2024 : une transition à durée indéfinie

Déjà reportée à deux reprises, l’élection présidentielle qui marquera le retour à l’ordre constitutionnel au Mali devrait se tenir en 2024. Initialement prévue pour février, en accord avec la CEDEAO, elle a été repoussée sine die en septembre dernier, sans l’approbation de l’institution sous-régionale. Même si cette dernière semble dans une nouvelle posture conciliante, ses relations avec le Mali pourraient à nouveau se tendre dans les mois à venir. Les partis politiques, dans l’incertitude, doivent se préparer pour une élection dont les dates ne sont pas encore connues.

« Les dates de l’élection présidentielle initialement prévues pour le dimanche 4 février 2024 (premier tour) et le dimanche 18 février 2024 (second tour) éventuellement, connaîtront un léger report, pour des raisons techniques (…) Le Gouvernement de la Transition précise que les nouvelles dates de l’élection présidentielle feront l’objet de communiqué ultérieurement, après échange avec l’Autorité indépendante de Gestion des Élections (AIGE) », annonçait le 25 septembre 2023 le ministre d’État de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du gouvernement, Colonel Abdoulaye Maiga. Trois mois après, les autorités de la Transition n’ont toujours pas communiqué de nouvelles dates pour cette élection très attendue.

S’accorder avec la Cedeao

Alors qu’elle était attendue lors du sommet du 10 décembre dernier pour se prononcer enfin sur le report de la présidentielle au Mali, la Cedeao s’est contentée d’une réaction a minima, déplorant les « décisions prises unilatéralement en ce qui concerne la mise en œuvre du programme de transition qui avait été convenu avec la Cedeao ». L’organisation sous-régionale, après avoir levé l’interdiction de voyage qui pesait sur certaines hautes autorités maliennes, a aussi décidé d’engager une Troïka présidentielle, composée des Présidents du Nigéria, du Bénin et de la Guinée Bissau, à entreprendre d’urgence des visites au Burkina Faso, en Guinée et au Mali, en vue de renouer le dialogue avec ces trois pays pour la mise en œuvre inclusive du programme de transition.

« Cette réaction de la Cedeao signifie qu’elle a pris acte du report de la présidentielle au Mali et qu’elle va s’employer à trouver avec les autorités maliennes de nouvelles dates, qui tiennent dans un délai raisonnable », estime un analyste. « Je pense que le fait de lever l’interdiction de voyage, de décider de renouer le dialogue avec les autorités de la Transition et aussi que le Représentant permanent et Ambassadeur du Mali auprès de la Cedeao ait été reçu dans la foulée par le Président de la Commission de l’institution sont autant de signes annonciateurs d’une certaine décrispation à venir dans les relations », poursuit-il.

Pour un expert politique qui a requis l’anonymat, le seul point d’achoppement entre les deux parties pourrait être la durée d’une nouvelle prolongation de la transition. « Les autorités maliennes ont annoncé un léger report. Mais, si au cours des échanges avec la Cedeao elles proposent de nouvelles dates au-delà de 2024, par exemple, évidemment que la Cedeao ne l’acceptera pas. Elle pourrait alors brandir de nouvelles sanctions contre le Mali ». Selon certains observateurs, il n’est pas exclu que le léger report de la présidentielle soit au delà de 2024. « Les autorités pensent aujourd’hui être dans une position de force vis-à-vis de la Cedeao et de la classe politique ».

Les partis politiques dans l’expectative

Si des signes avant-coureurs sont là, des partis politiques se projettent déjà vers la présidentielle. À l’annonce du report, en septembre dernier, plusieurs formations se sont opposées et exigé la tenue de la présidentielle aux dates initiales den février 2024. Mais, à défaut de pouvoir faire revenir les autorités de Transition sur leur décision, elles se préparent pour une échéance éventuelle avant la fin de l’année 2024.

À en croire Sékou Niamé Bathily, Secrétaire à l’Information et Porte-parole du RPM tendance Bocary Treta, la préparation de la prochaine élection présidentielle a débuté dans l’ancien parti présidentiel depuis la tenue du Congrès extraordinaire, en août dernier, en démarchant dans un premier temps certaines formations de la classe politique et de la société civile. « Nous avons ensuite mis en place des commissions de travail et créé des structures pour une meilleure participation à ces élections, à commencer par une commission qui a travaillé sur la carte politique, que nous avons adaptée à l’organisation interne du parti. Nous avons créé de nouvelles sections et fédérations régionales, conformément au nouveau découpage territorial à base duquel devraient se tenir les prochaines élections dans notre pays ».

Comme le RPM, l’Adema est aussi déjà tournée vers la préparation de la présidentielle à venir. Selon Yaya Sangaré, Secrétaire général du parti, il essaye d’avoir une force politique nouvelle, de tirer les enseignements de tout ce qui a été fait ces dernières années et, en raison du contexte nouveau, d’analyser la situation pour proposer une nouvelle offre aux Maliens.

« Des actions sont déjà engagées. Nous sommes en train de renouveler nos structures à la base. Nous sommes aussi engagés depuis quelques mois à mettre en place une force politique électorale avec d’autres formations, mouvements et associations politiques », confie-t-il, assurant que l’Adema aura son propre candidat, comme recommandé lors du dernier Congrès, et que le parti travaillera à ce que ce candidat bénéficie de l’accompagnement des autres partis qui vont se retrouver dans son projet de société.

Au RPDM de Cheick Modibo Diarra, on se dit également « prêt à aller à la conquête du pouvoir à tout moment », tout comme au parti Yelema, qui va d’ores et déjà désigner son candidat au prochain scrutin présidentiel à l’issue de son 4ème Congrès ordinaire, le 23 décembre 2023.

Préparation impactée ?

Si les partis politiques sont tournés vers la préparation du prochain scrutin présidentiel, cette préparation reste particulière, étant donné que les nouvelles dates de l’élection ne sont pas encore connues. « La préparation est un peu impactée parce que nous ne connaissons pas les dates de l’élection. Dans un premier temps, notre programme de société, nous l’avons calé sur une période donnée, en nous basant sur les engagements des autorités de la Transition. Maintenant que ce délai a été repoussé, bien sûr que cela nous perturbe un peu », avoue Sékou Niamé Bathily, même si, pour lui, cette situation ne constitue pas un handicap. « Cela ne met pas un frein à ce que nous sommes en train de faire. Nous continuons à nous préparer pour être prêts lorsque le collège électoral sera convoqué », assure-t-il.

« C’est à la fois un handicap et une opportunité. Mais nous pensons qu’il est bon qu’on indique une date pour que nous puissions bien nous préparer, parce qu’une élection demande beaucoup de ressources. On ne peut pas se lancer dans une campagne indéfinie », estime pour sa part Yaya Sangaré.

Tenir l’échéance 2024

Même si la classe politique a invité le gouvernement de transition à ouvrir le dialogue en vue de trouver de nouvelles dates consensuelles pour la tenue de la prochaine élection présidentielle, elle n’a jusqu’à là pas encore été sollicitée par les autorités dans ce sens. Mais, pour la plupart des partis politiques, la tenue de l’élection ne devrait pas aller au-delà de l’année 2024.

« Nous devons tout faire pour que les élections puissent se tenir avant la fin de l’année 2024. Un léger report ne devrait pas dépasser 3 à 6 mois. Les autorités doivent mobiliser toutes les ressources, créer un cadre favorable de dialogue et régler tous les problèmes techniques pour que nous allions à cette élection pour mettre fin à la Transition », préconise le Secrétaire général de l’Adema.

C’est ce qu’estime également le RPM, pour lequel le léger report ne devrait pas dépasser 6 mois au plus. « Pour nous, cette élection peut et doit se tenir en 2024. Nous croyons en la bonne foi des autorités pour aller vers une sortie de transition honorable pour tous », appuie pour sa part Sékou Niamé Bathily. Aujourd’hui, l’interrogation porte sur les actions politiques qui seront menées si la Transition se prolonge pour une durée indéfinie. Mais nul doute que la pression pourrait être forte sur les autorités, aussi bien de la part de la Cedeao, des PTF, de la classe politique et des acteurs de la société civile.

Référendum constitutionnel : une date et des questions

C’est le scrutin qui va donner le coup d’envoi des différents rendez-vous électoraux prévus dans le chronogramme de la Transition d’ici à mars 2024. Reporté dans un premier temps le 10 mars, le référendum constitutionnel est finalement annoncé pour le 18 juin 2023. La date révélée par le gouvernement le 5 mai suscite depuis de nombreuses interrogations sur la bonne tenue de ce scrutin et l’aboutissement du processus électoral.

Alors que des voix commençaient à se lever pour pointer du doigt le retard pris dans l’annonce d’une nouvelle date pour le référendum constitutionnel, depuis son report il y a 2 mois, le gouvernement de la Transition a surpris. Un décret annonçant la tenue de cet important rendez-vous pour le 18 juin prochain a été lu à la télévision nationale le vendredi 5 mai 2023 par le ministre d’État chargé de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du gouvernement, le Colonel Abdoulaye Maiga.

« Le collège électoral est convoqué le dimanche 18 juin 2023 sur toute l’étendue du territoire national et dans les missions diplomatiques et consulaires de la République du Mali à l’effet de se prononcer sur le projet de Constitution. Toutefois, les membres des forces de Défense et de Sécurité voteront par anticipation le dimanche 11 juin 2023, conformément à la loi électorale », dispose l’article premier de ce décret, portant convocation du collège électoral et ouverture et clôture de la campagne électorale à l’occasion du référendum constitutionnel. La campagne électorale sera ouverte le 2 juin 2023 et close 16 juin à minuit, selon l’article 4.

Défis

La tenue du référendum dans un temps assez court implique un certain nombre de défis à relever pour le gouvernement, mais aussi et surtout pour l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE), l’organe chargé de la gestion et de l’organisation de ce scrutin. Entre autres, de l’élément d’identification (carte) pour exercer le droit de vote au récurent problème d’insécurité auquel font face certaines parties du territoire national, en passant par l’installation des coordinations de l’AIGE à l’intérieur du pays, les difficultés d’organisation sont légion.

Pour Soumaila Lah, Coordinateur national de l’Alliance citoyenne pour la réforme du secteur de la Sécurité, les défis liés à la garantie de la liberté d’expression ainsi qu’à la communication et à la sécurité sont les plus importants dans le contexte actuel. « Aujourd’hui, la logistique, les moyens financiers et humains, les capacités de l’armée ne permettent pas d’organiser le référendum sur toute l’étendue du territoire », indique-t-il, proposant par ailleurs que des capsules vidéo ou audio traduites dans les langues nationales soient disséminées un peu partout pour une meilleure appropriation du texte du projet de nouvelle Constitution afin de relever le défi de la mobilisation. Pour cet analyste, sur le plan du respect des libertés, la Transition gagnerait à laisser même les gens qui ne sont pas « pro Transition » s’exprimer sur ce référendum, « donner leur point de vue et dire qu’ils ne sont pas d’accord en toute liberté ».

Malgré les incertitudes, l’AIGE a tenu à se montrer rassurante. Lors d’un point de presse au siège de l’organe le 9 mai, son Président Moustapha Cissé s’est montré optimiste. « La dynamique est enclenchée et, de façon volontariste et responsable, nous sommes dans l’action pour l’accomplissement de tout ce que nous devons faire. Nous avons tous les moyens matériels et financiers pour pouvoir accomplir cette mission », a-t-il assuré.

Selon lui, concernant les démembrements à l’intérieur du pays, l’AIGE est prête. « L’installation des coordinations de l’AIGE est un processus qui a démarré et nous avons accompli plus de 90% de cette étape. La loi électorale dit que nous pouvons bénéficier à tout moment de l’appui de l’Administration territoriale et nous nous sommes inscrits dans cette dynamique. Il nous reste juste la phase de la nomination et de l’installation suivi de la prestation de serment des membres de ces coordinations », soutient l’ancien Bâtonnier.

Mesures exceptionnelles

Même si elles ne sont pas encore formellement actées, l’AIGE va prendre certaines mesures, au vu du délai serré pour la tenue du référendum. Pour ce qui est de la carte requise pour voter, qui est selon la nouvelle loi électorale uniquement la nouvelle carte nationale biométrique sécurisée, le Président de l’AIGE avance que les anciennes cartes d’électeurs ainsi que toutes les autres cartes d’identité légalement reconnues en République du Mali pourront être utilisées. « À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle fondée sur le droit. Des habilitations administratives et juridiques vont être faites pour permettre d’utiliser des éléments d’identification qui permettront à la majorité, sinon à tout le monde, de pouvoir participer à ce référendum. Notre rôle est de sauvegarder le droit de vote du citoyen », tranche M. Cissé.

