Droits de l’Homme : Abdoulaye Diop à Genève pour porter la voix du Mali

Le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye DIOP, prend part du 27 février au 03 mars 2023 à Genève, au segment de haut niveau de la 52ème session ordinaire du Conseil des droits de l’Homme.

Selon le département, la participation du ministre Diop qui est à la tête d’une délégation malienne permettra de promouvoir et protéger les droits de l’Homme au Mali, de mettre en exergue les efforts importants déployés, ou en cours par le pays pour la sécurisation et la protection des populations et de leurs biens.

Ce conseil de haut niveau sera aussi l’occasion d’après le ministère des Affaires étrangères de porter le message du Gouvernement en vue de déconstruire les allégations non fondées sur la question des droits de l’homme au Mali. Le 7 février dernier, lors de la visite au Mali du ministre des Affaires étrangères russe Serguei Lavrov, Abdoulaye Diop avait assuré qu’il était nécessaire de dépolitiser les droits de l’homme. Le 27 janvier dernier lors de l’examen d’un rapport sur la situation au Mali, le ministre des Affaires étrangères avait regretté « une instrumentalisation de la société civile ». Cette indignation faisait suite à l’intervention d’Aminata Cheick Dicko, vice-présidente de l’organisation Kisal sur des exactions présumées des partenaires russes de l’armée malienne. Plusieurs rapports pointent du doigt des exactions commises par Wagner au Mali. Le gouvernement dément la présence des paramilitaires russes sur le sol malien et conteste les accusations portées à l’encontre de leurs partenaires et des FAMa.

Lors de son séjour, plusieurs activités importantes sont inscrites dans l’agenda du Ministre DIOP, notamment, sa rencontre avec le Haut-commissaire aux droits de l’Homme, ses échanges avec le groupe des Ambassadeurs africains à Genève et son intervention au segment de haut niveau du Conseil des droits de l’Homme.

Pour rappel, le Conseil des droits de l’Homme est un organe du système des Nations unies dont la mission est d’assurer la promotion et la protection des droits de l’Homme dans le monde. Les sessions du Conseil servent de cadre pour faire le suivi de la mise en œuvre des obligations des Etats membres en matière de droits de l’Homme, avec la participation de l’ensemble des acteurs concernés.

Sécurité : 317 civils tués entre le 1er avril et le 30 juin 2022 selon la MINUSMA

La MINUSMA a publié hier mercredi sa note trimestrielle des tendances des violations et atteintes aux droits de l’homme au Mali. Elle note 467 violations et atteintes aux droits de l’homme et au droit international humanitaire soit une baisse de 42 % en comparaison avec le trimestre précédent. 317 civils ont été tués durant cette période contre 547 lors du trimestre précédent. Selon la MINUSMA « les principaux auteurs des actes de violence contre les civils sont entre autres le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS) et autres groupes similaires responsables de 297 atteintes graves aux droits de l’homme ». Concernant les groupes signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, la Minusma affirme avoir documenté « 14 atteintes aux droits de l’homme qui leur sont imputables, soit une hausse de 16 % en comparaison avec le trimestre précédent ». La mission onusienne explique que « les violations des droits de l’homme imputables aux Forces de défense et de sécurité maliennes ont, quant à elles, enregistré une baisse de 62 %, passant de 320 entre la période de janvier à mars 2022, à 122 au cours de la période couverte par cette note ». La dernière note de la MINUSMA publiée le 27 mai dernier avait fait l’objet de débats. Elle avait été transmise aux autorités pour observations. Dans leurs conclusions, elles avaient regretté que l’accent soit exagérément mis sur de prétendues allégations de l’armée, tandis que les nombreux succès qu’elle engrange sur le terrain sont évoqués de manière laconique.

Hamadoun Nialibouly – Moussa Dicko : Portés disparus

La liberté de la presse est une quête permanente, soumise au Mali à de nombreuses menaces. Insécurité, accès difficile à l’information ou encore intimidations, les défis sont nombreux et l’exercice de la profession de plus en plus compliqué. Une liberté de la presse menacée également par les enlèvements et les détentions arbitraires. Nous avons choisi, au travers d’exemples concrets et récents, de mettre en exergue tous les écueils voire dangers auxquels font face les journalistes dans leur mission d’informer. 
Hamadoun Nialibouly et Moussa Dicko ont en commun d’être des journalistes locaux du centre du Mali et d’avoir été tous deux enlevés en 2020 et 2021. Très probablement à cause de l’exercice de leur profession.
 
