Référendum et Baccalauréat : la difficile équation des dates

18 et 19 juin. Ce sont respectivement les dates retenues pour le scrutin référendaire et le début des épreuves écrites de l’examen du baccalauréat. Un chevauchement qui pose question et suscite déjà l’inquiétude sur l’organisation matérielle des deux évènements. Face aux interrogations, le ministère de l’Éducation n’a pas tardé à réagir. Après des rencontres au sein du département, un communiqué daté du 9 mai détaille les dispositions à prendre. Notamment : épargner tous les centres d’examen du Bac dans les activités référendaires, retenir uniquement les écoles fondamentales comme sites de bureaux de vote, épargner tous les personnels engagés dans l’organisation du Bac. Le département demande également de retenir essentiellement les enseignants du préscolaire, du fondamental 1 et 2 dans les activités référendaires, de rendre disponible et afficher les décisions des présidents et des surveillants de centres d’examen au plus tard mercredi 14 juin. Ces mesures visent à ce que le scrutin référendaire ait le moins d’impact sur le début du Bac. Après l’annonce de la date du référendum, plusieurs acteurs du milieu scolaire avaient émis des réserves sur le délai très serré entre le scrutin et l’examen. Certains ont réclamé que l’un des deux soit reporté. Dans son communiqué, le ministère invite à activer les cadres de concertation avec les associations des écoles privées au niveau local pour la mise à disposition de celles d’entre elles qui répondent aux normes afin d’y passer le Bac. Même si ces dispositions concrètes devraient avoir un impact, elles ne suffisent pas pour autant à rassurer tous les acteurs du milieu scolaire. Certains d’entre eux attendent de juger ces mesures sur la base de l’application.

Référendum constitutionnel : une date et des questions

C’est le scrutin qui va donner le coup d’envoi des différents rendez-vous électoraux prévus dans le chronogramme de la Transition d’ici à mars 2024. Reporté dans un premier temps le 10 mars, le référendum constitutionnel est finalement annoncé pour le 18 juin 2023. La date révélée par le gouvernement le 5 mai suscite depuis de nombreuses interrogations sur la bonne tenue de ce scrutin et l’aboutissement du processus électoral.

Alors que des voix commençaient à se lever pour pointer du doigt le retard pris dans l’annonce d’une nouvelle date pour le référendum constitutionnel, depuis son report il y a 2 mois, le gouvernement de la Transition a surpris. Un décret annonçant la tenue de cet important rendez-vous pour le 18 juin prochain a été lu à la télévision nationale le vendredi 5 mai 2023 par le ministre d’État chargé de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du gouvernement, le Colonel Abdoulaye Maiga.

« Le collège électoral est convoqué le dimanche 18 juin 2023 sur toute l’étendue du territoire national et dans les missions diplomatiques et consulaires de la République du Mali à l’effet de se prononcer sur le projet de Constitution. Toutefois, les membres des forces de Défense et de Sécurité voteront par anticipation le dimanche 11 juin 2023, conformément à la loi électorale », dispose l’article premier de ce décret, portant convocation du collège électoral et ouverture et clôture de la campagne électorale à l’occasion du référendum constitutionnel. La campagne électorale sera ouverte le 2 juin 2023 et close 16 juin à minuit, selon l’article 4.

Défis

La tenue du référendum dans un temps assez court implique un certain nombre de défis à relever pour le gouvernement, mais aussi et surtout pour l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE), l’organe chargé de la gestion et de l’organisation de ce scrutin. Entre autres, de l’élément d’identification (carte) pour exercer le droit de vote au récurent problème d’insécurité auquel font face certaines parties du territoire national, en passant par l’installation des coordinations de l’AIGE à l’intérieur du pays, les difficultés d’organisation sont légion.

Pour Soumaila Lah, Coordinateur national de l’Alliance citoyenne pour la réforme du secteur de la Sécurité, les défis liés à la garantie de la liberté d’expression ainsi qu’à la communication et à la sécurité sont les plus importants dans le contexte actuel. « Aujourd’hui, la logistique, les moyens financiers et humains, les capacités de l’armée ne permettent pas d’organiser le référendum sur toute l’étendue du territoire », indique-t-il, proposant par ailleurs que des capsules vidéo ou audio traduites dans les langues nationales soient disséminées un peu partout pour une meilleure appropriation du texte du projet de nouvelle Constitution afin de relever le défi de la mobilisation. Pour cet analyste, sur le plan du respect des libertés, la Transition gagnerait à laisser même les gens qui ne sont pas « pro Transition » s’exprimer sur ce référendum, « donner leur point de vue et dire qu’ils ne sont pas d’accord en toute liberté ».