Par ailleurs, relève-t-il, il sera extrêmement difficile pour l’AIGE d’organiser ce scrutin sur la base du nouveau découpage administratif, qui a été adopté mais qui n’est pas encore effectif. « Compte tenu du délai, le découpage électoral dont nous disposons aujourd’hui et qui correspond parfaitement au fichier électoral, révisé à environ 8,5 millions d’électeurs en décembre dernier, sera celui de l’élection référendaire », annonce le Président de l’organe indépendant en charge des élections.

Désaccords persistants

Bien avant son report en mars et l’officialisation de la nouvelle date de sa tenue, le référendum constitutionnel n’a jamais fait l’unanimité auprès de la classe politique et des forces vives du pays. Cette situation s’est exacerbée depuis la publication du décret du  5 mai 2023. Si certains partis et organisations de la société civile ont salué un grand pas vers l’adoption de la nouvelle Constitution et commencé d’ores et déjà à appeler au « Oui » le 18 juin prochain, d’autres, en revanche, continuent de demander l’abandon du projet.

Parmi ces derniers, les organisations de l’Appel du 20 février comptent passer à la vitesse supérieure. Dans un communiqué daté du 7 mai, elles indiquent vouloir exercer un recours en annulation du décret portant convocation du collège électoral en vue du référendum « pour excès de pouvoir sur différents motifs, tous bien fondés ». Pour elles, ce décret viole le cadre normatif et les conditions requises en cette matière par la Constitution en vigueur, « au respect de laquelle le Président de la Transition, initiateur du projet, avait pourtant solennellement souscrit ». Même si ce recours semble avoir peu de chances d’aboutir, les responsables de ce collectif semblent déterminés.

« De la façon dont nous avons réussi à faire adhérer une frange importante des populations à la pertinence de l’abandon de ce projet illégal de nouvelle Constitution, nous empêcherons sans nul doute, par les voies de droit, la tenue même de ce référendum irrégulier en vue de son adoption », indique le communiqué, signé du Coordinateur général, le magistrat Cheick Mohamed Chérif Koné.

Tout comme l’Appel du 20 février, mais sur un autre plan, la Ligue malienne des Imams et érudits pour la solidarité islamique au Mali (LIMAMA) est également opposée à l’adoption de la nouvelle Constitution concernant l’article sur la laïcité. Un mouvement de soutien qui est né pour la soutenir, composé d’une vingtaine d’organisations islamiques, culturelles et politiques, dont la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’Imam Mahmoud Dicko, (CMAS) est monté au créneau le 6 mai en réclamant la suppression du concept de laïcité dans le projet. Ils assurent en outre vouloir mener une campagne pour le « Non », « si les revendications légitimes de la LIMAMA et du mouvement de soutien ne sont pas adoptées ».

Par ailleurs, selon nos informations, beaucoup d’autres partis politiques sont encore à l’étape de consultation de leurs bases pour arrêter une consigne par rapport au vote référendaire. À en croire une source au parti des FARE an Ka Wuli de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, qui a également demandé l’abandon du projet, ils n’ont pas encore reçu le document final du nouveau texte constitutionnel et s’abstiennent pour l’heure de se pencher sur la question. Plusieurs autres formations politiques seraient dans le même cas. Mais, en dépit de cela, si le scrutin se tient le 18 juin, le « Oui » l’emportera sans surprise, selon plusieurs observateurs.

Brésil : Lula da Silva élu président

Luiz Inacio Lula da Silva a obtenu 50,89 % des voix, contre 49,11 % pour le président sortant Jair Bolsonaro dimanche 30 octobre à l’issue du second tour de la présidentielle brésilienne. C’est l’écart le plus serré entre deux finalistes de la présidentielle depuis le retour à la démocratie après la dictature militaire (1964-1985). La marge est bien plus étroite que ce que prédisaient les sondages, qui avaient déjà sous-estimé le score de Jair Bolsonaro avant le premier tour. L’ancien métallo de 77 ans fera son retour au sommet de l’État le 1er janvier 2023. « Aujourd’hui, nous disons au monde que le Brésil est de retour, il est trop grand pour être relégué à ce triste rôle de paria dans le monde », a déclaré Lula dans son discours de victoire. Il s’est toutefois dit « inquiet » du silence assourdissant de son adversaire. Le président sortant Jair Bolsonaro n’a en effet toujours pas reconnu sa défaite plusieurs heures après l’annonce des résultats.

CNPM : un projet de textes divise les parties

Installée le 1er mars 2022, pour une période de 03 à 06 mois, l’administration provisoire du conseil national du patronat malien, a pour tâche la gestion des affaires courantes et la relecture des textes pour l’organisation de l’élection du nouveau président du patronat. Mais un projet de texte que proposent les responsables actuels du patronat  divise déjà.

Rassemblement, c’est l’engagement pris par les membres de l’administration provisoire mise en place au Conseil national du patronat (CNPM). Un rassemblement qui est devenu plus qu’une nécessité après plus de 16 mois de crise et d’interminables procédures judiciaires entre Mamadou Sinsy Coulibaly et Diadié dit Amadou Sankaré.

Après l’atelier d’élaboration de projet des nouveaux textes statutaires et règlementaires censés corriger toutes les anomalies, toutes les imperfections qui sont à la base de la crise actuelle au sein du CNPM, l’administration provisoire entend convoquer une assemblée générale extraordinaire le samedi 13 Août 2022 pour faire valider ces nouveaux textes par l’ensemble des groupements Professionnels et des Conseils patronaux des régions.

Ce projet de texte suscite déjà de la colère au sein du camp de Diadié dit Amadou SankaréAu cours d’une conférence de presse tenue ce samedi 7 août, un Collectif des groupements professionnels et conseils patronaux des régions membres du patronat malien soupçonne l’administration provisoire du patronat d’écarter des potentiels candidats lors de la prochaine Assemblée générale élective du président du secteur privé. Ce collectif dirigé par Youssouf TRAORE assure que parmi les nouveaux textes, un stipule que « toute personne ayant assumé la présidence du CNPM, quelles que soient la manière et la durée ne peut plus y prétendre ». Si ce texte venait à être adopté, il exclurait donc Mamadou Sinsy Coulibaly, et Diadé dit Amadou Sankaré de la prochaine élection. Pour le 1er vice-président de l’administration provisoire Boubacar H. Diallo, le travail des membres de l’administration provisoire est une démarche d’inclusivité, afin de réconcilier tous les membres du CNPM. Cette réconciliation est selon lui le seul gage du développement du secteur privé. Boubacar H Diallo soutient que, ces textes sont à la fois modernes et prennent en compte les aspirations profondes du secteur privé, moteur du développement.   Il poursuit que ces textes règleront beaucoup des difficultés et mettront fin à toutes les mauvaises interprétations, les supputations et les confusions qui ont engendré une crise sans précèdent au sein du CNPM. Sur l’éventuelle rejet de la candidature de Mamadou Sinsy Coulibaly et Diadié dit Amadou Sankaré, le vice-président de l’administration dit n’avoir pas la légitimité d’exclure qui que ce soit. Raison pour laquelle, il invite les membres du Patronat à venir trancher sur la question lors de l’assemblée générale adoptive des textes ce samedi 13 août.

 

Cotonculteurs : mésentente au sommet

Élu à l’issue d’une Assemblée générale le 10 juillet 2021, le nouveau Président de la Confédération des sociétés coopératives des producteurs de coton (C-SCPC), Bakary Koné, est déjà contesté. Certains réclament une administration provisoire en attendant des élections plus consensuelles, alors que pour les autres le bureau actuel est légal et doit mener à bien les missions de la structure.

Après une campagne cotonnière catastrophique et alors que les objectifs affichés restent ambitieux, le secteur du coton n’a pas fini de panser ses plaies. Avec l’inculpation de M. Bakary Togola, en septembre 2019 dans l’affaire des ristournes, et le lancement du processus de renouvellement, son mandat prenant fin, « le bureau n’a pu être installé » car « l’installation de la Confédération a coïncidé avec les difficultés du secteur », explique M. Dialla Moussa Dembélé, Président de la Fédération régionale de Kita. C’est ainsi qu’un président par intérim dont le mandat devait être de 6 mois est resté 20 mois à la tête de la structure.

Lors des Assises du coton, lancées en janvier 2021, et malgré des positions divergentes, «  il a été décidé de ne pas parler de transition, qui n’est pas prévue par les textes », ajoute M. Dembélé. Les 42 Unions des secteurs des sociétés coopératives et les 4 Fédérations régionales, pour poursuivre le processus, ont écrit au président par intérim du bureau de la C-SCPC et aux autorités pour l’organisation de l’Assemblée générale. Sans  réponse après 30 jours, elles ont alors commis un huissier et l’Assemblée générale du 10 juillet 2021 a élu M. Bakary Koné par 13 voix pour contre 7 à M. Bakary Togola.

Contestation

Le 31 août 2021, un collectif de cotonculteurs s’est réuni à Koutiala et a réclamé la mise en place d’une administration provisoire, estimant que « nul ne saurait se prévaloir du titre de Président de l’Union », car il n’y a eu « aucune élection crédible à la base ». « Nous ne pouvons pas empêcher ceux qui ont perdu d’être mécontents, mais nous avons des textes qu’il faut respecter », rétorque pour sa part le Président de la Fédération de Kita.

En attendant de voir se rapprocher les deux camps, la campagne est plutôt bien partie, selon M. Dembélé. Alors que les objectifs étaient de 800 000 hectares, ce sont 810 000 hectares qui ont été semées. La zone de Kita a réalisé 92 500 hectares contre 90 000 prévus, soit un taux de 102%.

Renouvellement bureau du CNPM : les deux camps à couteaux tirés

Annoncée pour le 26 septembre 2020, puis reportée avant de se tenir dans des conditions particulières, l’élection à la tête du Conseil national du patronat malien(CNPM), n’a pas fini de faire parler. Alors que Amadou Diadié Sankaré, l’un des candidats se déclare élu à la tête d’un nouveau bureau, l’actuel président Mamadou Sinsy Coulibaly parle d’une non élection et envisage la poursuite du processus pour la tenue dans les conditions requises de l’Assemblée générale puis de l’élection du futur président du CNPM.

« L’élection a été reportée pour plusieurs raisons », a expliqué Mamadou Sinsy Coulibaly dans une déclaration ce 28 septembre 2020 au siège du CNPM. Compte tenu du scrutin de liste qui prévaut pour cette élection, le secrétariat général qui reçoit les candidatures a reçu deux listes. Ayant fait le constat des cas de doublures, c’est-à-dire de personnes qui figurent sur l’une et l’autre des deux listes,  le secrétaire général a donc demandé aux deux listes de reprendre, ce qui n’a pas été fait.

Aussi, selon Coulibay, plusieurs  personnes figurant sur la liste du candidat Amadou dit Diadié Sankaré sans leur aval ont envoyé des communications pour le signifier au dit candidat et demander leur retrait de sa liste de candidature.

Une situation qui a amené l’organisateur de cette élection, en l’occurrence le secrétariat général à s’enquérir de recommandations auprès d’instances en charge des élections au Mali. Ces dernières ayant conseillé un report du scrutin, le président en a donc pris l’initiative, conformément à ses prérogatives. Une décision notifiée par le secrétariat général mais qui n’a pas été respectée par la liste conduite par Monsieur Sankaré.

« Une  élection régulière s’est tenue samedi avec plus de 2/3 des délégués qui m’ont porté à la tête du patronat avec 89 voix. Je suis donc le président du patronat », a déclaré M. Sankaré. Une élection « légitime »  malgré les conditions particulières de sa tenue, estime, M. Sankaré . « Vu qu’il y avait les 2/3 des délégués qui étaient là, nous avons décidé avec le comité statutaire de tenir cette assemblée élective, qui était prévue et dont le calendrier a été approuvé par le bureau tout entier du patronat ».

Mais «  on ne peut pas être candidat et organiser l’élection », rétorque M. Coulibaly qui ajoute qu’il ne sait pas quelle liste a été présentée à son nom. « Cela n’est pas la légalité ».

Le mandat du bureau actuel  du CNPM prend fin le 10 octobre 2020 et une réunion du bureau prévue ce 29 septembre déterminera sans doute les prochaines étapes de ce nouvel épisode au sein du patronat malien.

