivre en harmonie. Il invite cependant « à reprendre l’école en main », car, sans éducation, on ne peut s’en sortir.

Rejeter les intégrismes de tout bord et respecter la différence est une manière de maintenir cette harmonie. « J’aurais toujours un ami Patrice et Patrice aura toujours un ami Youssouf. Nous continuerons à être ensemble dans les facs, dans les lieux publics. Le Mali est un tout qui appartient à tout le monde », conclut M. Diagouraga.

 

Commune de Dioungani : Les Chrétiens pris pour cible

Il est 14h30 quand, dans une cacophonie motorisée, 12 hommes armés convergent vers l’église catholique du village de Douna, chef-lieu de la commune de Dioungani, dans le cercle de Koro. Aux cris d’Allah Akbar, ils s’élancent en direction du bâtiment religieux. Les villageois comprennent vite ce qui va se passer et rentrent se cloîtrer chez eux. Nous sommes le vendredi 6 octobre, une date que la population et la communauté chrétienne de Douna n’oublieront pas. Deux longues heures d’une séquence violente et choquante, mais qui dans la commune, ces 8 derniers mois, est loin d’être inédite.

Une poignée d’hommes a pris position sur les principaux axes menant à l’église, tandis que d’autres escaladent le bâtiment et entreprennent méthodiquement de casser la croix en béton équipée d’un haut-parleur qui trône sur le toit. Elle finit par dégringoler et se briser au sol, accompagnée de clameurs de satisfaction. « Une femme est sortie et a essayé de leur faire entendre raison. Ils l’ont battue ! Malgré les coups, elle leur a dit qu’elle préférait être tuée que de ne rien dire. L’un des hommes a pris son coupe-coupe et lui a tailladé le bras », se remémore un habitant de Douna qui tient à garder l’anonymat. Une fois le lieu de culte décapité de son symbole, les hommes pénètrent dans l’église et rassemblent tout ce qu’ils peuvent : meubles, crucifix, portrait de la Vierge, effigie de Jésus, rideaux, nappe d’autel. Ils jettent le tout sur le sol en un grand tas. « Avec de l’essence, ils y ont mis le feu. Tout a flambé. Ils ont pris leur temps », témoigne un autre villageois. Les flammes ont déjà bien noirci les murs de l’église et calciné ce qui s’y trouvait, quand les profanateurs quittent le village en trombe, criant à la population abasourdie qu’il est interdit désormais d’y prier.

Malgré la destruction de nombreuses antennes-relais dans la commune, où plusieurs villages sont coupés du monde, la nouvelle se propage comme une traînée de poudre. 24 h plus tard, un contingent de l’armée malienne se rend sur place, inspecte l’église, fait une ronde, puis s’en retourne à sa base de Koro. À Douna, l’attaque a surpris, comme dans la paroisse de Barapeli, dont le petit village dépend. L’effroi a saisi les communautés qui redoutent que les djihadistes ne mettent en péril la présence chrétienne dans la commune.

Actes antichrétiens en augmentation « C’est la cinquième communauté visée », souligne un élu de la commune, « les djihadistes veulent imposer leur loi. Ils brûlent les églises et veulent chasser les Chrétiens ». « Depuis quelques mois, ils interdisent toutes les activités religieuses chrétiennes. Si ce n’est pas respecté, ils menacent de revenir pour sévir plus fort », confirme l’Abbé Edmond Dembélé, Secrétaire général de la Conférence épiscopale du Mali.

C’est le 15 avril dernier, lors de la nuit de Pâques, qu’une première attaque contre une église chrétienne est signalée à Didia, un village de la commune de Dioungani. Là-bas, les djihadistes ont intimé aux Chrétiens du village de ne plus sonner la cloche et de ne plus se rassembler. Le 15 août, ils s’en prennent au village de Djanwelli, dans la même commune, avec un procédé particulier. « Ils ont rassemblé Chrétiens et Musulmans sur la place publique et ont prêché le coran durant 3 heures, avant de leur ordonner de ne plus jouer du tam-tam et de ne plus chanter pendant la prière », raconte un commerçant du cercle de Koro. Le 26 août, c’est l’église du village de Bodwall qui est attaquée. « Ils ont voulu casser la cloche de la petite église, mais ils n’ont pas réussi. Alors, ils sont allés au hangar à palabre des Dogons et leur ont dit de dire aux Chrétiens de détruire leur église », poursuit le commerçant. Le 19 septembre dernier, ils défoncent les portes de l’église de Dobara, toujours dans la commune de Dioungani, rassemblent à l’extérieur tout ce qu’ils peuvent y trouver et y mettent le feu, avant de menacer de mort tous ceux qui dorénavant viendraient y prier.

Chasser les Chrétiens Dans l’importante paroisse chrétienne de Barapeli, qui s’étend sur 8 150 km², forte de 45 églises et de plus de 130 communautés dynamiques qui n’hésitent pas à bousculer les prêtres pour l’apostolat (propagation de la foi), on ne comprend pas pourquoi ces attaques visent seulement la commune de Dioungani. « La cohabitation entre Chrétiens et Musulmans était bonne. Dans les différentes fêtes religieuses, ils se rendaient mutuellement visite. Depuis l’arrivée des djihadistes, les choses ont changé. Certains, à l’est de Barapeli, pensent qu’il y a plus d’églises que de mosquées », relève un habitant. Une affirmation plausible pour ce prélat de la paroisse : « il est vrai que ces hommes armés, quand ils sont venus à Douna, ont dit à certains musulmans, « ils ont des églises partout et vous vous n’avez même pas assez de mosquées », et ils ont ordonné à ces gens d’en construire. En se basant là-dessus, on peut se dire que, peut-être, le dynamisme de nos communautés fait qu’ils pourraient se sentir un peu menacés », avance-t-il.

Une autre raison est évoquée par cet employé d’une ONG locale, qui rappelle que depuis des mois les djihadistes, au nom de l’Islam, ont interdit le tabac ainsi que les boissons alcoolisées. « À Douna, il y a deux églises. Ils ont seulement attaqué celle des Catholiques, pas celle des Protestants. L’église catholique a été attaquée parce que la consommation d’alcool n’y est pas prohibée alors que les Protestants l’interdisent. Dans le village, il y avait un maquis à côté de l’église attaquée. Après l’avoir saccagée, les djihadistes sont partis trouvés des consommateurs là-bas. Il y en avait deux, un Dogon et un Peul. Ils les ont frappé, ont bandé les yeux du Peul et sont partis avec. On a plus de nouvelles depuis », ajoute-t-il.