En septembre 2020, vers Somadougou, dans la région de Mopti, Hamadoun Nialibouly rentre d’une session de formation organisée par l’URTEL et CFI. Du car qui le ramène de Bamako on le fait descendre, sous le prétexte qu’il aurait participé à une attaque récente contre une communauté locale. Un argument totalement fallacieux, explique M. Mamoudou Bocoum, puisque Nialibouly participait à la formation aux dates indiquées comme étant celles de l’attaque, renchérit le Coordinateur local de l’URTEL pour la région de Mopti.
Lorsque l’on se rend compte qu’il n’est pas arrivé à destination, des investigations sont menées et des discussions sont entamées avec « un intermédiaire». Les échanges dureront environ 3 mois. Puis plus rien, avant que d’autres contacts n’aient lieu avec un autre homme qui s’avérera simplement être « un escroc ». Après avoir encaissé la somme de 300 000 francs CFA pour « assurer l’escorte », il ne donnera plus signe de vie. Puis vient une troisième tentative. Mais, alors que les proches lui demandent une preuve de vie, le contact ne répond plus.
Les proches et les collaborateurs du journaliste sont donc sans nouvelles de lui depuis le mois de janvier 2021. Une situation angoissante, où la peur fait place souvent à la résignation.
Moussa Dicko
Communiquer ou pas ? Dans ces situations délicates, c’est souvent à un dilemme auquel doivent faire face les proches et collaborateurs des journalistes. Chaque cas est différent, mais dans les premiers jours, le choix est souvent fait de ne pas communiquer, explique le Président de la Maison de la Presse, M. Bandiougou Danté. Un choix assumé, pour « ne pas heurter certaines sensibilités » et surtout ne pas mettre en danger la vie de ceux qui sont retenus en otages. « Lorsque les gens vivent dans un tel environnement, même ceux qui sont chargés de relayer l’information doivent faire énormément attention, pour ne pas exposer la vie des autres ».  Et quand il s’agit de zones qui échappent à toute autorité étatique, c’est même une question de responsabilité, ce qui exige énormément de prudence, poursuit-il.
C’est donc vers les forces de sécurité et de renseignement internationales et nationales que se tournent les responsables d’associations de défense des journalistes. Comme c’est souvent le cas dans ce genre de situations, elles ont entrepris d’entrer en contact avec des « chefs locaux» et exploré la possibilité de  passer par certains canaux « sociaux » pour obtenir les libérations. Des pistes ont indiqué un moment que le journaliste était « avec »
un groupuscule armé et qu’il ne risquait rien. Mais, ensuite, « on a perdu toute trace». Fallait-il alors encore garder le silence ? Non, assurément. Il fallait donc porter les faits à la connaissance du public et susciter une large mobilisation dans l’objectif d’une issue heureuse.
Le 18 avril 2021, une autre nouvelle vient assombrir un tableau déjà peu reluisant. Moussa Dicko, Directeur des programme de la radio « La voix de Haïré »
a été enlevé chez lui à Douentza. Des informations contradictoires et l’absence de revendication ajoutent aux difficultés dans les cas similaires. Ni sa famille ni ses proches n’ont plus eu de nouvelles de lui depuis. Selon certaines analyses, les journalistes qui effectuent des allers-retours entre Bamako et les zones concernées deviennent des cibles. Les hommes armés qui y sévissent les soupçonnant de les espionner pour le compte de l’armée malienne ou de forces étrangères. Les cas de Nialibouly et de Dicko sont similaires en ce point : tous les deux avaient séjourné à Bamako peu avant leur enlèvement.
Si l’autocensure est souvent privilégiée pour continuer à exercer, les professionnels reconnaissent travailler « sans liberté »,
y compris celle de se déplacer, qui est largement compromise. Dans certaines régions du Mali, où ne se hasardent plus les journalistes de la capitale, la presse locale est le seul recours pour informer les populations. Elle est devenue la cible privilégiée de ceux qui ont décidé de la réduire au silence ou d’en faire une monnaie d’échange. Il ne reste donc plus aux journalistes que de faire de la « résistance » en attendant le bout du tunnel.
Fatoumata Maguiraga 
Cet article a été publié dans Journal du Mali l’Hebdo n°318 du 13 au 19 mai 2021 

Aguibou Bouaré : « Nous sommes inquiets par rapport à un certain nombre d’actes »

Les Conseils de Boubacar Keita, fils de l’ex Président IBK, ont saisi par courrier en date du 21 décembre 2020 le Président de la CNDH pour un accompagnement, afin qu’il sorte « rapidement des conditions arbitraires et dégradantes à lui imposées ». Dans cet entretien,  Aguibou Bouaré revient pour Journal du Mali sur ce dossier et ceux d’autres arrestations extrajudiciaires.

Quelle suite allez-vous donner à ce courrier ?

Nous avons pris le dossier en main et nous sommes en train de l’analyser. Naturellement, comme la loi l’indique, nous devons entreprendre des investigations et essayer d’établir les faits. Au cas où ces faits seraient avérés, nous allons dénoncer la situation et demander aux autorités de tout entreprendre pour la régulariser.

Qu’est-ce qui a été fait depuis que vous avez pris connaissance du dossier ?

Nous menons beaucoup d’actions en marge de l’espace public. Les actes que nous posons peuvent être des approches informelles des autorités, pour leur rappeler les situations qui ne sont pas conformes aux droits de l’Homme. Nous avions donc pris quelques contacts déjà, mais il faut reconnaitre que le courrier des Conseils nous a donné beaucoup plus d’éléments. Aussitôt nous avons pris contact avec les autorités compétentes. Nous sommes en train de poursuivre les investigations et nous ne manquerons pas, s’il est établi que c’est une mise à résidence sans base légale, de conclure à une situation qui viole les droits de M. Keita.

Comment réagissez-vous à l’interpellation extrajudiciaire  de trois personnes par la SE dans la nuit du 21 décembre ?

Nous avons appris l’information comme tout le monde. Nous sommes en train de constituer des dossiers là-dessus. Mais il faut déjà rappeler le principe qu’une personne ne doit pas être l’objet de disparition forcée. Il faut que tout le monde fasse attention. Ce sont des actes qui peuvent vous rattraper après. C’est le lieu de rappeler que les droits de l’Homme ne sont pas le fruit d’une imagination ou l’opinion d’une quelconque personne, mais des obligations souscrites par l’État du Mali.

