Accord pour la paix: Une feuille de route de plus ?

Les partis signataires de l’Accord ont signé le 22 mars une feuille de route pour la mise en œuvre du chronogramme d’actions prioritaires endossé lors de la 23ème session du CSA. Ces nouveaux engagements, en 21 points, étalés jusqu’en 2019, ressemblent fort aux précédents : est-ce une feuille de route de plus ?

Le gouvernement, la CMA et la Plateforme ont adopté une nouvelle feuille de route le 22 mars. Fixant 21 points d’actions prioritaires, ce chronogramme vise la tenue d’élections inclusives, libres  et transparentes et l’accélération de  la mise en œuvre de l’Accord. Un de ses points-phares est l’atelier de haut niveau sur  la Réforme du secteur de la sécurité (RSS), qui a réuni du 27 au 29 mars tous les acteurs impliqués.

Le document précise les différentes actions à mener de mars 2018 à  fin 2019. Entres autres : parachever les collectivités territoriales de Taoudeni et Ménaka lors de la session d’avril de l’Assemblée nationale ; assurer entre mars et avril le fonctionnement effectif des Autorités intérimaires et des Collèges transitoires, pour qu’ils puissent fournir des services sociaux de base et organiser les élections à venir ; lancer le Mécanisme opérationnel de coordination (MOC) à Kidal et Tombouctou et recenser les combattants éligibles à l’intégration ou au programme Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR). S’agissant de Ménaka, une délégation dite des « communautés lésées » séjourne depuis deux semaines à Bamako. Elle dénonce la non prise en compte de ses propositions de communes dans le projet de loi que les élus nationaux examineront. Les MOC de Kidal et Tombouctou, maintes fois annoncés, restent toujours un défi. Celui de Gao, plus d’un an après son installation, ne suscite plus l’enthousiasme.

Lors du point de presse de la MINUSMA, le sous-secrétaire général à l’État de droit et aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, Alexander Zuev, a salué cette nouvelle démarche. « Ce chronogramme est très important pour la mise en œuvre de l’Accord de paix et il y a des activités tout à fait concrètes, comme les huit sites de cantonnement et les MOC à Gao et bientôt Tombouctou et Kidal ». A Gao, où il s’est rendu, « la situation sécuritaire est particulièrement complexe ». Pour Boualem Chebihi, chef de file de la médiation et ambassadeur d’Algérie au Mali, « tout dépend de la volonté des parties de respecter leurs engagements ». Mais l’expiration du précédent chronogramme et le report de la 24ème session du CSA invitent au doute quand à l’efficacité de ce énième arrangement.

Processus de paix au Mali : Où sont les femmes ?

Piliers de la famille et de la société, les femmes sont en marge du processus de paix au Mali. La place qu’elles occupent dans leurs foyers et la puissance de leur approche font pourtant d’elles des actrices indispensables pour que chacun hume le vent de la paix. Elles sont exclues d’un processus qui se doit d’être inclusif, car c’est un leurre sans elles.

Elles sont mamans, épouses, sœurs, tantes, cousines. Elles sont le point focal de toutes les sensibilités, les meilleurs instruments de tous les apaisements. Leurs actes et leurs paroles tracent le chemin qui mène à la paix. Elles, ce sont les femmes. La crise de 2012, dont le pays se relève avec peine, a abouti en 2015, entre le Gouvernement, la CMA et la Plateforme, à la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger. Le texte prône, dans son Chapitre I, l’implication « des femmes et des jeunes », mais les acteurs sont toujours muets quant à la prise en compte de ces dispositions.