FEMAFOOT: Mamoutou Touré dit « Bavieux » nouveau président

A l’issue du vote des 62 délégués, Mamoutou Touré dit Bavieux a été élu ce jeudi nouveau président de la fédération malienne de football (FEMAFOOT). Avec 32 voix glanées contre 30 pour son concurrent le plus sérieux Salaha Baby, Touré, premier vice-président de l’AS Réal va succéder à Boubacar Baba Diarra. Il avait déjà gagné la controversée élection de 2017 qui l’opposait au même candidat, et qui par la suite été annulée. Englué dans une crise depuis plusieurs années et après 18 mois de gestion par un comité de normalisation, cette élection était attendu avec scepticisme, mais aussi espoir, celle de tirer le football de la crise. Dans son programme de gouvernance, Touré fait de la réconciliation une de ses priorités. Il affirme que sa première action « sera de mettre à plat la crise et de réconcilier les acteurs entre eux ». Il souhaite également réorganisé l’administration de la fédération, refondé les compétitions nationales et apporter un appui aux structures déconcentrées et aux clubs. Le tout nouveau président de la FEMAFOOT aura quatre ans pour mettre en œuvre ce programme.

Thomas Boni Yayi: « Il faut que nous sortions du cycle des élections compliquées en Afrique »

Président de la République du Bénin du 6 avril 2006 au 6 avril 2016, Thomas Boni Yayi s’est éloigné de la vie politique de son pays et coule « une retraite paisible », avec une pause pour venir au Mali en qualité de Chef de la Mission d’observation de l’Union africaine pour la présidentielle, dont le second tour a eu lieu le 12 août. À 66 ans, l’ancien chef d’État, qui dirigeait une équipe de personnalités de haut niveau (anciens Présidents, Premiers ministres, ministres et parlementaires, ainsi que de nombreux diplomates africains), a salué le peuple et les autorités maliens pour l’organisation à échéance du scrutin. Selon lui, les Maliens doivent maintenant se tourner vers l’avenir, avec comme priorité, parmi d’autres, la formation civique du citoyen. Dans un style bien à lui, il répond aux questions de Journal du Mali.

Comment qualifieriez-vous la présidentielle malienne en général et le second tour que vous venez d’observer au nom de l’Union  africaine en particulier ?

Je parlerai de la sérénité de tout un peuple, de toute une classe politique, d’un gouvernement, d’une société civile responsables. On peut parler également des efforts notables qui ont été faits dans le sens d’une meilleure transparence du scrutin, car, sur ce point, il y avait beaucoup de manquements et de désaccords entre le gouvernement et la classe politique. Il a fallu des discussions entre tous les acteurs pour obtenir des améliorations dans la gouvernance électorale. Je salue le respect du délai constitutionnel, s’agissant des délais du premier tour. Nous avions lancé un appel pressant pour que les gens aillent voter, pour que la jeunesse puisse utiliser ce droit citoyen, ce droit civique. Je parlerai enfin de quelques obstacles, comme les questions sécuritaires, les calamités naturelles, notamment les inondations, les crises intracommunautaires qui sont autant de menaces qui ont compliqué la tenue du scrutin. Sans oublier les djihadistes, qui ont interdit le vote ou menacé les gens qui voulaient aller voter.

Votre appréciation de ce second tour ?

Il y a de nombreux facteurs endogènes et exogènes. Le Mali vient de loin et il faut en tenir compte, tout en mettant de la rigueur dans les observations et les appréciations que nous avons eu à faire sur le processus. Les acquis que nous avons pu obtenir n’étaient pas évidents, donc je peux vous dire que le scrutin peut être jugé comme acceptable quand on intègre tous les paramètres et qu’on cumule leurs impacts. On peut le dire, le scrutin est acceptable.

Le candidat Soumaïla a annoncé qu’il ne reconnaitrait pas les résultats officiels de ce second tour. Craignez-vous une crise postélectorale ?

Je m’en tiens au délai légal et je pense que nous devons nous en tenir à ce qui est prévu comme délai constitutionnel pour les résultats. Je pense que les acteurs, je les connais, je les côtoie, sauront mettre le Mali au-dessus de tout et rester dans le cadre de la loi, même pour leurs contestations.

En avez-vous discuté avec les différents acteurs ? 

Je viens de quitter le Premier ministre (le lundi 13 août au soir, NDLR). La veille du scrutin nous avons rencontré le Président IBK. Nous étions également avec le Président Cissé ainsi que quelques candidats malheureux. Nous avons également discuté avec les partenaires que sont l’Union européenne, les Nations unies, la CEDEAO, l’OIF, etc. L’appel au calme que nous ne cessons de lancer est entendu de tous et, pour ce qui est des acteurs politiques, surtout des candidats qualifiés pour le second tour du scrutin présidentiel, je leur serai reconnaissant d’en faire une gestion pacifique, pour le bonheur du Mali, de l’Afrique de l’ouest et de tout le continent.

Quelle lecture fait votre mission du faible taux de participation ?

Il faut que nous sortions du cycle des élections compliquées en Afrique. Pour cela, il y a deux clés. Tout d’abord la formation des populations. C’est un véritable chantier à entreprendre par les dirigeants, mais aussi par les politiques. Quand vous voyez que dans un pays comme le Mali les gens ne sortent pas voter, que le taux de participation atteint difficilement les 50%, c’est qu’il y a une faible connaissance de l’importance du vote par les populations. C’est un travail d’éducation, d’information, et cela doit commencer dès le plus jeune âge, pour que les gens comprennent que le choix des dirigeants est un droit mais aussi un devoir et que la gouvernance que l’on désire ne peut advenir que si on est partie prenante. Cela prendra du temps et il faut commencer maintenant. Il faut que les politiques s’en sentent responsables et s’y investissent. La deuxième clé, c’est que ceux qui dirigent un pays sachent partir quand c’est le moment. Moi, j’ai dirigé le Bénin pendant 10 années. J’ai travaillé avec tout le monde et nous avons eu de grandes avancées sur le plan social, économique, etc. Quand l’heure est venue, j’ai passé le témoin. Cela aussi motive les électeurs.

Il faut donc inviter ceux qui sont de l’autre côté à nous rejoindre, nous les retraités (rires). Vous me comprenez. Vous avez vu dans notre délégation des anciens Présidents, des anciens Premiers ministres, des diplomates, etc. Cela veut dire que l’on peut continuer à donner, même après le pouvoir.

Au lendemain du premier tour, les Maliens ont énormément partagé une image de vous, assis dans un bureau de vote, avec comme légende : « il y a une vie après la présidence ». Parlez-nous, Excellence, de votre vie après la présidence.

Je suis surpris que vous parliez de cela. Cette image, c’est exactement cela la vie après la présidence. La vie après la présidence, c’est une vie que nous devons consacrer à nos peuples. Dans un contexte aussi important dans la vie du peuple malien, venir assister, appuyer ce scrutin, voilà une partie de cette vie après la présidence. Ma vie après la présidence, c’est toute une encyclopédie. C’est une vie heureuse, c’est une vie de partage d’expériences. Dans cette vie heureuse de retraité, nous serons heureux d’accueillir d’autres retraités. Lorsqu’on a 80 ans, c’est un tournant important, et là, vous pourriez me demander de dire « Monsieur le Président, faites appel alors à tous ceux qui ont 80 ans pour s’associer à vous ». Vous m’auriez fait une excellente recommandation ! (rires)

Louis Magloire Keumayou : « Le Mali est un pays qui a un semblant d’unité»

La période effrénée de la présidentielle malienne tend vers sa fin. Elle aura duré plus d’un mois, avec des discours enchanteurs et des grands meetings. Sur les 24 candidats du premier tour du 29 juillet, deux ont refait le jeu le 12 août. Le Président du club de l’information africaine, Louis Magloire Keumayou, a accepté de répondre aux questions du journal du Mali  sur le bilan du scrutin et l’évolution du Mali depuis l’élection de 2013. 

Quel bilan peut-on tirer de cette présidentielle ?

Le premier constat est que l’élection s’est tenue, malgré des conditions qui n’étaient pas totalement réunies pour qu’elle se tienne sereinement sur l’ensemble du territoire malien. Elle a eu lieu, tant mieux. Maintenant, avec toutes les violences qu’il y a eu sur le plan sécuritaire et verbal, il faudrait voir les suites qui seront données. Après c’est à la Cour constitutionnelle de se prononcer sur les résultats acheminés et centralisés à Bamako. Il est un peu trop tôt pour savoir si toutes les conditions ont été réunies pour qu’on parle d’une élection transparente, inclusive et réussie.

Y a-t-il eu des nouveautés par rapport à 2013 ?

La grande nouveauté est que le taux de participation, notamment dans le nord, a été plus important. Mais il ne faut pas se méprendre sur le fait que les gens croient en leur pays. Ils croient en ce que la démocratie peut encore apporter au Mali. On ne peut pas dire que les acteurs politiques eux-mêmes aient fait beaucoup pour saisir l’électorat entre 2013 et 2018. Malheureusement, ni IBK, ni Soumaila, ni les autres n’ont investi le nord, qui est quand même une partie du territoire malien, pour le rassurer, pour le reconstituer avec le sud. L’accord pour la paix, c’est quelque chose qu’il faut appliquer. Il faut que les acteurs politiques s’en saisissent et fassent en sorte que le pays revienne à un fonctionnement normal, celui qui a été le sien avant les attaques dans le nord. Il y a un autre défi qu’il faut relever, celui de sortir du tout militaire. Il faut arrêter de penser que la seule solution aux problèmes du Mali est militaire. Gagner la guerre est beaucoup moins  compliqué que de gagner la paix, et aujourd’hui même la guerre n’est pas encore gagnée. Je pense qu’il faut surtout investir le champ social et économique pour que les gens se sentent sécurisés.  C’est la mission première de l’État, protéger ses citoyens.

Est-ce que l’attachement à l’Accord au nord explique le taux favorable à IBK ?

Je ne sais pas qui doit récolter le gain de cette forte participation au nord, si ce n’est le peuple malien lui-même. Que le nord se reconnaisse dans des élections le prouve. C’est le Mali qui sort gagnant de cette forte participation.

Qu’est ce qui explique le faible engouement ailleurs ?

Ce sont les leaders politiques qui n’arrivent plus à se montrer « sexy » vis-à-vis de la population. Même dans les grandes démocraties les taux de participation baissent. Mais au Mali, en plus du fait que les politiciens soient mauvais, il y a les situations socioéconomique, sécuritaire qui sont mauvaises, l’État qui est ébranlé dans ses fondements. Malgré cela, les politiques font comme si on était dans un pays normal, qui n’a pas de problèmes de sécurité, économiques et sociaux. Je pense qu’ils déçoivent les électeurs. Malgré l’engouement qu’il y a eu dans les années 90 pour que le Mali devienne un pays de démocratie exemplaire, aujourd’hui on a l’impression que le soufflé est retombé et que les gens n’y croient plus trop.

Quels enseignements peut-on tirer de cette élection ?

Le Mali est encore un pays qui a un semblant d’unité. Même si tout n’a  pas été gagné dans la conquête du nord, on sent que tous les Maliens, du sud au nord en passant par le centre, se sentent concernés par les enjeux politiques et démocratiques. Ce qui est une bonne nouvelle. Le reste est entre les mains des politiciens eux-mêmes.

Quels sont les défis auxquels le nouveau président devra faire face en urgence ?

Il faudra qu’il réconcilie les Maliens, parce qu’un pays qui est divisé n’est pas fort. Avant on parlait d’un pays divisé en deux, aujourd’hui, il n’est pas exagéré de dire qu’il divisé en trois, puisque le nord, le centre et le sud sont soumis à des tensions très fortes. Le deuxième enjeu est celui de reconquérir la souveraineté de l’État partout où elle doit être exercée. Le troisième est de remettre les hommes au centre de la politique, parce qu’il faut que les politiciens arrivent à rendre les Maliens heureux à nouveaux.

Présidentielle 2018: un 2ème tour sous la pluie

A Bamako, où l’intérêt pour cette présidentielle s’était essoufflé depuis le premier tour du 29 juillet, faisant craindre une faible mobilisation, les opérations pour le second round sont fortement perturbées par la météo.

Très faible affluence dans les bureaux de vote ce matin à Bamako, capitale du Mali. Depuis l’ouverture des bureaux de vote à 8 heures GMT, sans incident particulier signalé pour l’instant, très peu de monde se présente devant les urnes. Alors que des soupçons de fraude planent sur le scrutin, la sécurité a été renforcée et les centaines de badauds qui flânaient dans les centres de vote au premier tour sont désormais « personae non grata » sur place. « Je n’irai pas », déclare tout de go Boubacar, un jeune trentenaire, tenancier de boutique à Kalabancoura, en commune  6 du District de Bamako. Selon lui, « c’est déjà fini. On connait la fin de cette histoire », évoquant ce second tour qui oppose le président sortant, candidat pour un second mandat, Ibrahim Boubacar Kéita et le chef de file de l’opposition Soumaïla Cissé. La coalition  autour de ce dernier maintient la pression et a assuré lors de la dernière déclaration à la presse, avoir mis en place un système pour réduire les risques de fraude, fraude qui selon elle a tronqué les résultats du 1er tour.