Êtes-vous inquiet d’une possible dégradation de la situation des droits de l’Homme sous la Transition ?

Notre combat n’est pas lié à un régime ou à une situation quelconque. Quand nous voyons venir des situations qui peuvent constituer des violations des droits de l’Homme, nous les dénonçons. Nous devons  avouer aujourd’hui que nous sommes inquiets par rapport à un certain nombre d’actes. À chaque fois que nous avons eu notre mot à dire, nous avons souhaité que la protection des droits de l’Homme soit au cœur des préoccupations de la Transition.

Insécurité: 377 000 enfants ont besoin d’assistance et de protection au Mali

Ce mercredi 21 août 2019, une mission de haut niveau de l’UNICEF a terminé une visite de terrain sur le programme conjoint de coopération entre le Mali et l’UNICEF en matière de protection et d’éducation des enfants. La mission est revenue sur la coopération et la stratégie mise en oeuvre avec a Mali et des partenaires afin d’apporter du soutien aux enfants déplacés à cause de l’insécurité. Au terme de sa visite, la mission a échangé avec la presse sur la situation des enfants au Mali ainsi que la nécessité de les protéger. 

Les conséquences de l’insécurité deviennent inquiétantes dans notre pays. Seulement au premier semestre de l’année en cours, près de 377 000 enfants ont besoin d’assistance et de protection. Selon les données préliminaires enregistrées par les Nations Unies plus de 150 enfants ont été tués au cours du premier semestre de 2019.

Les experts estiment à 75 le nombre d’enfants blessés lors d’attaques violentes dans notre pays. La principale cause réside dans la croissance de l’insécurité dans le centre et le nord du Mali. Dans un contexte d’instabilité, Ils sont de plus en plus nombreux les enfants qui subissent sans aucune défense ou protection les conséquences de cette instabilité sociale. 

Selon l’Unicef, le recrutement ou l’utilisation des enfants dans des groupes armés a doublé cette année par rapport à la même période en 2018. Une situation inquiétante qui conduit même à la déscolarisation des enfants. Toujours à cause de l’insécurité, 900 écoles recensées sont restées fermées au premier semestre 2019 conduisant à une baisse de niveau dans certaines parties du pays et à une année scolaire perdue pour d’autres.

La récurrence des attaques sporadiques seulement dans la région de Mopti ces derniers mois et la présence de groupes armées ont entraîné la mort, la mutilation, la séparation des enfants de leurs familles, l’exposition aux violences sexuelles causant même des traumatismes psychologiques. 

En collaboration avec les autorités locales et les partenaires, l’Unicef envisage apporter un appui psychosocial à un peu plus de 90 000 enfants touchés par le conflit. Il s’agit aussi de fournir des soins médicaux, de travailler sur la question de réinsertion sociale, mais aussi et surtout de retrouver les familles des enfants séparés. 

(Défis de 2019- 2/7) Droits de l’Homme : Leur respect s’impose !

2018 aura été pour le Mali une année difficile pour les Droits de l’Homme. Les organisations de défense des droits humains dans le pays sont toutes unanimes dans ce constat. Des restrictions ont été observées concernant la jouissance de certains droits élémentaires : manifestation, protestation ou encore liberté d’expression. Les multiples exactions commises, notamment au centre du pays, où l’insécurité va toujours grandissant, ont fini d’amener les indicateurs au rouge. À l’orée de la nouvelle année, d’importants défis restent à relever.

Rien que pour le dernier trimestre 2018, 90 cas de violations de Droits de l’Homme ont été enregistrés, occasionnant 163 victimes, dont 12 femmes et 18 enfants.  En plus de 30 cas d’exécutions extrajudiciaires recensés dans le pays, on note également 5 cas de torture et 9 cas de détentions illégales. Avec 57% des cas, les régions de Mopti et Ségou sont les plus touchées. Par contre, les régions de Koulikoro et de Kidal enregistrent seulement 1% des cas. Ces chiffres proviennent du dernier rapport de l’ONU sur le Mali, publié le 28 décembre 2018. Si, selon ce rapport, la plupart de ces cas de violations de Droits de l’Homme sont commis par le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), les groupes armés signataires de l’Accord pour la paix et les forces de défense et de sécurité maliennes sont aussi impliqués.

Ce tableau peu enviable de la situation des droits de l’homme dans le pays inquiète les défenseurs des droits humains, qui suivent attentivement l’évolution des évènements. « De façon générale, de notre point de vue, les Droits de l’Homme sont vraiment à la peine au Mali. Qu’il s’agisse des droits civils et politiques ou des droits économiques et socioculturels, il existe encore beaucoup de difficultés et des défis à relever », relève Dr Malick Coulibaly, Président de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH).

Au sud du pays, plus particulièrement à Bamako, si la situation est globalement acceptable, certaines restrictions se sont néanmoins accentuées autour de libertés fondamentales, notamment les droits de manifestation et la liberté d’expression, entres autres. « Quand il y a des discriminations, quand certaines manifestations sont réprimées parce qu’interdites tandis que d’autres ne souffrent d’aucune interdiction, que le gouvernement obéit les yeux fermés à certains, c’est extrêmement grave », souligne Maitre Moctar Mariko, président de l’Association malienne des Droits de l’Homme (AMDH). Une situation mal vécue aussi au niveau d’Amnesty International Mali, où l’interdiction de la marche de protestation du 5 décembre 2018 contre le projet de loi d’entente nationale est décriée. « Le respect de l’état d’urgence se fait de manière sélective. Lors des rassemblements du Maouloud et du pèlerinage de Kita, personne ne l’a évoqué. Pourquoi, quand il s’agit des fêtes religieuses, on occulte l’état d’urgence, mais quand il s’agit d’attroupements pour manifester des désaccords et des mécontentements, on interdit les marches ? », s’interroge Ramata Guissé, Directrice exécutive d’Amnesty International Mali.