Malgré les incertitudes, l’AIGE a tenu à se montrer rassurante. Lors d’un point de presse au siège de l’organe le 9 mai, son Président Moustapha Cissé s’est montré optimiste. « La dynamique est enclenchée et, de façon volontariste et responsable, nous sommes dans l’action pour l’accomplissement de tout ce que nous devons faire. Nous avons tous les moyens matériels et financiers pour pouvoir accomplir cette mission », a-t-il assuré.

Selon lui, concernant les démembrements à l’intérieur du pays, l’AIGE est prête. « L’installation des coordinations de l’AIGE est un processus qui a démarré et nous avons accompli plus de 90% de cette étape. La loi électorale dit que nous pouvons bénéficier à tout moment de l’appui de l’Administration territoriale et nous nous sommes inscrits dans cette dynamique. Il nous reste juste la phase de la nomination et de l’installation suivi de la prestation de serment des membres de ces coordinations », soutient l’ancien Bâtonnier.

Mesures exceptionnelles

Même si elles ne sont pas encore formellement actées, l’AIGE va prendre certaines mesures, au vu du délai serré pour la tenue du référendum. Pour ce qui est de la carte requise pour voter, qui est selon la nouvelle loi électorale uniquement la nouvelle carte nationale biométrique sécurisée, le Président de l’AIGE avance que les anciennes cartes d’électeurs ainsi que toutes les autres cartes d’identité légalement reconnues en République du Mali pourront être utilisées. « À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle fondée sur le droit. Des habilitations administratives et juridiques vont être faites pour permettre d’utiliser des éléments d’identification qui permettront à la majorité, sinon à tout le monde, de pouvoir participer à ce référendum. Notre rôle est de sauvegarder le droit de vote du citoyen », tranche M. Cissé.

Par ailleurs, relève-t-il, il sera extrêmement difficile pour l’AIGE d’organiser ce scrutin sur la base du nouveau découpage administratif, qui a été adopté mais qui n’est pas encore effectif. « Compte tenu du délai, le découpage électoral dont nous disposons aujourd’hui et qui correspond parfaitement au fichier électoral, révisé à environ 8,5 millions d’électeurs en décembre dernier, sera celui de l’élection référendaire », annonce le Président de l’organe indépendant en charge des élections.

Désaccords persistants

Bien avant son report en mars et l’officialisation de la nouvelle date de sa tenue, le référendum constitutionnel n’a jamais fait l’unanimité auprès de la classe politique et des forces vives du pays. Cette situation s’est exacerbée depuis la publication du décret du  5 mai 2023. Si certains partis et organisations de la société civile ont salué un grand pas vers l’adoption de la nouvelle Constitution et commencé d’ores et déjà à appeler au « Oui » le 18 juin prochain, d’autres, en revanche, continuent de demander l’abandon du projet.

Parmi ces derniers, les organisations de l’Appel du 20 février comptent passer à la vitesse supérieure. Dans un communiqué daté du 7 mai, elles indiquent vouloir exercer un recours en annulation du décret portant convocation du collège électoral en vue du référendum « pour excès de pouvoir sur différents motifs, tous bien fondés ». Pour elles, ce décret viole le cadre normatif et les conditions requises en cette matière par la Constitution en vigueur, « au respect de laquelle le Président de la Transition, initiateur du projet, avait pourtant solennellement souscrit ». Même si ce recours semble avoir peu de chances d’aboutir, les responsables de ce collectif semblent déterminés.

« De la façon dont nous avons réussi à faire adhérer une frange importante des populations à la pertinence de l’abandon de ce projet illégal de nouvelle Constitution, nous empêcherons sans nul doute, par les voies de droit, la tenue même de ce référendum irrégulier en vue de son adoption », indique le communiqué, signé du Coordinateur général, le magistrat Cheick Mohamed Chérif Koné.

Tout comme l’Appel du 20 février, mais sur un autre plan, la Ligue malienne des Imams et érudits pour la solidarité islamique au Mali (LIMAMA) est également opposée à l’adoption de la nouvelle Constitution concernant l’article sur la laïcité. Un mouvement de soutien qui est né pour la soutenir, composé d’une vingtaine d’organisations islamiques, culturelles et politiques, dont la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’Imam Mahmoud Dicko, (CMAS) est monté au créneau le 6 mai en réclamant la suppression du concept de laïcité dans le projet. Ils assurent en outre vouloir mener une campagne pour le « Non », « si les revendications légitimes de la LIMAMA et du mouvement de soutien ne sont pas adoptées ».