Si au Mali, en cette saison  hivernale, le ciel couvert et la pluie sont de bon augure, les acteurs de cette journée électorale, structures organisatrices comme acteurs politiques ne se réjouissent guère du climat pluvieux de cette matinée qui décourage plus d’un électeur. De Hamdallaye à Sébénikoro sur la rive gauche en passant par Kalabancoura de l’autre côté du fleuve en commune 5 du District, l’élément marquant de cette matinée est la « très faible affluence. Nous sommes là et depuis 8h jusqu’à 10h nous avons eu à peine 30 votants dans notre bureau », confie un assesseur au centre « Ecole fondamentale de Sabalibougou », lui aussi en commune 5. « Nous avons ouvert à 8h, avec tout le matériel bien  en place. A 10h36,  le nombre de votants s’élève à 36 », déclare Gaoussou Coulibaly, président du bureau de vote 06 au centre de l’Hippodrome, école Nelson Mandela, en commune 2.

A Yirimadio, en Commune 6 du District, ce sont les personnes âgées qui ont ouvert le bal. Les jeunes se sont aussi manifestés mais moins que l’ors du premier tour, du moins pour cette matinée. Ce sont en général « les vieux et les jeunes qui viennent le matin. Mais c’est encore un peu timide », explique un agent de bureau de vote.

Les cartes d’électeurs non distribuées étant toujours disponibles, quelques électeurs viennent réclamer les leurs. C’est le cas de Fatoumata Diarra qui était en voyage le 29 juillet et qui recherche ce matin sa carte et son bureau de vote. Dans son centre de vote, le même que celui du candidat Ibrahim Boubacar Kéita, l’affluence a faibli sitôt le vote de ce dernier accompli. Ici aussi la pluie en décourage plus d’un, les accès aux bureaux de vote sont devenu un  vrai parcours boueux.

Au premier tour de ce scrutin, les deux candidats avaient obtenu 41,72% et 17,78% respectivement pour IBK et Soumaila Cissé. Chacun a bénéficié de ralliement de recalés du premier tour et l’autre grande question de ce second tour est de savoir si les consignes de report de voix seront suivies.

Présidentielle 2018: Ils ont voté!

Les opérations de vote ont normalement commencé à Bamako comme dans les régions du Mali. Dans la capitale comme dans les villes principales à l’intérieur du pays à l’instar de Tombouctou, Gao ou encore Mopti, les électeurs sont sortis dans le calme.

A 10heures, dans la plupart des bureaux de vote qu’a sillonné notre équipe, le taux de votants était d’environ 10%. Même si quelques problèmes techniques ont retardé le début du vote pour certains électeurs, comme au centre principal de Doumazana où une dizaine de bureaux de vote a du être installé en plein air , le nombre de salle du centre n’étant pas suffisant et aucune autre disposition n’a été prise pour régler ça. A 9heures passées, certains électeurs sont rentrés chez eux sans voter parce que ne sachant pas où voter ».

Certains bureaux ont été installés sous des tentes.

Malgré ces difficultés, les choses se stabilisent petit à petit et c’est dans une ambiance bon enfant que les gens attendent leur tour pour voter.  L’attention de tous est bien entendu attirée par les candidats à cette présidentielle qui ont commencé à voter aux alentours de 9h. Quasi simultanément pour Modibo Koné à l’école communautaire de Titibougou et Ibrahim Boubacar Kéita qui lui a voté dans le centre de l’école AB à coté du marché de Sébénikoro, à 9h15. Le premier  s’est dit heureux en ce « jour historique. Je souhaite pour l’ensemble du peuple malien la paix, le bonheur et la prospérité. Que ce jour historique soit béni afin que les Maliennes et les Maliens puissent bénéficier de cette journée. Vive la démocratie et vive le Mali ». Le candidat Moussa Sinko Coulibaly, qui a lui  voté peu avant 10heures a salué l’engagement des Maliens. « Nous venons d’accomplir ce que les Maliens attendaient depuis longtemps. A la fin de la journée, nous espérons que les Maliens auront voté pour le changement », a-t-il déclaré.  Autres candidats à avoir déjà donné l’expression de leur choix le Dr Cheick Modibo Diarra,  Djenebou Ndiaye… Soumaïla Cissé devrait voter sous peu à Niafunké, avant de revenir sur Bamako. Aliou Boubacar Diallo, qui a également déjà voté a déclaré l’avoir fait « pour la paix et la stabilité au Mali et nous espérons que cette ambiance festive continuera ».

Dans les allées des centres de vote, notre équipe a croisé plusieurs personnalités. « Malgré les soubresauts de l’affaire du fichier électoral, je suis resté confiant » a affirmé le président de la Commission électorale nationale indépendante, Mamadou Diamoutani, tandis que l’ ancien ministre et cadre du RPM, Mahamane Baby, s’est dit « fier  que ce scrutin se passe dans de bonne conditions ».

Les électeurs sont dans un état d’esprit positif. « Je suis confiant. Je pense que tout a été mis en oeuvre pour une élection transparente. il suffit de voir le nombre d’observateurs ou de journalistes présents », a déclaré l’un d’entre eux au sortir du bureau de vote.  Fait marquant, de nombreuses personnes âgées se sont déplacées ce matin. C’est le cas d »Ibrahim Haidara, né en 1953 et handicapé, n’aurait raté ce vote pour rien au monde. « Je suis venu voter par patriotisme et civisme », a-t-il déclaré.

A Sébénikoro, Fatoumata Tounkara ne  décolère pas. Comme de nombreux électeurs bamakois, elle a attendu ce dimanche matin pour retirer sa carte directement dans son bureau de vote, comme cela est possible. Elle n’a malheureusement pas retrouvé le précieux parchemin et jure que « si je ne vote pas cette fois-ci, je ne votera plus jamais dans ma vie! », nous rapporte notre reporter sur place Achérif ag Ismaguel. Des agents électoraux maintiennent le calme face à ce type de situation ou encore dans des cas comme celui d’un jeune électeur qui rouspète pour passer avant les autres dans la queue devant le bureau de vote.

 

 

 

Général Siaka Sangaré, Délégué général aux élections : « Tous les fichiers sont perfectibles »

A la tête de la Délégation générale aux élections (DGE) depuis 2006, le Général Siaka Sangaré est un des principaux acteurs de l’élection présidentielle. Plébiscité à l’international pour son expertise, il a dégagé un moment dans son agenda chargé pour répondre aux questions du Journal du Mali.

Quelles sont les spécificités du fichier électoral cette année ?

Cette année, après la révision exceptionnelle des listes électorales, nous avons mis à jour le fichier existant. Il en est ressorti que nous avons 8 464 000 électeurs répartis entre 23 041 bureaux de vote. Ce fichier n’a pas de spécificité par rapport aux précédents, c’est simplement une mise à jour. Si je devais parler de spécificité, ce serait de l’inversion du ratio hommes – femmes. Auparavant, le nombre de femmes était supérieur, mais dans le fichier actuel c’est l’inverse. Nous nous sommes aperçus que cela est surtout dû à l’étranger, où il y a plus de 520 000 électeurs mais très peu de femmes.

Après son audit, l’OIF a conclu que le fichier était fiable mais perfectible. En quoi l’est-il ?

Ce n’est pas moi qui le dit, mais le comité d’audit. Il n’y a pas de fichier parfait, tous les fichiers sont perfectibles. Dans le contexte malien, il y a deux insuffisances qu’il conviendrait de corriger : la sous-inscription des jeunes électeurs et l’existence d’électeurs décédés. Il y a aussi des erreurs de saisie qui sont indépendantes de la volonté de la DGE mais qui doivent également être corrigées.

La révision exceptionnelle destinée aux nouveaux majeurs n’a pas suscité un grand engouement. Cela a-t-il eu une incidence ?

Cette sous-inscription des jeunes majeurs est une insuffisance du fichier électoral indépendante de la volonté de la DGE et de celle du ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation (MATD). Lorsque nous avons élaboré le fichier de 2016, dans la perspective des communales, nous avons fait une évaluation et rédigé une note technique qui a été envoyée au MATD. C’est pour cela que le ministère a organisé une opération spéciale d’enrôlement des jeunes majeurs. Nous nous attendions à au moins 500 000 jeunes, mais le résultat a été très décevant, puisque nous en avons recensé moins de 100 000.

Comment expliquer la présence de personnes décédées dans le fichier ?

Même le jour du scrutin, au moment où certains sont en train de voter, d’autres sont rappelés à Lui par le Bon Dieu. Dans le contexte malien, ceci s’explique par deux phénomènes. Tout d’abord, nous avons un état-civil en construction, pas encore fiable. Tous les faits d’état-civil ne sont pas enregistrés à temps. Cela a été aggravé par la suppression de l’impôt per capita qui, à la faveur des évènements de mars 1991, a été supprimé, certainement à juste raison. Il obligeait la famille d’une personne décédée à aller le déclarer rapidement afin de ne pas devoir le payer. Depuis la suppression, les chefs de famille ne se pressent plus pour faire les déclarations. Voilà pourquoi nous avons des électeurs décédées dans le fichier, mais le plus important est de faire en sorte qu’on ne puisse pas utiliser leurs cartes d’électeurs. Le dispositif mis en place cette année, avec un assesseur de la majorité et un autre de l’opposition qui auront pour mandat spécifique l’identification des électeurs dans les bureaux de vote, fera que, j’en suis sûr et certain, s’ils ne sont pas complices, personne ne pourra passer à travers les mailles du filet avec la carte d’autrui.

Certains électeurs se plaignent de devoir voter très loin de leur domicile. Quelle en est la cause ?

Cette année, nous avons fixé un minima pour tous les bureaux de vote. Si le nombre d’électeurs dans un bureau n’atteint pas 50, ce bureau est rajouté à un autre. Effectivement, cela peut créer un phénomène d’éloignament. Mais les gens devraient chaque année, à l’occasion des révisions des listes électorales (d’octobre à décembre), aller changer leur lieu de vote afin de se rapprocher de leur lieu de résidence. Je l’ai fait personnellement.

La DGE procède au financement public des partis politiques. Un financement spécial est-il prévu en période électorale ?

Le financement des partis politiques est une aide que l’État leur accorde. Son montant est égal à 0,25% des recettes fiscales du budget d’État. C’est donc un financement annuel, qui n’est pas lié aux élections qui n’ont pas de financement spécifique prévu. C’est un peu l’une des faiblesses de notre système électoral, mais des réflexions sont menées. Je pense que, tôt ou tard, la possibilité de rembourser jusqu’à un certain niveau les dépenses électorales existera, tout comme le fait de fixer un plafond de dépenses pour les campagnes. Dans certains pays, c’est 300 millions, dans d’autres 500. Il va falloir que nous fassions la même chose.

Quels sont les critères de financement public des partis ?

Il y a sept critères d’éligibilité, dont cinq importants. D’abord, il faut avoir un siège différent du domicile, tenir les instances statutaires, avoir un compte dans une institution financière et déposer le 31 mars de chaque année un bilan qui doit être validé par la Section des comptes de la Cour suprême. Ensuite, il faut avoir participé aux élections générales.

Le poids et l’implantation des partis déterminent-ils leur financement ?

Oui. Il y a une clé de répartition. Ceux qui ont beaucoup d’élus ont une plus grande part. 35% sont répartis entre les partis au prorata du nombre de députés. Il en est de même pour les conseillers communaux et pour le genre. 10% sont alloués aux femmes élues, 5% pour les femmes députés et 5 autres pour les conseillères.

Habib Dembélé Guimba : « J’ai le même âge politique que les autres candidats »

Il avait affiché son intention de candidater à la présidentielle. Après y avoir renoncé, le célèbre comédien, Habib Dembélé « Guimba » évoque dans un entretien avec le Journal du Mali les raisons de cette non candidature.

Pourquoi n’êtes-vous plus candidat à la présidentielle ?

Je ne suis plus candidat parce que je n’ai pas obtenu le quota de parrainages requis à Kidal, Tombouctou, Mopti et Bamako, alors que la loi électorale dit qu’il faut réunir 5 parrainages dans chaque région. Pour ne rien vous cacher, dans certaines régions les parrainages se vendaient entre 25 000 et 600 000 francs CFA. Une élue de Kanadjiguila, près de Bamako, nous a clairement dit : pas d’argent, pas de parrainage. À  Mopti et à Bamako également. Au Nord, la fourchette était entre 500 et 600 000 francs CFA.

Vous pensez qu’il y aura un jour un changement au Mali pour que les élus fassent le travail pour lequel ils sont élus ?