Pour l’Abbé Edmond Dembélé, la consommation d’alcool reste une explication négligeable. « Ce n’est pas seulement du côté des Catholiques, les adeptes de la religion traditionnelle, partout sur le territoire du Mali, sont aussi des consommateurs d’alcool. Je pense qu’il y a d’autres explications un peu moins sommaires ».

Dans les villages attaqués de la commune de Dioungani, désormais les Chrétiens font profil bas. Ils ne vont plus prier à l’église, conscients que ces lieux de culte sont devenus une cible privilégiée des djihadistes. « Nous leur avons dit de ne pas aller y prier pour leur sécurité et parce qu’il y a eu une forme de profanation de ces lieux de culte. Pour nous Chrétiens, ce qu’il s’est passé, ce sont des blasphèmes contre Dieu, Sa parole et Son église. Les fidèles sont inquiets. On est passé à un cran supérieur. Ils ne savent pas si demain ils se lèveront sur leur pied. Mais ils ne souhaitent pas partir, parce que le Mali est un pays laïc, que c’est leur village et qu’ils espèrent que des solutions seront trouvées et que le calme et la cohabitation pacifique qui régnait jusqu’ici reviennent », explique un curé.

À Douna, les blessures du 6 octobre mettront beaucoup de temps à se refermer. Pour les Chrétiens les plus âgés du village, qui ont vu la communauté se constituer, l’église se bâtir, ces images indicibles, ne pourront jamais être effacées.

Nord et Centre du Mali : guerre contre l’éducation ?

Pour la nouvelle année scolaire, il y aura une augmentation de 70 % du nombre d’écoles fermées par rapport à l’année scolaire 2015 – 2016. Une situation due principalement aux menaces des groupes armés et au climat d’insécurité, mais aussi à une certaine méfiance envers le système scolaire national.

Leurs enseignants ont fui sans jamais revenir. Leurs écoles ont été saccagées, incendiées, par des individus armés. Dans le Nord et le Centre du Mali, les écoles fermées sont légion et créent une génération sacrifiée de garçons et de filles déscolarisés. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), l’année 2016 – 2017 s’est terminée avec 500 écoles fermées, soit 31 % de l’ensemble du Centre et du Nord du pays, et 150 000 enfants déscolarisés. La région de Mopti, avec 248 écoles fermées, est la plus touchée. « Les djihadistes ordonnent de fermer toutes les écoles non coraniques. Ils sont hostiles à l’école de la République. Partout où ils passent, ils menacent les enseignants, qui ont tous déserté. Pour eux l’école fondamentale vient du Blanc, et ils n’aiment pas ça », explique un habitant de Youwarou. Dans les territoires enclavés de la région de Mopti, où l’État et l’armée ne sont présents que dans les grandes villes et où l’islam est fortement enraciné, on rencontre aussi une hostilité naturelle envers l’école de la république, un état de fait antérieur à la présence des djihadistes. « Chez nous, c’est une question de culture. Auparavant, il y avait même des parents qui allaient jusqu’à payer des directeurs ou des enseignants pour que leurs enfants ne soient pas recrutés. Beaucoup profitent de la situation créée par les djihadistes car ils considèrent qu’un enfant qui va à l’école française deviendra difficilement un bon musulman », souligne un enseignant du cercle de Tenenkou, où 91 établissements scolaires sont fermés depuis l’année dernière.

Cursus franco-arabe, une solution ?  « Les écoles publiques sont mal vues parce que c’est le français qu’on y enseigne et que la population, comme les djihadistes, préfère les écoles coraniques », confirme Sékou Bakaye Traoré, Président du Conseil de cercle de Youwarou. Pour lui, il y a une solution qui pourrait favoriser qui pourrait favoriser la réouverture des écoles dans la région : la mise en place d’un système où l’on pourrait conjuguer apprentissage de l’arabe et du Coran et cursus conventionnel. « Je pense que l’État doit entreprendre certaines réformes. Il faut introduire l’arabe dans nos écoles dès le primaire. Les écoles franco-arabes, la population a toujours souhaité ça. Enseigner le français ici encourage l’islamisme. Je pense que si on fait ça, il y aura des effets importants. Ce sont des décisions politiques à prendre, mais je suis convaincu que, pour rouvrir les écoles, il faut modifier un peu les programmes », affirme-t-il.

 

Burkina Faso : de nouvelles mesures pour lutter contre le djihadisme

Face à la recrudescence des attaques terroristes dans le nord du pays, les autorités burkinabés ont pris de nouvelles mesures pour lutter efficacement contre le terrorisme dans la zone.

Les autorités burkinabés ont pris de nouvelles mesures sécuritaires pour lutter contre les attaques terroristes entre la frontière du Mali au nord et la ligne délimitée par les localités burkinabés de Baraboulé, Nassoumbou, Koudougou, Déou, Oursi et Markoye. En proie à une vague d’attaque terroriste, le nord du Burkina Faso est désormais une zone à risque pour les populations qui y vivent. Pour faire face au problème, un arrêté du gouverneur de la région pour réguler la mobilité des véhicules et particulièrement des motos, considérés comme le moyen de déplacement privilégié des djihadistes, à certaines heures, est désormais en vigueur.

Les véhicules automobiles et motocyclettes sont interdits de circulation de 17 h à 6 h du matin. En d’autres termes, la circulation des véhicules à quatre roues, des motos à deux roues, des tricycles et des vélos, est formellement interdite à la bande frontalière aux heures indiquées et dans les localités concernées. L’information a été diffusée sur les médias locaux et dans différentes langues parlées dans la région.

Cet arrêté qui se présente comme une lueur d’espoir pour les populations est une promesse du ministre burkinabè de la Sécurité en visite dans la province du Soum, lundi 6 mars, où un enseignant avait été assassiné vendredi 3 mars par des hommes de Malam Dicko, chef du groupe terroriste Ansarul Islam qui sévit dans la zone. Les djihadistes exigeant des enseignants qu’ils cessent l’enseignement en français.

En attendant de voir les résultats et les effets de ces nouvelles mesures sécuritaires, le Burkina Faso est désormais engagé dans la lutte contre le terrorisme aux côtés du Mali. Une opération de ratissage dénommé « Tomonon » est actuellement menée par l’armée malienne, mauritanienne et la force Barkhane dans la forêt de Wagadu. Son objectif : débusquer les djihadistes jusque dans leur dernier retranchement.