Par ailleurs, selon nos informations, beaucoup d’autres partis politiques sont encore à l’étape de consultation de leurs bases pour arrêter une consigne par rapport au vote référendaire. À en croire une source au parti des FARE an Ka Wuli de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, qui a également demandé l’abandon du projet, ils n’ont pas encore reçu le document final du nouveau texte constitutionnel et s’abstiennent pour l’heure de se pencher sur la question. Plusieurs autres formations politiques seraient dans le même cas. Mais, en dépit de cela, si le scrutin se tient le 18 juin, le « Oui » l’emportera sans surprise, selon plusieurs observateurs.

Mali – Transition : le référendum constitutionnel se tiendra le 18 juin

Par un décret lu à la télévision nationale ce vendredi 5 mai, les autorités de la transition ont annoncé la nouvelle date du référendum qui se tiendra le 18 juin 2023.

« Cette nouvelle date se justifie par le respect de la parole donnée et également l’engagement du chef de l’Etat à respecter les recommandations issues des Assises Nationales de la Refondation » a expliqué le Ministre d’Etat, Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du Gouvernement, le colonel Abdoulaye Maiga. La campagne électorale à l’occasion du référendum sera ouverte le vendredi 2 juin à 00 heure et close le vendredi 16 juin 2023 à 00 heure.

Toutefois les membres des forces de Défense et de sécurité voteront par anticipation le dimanche 11 juin 2023 conformément à la loi électorale. Plus concrètement, les électeurs répondront par oui ou non. Les bulletins de couleur blanche correspondent au oui, et ceux de couleur rouge au non.

Selon le Ministre d’Etat, toutes les dispositions seront prises pour la bonne tenue de ce référendum notamment à travers l’Autorité Indépendante de la Gestion des Élections (AIGE). Toutefois, le ministre n’a pas donné de détails sur les cartes biométriques qui servent désormais de cartes d’électeurs. La remise officielle des cartes biométriques a débuté le 11 avril dernier mais plusieurs potentiels électeurs ne sont pas encore entrés en possession des cartes. Le nombre d’électeurs au Mali est évalué à huit millions. Des coalitions politiques et de la société civile s’opposent à la nouvelle constitution notamment l’Appel du 20 février ou le Cadre des partis pour un retour à l’ordre constitutionnel. Des formations politiques telles l’URD ou encore l’ADEMA se sont prononcées en faveur du projet et s’engagent à le vulgariser. Le référendum était initialement prévu le 19 mars 2023.

Les chefs traditionnels demandent au président de surseoir au projet de réforme constitutionnelle

Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta a entamé une série de concertations avec les acteurs politiques et de la société civile sur le projet de révision constitutionnelle. S’ils reconnaissent la necessité de cette révision, les leaders religieux et traditionnels demandent au chef de l’Etat de surseoir au projet.

Après le report siné dié de la date du référendum constitutionnel initialement fixé au 9 juillet 2017, le chef de l’Etat malien Ibrahim Boubacar Keïta, a entamé une série de concertations avec les différentes couches de la société. Il a donc reçu le 12 août 2017, les leaders religieux et les représentants des familles fondatrices de Bamako. Ces derniers ont demandé au président malien de surseoir au projet, en attendant de pouvoir réaliser un consensus autour du projet. « Nous sommes là pour calmer », a déclaré Dramane Niaré porte-parole de cette délégation et représentant des familles fondatrices de Bamako. « Nous ne demandons pas d’annuler mais de surseoir. Car c’est lui qui décide. Nous nous ne décidons rien, nous lui demandons. » Dramane Niaré, a ensuite rappelé, que cette révision est indispensable car « nous avons signé un accord international » qu’il faut mettre en œuvre.

Le président IBK qui poursuit ces concertations, doit recevoir les représentants de la plateforme « Antè Abana », opposé au projet. Ces derniers ont d’ailleurs lancé un ultimatum au chef de l’Etat lui demandant de retirer son projet au plus tard le 15 août à minuit, faute de quoi, ils appelleront à la désobéissance civile.

La Mauritanie dit Oui à une nouvelle constitution

La Mauritanie a depuis hier, une nouvelle constitution. Des milliers de mauritaniens ont voté pour sa modification lors d’un référendum.

Le ‘’Oui’’ l’a largement emporté lors du referendum pour une nouvelle constitution en Mauritanie qui s’est tenu samedi. 85% des électeurs se sont prononcés en faveur d’une nouvelle constitution. Une coalition regroupant huit partis de l’opposition avaient appelé à boycotter le scrutin, qui a tout de même vu un taux de participation de 53,73%. « Une farce électorale qui a ouvert la voie à une fraude encore plus vaste » qualifie l’opposition. Elle dénonce également un coup de force du président Mohamed Ould Abdel Aziz pour tenir le référendum. Les sénateurs avaient en effet rejetés le projet de révision constitutionnelle.

