Biennale artistique et culturelle 2017 : une édition spéciale de retrouvailles

Les enfants du Mali se retrouvent à Bamako du 24 au 31 décembre, à l’occasion de cette édition spéciale de la biennale artistique et culturelle. Le Président Ibrahim Boubacar Keïta a présidé la cérémonie d’ouverture de cet évènement inclusif au Stade Omnisports Modibo Keïta. Des membres du gouvernement, présidents des institutions, gouverneurs des régions et plusieurs autres personnalités dont le ministre nigérien de la culture étaient présents. Des expressions culturelles et symboliques ont marqué ce lancement.

« De même que la beauté d’un tapis tient à la variété de ses couleurs, la diversité des hommes, des cultures et des civilisations fait la beauté et la richesse du monde », disait Amadou Hampâté  dans sa lettre adressée à la jeunesse en 1985. Cette célèbre citation, va bien à l’esprit de la biennale artistique et culturelle instaurée dès la première République. L’évènement répond au besoin de réunir les enfants du pays de différentes régions, issus de différentes communautés pour se retrouver tous les deux ans autour de l’art et de la culture. Dimanche 24 décembre, le Stade Omnisports Modibo Keita a été le lieu idéal où se sont retrouvés les jeunes de toutes les contrées du pays, de Kayes à Taoudeni, en plus de ceux du district de Bamako. La jeunesse de la diaspora ainsi que l’association des personnes vivant avec un handicap complètent le décor. Près de 800 participants séjourneront, certains pour la première fois à Bamako. Au-delà de la culture, l’occasion est unique, dans un contexte de crise, pour les fils du pays de se découvrir, se connaître et s’aimer davantage. Selon la ministre de la Culture, madame N’Diaye Ramatoulaye Diallo, la biennale artistique et culturelle n’est pas seulement la culture, ni une compétition entre les régions, ni la fête du folklore malien, mais « c’est à la fois tout cela ». Un évènement de « tous les enfants du Mali » où « personne ne peut être laissé sur le bord de la route », souligne la ministre, pour qui, ce rendez-vous est « un effort de rapprochement des peuples dans une dynamique de destruction des barrières entre eux.» 

La paix par le symbole et les exemples

La crise de 2012 a occasionné une blessure encore douloureuse dans l’architecture sociale de notre pays. La dimension de la tragédie et de l’épreuve ont été inégalées dans l’histoire du Mali. Pour madame N’Diaye Ramatoulaye Diallo, le retour de la paix passe par le symbole et les exemples. La tenue de l’évènement s’inscrit dans cette optique, pour renforcer le dialogue interculturel. « Le monde attend de voir le Mali se réconcilier », a-t-elle déclaré lors de la cérémonie d’ouverture. Pour mettre l’accent sur le geste et le symbole, la ministre a invité le stade à se lever pour que chacun salue son voisin direct au nom de la paix, de la cohésion sociale et du vivre ensemble. 
Le défilé des troupes a également été riche en chants, danses et habillements du terroir. Chaque région a montré un avant-gout de son savoir culturel sous les applaudissements d’un public acquis. La prestation de l’humoriste Kanté qui mélange le faire rire et des messages de paix, a agrémenté les instants. Devant l’assistance, des symboles représentatifs de toutes les régions du Mali étaient dressés. « Nous avons voulu mettre en évidence les différentes régions, chacune, par ce qui la caractérise. Les tentes qui caractérisent généralement les régions nord du Mali, les greniers, les maisons d’habitations en toit de paille, les maisons isolées, celles des devins, le style soudano-sahélien, c’est le Mali en entier qui est symbolisé par ces dessins », explique Dr Fodé Moussa Sidibé, tête pensante des œuvres. 