Actrices incontournables Fatoumata Maiga, Présidente de l’ONG Association pour les initiatives de paix (AIP), s’insurge contre cet état de fait. « Les femmes sont carrément exclues de toutes les structures de mise en œuvre de l’Accord, alors que sans leur implication et celle des jeunes au niveau communautaire, il n’y aura jamais de paix. Il ne faut pas que les gens se leurrent. Il faut qu’on les associe », plaide-t-elle. Présentes sur le terrain, actives pour faire baisser les tensions intercommunautaires, les femmes, selon elle, qui a participé aux négociations d’Alger en 2014, jouent un rôle prépondérant. « Malgré ce qu’elles font pour dénouer les crises, elles n’ont pas été associées formellement. Mais, quand ça coince, on leur demande de s’investir pour calmer les choses », dénonce-elle, très déçue. Imprégnée de la genèse des crises au Nord du Mali, l’organisation qu’elle pilote vit le jour en 1998, un an après la Flamme de la paix, dont elle fut l’une des protagonistes. Impliquer les communautés à la base semble être l’approche de toutes les associations qui militent pour la paix et la sécurité au Mali et c’est celle que privilégie la Coalition nationale de la société civile pour la paix et la lutte contre la prolifération des armes légères (CONASCIPAL).

« Ce que femme veut, Dieu le veut », dit l’adage. Si les femmes conservent leur capacité de résolution des conflits, les négliger peut aussi s’avérer fort regrettable. Emprunter un chemin sans elles, c’est risquer de tourner en rond. « La femme, c’est une maman, qui peut dire à son enfant ce qu’aucun homme ne peut lui dire. Une épouse, qui est au courant de ce que fait son mari. Elle a la possibilité de lui exposer les choses comme même sa maman ne pourrait pas », affirme la Présidente de l’ONG AIP. Pour Madame Sacko Kadi Kamissoko, Présidente de l’association des Sœurs unies de Tabacoro, « la femme, c’est le disque dur même de la société. C’est elle qu’on voit en premier lieu. C’est d’elle que viendra le dénouement de cette crise », assure-t-elle. « Si les femmes s’engagent, je vous assure qu’il y aura la paix dans ce pays », prophétise-t-elle.

La paix, un mirage ? S’il y a un vocable qui a été très utilisé ces dernières années c’est bien « paix ». Plus le mot revient, plus la situation se dilue. Des communautés ayant vécu en symbiose sont désormais sur le qui-vive. « Ce qui s’est passé à Gao, on aurait pu l’éviter, mais on a laissé la situation pourrir et dégénérer », regrette Fatoumata Maiga. Les femmes ont l’impression qu’elles ne comptent pas et « quand on les met dans certaines situations, elles le font savoir », avertit-elle. Elle fait partie du Collectif des femmes leaders qui avait, lors de la 23ème session du CSA, réclamé leur prise en compte dans les instances de l’Accord. «Nous voulons que les femmes soient parties prenantes de tout le processus, du sommet à la base », exige-t-elle, évoquant une violation de l’Accord. Selon elle la paix est possible, il suffit d’analyser certaines conclusions de la Conférence d’entente nationale. « On n’a pas dit de parler avec Iyad Ag Agaly ou Amadou Kouffa, mais avec les gens des villages. A Segou ou à Ménaka, pourquoi ne pas ramener sur le droit chemin les jeunes qui se battent pour ces chefs-là ? ». Elle en est certaine : « si les gens veulent sauver le pays, on le sauvera ».

 

Sanctions de l’ONU au Mali : 3 questions à Yvan Guichaoua, maître de conférences et spécialiste du Sahel

Est-ce que le régime de sanctions de l’ONU peut être un instrument efficace ?

Pour l’instant aucune sanction n’est prise. Avec cette nouvelle résolution, les Nations Unies se dotent d’un nouvel outil juridique contre ceux qui entravent le processus de paix. Elles étendent leur arsenal punitif potentiel. Mais il reste beaucoup d’étapes avant qu’une sanction concrète puisse être envisagée : il faut que des experts soient nommés, qu’ils puissent rassembler des éléments de preuve, qu’ils soient écoutés par les décideurs et qu’enfin les éventuelles sanctions soient appliquées. Ce n’est pas pour demain, mais peut-être après-demain. La situation est tellement dégradée désormais au Mali que personne ne se satisfera des gestes symboliques, des froncements de sourcils et des formules aseptisées que la MINUSMA emploie dans chacun de ses communiqués. Et puis pourquoi se doter d’un tel outil, aux dispositions si explicites, par exemple en matière de lutte contre les trafics, pour ne pas y recourir in fine ?

Seront-elles être suffisantes, selon vous, pour contraindre chaque partie à avancer dans l’application de l’accord de paix ?