Quels défis pour 2019 ?

Bien des défis sont à relever pour cette nouvelle année en matière de Droits de l’Homme au Mali. Pour la plupart des observateurs, notamment les organisations de défense des droits humains, le défi majeur de cette nouvelle année pour les autorités étatiques du Mali est de résoudre l’épineuse problématique de l’insécurité dans les régions du centre et du nord. Pour y arriver, l’AMDH préconise le dialogue entre les communautés comme solution. « C’est aux communautés elles-mêmes de trouver les voies et moyens, en dehors de l’État, parce que à chaque fois que l’État intervient, il y a certaines communautés qui ne se sentent pas à l’aise, ayant des suspicions de soutien de l’État  à d’autres », estime Maitre Moctar Mariko. La lutte contre l’impunité doit également s’accentuer. Le Président de l’AMDH penche pour des « procès emblématiques », qui feront comprendre à ceux qui s’adonnent aux violations des Droits de l’Homme que certains actes passent nécessairement par la case justice.

Dr Malick Coulibaly évoque pour sa part une lutte incisive contre la corruption, car, dit-il, « un franc détourné, c’est un droit à l’éducation ou à la santé en moins. Qui connait l’interconnexion entre les droits humains comprend aisément que la mauvaise gouvernance impacte négativement la jouissance des Droits de l’Homme ». Selon le Président de la CNDH, les efforts doivent être démultipliés pour que cette année le maximum de Maliens puisse avoir accès aux droits prescrits par la Constitution et les instruments juridiques régionaux et internationaux que leur pays  a librement ratifiés.

 

Cet article a été publié dans le Journal du Mali l’Hebdo N°(196) du 10 janvier 2019

Me Moctar Mariko : « La loi d’entente nationale est une prime à l’impunité »

Alors que des associations de défenses des droits humains se mobilisaient pour une marche pacifique le 11 décembre, elles ont reçu du gouverneur du district un avis défavorable à leur initiative. Les responsables ont finalement tenu une conférence de presse pour fustiger ces interdictions et les raisons de leur opposition à la loi d’entente nationale qui doit être en principe débattue ce jeudi à l’Assemblée nationale. Le président de l’Association malienne des droits de l’Homme, Me Moctar Mariko, se livre au Journal du Mali sur le sujet.

Pourquoi avez-vous renoncé à votre marche ? 

Nous avons projeté de marcher le 11 décembre mais en tenant compte de l’arrêté du gouverneur que nous considérons illégale parce que contraire à la Constitution, nous avons choisi un itinéraire qui n’y était pas indiqué. C’est le rond-point Cabral jusqu’au terrain Chaba. Nous avons écrit au gouverneur, nous, cinquante et une associations de défense des droits humains et des victimes, pour l’informer de notre marche.  Mais nous avons reçu la veille un avis défavorable. La nuit aussi, j’ai reçu un appel provenant de la direction nationale de police me demandant de surseoir pour éviter des affrontements avec la police. Nous sommes partisans de la non-violence nous n’avons pas voulu exposer l’intégrité physique des marcheurs, ainsi nous avons opté pour une conférence de presse.

Que dénoncez-vous dans le projet de loi d’entente nationale ?

Nous fustigeons le comportement du gouvernement qui n’a procédé à aucune consultation auprès de nos organisations et des victimes. Comment voulez-vous aller à une loi dite d’entente nationale alors que la partie qui est concernée et qui a subi les conséquences du conflit n’a pas été entendue ? Ensuite, la CVJR devrait faire un rapport à la fin de son mandat pour répertorier les genres d’infractions commises, identifier les victimes, le mode de réparation. Il est dit aussi que ceux qui sont impliqués dans la commission des exactions sont libérables s’ils sont en prison ou s’il y a des mandats d’arrêts lancés contre eux, six mois après la publication de la loi. Nous avons dit que c’est une prime à l’impunité. Pour nous, l’amnistie égale incitation des gens à commettre plus d’infraction. Laissez la justice faire son travail, le président à son droit de grâce.

Que comptez-vous entreprendre si la loi est votée ?  

Si elle venait d’être votée sans être enrichie, sans consultation et retrait de certains articles qui prêtent à confusion, nous allons prendre des mécanismes nationaux. Avant qu’elle ne soit promulguée, nous verrons le président de la République pour qu’il la revoie en seconde lecture. Nous allons saisir la commission africaine de droits de l’homme. C’est une loi contraire même à l’accord pour la Paix.

CapDh : Pour une élection apaisée et transparente

La cérémonie d’ouverture de l’atelier de formation aux techniques d’observations des droits humains en période électorale organisé par le Centre d’assistance et de Promotion des Droits Humains (CapDH) a lieu, à Sabalibougou, ce lundi 23 juillet 2018. Prévu du 23, 24 et 25 juillet, cet atelier permet d’outiller 36 jeunes venus des régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti, ainsi que le district de Bamako avec l’appui financier de l’ambassade Royale du Danemark au Mali à travers le Fonds d’Appui aux Moteurs du changement (FAMOC).