C’est dans cet univers reconstitué qu’est apparu un peuple en paix. Chaque communauté vit en symbiose avec ses voisines. Mais tout d’un coup « ce Mali paisible » tombe dans le malheur. Les femmes, mains sur les têtes se lamentaient, leurs époux par terre, fauchés par la mort. Les activités sont arrêtées. Les enfants qui jouaient autrefois sont désemparés. Le spectacle était vraisemblable. Les voix mélodieuses, mais en ce moment mélancoliques de Djeneba Seck et Haïra Arby ont résonné dans ce Stade sous un silence effroyable. Tout à coup une voix se fit entendre, appelant le Mali et les Maliens à se mettre debout. Le peuple recommence à se lever, puis à se retrouver et à danser tout en chantant. Dr Fodé Moussa Sidibé explique le message véhiculé, « il y avait le Mali paisible qui vient être perturbé, après cela, la paix revient et les gens reprennent leurs occupations. Finalement, il y a eu l’arrivée d’un Mali, représenté par l’hippopotame et la carte d’un Mali un et indivisible, tel est le message fondamental », commente-t-il. Cette activité de fraternité et de brassage, « permettra aux gens de Kidal de passer une bonne semaine avec ceux de Kayes, de Sikasso et tout le pays se retrouve dans l’art, la compétition, et la joie », renchérit Dr Fodé Moussa Sidibé.
C’est en fondant l’espoir sur un nouvel élan autour du pays, que le président IBK a déclaré avec « bonheur » l’ouverture de la biennale artistique et culturelle. La manifestation au regard de l’ambiance d’ouverture promet d’être un merveilleux souvenir pour tous les participants et d’être imprégné à jamais des valeurs culturelles de la nation. 

Pour une industrie de la culture

Marginalisée, la culture est l’un des portefeuilles ministériels les plus pauvres en termes de budget. Pourtant, la renommée du Mali est aussi due à sa grande richesse en la matière.

0,37 %, c’est ce que représente sur le total le budget alloué à la culture au Mali. Un chiffre très mince, compte tenu de la grande richesse culturelle du pays. Au département dédié, dirigé par Mme N’Diaye Ramatoulaye Diallo, on espère que ce chiffre atteindra 1 %. « Ensuite nous verrons avec les acteurs culturels comment  convaincre que ces 1 % sont mérités. Il y a une campagne de plaidoyer actuellement auprès de l’Assemblée nationale et du gouvernement afin de voir comment augmenter ce budget ».

L’une des solutions serait d’industrialiser le secteur, ce qui permettrait aux Maliens et aux étrangers d’en apprendre davantage sur le patrimoine culturel du pays. En plus, « cela peut réduire le taux de chômage », atteste El Hadj Djitteye, activiste culturel et chercheur sur l’héritage culturel du Mali, en particulier sur le patrimoine de Tombouctou. De plus, mettre sur pied une vraie industrie culturelle permettrait aux régions du nord – où le tourisme est en berne depuis 2012 – de « développer la vente en ligne des produits artisanaux. Cela peut développer le secteur et permettre aux artisans de vivre de leur art », déclare-t-il.

L’aspect économique a une grande importance, puisque les retombées peuvent générer des revenus, en plus de la visibilité, pour un secteur souvent qualifié de « parent pauvre ». Parler d’industrialisation de la culture a donc du sens. Au ministère, on soutient « elle est nécessaire. Notre premier effort a été de doter le Fonds du cinéma d’un budget de 6 milliards sur 3 ans, de voir l’impact que cela peut avoir sur l’industrie cinématographique et de l’étendre aux autres secteurs de la culture ».

D’ailleurs, le cinéaste Souleymane Cissé, lors de son intervention au forum Invest in Mali, a évoque ce sujet. « Il n’y aura jamais de développement sans culture. Il est temps que le Mali fasse de l’industrie culturelle sa force. Cela est indispensable à notre survie ». Quant à El Hadj Djitteye, il estime que la « créativité doit être au cœur des débats politiques et le gouvernement doit accompagner les initiatives culturelles pour un Mali meilleur ».

« Les sites classés au Patrimoine mondial ne sont pas assez valorisés », regrette le chercheur, qui pense que les Maliens ne mesurent pas assez l’importance de leur héritage culturel, ce qui explique que le gouvernement « oublie » le secteur. « Il faut que les pouvoirs publics prennent en main la culture. C’est une ressource certaine. Investir dans la culture, c’est investir dans l’avenir », conclut-on au ministère.

Biennale de la Photographie : clics sur Bamako

Le monde et l’Afrique de la Photographie se donnent rendez-vous dès ce 2 décembre à Bamako pour une rencontre devenue incontournable dans le calendrier artistique du continent. La Biennale de Photographie s’ouvre avec sa semaine professionnelle et elle promet pour les deux mois à venir.

« Afrotopia », c’est le thème des Rencontres de Bamako édition 2017, qui se tiendront du 2 décembre au 31 janvier prochains. « Ces Rencontres de Bamako sont une escapade heureuse de la situation que notre pays a connue », se réjouit N’Diaye Ramatoulaye Diallo, ministre de la Culture du Mali. « Leur tenue est, à chaque fois, un défi organisationnel et surtout une jauge unique de la confiance des partenaires en notre pays. Ce partenariat est en premier lieu celui que nous avons avec nos illustres artistes invités », poursuit-elle.