Ce nouvel outil vise en priorité les signataires de l’accord de paix ; il ne concerne donc qu’une partie du problème de la violence au Mali. La communauté internationale n’a toujours pas trouvé d’instrument non coercitif pour régler la question des mouvements djihadistes. Pour ce qui est des signataires, l’étau se resserre autour d’acteurs connus pour jouer sur plusieurs tableaux et que l’on sait capables de déstabiliser la situation selon leurs intérêts du moment. Ces gens se savent dans le viseur de la communauté internationale et la perspective d’être punis va peut-être les inciter à se montrer plus accommodants. En même temps, les ancrages politiques et dans l’économie parfaitement licite de ces groupes d’intérêts, les rendent difficiles à déboulonner sans effets collatéraux imprévisibles. Mais après tout, les FARC en Colombie  sont la preuve qu’un mouvement qui s’est criminalisé peut être décriminalisé.

Autrement, comment empêcher les parties de faire obstruction à la paix ?

On peut utiliser le bâton, comme c’est le cas avec ce nouvel outil, ou la carotte, comme ce fut le cas à Alger. On peut aussi multiplier les échelles d’interventions : traiter le clivage Nord-Sud comme à Alger ou les rivalités intercommunautaires comme à Anéfis en 2015. En travaillant sur ces deux axes, de proche en proche, par exemple en développant des démarches plus inclusives, on peut imaginer parvenir à des équilibres sécuritaires temporaires. Mais la reconstruction de la légitimité politique prend nécessairement du temps et elle ne peut guère être pilotée de l’extérieur. Le processus est d’autant plus fragile qu’il se produit sous l’œil plus qu’attentif des mouvements djihadistes. Il est parfaitement vain de faire comme si on avait des disputes à résoudre entre gens raisonnables d’un côté et un ennemi uniforme irrémédiablement perdu pour le dialogue de l’autre. Les mobilisations violentes des uns et des autres sont interdépendantes et pourtant les réponses de la communauté internationale sont totalement compartimentées. On pourrait aussi se demander comment éviter que d’autres parties n’émergent. On voit que d’autres foyers de violence potentielle s’ouvrent : entre communautés peules et dogons, ou parmi les jeunes de Gao récemment. Il y a un impératif de court terme de protection impartiale des populations sans laquelle rien n’est possible à plus long terme.

 

Charte pour la paix : nouveau coup d’épée dans l’eau ? 

Au Mali, vingt-quatre mois après la signature de l’accord issu du processus d’Alger, le train de la paix semble toujours à quai. Pendant ce temps, les actes de banditisme, les attaques et les enlèvements se multiplient de façon inédite. C’est dans ce contexte que la Charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale, élaborée à la suite de la Conférence d’entente nationale, a été remise au président de la République mardi 20 juin dernier. Mais nombreux sont les Maliens qui s’interroge sur ce qu’elle apporte au processus, et sur sa capacité, dans le climat de défiance et de division actuel, de mener le pays vers le chemin de la paix.

Deux ans jour pour jour après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, se voyait, le 20 juin 2017, remettre des mains du Médiateur de la République, Baba Akhib Haïdara, la Charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale, censée exprimer la volonté et l’engagement de toutes les composantes de la nation à œuvrer à la consolidation de la paix et à l’unité. Ce document rédigé sur la base des conclusions de la Conférence d’entente nationale (CEN) intervient à un moment où le pays traverse une crise sociale et sécuritaire sans précédent, où les divisions et le pessimisme ambiant gangrènent la vie des populations, faisant de cette paix tant souhaitée, un projet intangible.