La nouvelle constitution, en elle-même prévoit l’abolition du sénat qui sera remplacé par des conseils régionaux élus, le drapeau aussi subira des modifications. Deux bandes rouges « pour valoriser le sacrifice des martyrs » de la résistance à la colonisation française qui s’est achevée en 1960. Une nouvelle hymne national verra aussi le jour.

Une partie de l’opposition le soupçonne de vouloir aller au-delà de son second mandat que lui confère la constitution et qui prendra fin en 2019. Une inquiétude renforcée par une récente déclaration du président, laissant entendre que cette modification de la Constitution ne serait pas la dernière. « Dans deux ans, voire dix ans, d’autres amendements peuvent intervenir pour adapter notre constitution à nos réalités ».

 

Ibrahim Boubacar Keïta : président mal aimé ou mal compris ?

Depuis des semaines, l’opposition politique et populaire au projet de révision de la constitution, semble avoir considérablement érodé la cote de popularité du président. Au fur et à mesure que la rue gronde au son des partisans du Non, la figure présidentielle semble en prendre un coup, et quand la riposte s’organise, les éléments de langage : « désamour », « haine » « attaque » et les propos agressifs de certains ministres, loin de susciter l’accalmie, clivent et divisent le population malienne sommée de prendre parti pour le Oui ou pour le Non, pour ou contre le président. Cette communication politique non-maîtrisée, autour d’un sujet aussi sensible, à un an de l’élection présidentielle, risque d’abîmer encore plus l’image du président, qui peine à faire imprimer durablement son action politique dans l’opinion publique.

« Aujourd’hui, il est clair qu’IBK est très impopulaire, vous avez sûrement appris que dans un quartier où il passait, il a été hué ? », interroge ce membre de la Plateforme An té A bana Touche pas à ma constitution, en marge de la grande marche des partisans du Non, le 15 juillet dernier. « Chez nous, Maliens, un chef d’État qui se fait huer c’est le summum de l’impopularité », ajoute-t-il.

Parmi les slogans scandés par les manifestants, demandant le retrait pur et simple du projet de constitution, on pouvait aussi en entendre d’autres, adressés directement au chef de l’État : « IBK démission ! IBK dégage ! », preuve que ces manifestations en faveur du Non à la révision constitutionnelle, sont devenus petit à petit un réceptacle de toutes les frustrations, un pot-pourri des mécontentements qui se sont agglomérés avec la loi référendaire. « Une réforme constitutionnelle a toujours soulevé partout dans le monde des partisans et des détracteurs. On l’a vu à Dakar, en Côte d’Ivoire, partout dans le monde », souligne le ministre Baber Gano, secrétaire général du Rassemblement pour le Mali (RPM), parti au pouvoir, qui considère que cette réforme est nécessaire. « Ils ont inventé des arguments qui ne sont pas contenus dans la constitution. Il s’agit de rancoeur, de rancune et d’une haine envers le président. Mais IBK a su préserver son image, il a accepté toutes les critiques, souvent très extrémistes, voire injurieuses, il s’est comporté en vrai homme d’Etat. Quand tout ça se calmera, son travail de chef d’Etat continuera », assure le ministre des Transports.

Popularité en berne Il en avait suscité pourtant de l’amour ce candidat à la présidentielle. L’homme qui pouvait sauver le Mali, porté aux plus hautes fonctions par 77 % des suffrages, un score inédit dans le pays, qui a surpris tout le monde, à commencer par ceux qui ne l’avaient pas vu venir, ses adversaires, tous issus de la même génération politique, amis d’hier, et qui se pensaient favoris. « Est-ce que vous voyez le mal que cela a pu leur faire quand celui qui n’était pas dans leurs calculs est venu les gouverner ? Ils ne veulent pas attendre qu’il finisse son mandat, il faut le torpiller pour montrer qu’il est incapable », lance Badara Aliou Sidibé, chef de cabinet au Conseil économique et social, confortablement assis dans un fauteuil de son bureau à Koulouba.