Pour le Délégué général de la Biennale, non moins Directeur du Musée national du Mali, Samuel Sidibé, cet évènement est « une plateforme qui permet aux photographes africains du continent et de la diaspora de montrer leur travail. La photographie s’est développée vers une approche artistique, une approche différente. La photographie n’est plus seulement le portrait. Elle est une démarche artistique pour les photographes qui cherchent ainsi à exprimer leur vision du monde, leurs préoccupations ». « La photographie au centre des catalyseurs possibles de notre développement endogène. Par la culture, et ceci est une autre forte conviction des autorités du Mali, le développement économique est possible. Par la culture, le développement social s’impose », estime pour sa part la ministre de la Culture.

Les utopies africaines

Sous la direction de Marie-Ann Yemsi, Commissaire de cette 11ème édition, « Afrotopia » se veut une réflexion sur les utopies africaines et sur comment l’Afrique peut, à partir de ces propres valeurs et de son potentiel, s’interroger sur son avenir. De cette réflexion sont sorties les œuvres de la quarantaine de photographes, qui ont développé leur propre approche artistique, qui exposeront à Bamako. Elles portent sur des phénomènes divers dans la société tels que l’urbanisation, les questions politique et sociale, ou plus prosaïquement la relation entre les hommes. .

La Biennale existe depuis 1994 et a toujours eu lieu au Mali. La semaine professionnelle qui s’ouvre le 2 décembre est un espace permettant « que le travail artistique et le débat intellectuel se rejoignent », comme l’explique le Délégué général. Des intellectuels, des commissaires, des directeurs de musée, de galeries, tout un ensemble de gens des mondes de la culture d’Afrique, de France, du Brésil, d’Espagne, d’Angleterre, seront présents pour organiser des débats, des master classes, des discussions autour de la photographie, afin d’enrichir la Biennale d’un débat intellectuel.

Timbuktu Renaissance, un autre regard sur le Mali

Dans le cadre du projet Timbuktu Renaissance, le ministère de la Culture a organisé une conférence de presse ce lundi 30 janvier 2017 en son siège sis à la cité ministérielle à 10 heures. Le but de ladite conférence était d’informer l’opinion publique sur l’évolution du projet. La conférence était animée par Mme le ministre de la Culture N’diaye Ramatoulaye Diallo, l’ambassadrice du projet Cynthia Shneider et le secrétaire général du projet Mr Mani Ansar.

Le Projet Timbuktu Renaissance existe depuis plus de deux ans. Il vise à rehausser l’image du Mali (à travers Tombouctou), son extraordinaire patrimoine et sa culture vivante, à promouvoir la paix, la réconciliation, et à booster l’économie à travers le tourisme (la production musicale et cinématographique et l’artisanat) et la mobilisation de l’investissement dans les initiatives de développement.

La vision de Timbuktu Renaissance est de mettre la culture au cœur de la lutte pour un avenir de paix et de prospérité du Mali en l’exposant à un auditoire mondial et donc potentiellement à des investisseurs. Ce projet vise également la relance des trois régions du nord du Mali. Et c’est dans ce cadre que s’est tenu au ministère de la culture une conférence, lundi 30 janvier 2017.

Le but de cette conférence de presse était d’informer l’opinion publique sur l’évolution du projet dont Google Cultural Institute et National Endowment for Democracy (NED) sont partenaires.

Tombouctou sera bientôt doté d’un centre culturel et d’innovation au mois de Mars. Un centre multifonctionnel qui pourra accueillir des rencontres, des conférences-débats, des concerts, des animations culturelles. Le centre sera équipé grâce au Google Cultural Institute, d’ordinateurs et de toutes les commodités pour l’utilisation des TIC par les jeunes de Tombouctou. Également avec Google il sera possible de diffuser les concerts à travers YouTube. Ce centre accueillera également un studio d’enregistrement. Le secrétaire général du projet Timbuktu Renaissance a lancé un appel poignant a tous les maliens « Il faut qu’on résiste, faut pas qu’on se décourage, devant tous ces évènements (menaces sécuritaires) il faut avancer, il faut garder le moral, il ne faut pas céder ».