Le CapDH est une association de droit malien et apolitique créée à Bamako, en mars 2008. « Il a pour vision de faire du Mali un véritable Etat de droit dans lequel les droits humains sont promus et respectés », déclare Négueting Diarra, directeur exécutif du CapDH Mali. Cette initiative a pour but de permettre à ces jeunes de surveiller, d’enquêter et de documenter les cas de violations des droits humains liés aux élections avant, pendant et après le scrutin du 29 juillet 2018.

Au cours de ces trois jours de formation, les 36 jeunes seront éclairés sur plusieurs modules, à savoir « la nouvelle loi électorale », ou « l’introduction générale aux droits de l’Homme », ou encore « les outils de collecte, de traitement et d’analyses des données ». Tous ces modules seront abordés par des experts. « Financer et appuyer ces jeunes, c’est leur permettre d’être outillés, afin d’apporter leurs appuis et contributions au bon déroulement d’une élection apaisée au Mali », indique Frédéric Kabore chef d’équipe du Fonds d’Appuis aux Moteurs du Changement (FAMOC).
Convaincu de l’importance du rôle des observateurs dans une élection, le CapDH ambitionne de prévenir les violences contre les hommes de média, les électeurs, les responsables électoraux. Pour cette association, un observateur n’est pas celui qui va partir changer les choses, mais c’est celui qui est témoigné de ce qui est fait, et de rendre compte. À l’issu de ces travaux, des recommandations seront adressées aux autorités compétentes. « Le travail d’observateur n’est pas facile, il est fastidieux, observer tout ce qui se passe avant, pendant et après les élections pour qu’on puisse d’avoir des éléments qui permettront à la société et la démocratie malienne d’évoluer pour les élections à venir » soutien Frédéric Kaboré. « C’est ainsi qu’ensemble nous contribuerons à faire de ce pays, que nous aimons tous, un havre de paix pour tous les citoyens maliens et pour tous ceux qui y vivent », conclut, le directeur exécutif du CapDH.

Al Hassan à la CPI: Le temps de la Justice?

Mercredi 4 avril 2018, Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud allias « Al Hassan » apparait rasé de près, vêtu d’un costume bleu nuit. Assis à la place du suspect. A la Cour pénale internationale de La Haye. Il y assiste à la toute première étape de la procédure judiciaire devant cette instance internationale en charge de dire le droit. Devant le juge unique de la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « Cour »), Marc Perrin de Brichambaut, il est représenté par Me Yasser Hassan, égyptien. Poursuivi pour crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, son transfèrement à la CPI a été salué de tous, autorités et acteurs judiciaires en passant par les organisations des droits de l’Homme. Un tel procès soulève cependant également le scepticisme dans l’opinion publique, qui se demande ce qu’il va changer dans la quête de la justice pour les victimes.

« A La Haye, c’est tout sauf une prison pour ces gens-là ». Ces gens-là, ce sont les responsables, commanditaires et auteurs, de crimes commis lors de la crise que le Mali a traversé de 2011 à 2013, « que ce soit les militaires ou les djihadistes », précise d’ailleurs notre interlocuteur, défenseur malien des droits de l’Homme. Un langage pas très « politiquement correct » du point de vue de sa position, « mais le fait est que cette justice internationale, pour l’instant, reste éloignée des préoccupations des victimes. « Les femmes qui ont été violées, les gens qui ont été amputés, persécutés, vivent aujourd’hui au quotidien avec leurs bourreaux. Qu’est-ce que la CPI peut y faire, elle qui s’attaque à des casseurs de mausolées au lieu des briseurs de vie ? », s’interroge pour sa part « Abdou » (pseudonyme), ressortissant de Tombouctou et dont un parent a été victime directe des exactions de la police islamique de Tombouctou. L’homme ignorant la procédure contre « Al Hassan » comme il l’appelle, se réjouit en apprenant que le commissaire de la police islamique qui a régenté la ville pendant les heures sombres de l’occupation va passer devant la justice. Pas encore, tempère le juge de Brichambaut. Il faudra encore tenir l’audience de confirmation des charges dont une nouvelle date a été fixée au 24 septembre prochain. Une audience de confirmation des charges sert à déterminer s’il y a des motifs substantiels de croire que le suspect a commis ces crimes. Mais, si l’on en croit le bureau du Procureur de la CPI, toutes les conditions sont réunies pour que le prévenu, en prison au Mali depuis un an et transféré à La Haye le 31 mars, soit jugé.

Crimes de guerre « Les charges retenues contre Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud sont, tel qu’indiqué dans le mandat d’arrêt émis sous scellé par la Chambre Préliminaire I le 27 mars 2018 : des crimes contre l’humanité de torture, viol et esclavage sexuel, persécution pour des motifs religieux et sexistes et autres actes inhumains. Ainsi que des crimes de guerre d’atteintes à l’intégrité corporelle et atteintes à la dignité de la personne, condamnations prononcées sans un jugement préalable rendu par un tribunal régulièrement constitué et assorti des garanties judicaires généralement reconnues comme indispensables, viol et esclavage sexuel et attaques dirigées contre des bâtiments consacrés à la religion et monuments historiques », explique Richard Nsanzabaganwa, conseiller en coopération internationale auprès du bureau du Procureur. Le djihadiste âgé de 40 ans est originaire d’Hangabera, 10 km au nord de Goundam dans la région de Tombouctou. Il aurait été membre d’Ansar Eddine et commissaire de facto de la Police islamique. Il aurait également été associé au travail du Tribunal islamique à Tombouctou et aurait participé à l’exécution de ses décisions. M. Al Hassan aurait pris part à la destruction des mausolées des saints musulmans à Tombouctou en juin 2012 grâce à l’utilisation des hommes de la Police islamique sur le terrain. Il n’est cependant pas poursuivi pour ce dernier crime pour lequel un autre djihadiste Ahmad Al Faki Al Mahdi a été jugé et condamné pour neuf ans de prison pour sa responsabilité dans ce crime de guerre. Al Mahdi a également été condamné à payer 2,7 millions d’euros en réparation.