C’est à Koulouba justement, au palais présidentiel, une bulle où les bruits du pays remontent difficilement, que le nouveau président va connaître un bref état de grâce en 2013, stoppé net par l’acquisition de l’avion présidentiel et l’affaire des marchés de l’armée. A Koulouba, sans des canaux fiables capables de remonter les humeurs du pays, la réalité du terrain s’estompe. « Il faut aussi reconnaître que le président IBK, c’est quelqu’un d’inaccessible, il l’a toujours été. C’est un chef, tout le monde n’a pas accès à lui. Il y a des ministres qui ne voient IBK que lors du Conseil des ministres. Au RPM, au bureau politique national, certains ne l’ont pas vu depuis très longtemps », explique ce collaborateur de la présidence de la République, sous couvert d’anonymat.

Aujourd’hui, cette image de président déconnecté du pays, dont les actions ne satisferaient que 46 % des Maliens, selon le sondage Mali-Mètre de mars dernier, et qui s’obstine dans un choix que beaucoup disent ne pas comprendre, lui colle à la peau. A l’international, le président suscite de plus en plus de réserves quant à sa capacité d’être à la hauteur des enjeux. « IBK ne voit pas le peuple dans cette opposition au référendum, il voit des adversaires qui veulent se comparer à lui, qui veulent montrer qu’ils sont les chefs : Tiébilé Dramé, Madame Sy Kadiatou Sow, Modibo Sidibé, etc. Ce sont eux qu’il voit et pas le peuple malien, c’est pour cela qu’il est en déphasage », observe ce chroniqueur de la scène politique malienne.

Au RPM, les partisans du président se sont lancés avec zèle dans la bataille, reprenant en éléments de langage les paroles formulées par le président, au risque de desservir ce dernier. « C’est une communication élaborée et dirigée de manière maladroite. Quand vous entendez un membre du RPM dire que c’est « une haine » qui vise le président, ça créée un malaise. C’est une grosse erreur d’appréciation », commente ce spécialiste français en communication politique, qui considère que ce type de communication peut potentiellement amener à des situations de pure confrontation.

Objet communicant non-identifié Pointés du doigt, les communicants du président, qui ne maîtrisent pas vraiment ce domaine et n’ont pas réussi, depuis son accession au pouvoir, à élaborer une stratégie de communication politique efficace valorisant l’homme, ses idées et ses actions, abîmant par là-même son image. « La communication du président fait partie du problème. On sent un passage en force, on sent un mépris de tout ceux qui peuvent avoir une autre position. C’est nous le pouvoir, nous allons l’imposer. Ce sont des invectives, des menaces. Quand vous entendez le langage des dirigeants de ce pays sur les antennes nationales, c’est incroyable ! », s’exclame Soumana Kalapo, syndicaliste et membre de la Plateforme An té A bana. Pour ce chroniqueur politique, il y a aussi une certaine crainte à aborder le chef de l’État sur ses sujets. « Je ne connais pas un conseiller en communication qui ose taper à la porte du président. Je n’ai pas vu de gens autour de lui assez responsables pour aller lui dire « on est en train de foncer dans le mur, il faudrait vraiment faire une ouverture et voilà l’ouverture qu’on peut faire. Il faut une personnalité qui pourra lui parler, lui exposer sincèrement l’État de la situation ».

Reste que cette communication « artisanale » se traduit dans l’opinion par une perte de crédibilité évidente, une image dégradée auprès des Maliens et un manque de visibilité de son action. « Il y a tellement de choses qui sont passées inaperçues que finalement on peut se dire qu’il n’y a rien. Les militaires le disent, ce qu’il a fait pour l’armée, en 50 ans d’indépendance, aucun président ne l’a fait. Moi je sais que le tableau n’est pas totalement noir, même si le bilan n’est pas reluisant. Il a fait des choses mais ce n’est pas forcément perceptible ici à Bamako. À l’intérieur du pays, le peuple croit encore à IBK », affirme ce militant du RPM.

Le sursaut ? A un an jour pour jour de la prochaine élection présidentielle, le temps semble court pour le président candidat à sa succession, qui devra mettre les bouchées doubles pour inverser la vapeur. « Tout ce qui se passe créée des sympathies pour nous et diminue, à mon avis son électorat. Le régime doit faire attention et se souvenir que les Maliens qu’il menace et maltraite aujourd’hui sont des électeurs », assène Soumana Kalapo. Mais certains veulent y croire. « C’est un patriote, c’est indéniable. Il est vraiment attaché aux intérêts du pays, mais toutes ces erreurs de communication comme de casting ont fait que ça ne s’est pas manifesté comme il le voulait. Il est largement insatisfait », poursuit ce même militant.