 

Le trésor de Tombouctou, l’histoire d’un sauvetage

En avril 2012, la nuit s’abat sur le solaire Tombouctou : venus du nord du Mali et du désert, les djihadistes d’Ansar Dine envahissent la ville et font régner la terreur. Non content d’imposer (surtout aux femmes) une dictature se réclamant de la charia et du rejet du mode de vie occidental, le groupe armé s’attaque aussi à la culture et à l’histoire de la cité. Ancien grand centre spirituel arabo-africain qui connut son apogée aux XVe et XVIe siècles, et carrefour commercial au croisement de nombreuses cultures, Tombouctou incarne ce que les miliciens islamistes ne supportent pas : le brassage, le savoir et la tolérance. Détruisant de nombreux mausolées, ils menacent surtout les bibliothèques et leurs inestimables trésors, des manuscrits séculaires, porteurs de la mémoire du pays.

Anti-terrorisme : la difficile équation de Barkhane

Prises entre le marteau de l’opération Barkhane et l’épée des djihadistes, les populations des régions du nord, en particulier celles du cercle d’Abeïbara, ne savent plus à quel saint se vouer.

Lancée le 1er août 2014, Barkhane est une opération menée au Sahel par l’armée française pour lutter contre les groupes armés djihadistes. Elle a pris la suite de l’opération Serval qui a stoppé l’avancée des djihadistes à Kona en janvier 2013. Si la légitimité de ces opérations n’est pas à remettre en cause, la question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment en minimiser l’impact sur la vie des populations riveraines des zones d’intervention, surtout en ce qui concerne les atteintes aux libertés de mouvement des personnes, souvent des nomades. La résolution de cette équation semble ne pas être chose aisée pour le commandement de Barkhane, si l’on en croit les témoignages qui se multiplient dans les régions concernées. La recrudescence des opérations dans les localités de Tessalit et d’Abeïbara, dans la région de Kidal, entraine des flux massifs de populations vers l’Algérie. « 40 à 50 familles, soit environ 500 personnes, sont déjà en Algérie. Ils fuient la violence des opérations qui s’intensifient et semblent de plus en plus être menées à l’aveugle », explique un élu local. « Et pourtant, au début tout marchait bien. Le contact était bien établi entre la force et les habitants, elle donnait des médicaments et aidait beaucoup la population. Depuis quelques temps maintenant, c’est la peur qui règne chez nos populations. Les militaires viennent dans les hameaux prendre les gens et les amènent on se sait où pour les libérer après », ajoute-t-il.

Bavure ? Ce qui a accentué la peur au sein de la population, c’est la mort dans des circonstances non encore éclaircies du petit Issouf Ag Mohamed. Ce berger rassemblait les animaux de la famille le 30 novembre dernier à Tibagatene, dans le cercle d’Abeïbara. « Ce jour-là, deux hélicoptères sont passés au-dessus du campement. Bientôt, ils entendirent des tirs. Certains disent qu’il s’agissait de roquettes, d’autres de mitrailleuses. Puis le calme est revenu. Vers 15 heures, un seul hélicoptère était de retour sur les lieux. De loin, les nomades crurent voir des soldats descendre, s’activer quelques minutes au sol, puis repartir », raconte une source. C’est le lendemain, constatant son absence, que les habitants retrouvèrent le corps sans vie du petit garçon dont la mort est, selon eux, imputable à une bavure des forces françaises. Contacté à plusieurs reprises, le commandement de la force n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet. « C’est vrai qu’il y a un terrorisme résiduel et les nomades et bergers sont des suspects potentiels. Ils sont obligés de faire la politique du ni vu ni connu pour sauver leur peau. De là à faire d’eux des terroristes, c’est démesuré », conclut un habitant.

 

Centre du Mali : un notable enlevé à Boni et le poste de sécurité de San attaqué

Les régions de Mopti et de Ségou ont de nouveau été le théâtre d’attaques de groupes armés vendredi 2 septembre. Profitant de l’absence des FAMA, une trentaine d’hommes qui semble appartenir à un mouvement à caractère ethnique peul, a occupé la ville de Boni pendant trois heures. « Ils ont fait leur entrée dans la ville à 15 heures avant de se retirer vers 18 heures. Pour l’instant, on ne déplore aucune victime, mais les assaillants ont pris en otage un notable », expliquent nos sources.

Au même moment, le poste de sécurité de la ville de San a été attaqué par un autre groupe. Là également, il y a eu plus de peur que de mal. « Il n’y avait aucun gendarme sur place », affirment une source sécuritaire. La localité a d’ailleurs déjà connu une attaque armée qui avait ciblée une position des forces armées maliennes. Selon certains observateurs, il s’agit de mouvements qui veulent se faire entendre afin d’être intégrés dans le processus de DDR. D’autres soutiennent que ce sont des groupes terroristes à la solde d’Iyad Ag Ghaly, qui cherchent à semer le désordre au centre du pays. « Ils posent des actes et les attribuent aux Peuls », indique-t-on.

Djihad au Mali : Ils sont toujours là !

Des attaques contre les installations de la Minusma à  Kidal ou Gao à  l’attentat de La Terrasse à  Bamako, la marque des islamistes est bel et bien de retour au Mali. Pour s’en convaincre, il suffit d’analyser les récents évènements sur le plan sécuritaire. 15 actes terroristes en un an Le samedi 28 Mars, une information fait le tour des médias. Des combats ont opposés des hommes du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) à  des membres du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Ces affrontements ont duré plusieurs heures et se sont déroulés à  Inazol, localité située au sud-ouest de Ménaka, selon une source de la CMA qui « déplore la mort de cinq combattants » dans ses rangs et affirme que « le MUJAO a subi une lourde perte » sans donner plus de précision. Pour rappel, la CMA regroupe le MNLA, le HCUA, le MAA, et occupe certaines zones au nord du Mali, comme Kidal. Elle n’a pas encore paraphé le projet d’accord de paix proposé par la médiation algérienne le 25 février dernier. Est-ce cette situation de ni paix ni guerre qui favorise le retour des djihadistes ? Tout porte à  le croire, même si, selon les populations et des sources sécuritaires, les membres de ces groupes n’avaient jamais vraiment quitté le nord du Mali. Depuis quelques mois, les revendications d’actes terroristes se suivent et se ressemblent. Elles émanent des engeances tels que AQMI, MUJAO, Al Mourabitoune ou encore Boko Haram… En moins d’une année, entre juin 2014 et aujourd’hui, pas moins d’une quinzaine d’actions terroristes ont été dirigées contre les forces françaises, les casques bleus de l’ONU et les forces maliennes Et récemment, la décapitation en plein marché d’un collaborateur local des troupes françaises dans une localité de la région de Tombouctou, tout comme l’attaque du camion du CICR près de la frontière nigérienne… autant d’actes qui font craindre à  Bamako une dégradation de la situation sécuritaire dans cette partie du pays, voire au-delà . Rébellion et djihadistes se coalisent à  Kidal Le ministre malien de la Justice Mahamadou Diarra l’a bien souligné, lors d’une récente visite en Europe. «Entre les bombes artisanales, les attaques de convois, les attentats sur les marchés et dans les localités, il y a comme un embrasement qui ne dit pas son nom», prévient le ministre pour qui C’’est l’illustration du travail qui reste à  faire pour ramener la paix et la stabilité dans la région. Et de montrer à  nouveau du doigt le MNLA et ses alliés, dont le refus de parapher l’accord d’Alger bloque le processus de normalisation. « Le MNLA, qui se prétendait être un mouvement laà¯que combattant pour l’indépendance, cautionne aujourd’hui la mise en place d’une police islamique qui ampute, exécute et oblige les femmes à  se voiler. Officiellement, Kidal se trouve sous le contrôle de la rébellion MNLA, mais en réalité C’’est Ansar Eddine, le mouvement djihadiste antilaà¯que, qui dirige tout», affirme Mahamadou Diarra. «On a empêché l’armée malienne d’entrer à  Kidal quand il y a eu la libération. Je pense que cette action est à  la base de la poursuite de la rébellion et du retour des mouvements djihadistes et des narcotrafiquants au Mali», déplore Mahamadou Diarra, cité par le journal suisse La Tribune de Genève. «Aujourd’hui, ces groupes disposent d’un armement ultramoderne et sophistiqué dont n’est pas dotée notre armée. Tout cela contribue à  alimenter un banditisme rampant qui prospère grâce au business des prises d’otages et des rançons», ajoute-t-il. Pour faire face à  la menace plus que présente, le Mali a encore besoin de soutien de ses partenaires. «De plus en plus, rébellion et djihadistes se confondent et le niveau de violence est décuplé chaque mois», explique Mahamadou Diarra. «Maintenant, il va falloir déconstruire les idées qu’ont propagées les islamistes», affirme-t-il.