Une charte de paix qui divise « Cette charte aurait été une bonne base pour consolider la paix, mais vu la situation actuelle et compte tenu de tout ce qui se passe, elle ne reflète aucune réalité. C’est du vide ! », lâche, désabusé, Ibrahim Ag Eouegh de la CMA, membre de la commission spéciale en charge de rédaction de la charte, qui deux semaines durant, avec une quarantaine de membres, a planché pour produire un document final dans le court temps imparti. Selon lui, toutes les missions qui se sont rendues dans le pays et surtout à l’extérieur pour présenter et expliquer le projet de texte aux compatriotes, sont revenues porteuses des mêmes échos : « On n’a rien compris à la CEN, on ne peut rien comprendre à cette charte, on nous parle des Accords, il ne sont pas appliqués, il y a des griffonnages sur le papier mais sur le terrain il n’y a rien ! » « À Kidal, les gens nous ont dit qu’ils ne se reconnaissaient pas dans la Charte pour la paix, et dans l’Azawad, qu’ils ne partagent aucune valeur, aucun principe avec les gens du Sud », poursuit notre interlocuteur. Dans le bastion du Nord, la tentative de vulgarisation de ce texte censé favoriser l’union sacrée a plutôt récolté une fin de non-recevoir. « Ils sont venus nous parler de paix alors que nous sommes en guerre. Ils viennent nous parler de réconciliation nationale alors que le gouvernement envoie ses milices nous attaquer », s’exclame ce membre de la CMA joint au téléphone à Kidal. « Effectivement, la semaine où nous étions là-bas, il y a eu plus de 30 morts dans des conflits intercommunautaires et tout ce que nous sommes venus exposer a évidemment été très mal reçu », explique Ibrahim Ag Eouegh, qui déplore que l’impératif de la date de remise de la charte au président IBK ait primé sur le temps et la qualité du travail et que tous les compte-rendus de mission n’aient pas été utilisés pour l’élaboration de la charte, notamment ceux concernant l’épineux sujet de l’Azawad, passé, selon lui, à la trappe.

Cet autre membre de la commission rédaction, a quant à lui été surpris par le « fort scepticisme » des populations à voir s’installer la paix. « Pour la plupart des gens rencontrés, ce qui est difficile à croire, c’est la capacité de l’État à mettre en œuvre ce qu’on leur a dit. Les gens ne sont plus comme ils étaient il y a trois ou quatre ans. Les populations n’écoutent plus, parce qu’on leur a trop fait de promesses et finalement ils ne croient plus à rien. Je fais parti de ceux qui croit qu’il sera difficile de faire appliquer ces mesures, ce pessimisme est généralement partagé. Pour eux la paix est un mirage ».

Démarrer le train de la paix Depuis sa signature en juin 2015, l’accord de paix fait du sur place. Ce constat globalement admis, même par ceux qui sont le plus enclin à dire qu’il y a des progrès, ne permet pas pour autant, malgré des symptômes connus, d’appliquer les remèdes qui permettraient de le faire avancer. « La réalité c’est que l’accord traite d’un problème entre le Nord et le Sud qui n’a jamais existé, alors que nous avons un problème intercommunautaire et de gouvernance locale. Il y a eu plus de morts chez moi après la signature de l’Accord de paix qu’avant. Les gens pensent que c’est un problème touareg, de racisme, que nous sommes marginalisés. Pourtant, aujourd’hui la CMA est prête à accepter des militaires noirs issus du Mali alors qu’elle n’accepte pas la Plateforme, donc c’est d’abord un problème du Nord et du Nord. Nous contaminons tout le reste des Touaregs dans le Nord du Mali avec nos problèmes communautaires », analyse Abda Ag Kazina, 1er vice-président de l’autorité intérimaire de Kidal, toujours sans exercice et cantonné à Bamako.

Si l’on pouvait désigner un symbole de cette paix à construire, Kidal, « là où tout a commencé et là où tout devra finir », ironise ce membre de la Plateforme, serait celui-là. Ce bastion qui résiste à la souveraineté de l’État pourrait, si l’administration et l’armée y faisaient un retour effectif comme cela est prévu pour fin juillet, devenir un signal fort et un vecteur de paix. « Le gouvernement malien a fait de Kidal le symbole de la restauration de l’autorité de l’État. Tant que le drapeau malien ne flottera pas à Kidal, tant que l’armée ne sera pas de retour, il n’y aura pas de reconstruction de la paix. Or il faut se rappeler, que même lorsque l’État était présent à Kidal, la situation était loin d’être apaisée. Je pense donc que Kidal n’est qu’un symbole politique », objecte cet officiel européen proche du dossier. « Y a-t-il un autre endroit où l’on peut parler de paix dans ce pays ? », s’interroge Ilad Ag Mohamed, qui regrette cette focalisation sur la capitale de l’Adrar des Ifoghas. « Les gens sont plus préoccupés par les symboles que par la vie réelle et le quotidien des populations qui, elles, attendent toujours une attention particulière de la part du gouvernement ».