Sortir par le haut, dire que ce projet de révision a manqué de concertation, montrer qu’il est capable d’écoute, afin d’enclencher la dynamique pour la présidentielle de l’année prochaine, c’est ce que certains pensent au sein même de sa famille politique. « S’il a l’habileté de retourner au dialogue, de dire « je vous ai compris », comme disait De Gaulle, l’un de ses modèles, dans ce cas je crois qu’il y aura les moyens de redresser sa popularité », souligne ce cadre du parti majoritaire. « Il y a quand même un fond légitimiste dans ce pays, surtout dans le pays profond, s’appuyant sur des valeurs culturelles où, quand le chef reconnaît qu’il a eu tort et qu’il veut sincèrement réparer, il y a une possibilité. De plus, il n’y a pas dans l’opposition une personnalité qui émerge de manière évidente, qui peut opérer un renversement de l’opinion nationale en sa faveur. Donc IBK reste, malgré tout, un candidat évident et incontournable », conclut-il.

 

Révision constitutionnelle : 3 questions à Me Mountaga TALL , président du CNID

 

Faut-il réviser la Constitution de 1992 ?

Le principe de la révision de la Constitution du 25 février 1992 n’est rejeté par personne. La Constitution elle-même prévoit les modalités de sa révision. Le débat porte sur les articles à modifier et sur les nouvelles dispositions à insérer. Je pense qu’il faut réviser mais après avoir recherché et obtenu le consensus le plus large et convenu du meilleur moment pour le faire.

La révision constitutionnelle fait débat. Quel en est l’impact sur la démocratie malienne ? 

Le débat en cours me rassure sur la vitalité de la démocratie malienne. L’exécutif, l’Assemblée nationale, l’opposition politique, la société civile, les médias et les réseaux sociaux jouent pleinement leur rôle. Il n’a pas été confisqué par l’élite et tous les Maliens se sentent concernés et interviennent. Le débat doit se poursuivre afin que la démocratie et le Mali soient gagnants.

Que devrait faire le gouvernement si le projet de loi n’était pas entériné par le référendum ?

Le peuple est souverain et sa volonté s’impose à tous. D’ailleurs cela a été clairement dit par les autorités. Pour moi le Oui dans les conditions actuelles diviserait encore plus le Mali alors même que l’objet du référendum est la consolidation de la paix et de la réconciliation. Et le Non va remettre en cause la poursuite de la mise en œuvre de l’Accord. Il faut donc absolument trouver un compromis sur le contenu et la date du référendum. Et cela est possible.

 

Référendum constitutionnel : La cour constitutionnelle dit oui

Saisie par certains partis de l’opposition pour se prononcer sur la constitutionnalité du référendum pour la révision de la constitution initiée par le président de la République, la Cour Constitutionnelle du Mali a rendu sa décision ce 4 juillet. Si la requête de l’opposition est recevable dans la forme, la cour rejette sa demande tendant à déclarer inconstitutionnelle la loi portant révision de la constitution du 25 février 1992.

En clair la Cour Constitutionnelle estime que le référendum peut se tenir après cependant une relecture de la loi.

La Cour Constitutionnelle rejette donc le principal argument de l’opposition qui s’appuyait sur l’article 118 de la constitution du 25 février 1992 pour déclarer inconstitutionnelle la tenue du référendum. La Cour estimant que malgré « l’insécurité résiduelle », les conditions de sécurité lors des élections en 2013 n’étaient pas meilleures.

Même si la Cour déclare « conforme à la constitution » la loi du 02 juin 2017 portant révision de la constitution du 25 février 1992, elle exige certaines corrections. Notamment sur la durée du mandat du 1/3 des sénateurs, qui seront désignés par le président de la République, qui n’est pas précisée. Ces corrections portent aussi sur une omission dans l’article 37 qui porte sur la formulation du serment du président de la République. En somme, la Cour exige la correction « d’erreurs matérielles » sur une dizaine d’articles du projet de loi portant révision constitutionnelle.

« Notre requête a abouti » et nous restons vigilants déclare Mody N’DIAYE, député de l’URD (Opposition) à l’Assemblée Nationale. La « Cour a déclaré que la mouture actuelle est à corriger », ajoutant que la Cour aurait dû déclarer tout simplement ce projet de loi inconstitutionnel. Le président du groupe VRD à l’Assemblée Nationale affirme que leurs actions futures seront déterminées par la suite donnée à l’arrêt de la Cour, c’est-à-dire la relecture annoncée du projet de loi.

« Le droit a été dit, c’est le Mali qui gagne », se réjouit le député Mamadou DIARASSOUBA, secrétaire à l’organisation du Rassemblement Pour le Mali RPM (Parti au pouvoir). Il estime qu’il faut tirer comme enseignement ce cet arrêt que tout le monde ait la même interprétation de l’article 118 de la constitution de 1992. Il ajoute que les « points soulevés par la Cour Constitutionnelle seront intégrés » et le projet examiné à l’Assemblée Nationale.