Pour Hollande, l’opération au Mali est une victoire…

Face à  la presse mardi 14 janvier, François Hollande a abordé les questions internationales et africaines. « Les valeurs de la république sont les valeurs de la France au plan international » a expliqué le président français qui est revenu sur les opérations au Mali en Centrafrique qu’il considère comme des réussites. Victoire au Mali Pour le président français, l’opération Serval est une réussite. Elle a permis de booter les djihadistes hors du Mali. « Au Mali, il y a un an presque jour pour jour, je décidais d’une intervention militaire dans le cadre des Nations unies avec les Africains, a rappelé le président français. Le résultat est là . Les jihadistes ont été repoussés, vaincus, le Mali a retrouvé son intégrité territoriale, des élections ont eu lieu, présidentielles, législatives. » En résumé, la France a joué son rôle. « « Oui, il y a des moments o๠il faut saluer les victoires ! C’’en est une. Victoire contre le terrorisme, victoire pour la démocratie, victoire pour le développement, a salué le président français. Je veux rendre hommage à  nos soldats. Mais l’opération va s’achever ! Elle ne comptera que sur 1 600 soldats en février et 1 000 à  la fin du printemps. Voilà  ce qu’est une intervention utile, o๠la France a pu être à  sa place ». Et cette opération n’a pas vocation à  perdurer. D’autant que le retrait progressif se fera. Avec à  terme 1000 soldats français en fin avril.

Gao: manifestation contre le retour de djihadistes

Une centaine de jeunes du 4e quartier de Gao, dans le nord du Mali ont marché dimanche 25 août pour dénoncer le retour des djihadistes à  Gao. Depuis plusieurs jours, la population alerte la police et la gendarmerie pour leur demander d’intercepter ces personnes qui après plusieurs mois de silence refont surface. Il s’agit essentiellement de djihadistes du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest) qui ont semé la terreur dans la ville depuis durant des mois l’an passé et qui avaient trouvé refuge en dehors des frontières maliennes. Joint par RFI, un habitant de Gao déclare : « nous avons constaté le retour de certains qui ont les armes au temps de l’occupation. On les connaissait très bien. C’’était nos voisins, nos compagnons durant des années donc on les connaissait très bien. On a informé les autorités à  plusieurs reprises mais elles ne réagissent pas. Elles se content de prendre de l’argent et de les libérer… Il y a trop d’impunité chez nous, ça nous fatigue. Il faut que la gendarmerie et la police fassent correctement leur travail. » Avertissement aux autorités D’après les organisateurs, « ceux-ci retournent en tenues civiles et se pavanent comme si de rien était. En plus, certains des alliés des Moudjahidines qui étaient arrêtés par les forces de l’ordre, ont été libérés moyennant de l’argent. C’est pourquoi nous avons marché pour dénoncer ces situations ». « Si les autorités régionales ne s’impliquent pas pour arrêter le retour des alliés des islamistes dans la ville, au-delà  d’un délai de trois jours, nous allons nous-mêmes les agresser physiquement » ont-ils ajouté. Il y a quelques jours, le Mujao, né au nord-Mali et auteur d’exactions pendant les mois d’occupation de trois régions, s’est trouvé de nouveaux alliés. Avec les « Signataires par le sang », groupe terroriste de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, il a fusionné pour créer « Al Mourabitoune » c’est-à -dire les Almoravides en français. « Les Signataires par le sang et le Mujao ont décidé de s’unir au sein d’une même Jamaa, dénommée « Al Mourabitoune », dans la perspective de réaliser l’unité des musulmans du Nil à  l’Atlantique », a indiqué la nouvelle organisation dans un communiqué diffusé par l’agence de presse mauritanienne AP.