Petit poisson « Les chefs de cet homme sont connus et ils sont en liberté », regrette Me Fatoumata Diarra, ancienne juge internationale ayant siégé une quinzaine d’années dans les cours et tribunaux internationaux. « Mais c’est aussi une question de choix. C’est bien l’Etat du Mali qui décide qui il veut envoyer devant la CPI et qui il veut juger lui-même », explique le magistrat. En effet, le Mali qui a ratifié le Statut de Rome le 16 août 2000, a renvoyé à la CPI la situation qui prévaut sur son territoire depuis janvier 2012. Les enquêtes au Mali portent essentiellement sur les crimes de guerre qui auraient été commis depuis janvier 2012, principalement dans les trois régions de Gao, Kidal et Tombouctou dans le nord du pays, et sur des faits survenus à Bamako et Sévaré dans le sud. « La justice internationale est une justice au secours en ce sens qu’elle agit que lorsqu’un État n’a pas soit la volonté ou la capacité de juger des auteurs de crimes, et cela en vertu du principe de la complémentarité positive », explique Drissa Traoré, coordinateur du projet conjoint AMDH-FIDH. « La justice nationale à qui incombe la première responsabilité de juger est dans un état inerte ne permettant pas aux victimes d’être reconnues comme telles et d’offrir des réparations à hauteur des préjudices » déplore-t-il. « Nous venons en effet en appui à la justice nationale, nous ne la remplaçons pas », explique Me Amady Ba, chef de la Section coopération internationale du bureau du Procureur. C’est donc le Mali qui envoie et enverra ceux qu’il désire voir juger à la CPI. Si certains cas ont été jugés au Mali, « c’est qu’ils entrent dans le cadre de la compétence juridique des tribunaux maliens et que la justice de notre pays est apte à les juger. Ce qui ne veut d’ailleurs pas dire que la CPI ne peut pas plus tard les réclamer pour d’autres affaires. C’est d’ailleurs le cas de Al Hassan qui était en prison au Mali depuis un an sous d’autres charges, avant l’émission du mandat d’arrêt ». « Si les gros poissons doivent venir à la CPI, ils viendront », assure un de ses collaborateurs. Plusieurs dossiers concernant le Mali sont en effet en cours d’enquête et dans les couloirs de La Haye on préfère ne pas trop rentrer dans les détails les concernant. Il n’est d’ailleurs pas exclu que Al Faki Al Mahdi revienne devant les juges. « Cette procédure avait laissé un goût d’inachevé et la FIDH, AMDH, WILDAF et d’autres organisations avaient insisté auprès du bureau du Procureur afin que d’autres poursuites soient ouvertes pour d’autres charges, notamment les crimes sexuels », explique M. Traoré.  « Cela pourrait se faire très bientôt », révèle-t-on.

En attendant la confirmation des charges, c’est une soif de justice qui anime les victimes des nombreuses exactions commises au Mali sur la période concernée. « Nous avons commencé à les rechercher et elles vont prendre part, pour celles qui le souhaitent, à ce processus qui n’est pas facile et qui peut durer des années », explique-t-on au Bureau du Procureur. « C’est pour elles qu’existe la CPI, c’est pour les victimes que nous travaillons, afin qu’elles obtiennent justice et réparation », explique pour sa part Fatou Bensouda, Procureur de la CPI. « C’est grâce à leur courage, aux risques qu’elles acceptent de prendre pour venir témoigner, la confiance qu’elles placent en notre juridiction, que la CPI a sa légitimité », se réjouit le juge de Richambaut. En septembre prochain, Al Hassan sera donc face aux juges. D’ici là, d’autres affaires pourraient arriver sur leur table. « Je n’y crois pas. Le calendrier de cette comparution est purement politique. C’est pour montrer aux Maliens qu’on veut juger ces gens », déclare « Abdou ». Il espère, à l’instar des centaines d’autres victimes ou leurs proches, que l’élan va continuer et que de l’intérieur comme à La Haye, le droit soit dit. « Pas de développement sans paix. Pas de paix sans justice », conclut Fatou Bensouda.

 

2017: Une année difficile pour les droits humains

Amnesty International a procédé au lancement régional (Afrique de l’Ouest et du Centre) de son rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme dans le monde. Cette présentation qui se fait pour la première fois au Mali, dresse un bilan plutôt sombre de la situation des droits de l’Homme avec l’entretien « d’un climat de peur pour justifier les attaques contre les défenseurs des droits de l’Homme dans la région ». L’organisation souligne tout de même que l’espoir est permis.

Le rapport annuel d’Amesty International pointe du doigt une dégradation de la situation des droits de l’Homme dans la région Afrique de l’Ouest et du Centre. Cette aggravation de la crise des droits de l’Homme se manifeste à travers la répression des manifestations. Amnesty relève que dans 20 pays africains des atteintes ont été portées au droit de manifester. Au point que « les cas dans lesquels le droit à la liberté de réunion était respecté représentaient l’exception et non la règle », ajoute le rapport. Dans le même temps, les attaques à l’égard des défenseurs des droits de l’Homme, des journalistes et des militants de l’opposition se sont multipliées. Les cas du Cameroun, du Tchad, de la Guinée équatoriale et d’Érythrée ont été cités.