Révision constitutionnelle : que dit le Mali de l’intérieur ?

Depuis presqu’un mois le sujet de la révision constitutionnelle tient en haleine la société civile et les partis politiques à Bamako. Meetings et débats se succèdent, illustrant, si besoin en était, la passion soulevée par le sujet, qui cristallise les émotions, et ce même après le report à une date ultérieure du scrutin qui aurait dû se tenir ce dimanche 9 juillet 2017. A l’intérieur du pays cependant, il n’est que très peu, voire pas du tout, question de la révision constitutionnelle, pourtant d’intérêt national. Hormis dans les capitales et quelques grandes agglomérations régionales, la relecture de la Constitution semble donc bien loin des préoccupations des Maliens. L’intérieur se sent-il exclu de la grande discussion nationale autour de cette réforme ? Tour du Mali des opinions sur la question.

Mercredi 21 juin, les autorités locales de Tombouctou, avec à leur tête l’Honorable Aziza Ben Kattra, élue de la région, invitent les populations à une séance d’explication et d’information sur le projet de loi relatif à la révision constitutionnelle. Contre toute attente, les jeunes se mobilisent pour faire obstacle à la réunion. « C’est une première dans la région. Les jeunes montrent aujourd’hui publiquement qu’ils sont contre l’avis d’un élu local », explique Mohamed Salaha, porte-parole du collectif Yermatoun, qui signifie « Levons-nous ». Pour empêcher la tenue de la séance, les membres du collectif prennent d’assaut la salle du nouveau CEDRAB à Sankoré, munis d’écriteaux sur lesquels on peut lire : « Non à la monarchie », « Non au tripatouillage de la Constitution » ou encore « La démocratie, c’est le peuple ». La réunion se tiendra quand même et durera plusieurs heures. Les jeunes du collectif quittent la salle. Un camp du « Non » à la révision constitutionnelle est créé et entend se faire entendre par tous les moyens. Pendant ce temps, à Bamako, les manifestations, meetings et marches se multiplient.

Opération communication A l’intérieur du pays, la réalité diffère d’une région à une autre, avec des disparités notoires. Entre les risques d’attentats, les accrochages dans les régions du nord et les conflits communautaires entre éleveurs peuls et sédentaires au centre du pays, le sujet de la révision occupe peu les esprits. Les avis, quant à eux, sont mitigés. A Kayes, première région du pays, le sujet de la révision constitutionnelle ne passe pas inaperçu. Dans les grins, en famille et sur les lieux de travail, les discussions vives ne cessent pas, bien que les protagonistes ne comprennent pas véritablement le nouveau projet de texte. Boubacar Niane, journaliste, est convaincu que la majorité de la population ne sait pas grand chose du projet de loi. Et pour cause, « les députés de la région, qui ont entrepris des séances d’information et d’explication de la nouvelle Constitution, ne maîtrisent pas eux-mêmes tout le texte du projet. Il est donc difficile de convaincre les gens dans ces conditions », affirme-t-il. Un avis que partage Harouna Soumaré, entrepreneur. Selon lui, « les populations veulent en savoir davantage. Sinon, elles se contentent des rumeurs et finissent par rejoindre un camp, généralement celui du « Non ».

Alors qu’à Kayes, la société civile prépare une marche pacifique pour le samedi 8 juillet, afin de dire non à la révision constitutionnelle, à Gao, au nord du Mali, on multiplie les séances d’étude du texte afin de mieux l’expliquer à la population. Pour Moussa Yoro, membre de la société civile de Gao, « la révision constitutionnelle est nécessaire pour la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation ».

Au centre du pays, notamment à Ségou et à Mopti, l’adhésion au projet de révision constitutionnelle est loin d’être unanime. La séance d’information entreprise par les députés de la région dans la ville de Ségou, le 21 juin dernier dans la salle du Gouvernorat, a pourtant porté ses fruits. C’est du moins l’avis de Koni Coulibaly, président du Mouvement de la jeunesse pour le développement. « Ils ont vraiment expliqué le texte, point par point. Les participants ont avoué être satisfaits à la fin de la séance. Tous ont finalement rejoint le camp du Oui ». Seydou Daou, président de la section locale de l’Union des jeunes musulmans du Mali (UJMA) et maître coranique, n’a pas le même point de vue. « Nous ne savons rien du projet. Nous n’avons pas participé à la séance parce que nous n’avons pas été informés de sa tenue. Nous attendons donc que l’on vienne nous expliquer le contenu du texte », tranche-t-il.