A Koulikoro, des soldats maliens formés pour combattre les jihadistes

D’abord à  genoux, puis couchés sur le sol, ces soldats commencent par apprendre à  manier des Kalachnikov, sous l’oeil attentif d’instructeurs venus de sept pays membres de la mission de formation de l’Union européenne (EUTM): France, Royaume-Uni, Suède, Finlande, Lituanie, Luxembourg et Irlande. « Nous sommes très motivés pour cette formation qui était nécessaire pour nous. Après, nous irons au Nord combattre les terroristes », affirme le sergent Moussa Maà¯ga de l’armée malienne, parlant des islamistes armés qui ont occupé pendant près de dix mois en 2012 cette région qui représente les deux tiers du Mali. Depuis le 11 janvier, les jihadistes en ont en partie été chassés par une intervention armée franco-africaine, en soutien à  l’armée malienne qui, humiliée par la conquête fulgurante du Nord par les groupes armés début 2012, reste incapable de les combattre seule sans une solide formation. Face au sergent Maà¯ga, le lieutenant-colonel Gérard Veillefosse, de l’armée française, fait partie des 200 premiers formateurs de l’UE. « Le premier objectif est d’assurer la coordination du groupe », assure l’officier français, en notant que ces soldats ont auparavant été formés dans divers pays. « Ca ne peut pas fonctionner, parce qu’ils ne sont pas habitués à  travailler ensemble », affirme-t-il, ajoutant: « Le ciment, c’est la cohésion ». Depuis le début de la formation il y a une semaine, le camp d’instruction militaire de Koulikoro grouille de monde: vendeuses de frites et de viande, maçons achevant la construction de hangars devant servir de salle de cours, agents de nettoyage et militaires s’y côtoient. Au centre du camp d’environ six hectares, un hélicoptère vient d’atterrir près de tentes servant d’hôpital de campagne. « C’est un exercice de transfert de blessés de guerre. Il faut se mettre véritablement dans une situation de guerre. Je n’aime pas le mot +simulation+, nous faisons comme si nous étions sur un terrain de conflit », explique Boubacar Tiné, officier malien. « Fiers d’être Maliens » Non loin de là , deux formateurs finlandais marchent difficilement. Venant d’un pays o๠il faisait -25°C quand ils l’ont quitté, ils ont encore du mal à  supporter les 40°C de Koulikoro. . . Les premiers soldats maliens en formation viennent de tout le pays. Parmi eux, des Arabes et des Touareg, deux communautés minoritaires souvent assimilées aux islamistes par la majorité noire du pays. « C’est vous qui voyez en moi un Touareg. Moi, je suis un militaire malien avant tout. Nous voulons être formés pour défendre notre pays. Nous sommes fiers d’être des Maliens », explique Chérif, sergent touareg. Maniement des armes et discipline de groupe pour les simples soldats, techniques de commandement pour les officiers. Assis dans une salle du premier étage d’un bâtiment du centre d’instruction, ces derniers écoutent avec beaucoup d’attention un homologue français qui leur dit: « Lorsque vous donnez des instructions à  un subordonné, vous reprenez à  haute et intelligible voix, pour qu’il comprenne bien que ce sont des ordres ». L’ambition de la formation européenne est de mettre sur pied une armée nationale qui intègre aussi ce que représente le respect les droits de l’Homme, l’armée malienne actuelle étant régulièrement accusée d’exactions, en particulier contre les Arabes et Touareg. Au total, quatre bataillons d’environ 700 militaires maliens doivent être formés. « Chaque formation va durer dix semaines et se fera en deux phases: une formation militaire générale et, très rapidement, une spécialisation », explique le lieutenant-colonel Philipe de Cussac, porte-parole de l’EUTM. Une spécialisation « très pointue », selon lui, pour mettre sur pied « des forces spéciales », former des tireurs d’élite, des experts en télécommunications, génie, artillerie. Les premiers soldats maliens formés par l’UE seront opérationnels dès le mois de juillet et iront, pour beaucoup d’entre eux, dans le nord du Mali o๠subsistent des poches de résistance islamiste.

Opération Serval : Une guerre sans merci au Nord

Près d’un mois après le déclenchement de l’opération Serval, l’étau se resserre autour des djihadistes. Les frappes françaises continuent pour anéantir la capacité opérationnelle des fous de Dieu. Cette dynamique est boostée maintenant par les Etats-Unis qui ont déjà  commencé à  prêter main-forte aux efforts français. La confirmation de cet appui a été donnée hier par le vice-président américain, Joe Biden en visite en France. «Â Nous sommes tombés d’accord sur la nécessité mettre en place au plus vite une mission internationale africaine au Mali et de la placer aussi rapidement que possible sous l’autorité des Nations unies », déclaré Joe Biden à  l’issue de sa rencontre avec le président français François Hollande. Appui américain En effet sur le terrain, l’appui américain est perceptible. Ainsi selon des sources américaines, l’armée de l’air des USA a effectué, à  la date du 3 février, 30 vols pour soutenir les Français. Ces frappes intensives visent les caches d’armes, les centres d’entrainement… Ces derniers temps, elles visent particulièrement les montagnes de l’Adrar des Iforas de Kidal, seul repaire des djihadistes après leur débâcle dans les autres villes qu’ils occupaient. Et oà¹, selon toute vraisemblance, sont détenus les otages français. Pour François Hollande, la France va continuer sa mission qui consiste, selon lui, à  recouvrer l’intégrité territoriale du Mali avant de passer le relais aux troupes africaines et plus tard à  une mission de la paix. Cette position française traduit la perspective de l’arrivée prochaine du reste des troupes maliennes et africaines pour assurer le contrôle et la sécurité des zones débarrassées des islamistes. Les africains s’y préparent activement comme l’attestent les propos du président ivoirien et président en exercice de la Cédéao, Alassane Dramane Ouattara, selon lesquels toutes troupes africaines doivent être au Mali dans un très bref délai. Il s’agira donc de renforcer les troupes nigérianes, togolaises, nigériennes, tchadiennes, sénégalaises etc. qui évoluent sur le terrain. Au regard de tous ces derniers développements, l’on est en droit de se poser la question de savoir sur l’avenir des islamistes. En tout cas ça sent le roussi !

André Bourgeot:  » L’opération Serval risque de se transformer en guérilla »

SlateAfrique – l’intervention des troupes françaises au Mali est-elle de nature à  rétablir rapidement la paix dans le pays? André Bourgeot – Rapidement? Certes pas! L’intervention militaire française a d’une part stoppé l’avancée des groupes armés djihadistes qui ont tenté de prendre Sévaré, o๠il y a un aéroport international, et d’autre part libéré Diabaly et Konna avec, en réalité, l’appui l’armée malienne. L’objectif est bien de rétablir la paix qui ne sera effective que lors de la reconquête totale de l’intégrité du territoire national: cela demandera du temps d’autant que, pour l’heure, se sont essentiellement les militaires français qui sont en première ligne, avec une armée malienne affaiblie et dont la chaà®ne de commandement demeure floue. SlateAfrique – Est-ce que l’enthousiasme des populations que vous avez observé au Mali, par rapport à  cette intervention, va durer? A.B. – Globalement, les réactions sont favorables, en effet. Les populations du nord libérées du joug et de la terreur djihadiste reprennent vie et expriment leur soulagement. A Bamako, des vendeurs de petits drapeaux tricolores s’activent sur les trottoirs de la capitale et reprennent le commerce informel, tricolore cette fois: les petits drapeaux qui flottent sont même achetés. Pour autant, est-ce que cela va durer? Dans le nord, l’ensemble des populations (Songhai, Peuls, Touaregs, Bozos, Maures et Arabes) manifeste son soulagement et sa joie. Ce qui ne veut pas dire que les groupes armés djihadistes ne disposeront pas, le cas échéant, de relais locaux qui existent déjà . SlateAfrique – Le MNLA a-t-il véritablement une stratégie? A.B. – Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), indépendantiste et laà¯c, connaà®t un sérieux déclin, depuis quelques semaines. Il s’est fait d’abord bouté hors de Gao par le Mujao (Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest), puis de Ménaka toujours par ce même groupe efficace dans le trafic, entre autres, de cocaà¯ne, et plus récemment d’El Khali, dans les environs de Tin Zawaten. Il tente de rebondir en proposant ses services à  l’armée française, arguant du fait suivant: être des combattants aguerris et de bons connaisseurs de la région, tout en précisant qu’il rejette toute collaboration avec l’armée malienne interdite «d’Azawad». Cette dernière appellation relève d’une construction politique des rebelles qui ne renvoie à  aucun fondement géographique et encore moins historique. L’Azawad géographique concerne l’espace situé entre Tombouctou et Arraounae sillonné par les pasteurs nomades maures. Berabich représente une superficie de 380 kilomètres carrés environ. Il souffre d’un important déficit de légitimité sociale, politique et militaire difficile à  remonter… Lire la suite sur Slate Afrique : http://www.slateafrique.com/102239ord-mali-operation-serval-consequences-itv-andre-bourgeot