Les violences engendrées par les conflits ont également occasionné des exactions notamment de la part de groupes armés. C’est le cas au Cameroun, au Niger, au Nigeria, en République centrafricaine, en RDC, en Somalie et au Mali.

Installé dans une zone de turbulences depuis 2012, la Mali enregistre également ces cas de violation. Le rapport souligne que « l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’Homme au Mali et la MINUSMA » ont exprimé « leurs inquiétudes quant à de graves menaces pour la sécurité dans les régions du nord et du centre ».  Ce qui constitue un danger pour les civils et les empêche d’accéder « aux services sociaux de base.»

L’insécurité, une des causes de violation des droits.                                   

La MINUSMA a recensé 252 atteintes aux droits humains imputables aux forces de sécurité ou à des groupes armés et ayant fait plus de 650 victimes. Elle a également recensé 21 exécutions extrajudiciaires et homicides délibérés et arbitraires, 12 disparitions forcées et 31 cas de torture et autres formes de mauvais traitements. Le rapport met l’accent sur des exactions menées par les groupes armés dans les régions de Mopti et Ségou. Il ajoute que « la présence accrue des groupes armés et le recrutement local  ont aggravé les tensions entre différentes ethnies.» Les forces de maintien de la paix, les forces de sécurité maliennes et les forces françaises de Barkhane ont été la cible de 155 attaques, selon la MINUSMA. Et ce sont 30 personnes travaillant pour la force onusienne qui ont trouvé la mort dans des attaques revendiquées, pour la plupart par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Une insécurité qui a remis en cause le droit à l’éducation pour plus de 150 000 enfants. Ainsi  plus de 500 écoles de Gao, Kidal, Ségou, Mopti et Tombouctou sont restées fermées toute l’année. La situation des personnes détenues dont plus de 1 366 de la prison centrale de Bamako étaient en attente de leurs procès, et l’impunité dont les « efforts ont perdu de leur vigueur » selon le rapport, ont aussi retenu l’attention sur la situation du Mali.

L’espoir est permis

Même s’il s’alarme du fait que « la haine est passée du discours à la réalité », M. Alioune Tine directeur d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale estime que l’espoir est permis. Car « le fait que des milliers d’habitants de la région continuent à défendre leurs droits montre que les revendications de liberté, de justice et d’égalité persisteront toujours ». Et plutôt que de répondre par la répression, il invite les « Etats d’Afrique de l’Ouest et du Centre » à traiter les causes pour lesquelles les populations protestent, comme les questions de santé, de logement et d’emploi.

La situation des droits de l’Homme au Mali

La MINUSMA et le Haut-Commissariat des Nations Unis aux  droits de l’homme  ont publié le 1 février, un rapport sur l’état de droits de l’homme dans le cadre du processus de paix au Mali. Ce rapport brosse l’état d’une situation des droits de l’homme  ‘’préoccupante ‘’ malgré la signature de l’Accord de paix.

Plus de 6000  cas de violations et abus des droits de l’homme. C’est le bilan dressé par le rapport conjoint MINUSMA-Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme au Mali.  Le travail ayant abouti à ce rapport a été mené entre janvier 2016 et juin 2017. Quatre domaines déterminants pour les parties signataires ont été examinés : le niveau d’implication dans des violations et abus des droits de l’homme ; les détentions  en relation avec les conflits, « y compris celles liées aux opérations anti-terroristes » ; les efforts dans la lutte contre l’impunité ; et l’établissement de justice transitionnelle.

Selon le communiqué de la MINUSMA datant du 1 er février, plus de 800 incidents impliquant des hommes armés non identifiés et mettant en danger la vie de civils ont également eu lieu. Au total, souligne le communiqué, la violence a fait  2 700 victimes parmi lesquelles 441 ont été tuées. Des hommes et enfants constituent la majorité. Tous les mouvements armés et  d’autres acteurs sur le terrain sont impliqués dans ces violations, abus  et incidents, avec plus de 78%. Qu’ils s’agissent des mouvements signataires de l’Accord, des non signataires, des éléments armés non identifiés ou des membres des mouvements terroristes, AQMI, Ansar Eddine et autres, le rapport a relevé le degrés plus ou moins de leur implication dans les violations des droits de l’homme. Aussi, les forces de défense et de sécurité malienne, ainsi  que les forces internationales  présentes  dans le pays sont indexées. Le rapport souligne que tous ces actes dénoncés ont été  causés par un certain nombre d’éléments. «Les diverses confrontations entre les groupes armés signataires dans la région de Kidal, l’expansion des activités d’AQMI, Ansar Eddine et autres groupes similaires, la recrudescence du banditisme local dans la région du centre du Mali et enfin, les opérations anti-terroristes conduites par les forces maliennes constituent les principales causes de ces violations et abus », estime le communiqué de la MINUSMA. La division des droits de l’homme et de la protection  de la MINUSMA a fortement prêté attention aux  violations commises à l’encontre des personnes arrêtées et détenues dans les cadres des opérations anti-terroristes. Dans la même logique de lutte contre l’impunité,  la division a suivi « les procédures judiciaires relatives à des violations commises par des éléments des mouvements armés entre 2012 et 2013, et celles impliquant les forces de défense et de sécurité pendant la période de leur reconquête du nord ou après 2013», précise le rapport. 