S’il n’y a plus d’espoir tout est foutu. Il n y aura plus de Mali, ce n’est plus la peine que nous nous battions. Nous avons des élus corrects, c’est avec eux qu’il faut travailler. Ce Mali est extraordinaire, il y a des jeunes qui se battent tous les jours dans les associations pour changer les choses autour d’eux. Ce Mali est fier de Gassama, de Bathily, qui sauvent des vies en Europe. Des jeunes, dans les endroits les plus reculés du pays, sans électricité, sans hôpitaux, innovent. Des gens s’organisent, cotisent pour améliorer leur vie alors que c’est le travail de l’État. Il n’y a pas de petite action, il n’y a pas de petit Malien.

Si vous aviez pu être candidat, votre action se serait-elle bâtie sur ces valeurs ?

Nous avons un programme détaillé, disponible et accessible sur les réseaux. Il est fait pour s’implanter dans le débat politique. C’est le but de notre mouvement Mali ye anw bè ta ye. Au Mali il y a des élus honnêtes, entre autre ceux du PRDM, qui nous ont donné sans aucune condition leurs parrainages.

L’idée c’est de continuer travailler avec eux ?

Notre devoir humain nous impose de les contacter à  nouveau. Je ne suis pas un ingrat. Ils nous ont donné leurs parrainages de façon honnête et démocratique, quand ils auront besoin de nous, nous répondrons. Nous ne sommes pas des politiques, nous sommes issus de la société civile et nous sommes fiers de ce statut. Il y a trois conditions pour que nous rejoignons un candidat : qu’il ait l’esprit démocratique, qu’il prenne en compte notre programme, qu’il prenne en compte l’avis de ceux en qui nous croyons, les membres de notre mouvement, de partout au Mali et de la diaspora.

L’on ne peux vous interroger sans faire un parallèle entre vous et Coluche, candidat en France à l’époque et également comédien…

Je suis allé plus loin que Coluche, je suis allé aux urnes J’ai le même âge politique que les autres candidats maliens. IBK s’est présenté pour la première fois, comme moi, en 2002. Soumaila Cissé idem. Nous étions là avant eux. Les pièces Wari et Fereke nyagami bougou, à la base de la grogne sociale et à l’origine de la révolution, nous les jouions sous la dictature, quand eux n’étaient pas là. Mes candidatures sont toutes aussi légitimes que les leurs, elles ne sont pas de façade, elles sont réelles et plus que sérieuses.

L’art est-il une forme d’engagement ?

Oui c’est tout à fait ça. Je suis venu au théâtre par hasard, j’y suis resté car j’avais conscience du rôle qu’il pouvait avoir. C’est l’arme la plus efficace.

Parce que par la catharsis on dénonce ?

Oui absolument. Pour revenir à Coluche, j’ai beaucoup de respect pour lui. Il fait partie des personnes les plus intelligentes que l’humanité ait connues. Il était d’une finesse incroyable. Je pense que l’intelligence et la beauté se situent au niveau du détail. Et ça c’était Coluche!

Pensez-vous qu’en l’état actuel des choses, nous pouvons aller aux élections ?
Je pense que beaucoup de changements de dernière minute ont altéré les choses. Il est évident qu’on aurait pu organiser plus efficacement  ces élections. Je ne sais pas si elles seront transparentes et si les gens voteront partout au Mali, si on regarde l’état du centre et du nord. Si les choses avaient été autres, on aurait pu avoir des élections dans de meilleures conditions.

Election présidentielle : la MINUSMA appuie le processus

La Mission des Nations Unies au Mali réaffirme son accompagnement au  processus électoral en cours dans le pays. Lors de sa conférence de presse bimensuelle le 21 juin la porte-parole de l’organisation a rassuré de leur engagement aux côtés des autorités.

Toutes les attentions convergent sur la présidentielle prévue dans un mois. Malgré la volonté des autorités à tout mettre en œuvre pour la réussite de ce scrutin du 29 juillet, des difficultés d’accès aux régions du nord et le centre demeurent. C’est dans ce cadre que la MINUSMA appuie déjà le gouvernement dans l’acheminement du matériel électoral, formation des agents  et sécurisation du processus. « La MINUSMA apporte un appui à l’organisation des prochaines élections générales de 2018 (présidentielle de juillet et législatives de novembre), a déclaré Mme Myriam Dessables, porte-parole de la mission. Ainsi,  4,798 Tonnes de matériel (nouvelles cartes d’électeurs) pour les quatre  régions : Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal.

La division des Affaires électorales de la MINUSMA a organisé le 12  et 13 juin une session de renforcement des capacités de 64 agents d’appui logistiques recrutés. « Ces agents d’appui équipés chacun d’un véhicule 4X4 et de moyens de communication (ordinateurs, cellulaires) seront déployés dans les prochains jours dans les 49 cercles du Mali y compris le District de Bamako dans le cadre de la mise en œuvre de toutes les opérations électorales y compris la distribution des cartes d’électeurs biométriques dont le lancement officiel a eu lieu ce 20 juin sur toute l’étendue du territoire national », a fait savoir la porte-parole de mission lors de cette conférence de presse.

Dans le même but, la Division des Affaires électorales de la MINUSMA a pris part aux travaux du séminaire international  ayant lieu du 19 au 20 juin à Bamako. Ladite rencontre organisée par la CENI en collaboration avec l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), s’est déroulée en présence de plusieurs représentants des Institutions, du ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation, la Délégation générale aux élections(DGE), la Cour Constitutionnelle, les représentants des partis politiques et des experts internationaux. Objectif : échanger  sur le rôle de la CENI dans le processus électoral.

Des campagnes de sensibilisation des leaders communautaires et des médias sur leurs rôles respectifs en tant qu’acteurs dans la promotion d’une culture de paix, de la cohésion sociale et de la prévention des conflits ont également été organisées à Gao. Deux autres sont prévues  à Mopti ce 22 juin et à Tombouctou le 13 juillet. « Plus de 10 sessions de sensibilisation communautaire ont eu lieu à Bamako et dans les régions avec plus de 5000 personnes participantes », comptabilise Mme Myriam Dessables.

 

Fondation CMDID : Ancrer la démocratie au Mali

Crée en 2003 dans le cadre d’un projet de partenariat, la fondation Cadre Malien pour le Dialogue inter partis et la Démocratie (CMDID) est depuis 2008 dédiée à  l’ancrage de la démocratie au Mali. Elle a lancé le 4 juin 2018 un nouveau projet, destiné à favoriser le rehaussement du taux de participation aux élections. Un enjeu de taille, qui doit contribuer à la crédibilité du processus électoral.

Le renforcement des capacités des partis politiques, la création d’un espace d’échange inter partis sur les questions de gouvernance démocratique et sur les questions de préoccupation nationale et la prise en compte des questions de genre sont les grands axes de mise en œuvre des missions du CMDID, constitué d’environ 80 partis politiques.

Lancé le 4 juin 2018, le projet de sensibilisation et d’éducation citoyenne vise à rehausser le taux de participation lors des futures échéances électorales dans certaines circonscriptions, choisies en raison de leur importance, et pour assurer la continuité du projet relatif à la prise en compte du genre, également exécuté avec succès dans ces localités.  Sept zones, situées dans les régions de Mopti et Kayes, quatre cercles, Niono, San, Bougouni et Koutiala, et le District de Bamako sont concernés. « Des zones choisies en raison du faible taux de participation enregistré et en raison du fait qu’il s’agit de grandes circonscriptions électorales, avec un nombre important d’électeurs », selon Madame Mariam Dicko, chargée de programme au CMDID et responsable du projet. Pour permettre à tous les acteurs de bien appréhender les enjeux, le cadre a aussi organisé des rencontres autour des changements dans la loi électorale.

La plateforme de dialogue ainsi mise en place est un espace de discussion qui permet d’aborder les problématiques d’intérêt national et de faire des recommandations transmises aux autorités concernées, comme lors du projet de révision constitutionnelle. Une occasion pour le CMDID d’expliquer aux partis le projet et de recueillir leurs préoccupations.

Travaillant principalement avec l’Institut Néerlandais pour la Démocratie  Multipartite (NIMD), sur 5 ans, le cadre se focalise sur les questions sur lesquelles se positionnent les partis politiques. Définies au sein du Conseil d’administration, « les activités sont programmées en fonction des préoccupations nationales et du  contexte sociopolitique », explique Madame Dicko. Elles peuvent concerner les renforcements de capacité des partis et être relatives aux élections, à l’idéologie politique ou encore aux mesures permettant aux partis d’inclure les couches souvent marginalisées que sont les femmes et les jeunes.

« Si le cadre n’existait pas, il aurait fallu l’inventer », soutient Madame Dicko, car il permet aux partis, « qui adhèrent de façon volontaire », de discuter de façon ouverte et dans un lieu dépassionné de questions d’ordre national.

La Plateforme « Alliance Ensemble pour le Mali » prône l’apaisement

La nouvelle Plateforme de la Majorité présidentielle ‘’ Alliance Ensemble pour le Mali’’ a tenu une conférence le mardi à la maison de la presse de Bamako. Son président, principal conférencier a appelé aux respects de la loi  et au bon sens.

Le 5 juin, des responsables de la Plateforme ‘’Alliance Ensemble  Pour le Mali’’ ont organisé à la maison de la presse une conférence pour communiquer sur les derniers évènements relatifs à la marche interdite de l’opposition et appelé tous les acteurs à s’inscrire dans une dynamique responsable.

Le président du Rassemblement pour le Mali et de l’alliance EPM, Dr Bocary Treta a tenu avant tout à présenter aux hommes de la presse « ses profonds regrets » suite à la violence policière sur les journalistes lors de la marche du 2 juin de l’opposition. « Tel n’était pas le souhait  ni du gouvernement ni de la majorité présidentielle, ni du Président IBK encore moins à mon sens de nos services des maintiens d’ordre », s’est-il excusé, exprimant « sa solidarité pour la liberté ».

Dans son intervention, Dr Treta a rappelé toutes les étapes ayant jalonné le processus, depuis la mise en place du comité  d’expert piloté par l’opposition jusqu’au vote de la loi électorale modifiée.  Au regard des acquis et des concessions faites par le gouvernement  pour réussir une élection transparente, le président de l’Alliance a exprimé son incompréhension face au comportement de l’opposition et à sa « violence verbale ». « Et pourquoi notre opposition penserait-elle avant même d’entrer dans l’élection qu’elle a déjà gagné et si elle ne gagne pas ce qu’il y a eu fraude », s’étonne-t-il, invitant  les uns et les autres à revenir à l’ordre. « Ce qui est demandé à chacune et à chacun qui ont des prétentions pour gérer ce pays, c’est  de se préparer et de rentrer dans le processus, de rentrer dans la République,  d’être de la République », a-t-il souhaité. « Nous de la majorité, nous allons avec toute l’humilité Républicaine, toute la responsabilité,  abordé ces élections en toute confiance  avec l’ambition de les emporter. Mais nous disons chaque fois qu’une élection n’est jamais gagnée à l’avance », redresse-t-il.

Sur l’accaparement du pouvoir sur l’ORTM, Dr Bocary Treta répond que tout citoyen, tout parti politique  à la même passerelle qu’eux pour accéder à ce media d’Etat.

Conscient de la situation tendue, il rappelle la grandeur du Mali, héritée des grands empires et royaumes, foyer des valeurs traditionnelles.  « Nous sommes un peuple de paix, de concorde et de vivre ensemble », a-t-il mis en avant. « Je suis convaincu que nul n’a intérêt au Mali dans le désordre et la violence. Quand la violence commence personne ne sait où  est ce qu’elle va s’arrêter. Personne ne sait qui va être épargné et qui ne va pas l’être », prévient ainsi ce baron du RPM, appelant au bon sens.

Alors qu’il invite ses protagonistes à « une compétition civilisée », des jeunes se réclamant du RPM envisage une manifestation pour soutenir le gouvernement ce vendredi, simultanément à celle de  la Coalition pour l’alternance et le changement. Une initiative dont se désolidarise les 66 partis politiques de l’Alliance Ensemble pour Mali dont l’objectif est d’assurer  la victoire à IBK.

« Notre alliance ne peut pas plaider pour la paix, appelé l’ensemble des acteurs à savoir raison gardé et d’autre part chercher à envenimer une situation », a conclu le conférencier.

Siré SY : « Quand le Mali éternue, c’est toute l’UEMOA et le Sahel qui toussent »

Siré SY est le président du think tank Africa WorldWide Group. Un think tank afro-centré sur les questions de géostratégie et de communication politique et qui vient de publier un livre  »Afrique le modèle du monde: essai sur une géostratégie afro-centrée », paru en février 2018 . Il se prononce pour le Journal du Mali, sur le jeu des acteurs et sur les perspectives de l’élection présidentielle du 29 juillet 2018 au Mali.