Hollande et le Mali : quelques voix discordantes à droite et à gauche

« La Constitution dit qu’il peut être organisé un débat sans vote au Parlement dans les prochains jours. Je souhaite qu’il ait lieu rapidement. Nous nous mettrons certainement rapidement d’accord », avec les responsables des deux assemblées reçus lundi soir, a-t-il dit à  la presse en marge d’un déplacement à  Caen. De fait, l’intervention au Mali met tout le monde d’accord, ou presque. L’opposition, en pleine préparation de la manifestation contre le « mariage pour tous », a mis de côté ses griefs ce week-end pour saluer l’engagement des forces françaises, décidé par le président de la République. SOUTIEN A l’UMP ET CENTRE Jean-François Copé a publié un communiqué dans lequel il « apporte son soutien à  la décision prise par le président Hollande d’engager les forces françaises au Mali afin d’entraver l’établissement d’un Etat narcoterroriste ». Le président de l’UMP ajoute, un brin critique : « Il était grand temps d’agir. » Jean-Louis Borloo, le président de l’UDI, s’est joint au chœur : « Je salue l’esprit de responsabilité du président de la République et du premier ministre dans cette situation d’extrême urgence et de danger pour la population malienne et pour les ressortissants français. » Le centriste estime que tous les partis doivent être solidaires : « La décision d’engager les troupes françaises est un acte grave qui nécessite un débat. Même si l’unité nationale ne se décrète pas, le rassemblement des forces politiques qui concourent à  la démocratie est nécessaire dans ces moments-là . » DEUX MESSAGES AU FN Même la présidente du FN Marine Le Pen a appuyé la décision de François Hollande, lundi 14 janvier : « Je la crois légitime », a-t-elle déclaré Marine Le Pen sur RTL. Pas question en revanche de donner un satisfecit global à  la politique étrangère française : « Je pense que le développement des islamistes au Nord-Mali est la conséquence directe de l’action, des choix, des erreurs manifestes, stratégiques, qui ont été faits notamment en Libye et en Syrie. » Jean-Marie Le Pen s’est lui insurgé contre ce déploiement de force : « Nous avons soutenu, avec M. Sarkozy et le soutien du PS, des rebelles djihadistes en Libye, même militairement, considérablement. D’ailleurs, c’est le boomerang : nous retrouvons en face de nous l’armement qu’on a parachuté aux djihadistes de Libye. Idem en Syrie, on souhaite la victoire des djihadistes de Syrie, et on la combat au Mali : comprenne qui pourra, c’est la démarche de la bonne femme saoule qui titube d’un bord à  l’autre de la route. » LA VOIX DISCORDANTE DE DOMINIQUE DE VILLEPIN Une voix discordante s’est tout de même élevée ce week-end, celle de l’ancien premier ministre, Dominique de Villepin. Dans une tribune au Journal du dimanche, il estime qu' »aucune des conditions n’étaient réunies pour décider de cette intervention ». Celui qui fut ministre des affaires étrangères, et partisan de la non-intervention en Irak en 2003, développe son argumentaire : « Nous nous battrons à  l’aveuglette, faute de but de guerre. Arrêter la progression des djihadistes vers le Sud, reconquérir le nord du pays, éradiquer les bases d’AQMI [Al-Qaida au Maghreb islamique], sont autant de guerres différentes. » Il évoque l’isolement de la France sur ce dossier : « Nous nous battrons seuls faute de partenaire malien solide. Eviction du président en mars et du premier ministre en décembre, effondrement d’une armée malienne divisée, défaillance générale de l’Etat, sur qui nous appuierons-nous ? (…) Nous nous battrons dans le vide, faute d’appui régional solide. La Communauté des Etats de l’Afrique occidentale reste en arrière de la main et l’Algérie a marqué ses réticences. » Le texte intitulé « Non la guerre, ce n’est pas la France », s’interroge : « Comment le virus néoconservateur a-t-il pu gagner ainsi tous les esprits ? » SOUTIEN ET RESERVES A GAUCHE François Hollande ne bénéficiera pas non plus d’un soutien appuyé sur sa gauche. Jean-Luc Mélenchon a critiqué la position du président. « L’intérêt d’une intervention militaire extérieure pour régler le problème posé au nord du Mali est discutable. En décider alors que les intérêts fondamentaux de la France ne sont pas en cause, selon le chef de l’Etat lui-même, et alors que les troupes africaines sont engagées, est discutable », écrit le leader du Front de gauche dans un communiqué. Il regrette que le Parlement et le gouvernement n’aient pas été consultés. Le PCF aurait souhaité de son côté que l’intervention se déroule « dans le cadre d’une mission de l’ONU et de l’Union africaine, réalisée sous drapeau de l’ONU, par des forces maliennes et africaines, dans le strict respect de la Charte des Nations-Unies, dans les limites imposées par l’exigence de la souveraineté malienne ». « La France, ancienne puissance coloniale, ne peut apparaà®tre comme voulant poursuivre les pratiques dominatrices de la ‘françafrique’. » La méthode choque également Noà«l Mamère qui s’étonne « que le président de la République reproduise les mêmes méthodes que son prédécesseur en ne saisissant le Parlement qu’une fois les opérations lancées ». Le député écologiste rejoint ses collègues communistes dans sa critique : « On a le triste sentiment de revenir aux méthodes anciennes de la Françafrique. S’il y avait un vote au Parlement, je refuserai de participer à  cette mascarade. » Europe Ecologie-Les Verts a une position moins tranchée. Réservé sur la forme, le parti écolo admet la nécessité d’une opération « limitée dans le temps » dans un communiqué : « Conscients de la gravité de la situation, en ayant une pensée pour les otages retenus dans la région, EELV, tout en regrettant que le Parlement n’ait pas été consulté en amont de cette décision, souhaite que l’opération engagée par la France soit strictement limitée dans le temps et que l’armée française laisse très rapidement la place à  une force d’intervention africaine qui aura pour mission de veiller à  la mise en place, en accord avec les populations concernées, d’un processus démocratique et d’une paix durable. » L’EXTRàŠME GAUCHE CONDAMNE EN BLOC Le NPA d’Olivier Besancenot a réagi via un communiqué à  l’annonce de la mise en place de l’opération Serval : « Le NPA dénonce cette intervention militaire impérialiste décidée par Hollande, une fois de plus sur le dos des peuples ! Ce n’est pas de cette façon que les Maliens se libéreront de tous les fondamentalismes. » « Qui a dit que la Françafrique c’était fini ? » s’interroge le parti, qui dénonce un double discours de François Hollande, destiné à  « protéger les intérêts » de la France sur place. La porte-parole de Lutte ouvrière, Nathalie Arthaud, met dans le même sac l’opération avortée en Somalie pour libérer l’otage et l’intervention au Mali. Elle dénonce l’attitude des soldats français, venus libérer « un barbouze », qui « ont assassiné indifféremment preneurs d’otages et civils ». « L’attitude de l’armée française en Afrique, qui se considère là -bas comme en terrain conquis, est révoltante. Troupes françaises hors d’Afrique ! » conclut-elle.