Toutefois, le rapport salut la mise  en place de la Commission Vérité Justice et Réconciliation et le lancement de la réception des témoignages des diverses victimes.

Human Rights Watch accuse les FAMAs de violations de droits de l’homme

 L’organisation de défense des Droits de l’Homme Human Rights Watch a indexé  dans un rapport publié le 08 septembre dernier l’armée malienne des « graves violations des droits de l’homme ». Selon  l’organisation c’est dans la volonté de «  contrer les groupes islamistes dans le centre du Mali » que ces violations ont été commises. Pour vérifier  ces accusations,  en plus des allégations faites par la MINUSMA, la CMA et la Plateforme, le ministre des droits de l’homme et de la reforme de l’Etat a effectué une visite dans la région le 23 septembre.

L’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch dans un rapport publié le 08 septembre dernier, accuse l’armée malienne de violations de droits de l’homme dans la région de Mopti (Centre du pays). Le début de ces atteintes commises remonte à  fin 2016. Il s’agissait pour l’armée malienne  de contrecarrer la montée en puissance des groupes islamistes qui s’imposent en maitre des lieux dans certaines localités de la région. Elle aurait donc fait recours à des pratiques répressives allant « des meurtres extrajudiciaires, à des disparitions forcées, à des actes de torture et à des arrestations arbitraires à l’encontre d’hommes accusés de soutenir les groupes armés islamistes » souligne le rapport. En plus des ces actes dénoncés, l’organisation a documenté l’existence de trois fosses communes «  qui auraient contenues des cadavres d’au moins 14 hommes exécutés après avoir été détenus depuis décembre par des militaires maliens », accable le rapport, selon lequel les abus ont continué jusqu’en juillet 2017. Dans la même période, les groupes armés islamistes ont eux aussi commis dans la même zone du centre des  abus graves des droits de l’homme, « notamment des exécutions sommaires de civils et de militaires de l’armée malienne, des destructions d’écoles, et le recrutement et l’utilisation d’enfants comme soldats »  poursuit le rapport d’HWR.

Pour vérifier la veracité des accusations et les allégations formulées par la Minusma et les groupes armés signataires de l’Accord, le ministre des droits de l’homme et de la reforme de l’Etat a effectué  le 23 septembre, une tournée de trois jours dans la cinquième région. Sur place, le ministre Me Kassoum Tapo accompagné des membres de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et des autorités administratives de la région a visité les  prisons, les gendarmeries et  les commissariats de certaines localités comme Douentza, Hombori  Bandiagara, Sevaré pour ne citer que celles-ci. Le ministre s’était dit «  séduit » par la qualité de certains lieux de détention qui répondent à un certain confort. «  J’ai été personnellement séduit, en tant qu’avocat par cette gendarmerie ou j’ai vu une cellule pour la première fois avec une douche intérieur » se réjouissait-il. Il a eu l’assurance lors de cette mission que tous les présumés terroristes arrêtés sont au bout de 48 heures transférés à Bamako.

Revenu a Bamako, il a tenu hier mardi dans l’après midi au sein de son département une conférence de presse. Lors de cette rencontre il a  dénoncé le rapport de l’organisation des Droits de l’Homme,  qui selon lui manque de « sérieux » et de professionnalisme. Selon lui, ce document aurait dû être transmis aux autorités maliennes avant sa publication. Toute chose qui scandalise le ministre qui par la même occasion a balayé d’un revers de la main les accusations formulées à l’encontre des forces de défense et de sécurité malienne.

 

Droits de l’homme : La MINUSMA tire la sonnette d’alarme

A l’occasion de la conclusion de sa huitième mission dans notre pays, qui a duré du 27 février au 8 mars, l’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali, Suliman Baldo, précise que les graves menaces sécuritaires au nord et au centre du pays continuent à mettre les populations civiles en danger et à entraver leur accès aux services sociaux de base.

Si la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation avance petit à petit avec le début l’installation des autorités intérimaires à Kidal, Gao et Ménaka et la tenue prochaine de la conférence d’entente nationale, la situation sécuritaire sur le terrain est préoccupante. Les populations gardent en mémoire les nombreuses attaques et peuvent à juste titre, s’interroger sur la capacité des forces armées maliennes et de celles de la MINUSMA, à assurer leur sécurité.

Un indicateur de cette insécurité grandissante est le nombre très élevé des écoles et de centre de santé fermés dans le centre et nord du pays, risquant de priver les populations de l’accès aux soins de santé et d’éducation dans ces zones. M. Baldo a déploré la prolifération de postes de contrôle mis en place sur les axes routiers par des groupes armés et par des dissidents de ces derniers ainsi que par des bandits et la multiplication des attaques armés à ces postes, tels les actes de braquages et des vols de véhicules et bétails qui ciblent les civils et les acteurs humanitaires.

L’expert a souligné que l’attaque odieuse et meurtrière du 18 janvier 2017 contre le camp MOC à Gao, montre que les ennemis de la paix ont toujours une importante capacité de nuisance. Pour lui, l’annonce faite le 2 mars de l’unification de plusieurs groupes extrémistes violents sous la bannière d’Al-Qaida montre que ces groupes sont déterminés à contrecarrer les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. « Déjouer le dessein déstabilisateur de ceux qui veulent dérailler le processus de paix est la responsabilité des partis de l’accord et celle des partenaires internationaux du Mali », explique M. Baldo.