 

Quelle lecture votre think tank fait-il de la conjoncture politique au Mali, à presque un mois de la présidentielle du 29 juillet ? 

En à croire le secrétaire général du ministère de l’administration territoriale, Baba Hamane Maiga, lors de son point de presse tenu le 17 mai dernier,  »les dispositions sont en cours pour sécuriser le pays pour que l’élection puisse se tenir à date indiquée, et qu’il n’y aucune raison qui puissent empêcher les 8 millions d’électeurs à voter le 29 juillet prochain ». D’un autre côté, notamment dans les rangs des observateurs et autres partenaires du Mali, on reste sceptique et on avance que l’administration malienne n’est pas encore en mesure d’organiser matériellement et techniquement l’élection présidentielle sur toute l’étendue du territoire national pour que le verdict soit acceptable pour tous les bords politiques. Il faut aussi noter que la tenue correcte du vote dans les régions du Centre et du Nord ne dépend pas exclusivement du Mali mais aussi de la France et de l’Algérie. La situation actuelle du Mali que je porte intensément dans mon cœur, est à l’image du drame cornélien qui met en avant une situation où le héros, ici le Mali, pris dans une impasse, ne peut trouver son salut, sans heurt, ni blessure morale, qu’à travers l’élévation. Car, dans une impasse étroite en termes de marge de manœuvre et sans possibilité de retour en arrière, seule l’élévation et la hauteur, permettent de voir la lumière. Cela demande au Mali et aux Maliens, une volonté, surtout morale, parfois un sacrifice de soi, et une ténacité inébranlable face aux défis.

On entend parler de plus en plus de crise post-électorale. Est-ce que l’atmosphère tendue entre l’opposition et la majorité ne constitue- t-elle pas déjà les prémices de la  crise ?

On va vers une élection présidentielle avec beaucoup d’enjeux, d’incertitudes et de défis, comme il est de de coutume en Afrique où des tensions pré et post électorales ont souvent rythmé les processus électoraux. Toutes les autres élections se conjuguent au pluriel (les élections législatives, municipales, provinciales, territoriales…) sauf la présidentielle qui elle, se conjugue au singulier. Une élection présidentielle, c’est le rendez-vous d’un leader avec son peuple, c’est le rendez-vous d’un destin individuel avec une destinée collective, c’est le rendez-vous d’une vision et d’un projet de société avec les espérances et attentes collectives. C’est en somme, le rendez-vous d’un porteur d’enjeu avec des porteurs de voix. Pour le cas précis du Mali, comme c’est le cas de la plupart des Etats africains de langue française et à des exceptions près, c’est leur modèle politico-institutionnel qui secrète la violence politique et électorale. Le Mali a accusé du retard sur des réformes et ruptures qui auraient pût être prises et faites depuis longtemps. Son immense espace territorial qui était un avantage est devenu une contrainte.

Comment et en quoi le Mali a-t-il accusé du retard sur des reformes et ruptures qui auraient pûêtre prises et faites depuis longtemps ?

Dès lors que les pays subissent leur géographie mais font leur histoire, la réalité territoriale du Mali aurait dût inspiré aux pères fondateurs, d’oser une gouvernance du Mali de type régionaliste, avec des gouvernements régionaux autonomes et forts et un gouvernement national puissant et stratège. Le fait que le Mali ait hérité de la France et ait continué à perpétuer le modèle de fonctionnement de l’Etat jacobin, centralisateur, accaparateur voire même corrupteur, a fait que ce beau pays au beau peuple, est resté la République du Mali (un Etat administrateur et gestionnaire) alors qu’il y avait de l’espace pour inventer la République malienne (un Etat développementaliste et stratège). Le Mali n’est pas le seul pays dans ce cas de figure de ratage historique en Afrique et ce qui est arrivé au Mali et qui guette le Cameroun, est aussi ce qui est arrivé à des pays comme la RDC, le Soudan et l’Érythrée. L’autre conflictualité diffuse au Mali et qui est le lie de l’extrémisme violent au Centre et au Nord du pays, porte en elle même les racines profondes de ce qu’on appelle génériquement la crise malienne. Elle est relative à une cassure des ressorts du sinankuya malien, le vivre ensemble à la malienne entre différentes communautés. La classe politique malienne, les leaders d’opinions, les décideurs communautaires, les autorités traditionnelles et les chefs religieux, aujourd’hui plus que jamais, doivent se ressaisir. Dans l’un comme dans l’autre, toutes les attentions sont tournées vers le Mali car quand le Mali éternue, c’est toute l’UEMOA et le Sahel qui éternuent.

 Est-ce que lemploi par un grand nombre dacteurs nationaux et internationaux du terme de  ‘’crise post-électorale‘’, nest pas un facteur de conditionnement du peuple malien à une possible crise ?

Ma réponse s’inscrit dans la continuité de mes précédents propos en ce sens que le Mali qui est à un tournant décisif dans sa trajectoire, est appelé à cette élection présidentielle, à se rappeler qu’il n’est pas n’importe qui et ne doit pas faire n’importe quoi. La République du Mali est à la fois héritière et fille de l’Empire du Ghana, de l’Empire du Mali, du Royaume Songhaï, du Royaume du Macina et de la Confédération touareg Iwillimidère de la Boucle du Niger. A titre d’exemple, l’empire du Mali, fut le plus vaste empire qu’ait connu l’Afrique noire et l’un des plus considérables qui aient existé dans le monde. C’est donc dire…Le génie du peuple malien réside au fait qu’à chaque fois sa situation ait été donnée pour désespérée, il a su la transformer en sortant le grand jeu. Et ceci depuis fort longtemps. Le Mali, un pays riche de toutes les richesses de son sol, de son sous-sol et de ses enfants, je n’en doute à aucun instant, démontrera encore à l’occasion de cette présidentielle de juillet 2019, sa vraie image, celle d’un peuple et d’une classe politique matures et très au fait des enjeux locaux et globaux. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas quelques heurts ici et là mais au finish, il y aura de quoi à être fier d’être malien au soir du 29 juillet 2018.

Quelles sont les cas de figures à envisager pour rendre possible votre optimisme pour le Mali ?

Il y a trois cas de figures qui sont possibles pour le Mali: la continuité, l’alternance ou l’alternative.  Il y’a encore de la place au Mali, en termes de gouvernance politique et de management de la très haute performance, à expérimenter une Décentralisation à outrance, avec des pôles territoires en vue d’une territorialisation des politiques publiques, rempart pour retrouver l’unité nationale et l’intégrité territoriale. Pour éviter toute partition du pays et qui pourrait faire le bonheur des Autres. Le think tank Africa Worldwide Group que je préside et le Soudanais que je suis (il se définit comme un Soudanais de l’ex Fédération du Mali et un Africain), estiment que l’une des priorités de celui qui sera élu au soir du 29 juillet, c’est de refonder la gouvernance politique et d’inventer l’Etat malien, pour trouver une solution concertée autour de ces trois constantes: la gouvernance d’Etat institutionnalisé, la gouvernance légitime et le défaut de gouvernance. C’est donc au vaillant peuple malien, à lui seul et seulement, de décider de qui des candidats, présidera à sa destinée, les cinq ans à venir.

 

Votre think tank vient de publier en février 2018, un livre au titre évocateur  »Afrique, le modèle du monde: essai sur une géostratégie afro-centrée ». Quelle est la substance du livre, en termes didées et de prises de position avancées et les axes de réflexion de votre think tank?

 

S’agissant de notre think tank (www.africaworldwidegroup.org), nous avons trois Départements: le Département de Géostratégie, le Département Politiques publiques et le Département Communication politique et Relations publiques. Notre méthodologie est: étudier en universitaire ; penser en politique ; parler en journaliste. S’agissant du livre, il est un essai en Stratégie et Prospective, dans une perspective afro-centrée. Ce livre a pour contenu et finalité, de (re) donner aux Africains et Africaines, une estime de Soi. Ce livre se veut aussi un outil d’aide à la décision pour nos Dirigeants et Décideurs dans une Afrique qui vit un tournant décisif dans sa trajectoire millénaire et cosmopolite. C’est le temps de l’Afrique. L’Afrique vit son temps. Il s’agit d’un temps appelé à survoler le temps pour s’inscrire dans la durée imputrescible des épopées sublimées, celles qui sont appelées à éclairer la marche du continent, la marche du monde. Cet essai se soucie de coller aux exigences de l’heure, de coller aux pulsions de nos pays riches de toutes les richesses de leur sol, de leur sous-sol et de leurs enfants. Le pari de contribuer à donner la vraie image de notre continent, l’image enthousiaste du vainqueur qui se réjouit de la victoire à construire méthodiquement, chaque jour, de la victoire lancinante et permanente sur soi.

 

A vous entendre parler, il y a de quoi être optimiste pour l’Afrique?

 

Si vous faites un peu attention, vous verrez qu’il y a une nouvelle dynamique enclenchée sur le continent et qui présage dans la plupart des pays et sur le continent, une reprise en main des destins de nos pays et de nos peuples pour renégocier la place de l’Afrique dans la mondialisation. C’est cette nouvelle dynamique d’une Afrique des possibles, longtemps absente des imaginaires, qui est en train de se construire lentement et méthodiquement sur le continent. Et c’est cette nouvelle dynamique, cette Afrique à l’horizon, qui a porté Georges Weah au Liberia, qui a porté Julius Maada Bio en Sierra Leone, qui a porté Macky Sall au Sénégal, qui a porté João Lourenço en Angola, qui a porté Cyril Ramaphosa en Afrique du Sud, qui a porté Adama Barrow en Gambie, qui a porté José Mário Vaz en Guinée Bissau, qui a porté Emmerson Mnangagwa au Zimbabwe…

 

Élection présidentielle : Soumaïla Cissé investi candidat

Le chef de file de l’opposition, l’honorable Soumaila Cissé a été investi le samedi 12 mai au stade du 26 mars. Le désormais candidat de l’URD avait bénéficié du soutien des plusieurs mouvements et associations.  Après une dénonciation de la gouvernance actuelle, il promet au public ‘’une victoire certaine’’.

’Boua Ka Bla’’, ‘’Soumi, la solution ’’. Ce sont là quelques un des refrains entonnés depuis la tour de l’Afrique en direction du stade du 26 mars en cet après-midi du samedi 12 mai. Dans les Sotrama, mobilisés pour l’occasion, un seul homme comptait : Soumaila Cissé.

Devant l’infrastructure footballistique,

Parrainage de candidatures : Comment ça marche ?

La loi électorale de 2016, modifiée en 2018, exige que chaque candidat remplisse un certain nombre de critères. Le parrainage par des députés ou des conseillers communaux en est un pour que la Cour constitutionnelle valide son dossier. A quelques mois de l’élection présidentielle, comment se déroule cette procédure ?

Alors que les déclarations de candidatures se poursuivent en vue de la présidentielle, tous les candidats ayant l’ambition d’escalader la colline de Koulouba feront face une procédure électorale : le parrainage. La loi électorale en vigueur, en  son article 149 (nouveau), spécifie que : « chaque déclaration doit recueillir la signature légalisée d’au moins dix députés ou cinq conseillers communaux dans chacune des Régions et du District de Bamako ». La déclaration de candidature, selon l’Article 148, est faite à titre personnel à partir de la publication du décret convoquant les élections, au plus tard le  trentième (30ème) jour précédant le scrutin, et adressée au Président de la Cour constitutionnelle, qui en délivre récépissé. En plus de cette mesure, le candidat doit s’acquitter d’une caution de vingt-cinq millions de francs CFA. Pour certains observateurs, ce système crédibilise la candidature, alors que pour d’autres c’est  une manière de barrer le chemin « aux candidatures fantaisistes ». « Certains estiment que  c’est pour mettre la barre très haut, pour que tout le monde ne puisse pas  se présenter, mais même sans ces conditions draconiennes, il y aura des gens qui n’auront personne comme parrain », explique l’honorable Touré Alkaidi Mamoudou, du groupe Vigilance Républicaine Démocratique (VRD).

Pour l’honorable Sankaré Idrissa, du groupe parlementaire ADEMA – ASMA, le système à sa raison d’être. « C’est pour légitimer le candidat, parce que ces élus sont les représentants du peuple. On suppose que quand tu es un conseiller, tu es un représentant d’une partie de la population », avance-t-il. Selon lui, c’est le parrainage des députés qui est le plus recherché. « Ce qui ont de l’argent  préfèrent être parrainés par un député. Cela évite aussi des problèmes devant la Cour constitutionnelle, parce qu’il peut y avoir un seul conseiller qui soutient plusieurs candidats, ce qui n’est pas permis », souligne-t-il.