Les forces djihadistes ont repris la route vers le sud du Mali

Des convois de pick-up transportant des groupes d’islamistes fortement armés ont fait mouvement lundi vers le sud du Mali, non loin de positions tenues par le gouvernement, a-t-on appris de sources militaires. Ces colonnes sont signalées dans la région de Mopti, à  environ 500 kilomètres au nord-est de Bamako. « Les insurgés avancent et ont été repérés en plusieurs endroits (…) Nous les attendons. S’ils nous attaquent, nous riposterons », indique un responsable militaire malien. Les islamistes auraient atteint la zone de Bourei, à  25 kilomètres du dernier poste tenu par les forces maliennes. « L’armée malienne a effectué lundi et dans la nuit de lundi à  mardi vers Kona des tirs de sommation face à  l’ennemi, qui a reculé », a déclaré une source militaire malienne, Kona étant une localité de la région de Mopti, dont une partie est contrôlée par les forces gouvernementales et l’autre par des islamistes armés. Des rebelles touareg, soutenus par des islamistes radicaux parfois alliés à  Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), se sont emparés en avril des deux tiers du pays en profitant de la désorganisation de l’armée et du vide politique créé par un coup d’Etat militaire à  Bamako. Ansar Eddine, l’un des groupes rebelles qui a renoncé au cessez-le-feu proposé en décembre au gouvernement, a refusé de dire s’il déplaçait ses troupes ou préparait un assaut. « Pour des raisons stratégiques, nous ne disons pas o๠se trouvent nos combattants. Le gouvernement malien est responsable de ses propos, quels qu’ils soient, sur des mouvements de troupes », a déclaré le porte-parole d’Ansar Eddine, Sanda Ould Boumama. Le ministre de la défense, le colonel Yamoussa Camara, a déclaré pour sa part au micro de RFI que des « groupes djihadistes » s’étaient déployés en plusieurs endroits de la ligne de la démarcation séparant le Nord, aux mains des insurgés, du Sud, contrôlé par le gouvernement. En décembre, le Conseil de sécurité de l’ONU a approuvé des plans visant à  déployer un contingent de troupes ouest-africaines dans le Nord pour en chasser les groupes djihadistes liés à  AQMI, mais l’opération ne devrait pas être lancée avant septembre.