Pour Oumar Alassane Touré, président de la Coordination nationale du réseau des jeunes patriotes du Nord pour la paix et le développement, la question du Nord ne doit pas être gérée par le gouvernement mais directement de Koulouba, parce qu’il y a des choses sur le terrain qui ne peuvent être réglé sur le plan judiciaire et règlementaire. « Le président a le pouvoir discrétionnaire qui lui permet de réagir sur le plan institutionnel au niveau de la sécurité, de la justice. Un ministre, un préfet ou un directeur au niveau local, ne peut pas s’engager sur certaines choses, ils doivent toujours écrire, mais cela met parfois des mois, une année, pour être traité par les services techniques de l’État, c’est long et la question du Nord est urgente ». Pour le président de la coordination, le fait que les accords de paix aient été signés avec les leaders des mouvements armés qui n’ont pas ou peu de leadership sur le terrain, rend la population inaudible. « Ces leaders peuvent vous dire oui mais le lendemain il y a des attaques et des sabotages, ils ne contrôlent pas le terrain. Tous ces mouvements ont un commandement local, un chef de zone. Ce sont eux qui détiennent la réalité du terrain, sur le plan militaire et sécuritaire. À tout moment, ils sabotent ce que Bamako dit. Il faut une stratégie pour que les décisions prises à Bamako à destination des populations soient appliquées de manière automatique sur le terrain ». Une gageure quand on sait que les décisions de Bamako sont difficilement relayées au niveau des cercles, des communes, des villages car dans beaucoup d’endroits, les services techniques de l’État ne sont plus présents.

Cette instrumentalisation des populations par les groupes armés, les djihadistes mais aussi par les autorités traditionnelles voir par les partis politiques, sont autant d’obstacles qui contrecarrent le processus de paix. « Nous avons vu des gens de l’opposition politique venir dire aux jeunes, chez nous, de ne pas déposer les armes, parce qu’IBK ne contrôle pas l’État. Ils disent de garder les armes jusqu’aux prochaines élections et qu’on verra la situation après. Donc les jeunes, armés, continuent d’attaquer les gens dès qu’ils ont besoin de carburant ou de mouton à manger, car il n’y a pas de loi pour celui qui a faim », confie ce combattant de la région de Gao.

Obtenir la paix localement « Au Mali il y a deux grands problèmes, un problème de gouvernance et un problème d’impunité, il faut mettre un terme à tout cela, il faut que les gens comprennent qu’on est dans un État organisé avec des responsabilités et des lois qu’il faut respecter », estime Azarock Ag Innaborchad, président du CJA.

À cela s’ajoute des décisions trop centralisées à Bamako et déconnectées des régions. « La paix ne se joue pas qu’autour d’une table à Bamako avec des conseillers, à la télé ou dans les médias, mais aussi et surtout là où la population aspire au développement et au progrès. Il faut des actions concrètes, visibles sur le terrain à destination des populations. Il faut s’intéresser avant tout à ce qu’elles demandent. Ces populations seront les meilleurs conseillers du président », assure le leader du CJA.

La responsabilité seule des autorités maliennes ne peut cependant être désignée car pour le gouvernement de Bamako, la situation est aussi délicate à gérer, entre les problèmes locaux et les agendas des partenaires internationaux. « Aujourd’hui sur la zone Sahel et sur le Mali, au niveau international, vous avez au minimum 17 stratégies, et entre ces stratégies, vous n’avez aucune coordination, mais la même méthodologie », confie ce spécialiste de l’Afrique subsaharienne. « À un moment, il faut faire un virage à 360 degrés, voir et énumérer les problèmes au niveau local, ensuite au niveau national et international, pour essayer de les régler concrètement. Pour construire une paix durable au Mali, il faut renverser la table et travailler sans tarder sur ces aspects-là », préconise-t-il.