Même s’il y a une volonté de limiter les candidatures à travers cette loi, l’achat des signatures reste une alternative pour ceux qui ont confiance en leurs poches. En attendant, ce sont les annonces tapageuses de candidatures qui occupent le devant la scène politique.

 

Les problèmes du Mali vont au-delà de la présidentielle de juillet

L’organisation d’une élection crédible est importante au Mali mais elle ne doit pas occulter le défi de l’absence de l’État dans plusieurs localités du pays.

Quatre mois avant la tenue de l’élection présidentielle du 29 juillet au Mali, le pays reste confronté aux problèmes de gouvernance et de sécurité. Sur les plans politique, sécuritaire et opérationnel, les défis perdurent et focalisent l’attention nationale et internationale.

L’insécurité au Mali, caractérisée par la persistance de la menace terroriste, a entrainé la perte de contrôle de l’État sur une grande partie des régions du Nord et du Centre du pays. De plus, la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, signé entre le gouvernement malien et des groupes rebelles, en 2015, est actuellement au point mort. Dans ces conditions, il est peu probable que les pouvoirs publics puissent gérer et superviser efficacement les élections dans toutes les localités.

La présence d’agents électoraux n’est toujours pas garantie dans environ un tiers du pays

 

Si les récentes déclarations du Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, lèvent l’équivoque quant à la volonté d’organiser l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels, il semble évident que seul un scrutin imparfait pourra être organisé et qu’il importera de créer les conditions de son acception.

Sur le plan politique, l’espoir que le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) a suscité avec plus de 77 % des voix en 2013 s’est estompée avec en toile de fond des fractures au sein de la majorité présidentielle et une galvanisation de l’opposition politique.

Un sentiment d’insatisfaction, motivé par la perception qu’il n’a pas fondamentalement amélioré la situation du pays, grandit vis-à-vis du président Keïta. Selon un sondage réalisé en 2017 par la Fondation Friedrich Ebert auprès de 2 156 personnes, 50 % des sondés étaient « plutôt insatisfaits » de la gestion du président, contre 38,9 % qui se sont déclarés « plutôt satisfaits ».

Alors que des discussions sont en cours pour choisir un candidat unique de l’opposition, des coalitions hétéroclites se réunissent autour du mot d’ordre «Tout sauf IBK». Avec des conflits d’intérêts personnels et des dissensions stratégiques en son sein, il est cependant peu probable que l’opposition parvienne à s’unir autour d’une candidature unique.

 

Le prochain président du Mali devra faire face à de nombreux défis pour stabiliser le pays

 

Parallèlement, les partisans du président IBK restent convaincus que les résultats positifs de son premier mandat, notamment les améliorations au sein de l’armée malienne, lui permettront d’obtenir un second quinquennat.

Alors que l’opposition comme la majorité gouvernementale croient détenir les clés d’une victoire électorale, aucune d’elles n’a encore présenté de propositions concrètes pour la restauration de l’autorité de l’État et l’amélioration des conditions de vie des Maliens.

Sur le plan sécuritaire, une centaine d’attaques a été attribuée à des groupes terroristes depuis le début de l’année 2018. De plus, les affrontements entre certains membres des communautés peuhle et dogon, durant le mois de mars, ont fait 32 victimes, dans le Centre du pays. Ces tensions résultent, notamment des luttes de pouvoirs locales et de la compétition autour des ressources naturelles.

Cette recrudescence des attaques et des tensions intercommunautaires ont rendu difficile le bon fonctionnement de l’État. Depuis la rébellion armée de 2012 et la précarité de la sécurité qui s’en est suivie au Mali, l’administration publique a été absente de nombreuses localités du Nord et du Centre.

Dans ce contexte instable et à quatre mois de l’élection présidentielle, la présence d’agents électoraux n’est toujours pas garantie dans environ un tiers du pays. L’absence des représentants de l’État met en péril l’organisation des élections dans ces localités. Jusqu’à ce que la sécurité soit rétablie, le fonctionnement de l’État demeurera dysfonctionnel.

En avril 2017, le gouvernement a adopté le Plan de sécurisation intégrée des régions du Centre du pays (PSIRC). Ce plan, qui intègre les acteurs sécuritaires internationaux, devra être une réponse militaire pour notamment faciliter le redéploiement de l’administration dans le Centre en vue des élections.

L’autorité de l’État malien – et son utilité pour le peuple – doivent être restaurées sur l’ensemble du territoire

Malgré ce plan, des inquiétudes subsistent quant à la capacité de l’État à recouvrer et à conserver un contrôle territorial efficace dans le Nord et le Centre du pays. En effet, la montée en puissance de la force conjointe du Groupe des cinq pays du Sahel (G5-Sahel) – composée du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger, et du Tchad – est encore attendue. Cette force prévoit de déployer 5 000 soldats pour lutter contre le terrorisme, les trafics d’êtres humains et le crime organisé dans les zones frontalières de la région Liptako Gourma (Mali, Burkina, Niger).

Sur le plan opérationnel, en vue de donner certains gages de crédibilité et de transparence à l’organisation de la présidentielle, en plus de l’audit du fichier électoral en cours, le gouvernement prévoit la distribution de nouvelles cartes électorales. Elles remplaceront les cartes NINA (Numéro d’identification nationale) qui avaient été utilisées en 2013.

Cette mesure vise à dissiper les inquiétudes de l’opposition quant à la présumée disparition de 900 000 cartes après les élections de 2013. La disposition  s’ajoute à l’audit en cours du fichier électoral. Ces solutions du gouvernement – à quelques mois du scrutin – pourraient toutefois entraîner des retards et des complications au processus électoral au lieu de le renforcer et le légitimer.

De nombreux acteurs nationaux et internationaux se demandent si l’échéance du 29 juillet est réaliste dans le contexte actuel du Mali. Tenir l’élection présidentielle dans les délais est essentiel pour éviter une crise politique aux conséquences imprévisibles au Mali. Organiser les élections et créer les conditions pour l’acceptation de leurs résultats est également important. Mais cela ne devrait pas occulter l’ampleur des défis post-électoraux qui attendent le président qui sera élu.

En 2013, le pays organisait des élections sans le contrôle total de l’État sur le Nord. En 2018, elles sont envisagées dans un contexte d’absence de l’État dans une grande partie du Nord et du Centre. Cet état de fait souligne l’urgence de rétablir, non seulement l’autorité de l’État malien sur l’ensemble du territoire, mais aussi – et peut-être plus important encore – son utilité pour les populations.

 

Révision exceptionnelle des listes électorales : Les nouveaux majeurs ciblés

Dans la perspective des élections générales, le ministère de l’Administration territoriale lance, du 25 février au 6 mars, une opération de révision exceptionnelle des listes électorales. Prendre en compte l’inscription des jeunes majeurs est la motivation principale de l’initiative, qui va se dérouler sur tout le territoire et dans les ambassades et consulats du Mali. Quid des zones sans administration ?

197 609 électeurs potentiels. C’est le nombre des jeunes majeurs enrôlés en novembre dernier. Mais, pour qu’ils puissent obtenir leurs cartes NINA, s’inscrire sur les listes électorales est indispensable. D’où l’opération en cours depuis le 25 février et jusqu’au 6 mars sur l’ensemble du territoire national et dans les ambassades et consulats du Mali. Elle est « consécutive à l’opération d’enrôlement des jeunes majeurs déjà menée en  novembre 2017 », explique le lieutenant – colonel Boussourou Dramé, chef du bureau du  fichier électoral et de la documentation à la DGE. Selon lui,  au regard des attentes, une révision exceptionnelle est apparue nécessaire. « Nous nous  sommes rendus compte lors de l’élaboration du fichier électoral biométrique que, dans la pyramide des âges, la base était rétrécie. Ce qui est anormal, d’autant que nous avons une population en majorité jeune. C’est donc la base qui devait être large et le sommet étroit », ajout-t-il.

Un dérèglement né du Recensement administratif à vocation d’état-civil (RAVEC) de 2009, quand certains jeunes qui n’avaient pas encore quinze ans ont été enrôlés, mais sans photos ni empreintes. « Ils sont dans la base des données de l’état-civil, mais ils ne pourront pas être des électeurs lorsqu’ils auront 18 ans, parce que leurs empreintes et photographies faciales n’ont pas été enregistrées», explique le chef de bureau du fichier électoral. Un frein autrefois, mais plus un obstacle au  parachèvement du processus. Selon Amary Traoré, Vice-président en charge de communication de la CENI, « normalement, il ne devait plus y avoir de révision jusqu’en octobre 2018. Mais comme il y a une masse de jeunes et que l’élection présidentielle se tiendra en juillet, cette révision permettra à ceux qui ont complété  leurs données biométriques de basculer sur les listes électorales et d’obtenir leurs cartes Nina ».

Bien que censée couvrir tout le territoire national pendant 10 jours, l’opération ne suscite pas l’enthousiasme dans plusieurs communes du nord et du centre du pays. L’absence de l’administration, au-delà des listes électorales, jette des inquiétudes sur la tenue des prochains scrutins.

 

Présidentielle 2018 au Mali : Quels scenarii en cas de report ?

L’élection présidentielle en 2018 arrive. Scrutin très attendu, il suscite doutes et angoisses. Des voix ont déjà  appelé au report et à une transition, évoquant les conditions d’insécurité. D’autres s’inquiètent d’une crise  post électorale. Si l’option du report s’imposait, à quoi faudrait-il s’attendre ?

2018 est une année des défis pour le Mali. Organiser des élections crédibles et transparentes  sur l’ensemble du territoire national en est un, le plus grand de tous, avec la tenue de la présidentielle. Le gouvernement a affirmé sa volonté de tenir cette échéance à date, mais si, contre toute attente, il décidait de la reporter pour diverses raisons ?. Pour Abdoulaye Tamboura, Docteur en géopolitique, « nous sommes dans un contexte où tout est possible. Avec  un peu de volonté de la part de l’État et des formations politiques, les élections pourront se tenir, mais pas partout sur le territoire ».

Des voix, dont celle du doyen Seydou Badian Kouyaté, avaient plaidé pour une transition et un gouvernement d’union nationale, estimant que «  l’insécurité généralisée » ne permettrait pas la bonne tenue du scrutin. S’y ajoute un fichier électoral non révisé. Une thèse qui n’enchante pas le Dr Tamboura. « Si l’on attend que le pays soit totalement sécurisé pour l’organiser, on attendra jusqu’en  2025 ». Selon lui, il faut tout faire pour réviser le fichier électoral. « Si l’État attend la dernière minute pour décider d’un report pour cause d’insécurité, ça ne marchera pas », anticipe-t-il. « Les conséquences seront néfastes pour le pays. Les terroristes auront gagné. L’opposition et certaines formations politiques pourraient refuser que le Président continue. On assisterait à un désordre dont le pays n’a pas besoin », alerte-t-il. Le chef de la MINUSMA a lui aussi exprimé récemment sa crainte d’une crise postélectorale.

Selon Djiguiba Kéita, Secrétaire général du PARENA, l’hypothèse est à plusieurs inconnues. « Si d’aventure les élections ne sont pas organisées à temps, le pays sera dans une saison de chaos, car notre Constitution n’a rien prévu pour cela », dit-il, assurant que le peuple souverain saurait prendre ses responsabilités face à toute éventualité. « Si les choses ne se précisent  pas d’ici fin février, c’est qu’il y a une volonté inavouée», estime le Dr Tamboura. Selon lui, il n’y a que trois scenarii possibles : tenir l’élection, opter pour un gouvernement d’union nationale ou reporter le scrutin ».

 

Museveni se prépare pour un nouveau mandat

Au pouvoir depuis 1986 et âgé de 73 ans, le président ougandais, Yoweri Museveni vient de promulguer la loi supprimant la limite d’âge pour les candidats à la présidentielle. L’ancienne loi fixait à 75 ans l’âge limite.

Désormais, rien n’empêche le président ougandais de se présenter à l’élection présidentielle prévue en 2021. Il vient de promulguer la loi très controversée adoptée par le parlement le 20 décembre 2017 à une majorité de 315 voix pour et 62 contre et 2 abstentions, dans une ambiance assez tendue. La loi qui limitait l’âge des candidats à la présidentielle à 75 ans a été supprimée par les députés. L’actuel président qui aura donc 77 ans en 2021, à la fin de son mandat pourra librement se représenter à sa propre succession. Réélu pour un cinquième mandat en 2016, dans des conditions qui suscitent des interrogations, le président ougandais s’ouvre ainsi la voie pour « une présidence à vie », comme le craignent ses opposants.