Mali. Quatre signes qui montrent que la guerre approche à grands pas

Dans le désert du nord du Mali, on parle de centaines de jihadistes qui gagneraient les villes. D’autres évoquent des drones bruissant dans l’air chaud. Et, dans les bureaux des chancelleries, les téléphones sonnent un peu plus qu’à  l’accoutumée. Même le candidat à  la présidence américaine Mitt Romney s’est fendu d’un mot sur le Mali lors de son débat avec Barack Obama, lundi 22 octobre. Les signes ne trompent pas, l’atmosphère est à  la guerre. 1 Poussivement, l’ONU passe la seconde A croire qu’avant le passage du président français, François Hollande, à  la tribune des Nations unies le 26 septembre, personne ne se préoccupait de la crise malienne. La Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et l’Union africaine (UA) avaient pourtant mis leur grain de sel dès le coup d’Etat de mars, suivi de la prise du nord du Mali par les rebelles. Visites officielles, conférences, médiation du Burkina Faso et déclarations outrées ont émaillé plusieurs mois de négociations. Mais elles étaient restées sans effet. Il a fallu attendre le 14 septembre et la supplique à  l’ONU du président malien par intérim Dioncounda Traoré, revenu aux manettes après avoir été presque battu à  mort par des manifestants. Deux jours plus tard, lors d’une réunion sur le Sahel à  New York, François Hollande réclame « au plus vite une nouvelle convocation du Conseil de sécurité de l’ONU » pour répondre à  la menace terroriste. Le 15 octobre, le Conseil de sécurité adopte la résolution 2071. Laquelle demande au secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, de présenter un rapport « sur la base duquel le Conseil de sécurité pourra autoriser dans 45 jours le déploiement d’une opération africaine au Mali », écrit le Quai d’Orsay. 2 L’Algérie concède un feu vert La nouvelle est dans Le Monde du mardi 23 octobre : « L’Algérie ouvre la porte à  une opération militaire au nord du Mali ». Le journal s’appuie sur des « sources de la défense » qui affirment avoir reçu « un premier accord tacite de l’Algérie pour soutenir une opération visant à  chasser les groupes terroristes islamistes qui ont annexé le nord du Mali, accord qui va jusqu’à  tolérer l’inévitable présence à  terre de quelques unités étrangères, notamment françaises ». Faut-il y voir la conséquence des signes de bonne volonté de François Hollande ? L’Algérie – qui partage 1 300 km de frontières avec le Mali – est un acteur incontournable dans cette partie de l’Afrique, et avait jusque-là  tenu une position ambivalente. Alger, qui a aussi des otages au nord du Mali, a privilégié une solution politique. Le pays a négocié avec les islamistes maliens d’Ansar Dine, mais pas avec Al-Qaà¯da au Maghreb islamique (Aqmi). Dirigé exclusivement par des Algériens, Aqmi, ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), est une vieille connaissance des services algériens. Alors forcément, à  Alger, on ne s’enthousiasme pas de ce futur coup de pied dans la fourmilière : les ennuis d’hier pourraient repasser la frontière. Mais un mouvement dissident d’Aqmi (voir cet organigramme de Jeune Afrique), le Mujao, aurait poussé le bouchon trop loin en revendiquant deux attentats contre des casernes dans le sud de l’Algérie, croit savoir Le Monde. 3 Le plan se met en route L’ONU et l’Algérie dans la poche, l’opération peut prendre corps. Une force militaire, la Mission de la Cédéao au Mali (Micema), est actuellement en cours de création. Quelque 3 000 soldats de pays de la Cédéao doivent intervenir, avec la bénédiction de l’ONU. La France, qui doit apporter un soutien logistique avec les Etats-Unis, met les bouchées doubles. Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, veut une intervention d’ici « quelques semaines ». L’idée serait d’intevenir avant les fortes chaleurs du printemps. En coulisse, la France s’active. A Paris, les Français et les Américains ont discuté de la « sécurité au Sahel », mardi 23 septembre, entre « responsables de haut niveau ». Au Mali, l’envoyé spécial au Sahel, Jean Félix-Paganon, a annoncé que la France avait décidé de reprendre sa coopération militaire, interrompue depuis le coup d’Etat de mars. Il a évoqué l’envoi d’instructeurs pour former l’armée malienne, sous-équipée et démoralisée, dont on imagine mal qu’elle puisse être remise sur pied en « quelques semaines ». Et, toujours dans Le Monde, ont percé les premiers contours du plan d’intervention entériné par l’ONU. D’abord, en janvier 2013, « consolidation de la souveraineté malienne sur le sud du pays et sa capitale », puis « mise à  pied d’œuvre de trois ou quatre bataillons maliens sur lesquels les armées africaines et leurs alliées européennes pourront compter » et, après la reprise de plusieurs villes, « stabilisation du nord » en mars. Des bombardements auraient lieu. Selon Jeune Afrique, le plan s’inspire du modèle testé avec succès en Somalie à  partir de 2010, avec « regonflage du moral des soldats », et européanisation de la coopération. 4 Premiers mouvements sur le terrain Sur le terrain, la France s’apprêterait à  déployer des drones de surveillance, affirme l’agence AP, reprise par Le Nouvel Obs. L’information fait écho à  un article du Washington Post du 2 octobre présentant un réseau américain de petites bases aériennes situées en Afrique et vouées à  l’espionnage de groupes terroristes. Le journal américain ajoutait que des dizaines de militaires étaient déployés à  Ouagadougou, au Burkina Faso. Enfin, comme le rappelle Slate Afrique, les rumeurs de drones occidentaux survolant le Sahel se font insistantes. En face, les jihadistes rassemblent leurs forces, selon l’AFP. Une dépêche de l’agence, qui s’appuie sur des témoignages confirmés de source sécuritaire malienne, affirme que des « centaines » de jihadistes ont rejoint plusieurs villes du nord du Mali, le week-end dernier. Selon l’AFP, ils viennent de l’étranger, principalement du Soudan et du Sahara occidental, pour se battre aux côtés des islamistes. Des informations relativisées par RFI, qui parle de « mouvements » sans confirmer un afflux de combattants étrangers. Contactée par francetv info, Anne Giudicelli, spécialiste du terrorisme et de l’islamisme, estime que « ce n’est pas très clair », évoquant des « sources très divergentes » et une possible « intoxication ». « Je ne sais pas s’il y a afflux ou appui de centaines de gens du Soudan ou de Sahraouis », abonde Dominique Thomas, chercheur associé à  l’Institut d’études de l’islam et des sociétés du monde musulman (IISMM) de l’EHESS. Lui évoque plus volontiers le recrutement local que mènent les groupes islamistes. Et n’exclut pas que l’annonce de la convergence de combattants étrangers puisse « faire partie d’une intoxication », par exemple pour « faire prendre conscience de l’importance de l’urgence d’une intervention, au risque de voir ce sanctuaire se développer ». La guerre de la communication pourrait avoir déjà  commencé. Gaà«l Cogné

Mali : arrivée dans le Nord de « centaines » de djihadistes soudanais et sahraouis

Des « centaines » de djihadistes venus du Soudan et du Sahara occidental, sont arrivés ce week-end dans le nord du Mali occupé par des islamistes armés pour se battre à  leur côté dans la perspective de l’envoi dans la région d’une force armée étrangère, a appris l’AFP auprès de témoins. « Dans la région de Tombouctou (nord-ouest) et de Gao (nord-est), des centaines de djihadistes, essentiellement de nationalité soudanaise et d’origine sahraouie, sont venus en renfort pour faire face à  une attaque des forces maliennes et ses alliés », a confirmé une source sécuritaire malienne. Un habitant de Tombouctou a affirmé que « plus de 150 islamistes soudanais sont arrivés en 48 heures » dans la ville. « Ils sont armés et ont expliqué qu’ils sont venus pour aider leurs frères musulmans contre les mécréants ». Une autre source proche d’une ONG, a confirmé l’arrivée à  Tombouctou et sa région de Soudanais, mais aussi d’islamistes « d’autres nationalités ». Tombouctou est contrôlée par le groupe islamiste armé Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) et Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). « ILS VEULENT LA GUERRE ? ON VA FAIRE LA GUERRE » A Gao, « depuis vendredi, il y a de nouveaux islamistes qui viennent et se rendent à  la police islamique » du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) qui contrôle la ville, a déclaré un témoin. Il a affirmé avoir vu dix véhicules pick-up remplis d’hommes armés venir à  la police islamique. Habib Ould Issouf, l’un des dirigeants du Mujao à  Gao, originaire du Niger, a confirmé l’arrivée de ces islamistes étrangers. « Ils veulent la guerre ? On va faire la guerre. C’est pourquoi nos frères viennent de partout. Ils viennent des camps de Tindouf en Algérie, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, de partout », a-t-il affirmé. L’arrivée de renforts aux islamistes dans le Nord, intervient deux jours après une réunion internationale de haut niveau à  Bamako qui a exprimé sa « solidarité » avec le Mali, lui demandant de redoubler d’efforts pour faciliter l’envoi d’une force armée ouest-africaine soutenue par l’ONU pour reconquérir cette région occupée depuis près de sept mois par des groupes armés emmenés par AQMI.