En outre, la nouvelle loi promulguée réinstaure la limitation du nombre de mandats consécutifs à deux, alors qu’elle avait été supprimée de la constitution par le président en 2005 pour lui permettre de briguer un troisième mandat. Mais cette limitation du nombre de mandats présidentiels, n’entrera en vigueur que lors des futures échéances électorales en 2021. Ce qui donne théoriquement le droit au président actuel de se représenter un énième mandat. « La ratification de cette loi n’est pas une surprise. C’est un plan bien orchestré pour avoir Museveni au pouvoir à vie », s’est indigné le chef de l’opposition Kizza Besigye. « Museveni est le principal bénéficiaire de cette fraude constitutionnelle », a-t- il ajouté.

Élections du 17 décembre : un report qui ne fait pas l’unanimité

Les élections locale (régionales et communales partielles) prévues pour le 17 décembre 2017 ont été reportées en avril 2018. Une nouvelle bien accueillie par les acteurs qui espèrent que cette période sera mise à profit pour réunir les conditions d’organisation.

Les élections régionales devraient clôturer le processus électoral entamé en 2013 au Mali. Des échéances qui viennent d’être reportées par les autorités « après une concertation des parties prenantes », selon les termes du communiqué rendu public à l’issue du Conseil des ministres extraordinaire tenu ce 26 novembre 2017. Pour les autorités, ce report se justifie par une volonté des autorités d’organiser des élections « les plus inclusives possibles ».

Un report salué par Monsieur Ilad Ag Mahmoud, porte-parole de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA). Il espère que le gouvernement mettra à profit ce temps pour résoudre les difficultés qui se posent. Au nombre desquelles la révision de la loi sur les collectivités territoriales et la loi sur la libre administration. « C’est l’occasion aussi de rendre les autorités intérimaires effectives, les rendre opérationnelles afin de faire face au retour des réfugiés pour qu’ils prennent part à ces élections », ajoute le porte-parole. Pour les reformes de la loi, il suggère notamment que le président de région soit élu au suffrage universel direct et ait le pouvoir exécutif, le représentant de l’État aura un rôle de contrôle à postériori, déplorant la loi actuelle qui « donne tous les pouvoirs au gouverneur, ce qui est un recul », selon le porte-parole de la CMA. Tout en invitant le gouvernement à aller vite et à manifester sa volonté de procéder à ces changements, il estime que la situation sécuritaire ne saurait constituer un frein surtout si tous les acteurs « se donnent la main », conclut-il.

S’il n’avait pas demandé le report, le Gatia souscrit à ce report qui est « une bonne chose parce qu’il y a des acteurs qui se sont prononcés contre la tenue. Pour la réussite, il faut la contribution de tout le monde », selon Fahad Ag Almahamoud secrétaire général du Gatia. Admettant que les conditions sécuritaires n’étaient pas réunies pour organiser les élections, il estime même que d’ici avril toutes les conditions ne seraient pas réunies même si « on pourrait faire beaucoup de chose d’ici là ». Il pense qu’il faut essentiellement avancer sur trois points. « La révision des listes électorales, le cantonnement et le désarmement des groupes armés et la planification du retour des réfugiés ».

« Une fuite en avant »

Regrettant ce report, Monsieur Amadou Aya le secrétaire politique du parti Yelema estime qu’il était souhaitable que le gouvernement organise les élections avant 2018 pour parachever le processus en cours.  Les partis qui s’étaient majoritairement prononcé pour le maintien de la date, avaient déjà engagé des dépenses, « puisque des listes ont même été validées dans certaines localités », note Monsieur Aya. En plus, la nouvelle date se situe à deux mois de la présidentielle « ce qui peut créer des confusions », selon notre interlocuteur. « Je constate avec regret que c’est une minorité qui prend les élections en otage », s’insurge Amadou Aya qui estime que le gouvernement doit mettre en œuvre l’accord issu du processus d’Alger. Reconnaissant la nécessité d’une relecture de la loi, il propose cependant de faire « une relecture complète de la loi électorale et de la loi sur les collectivités », et pas des relectures à l’approche des élections. 

Considérant même ce report comme une fuite en avant, Monsieur Aya dit ne pas comprendre que malgré la présence de plusieurs forces étrangères et les forces de sécurité maliennes, on « arrive pas à maintenir des conditions minimums pour tenir des élections ».  Sans occulter, les difficultés, il estime néanmoins ce n’est pas un problème d’organisation. Annonçant qu’ils avaient bien posé le problème de sécurité au ministre qui les a assurés que les ministres de la Sécurité et de la Défense prendraient les mesures nécessaires. « Nous prenons le gouvernement au mot. Les partis sont prêts. C’est le gouvernement qui doit savoir quel est le problème », conclut monsieur Aya.

Élections locales au suffrage universel : portrait-robot de l’élu idéal

À deux semaines du début de la campagne électorale, tous les yeux sont rivés sur les différentes têtes de liste, à un mois des élections locales. Quelles qualités leur permettront de se départager ?

« Les élections, c’est une course de relais, il faut de bons coureurs et de bons relayeurs », précise Ibrahim Oumar Ly, Secrétaire général de l’UM-RDA Fasô Jigi. La nouvelle loi portant réforme des collectivités territoriales attribue aux régions et communes de nouveaux pouvoirs, élargis. Cela exige  des partis politiques qu’ils se réinventent, pour que le nouveau « chef de l’Exécutif » de la localité puisse cocher toutes les cases. Quel profil doit-il avoir ?

Critères légaux 

L’aptitude à être élu est prévue dans la loi électorale du 2 Octobre 2016. Outre les conditions de forme de la déclaration de candidature, elle prévoit des conditions de fond, dont la qualité de citoyen malien, évidemment. Ensuite vient l’âge minimum requis, 21 ans. Le plus jeune candidat, dans le cercle de Kita, est Cheick Oumar Diallo de l’ADP – Maliba, 31 ans. Après la proclamation des résultats, l’attribution des sièges nécessite qu’un parti obtienne au moins 5% des suffrages exprimés. La loi portant Code des collectivités territoriales liste en son article 307 les cas de non-cumul des fonctions de conseiller régional et d’autres, telle celle de maire.

Critères de personnalité 

« Les élections locales sont plus celles d’une personnalité que d’un parti », assure Abouzeidy Ousmane Maiga, tête de liste URD pour la Présidence du Conseil régional de Gao. Car le système politique veut que la seule volonté soit insuffisante pour être candidat. Eu égard à la crise multidimensionnelle dont le Mali tente de sortir et à l’élargissement des pouvoirs du Conseil Régional, son Président devra, selon lui, « être un cadre compétent, qui maitrise les rouages administratifs et politiques ».

Pour le Secrétaire politique de l’ADP – Maliba, Cheick Oumar Diallo, « il est important, et surtout temps, que le pays profond ait la parole, se fasse entendre ». Il s’agira donc d’avoir « une vision pour le développement au plus près des réalités locales ». Le « chef de l’Exécutif » devra avoir des « attaches avec la localité », une certaine « légitimité ». La notoriété locale, nécessaire pour toute élection, est donc la clef pour l’emporter. Elle demande « un travail politique, qui nécessite de poser des actes pour la localité, et de l’engagement », résume M. Diallo.

Cycle électoral sur fond d’embûches et d’incertitudes au Mali

Pour éviter une nouvelle crise politique, un large accord est nécessaire sur les meilleures conditions possibles d’organisation des élections.

Le Mali entre dans un cycle électoral avec les élections locales et régionales prévues pour le 17 décembre prochain. L’annonce de la date des élections locales et régionales fait entrer le pays dans un cycle électoral marqué par des incertitudes, notamment liées à l’insécurité persistante et à la polarisation de la scène politique. Au-delà du résultat des élections, ces scrutins – et par extension les élections présidentielles de 2018 – sont confrontées à plusieurs risques qui doivent être atténués.

Les élections locales et régionales doivent designer les présidents des régions et des cercles (subdivisions administratives) et le maire du district de Bamako. Elles doivent être couplées avec les élections communales partielles dans les 59 localités où, pour des raisons de sécurité, le vote n’a pas pu avoir lieu en novembre 2016.

Ces élections constituent un pan important dans la mise en œuvre du dispositif de réforme institutionnelle prévu par l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale. Cet accord a été signé en 2015 entre le gouvernement malien et certains groupes armés du Nord du pays.

Pour la première fois au Mali, les présidents de région et de cercle seront élus directement par les électeurs

Pour la première fois au Mali, les présidents de région et de cercle seront élus directement par les électeurs. Par le passé, ils étaient élus indirectement par des conseillers communaux. La réforme préconisée par l’accord de paix vise, à terme, à renforcer les pouvoirs des présidents de région.

Or, la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), signataire de l’Accord de paix, dans un communiqué publié le 28 octobre, s’est opposée à la tenue de ces élections en dénonçant une initiative unilatérale du gouvernement. Alors même que ces élections concourent à la prise en compte de revendications politiques de la rébellion armée de 2012, la CMA estimait dans un communiqué, qu’il faudra mettre en œuvre certains réformes politiques préalables, inscrits dans l’Accord de paix, notamment « l’opérationnalisation des Autorités Intérimaires, l’organisation du retour des réfugiés/déplacés, la révision des listes électorales, la relecture des lois portant libre administration et code des Collectivités Territoriales et bien d’autres aspects y afférents ».

L’opposition politique malienne estime quant à elle qu’en plus du contexte sécuritaire volatile, les conditions matérielles d’un scrutin crédible ne sont pas réunies. Elle réclame en outre l’audit du fichier électoral avant les élections.

La CMA – formée pendant le conflit de 2014 – s’oppose aux élections du 17 décembre

Cette situation est révélatrice des distensions et des contradictions qui entourent les élections à venir, et rappelle que la tension n’est pas véritablement retombée depuis le débat autour de la révision constitutionnelle avortée de juin 2017En termes de sécurité, l’assassinat du conseiller du chef de village dans la région de Mopti, le 7 novembre, et celui du chef du village de Kerena dans le cercle de Douentza, en novembre dernier, illustrent la montée de la violence dans les luttes pour la chefferie locale. Les  groupes terroristes, y compris le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, menacent également la bonne tenue du vote dans les zones où ils sont actifs.

En outre, le pays reste confronté à la croissance des réseaux criminels qui se livrent à toutes sortes d’exactions, allant des braquages sur les axes routiers aux vols de bétail dans les régions du Nord et du Centre.

Les élections au Mali sont également confrontées à plusieurs défis opérationnels. Il s’agit notamment de la présence de l’administration sur toute l’étendue du territoire et du retour des réfugiés et des déplacés. Malgré la signature de l’APR dernier, selon le Haut commissariat des réfugiés (HCR), on dénombrait toujours près de 143 103 réfugiés et 58 594 déplacés internes à la fin juin 2017. En 2013, toujours selon le HCR, ils étaient 167 000 réfugiés et 283 000 déplacés.

L’opposition politique malienne estime que les conditions matérielles d’un scrutin crédible ne sont réunies

Ces élections à venir font planer le risque d’une crise institutionnelle. Le président Ibrahim Boubacar Keïta, estimant que l’opposition ne peut accéder au pouvoir par la voie électorale, la soupçonne de chercher à rendre impossible l’organisation des élections  être associée à la gestion du pouvoir dans le cadre d’un éventuel gouvernement de transition. L’opposition quant à elle, estime que le président de la République et le gouvernement veulent utiliser le contexte sécuritaire comme prétexte pour rester au pouvoir au-delà du mandat constitutionnel.

Il est peu probable que d’ici les élections de décembre 2017 des avancées significatives puissent être enregistrées au plan sécuritaire. La tenue des élections régionales et locales constitue donc un test en prélude à la présidentielle et aux législatives de 2018. La création d’un cadre inclusif est nécessaire pour que les acteurs politiques, la société civile, et les signataires de l’Accord de paix de 2015 discutent et s’entendent sur les meilleures conditions possibles pour les élections – qui seront inévitablement viciées, mais peuvent toujours être crédibles. Alternativement, ils pourraient s’entendre sur un report. Un point de vue partagé est sans aucun doute l’une des meilleures garanties pour que les parties ne profitent pas des insuffisances liées aux élections pour contester les résultats.

Un arrangement politique de ce type avait permis, en 2013, à la suite de la crise multidimensionnelle malienne et de l’intervention franco-africaine, la tenue du scrutin présidentielle. Cette crise était survenue avec la rébellion armée de 2012 et la transition politique à Bamako, après le coup d’état de la même année. Un processus similaire pourrait voir le pays aller de l’avant – même si le rythme est lent.

Ce parallèle rappelle, en définitive, le peu d’évolution de la situation politique et sécuritaire du Mali depuis cette période.  

Cet article est d’abord paru sur le site de l’Institut d’études de sécurité.