Un peu plus loin, dans le cercle de Djenné, région de Mopti, on estime que les populations n’ont pas été consultées à la base. Pour Samba Cissé, consultant, le discours des jeunes s’articule autour d’un seul argument, « Mopti a été oubliée dans la nouvelle Constitution ». Compte tenu de la situation sécuritaire dans cette région du pays, où des affrontements se multiplient sur les questions de foncier, les populations se sentent laissées pour compte et bien loin « des problèmes de Bamako. Nous ne faisons que survivre. Les débats de politiciens ne me regardent pas », s’insurge Ismaël Traoré, de Markala, à quelques centaines de kilomètres de Ségou. Les populations sont convaincues que seul Bamako compte pour le gouvernement. A Sikasso, le constat est le même. Selon Mamadou Tangara, ancien maire de la ville, les gens disent non parce qu’ils voient qu’à Bamako des manifestations du camp du « Non » ont lieu presque chaque semaine. C’est « une occasion pour eux de dire non à la gouvernance actuelle », déplore-t-il.

Un non-événement ? À Aguelhoc, dans le cercle de Tessalit, au nord de la région de Kidal, où les récentes élections municipales ne sont pas tenues pour des raisons de sécurité, les populations se préoccupent plutôt de leur survie. Pour Ag Abdallah, le maire, « le sujet de la révision constitutionnelle ne dit rien à personne ici. Ce qui nous préoccupe, c’est notre sécurité. A Ansongo, dans la région de Gao, où les populations vivent la peur au ventre parce que craignant chaque jour une attaque djihadiste, le sujet de la révision constitutionnelle est un non-événement. Selon Amadou Cissé, maire sortant, ni la société civile, ni les partis politiques ne s’intéressent à ce sujet. Selon une autre source, un grand risque d’affrontement communautaire plane. « On préfère s’occuper de ces problèmes que d’autres choses pour le moment », assène-t-il. Dans les villes de Tessalit et de Kidal, la révision constitutionnelle passe également inaperçue. « Vous ne verrez personne en parler ici. C’est un non-évènement pour les populations », explique une source kidaloise qui a requis l’anonymat. Selon Alkassim Ag Alhouchel, président des jeunes de la CMA, le sujet est  pourtant évoqué timidement dans la région. « Les populations en parleraient davantage si le gouvernement déléguait des autorités pour venir expliquer le contenu du projet de loi.

Le déficit de communication est le seul point qui fait l’unanimité dans les régions. Tous s’accordent en effet sur le fait que le contenu de la nouvelle Constitution est méconnu  du plus grand nombre.

A Bamako, le gouvernement pourrait rendre publique très bientôt la nouvelle date retenue pour le référendum constitutionnel, après l’avis de la Cour constitutionnelle sur la requête introduite par l’opposition. Si on ne votera pas dans certaines régions, d’autres en revanche seront appelées à exercer leur droit civique. Voteront-elles « Oui » ou « Non » ? S’abstiendront-elles ? La question demeure pour le moment sans réponse !

 

 

 

Côte d’Ivoire : référendum constitutionnel sur fond de tension

Des votes émaillés de violence, des bureaux de vote vandalisés et un taux d’abstention non négligeable, voilà entre autres ce à quoi a abouti le scrutin référendaire organisé hier en Côte d’Ivoire.

Près de 6 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour s’exprimer sur le projet de nouvelle constitution voulu par le président Alassane Ouattara. « Voter est un devoir citoyen ; tourner la page de la crise née de la constitution de 2000 est quelque chose d’essentiel pour le futur de notre nation » estimait-il après avoir voté à l’école Sainte-Marie d’Abidjan.

Des incidents ont toutefois entâché la bonne tenue du scrutin à certains endroits. A Yopougon par exemple réputé pour être pro-opposition, une cinquantaine de jeunes ont bloqué des rues avant de saccager neuf bureaux de vote de l’école Sicogi II. « Ils veulent nous faire peur, mais on a connu bien pire, on ira voter et on mettra fin à toutes ces crises qui pourrissent notre pays » déclarait un habitant de la commune. Suite à ces incidents, le ministre de l’intérieur Hamed Bakayoko a tenu en premier lieu à rassurer « il y’a juste une centaine de bureaux sur 200.000 au total qui sont concernés, mais les choses se déroulent bien dans l’ensemble » avant de monter au créneau : « il y’a des gens qui sont de mauvaise volonté, qui manipulent les populations pour boycotter le scrutin de façon violente, mais ils assumeront leurs responsabilités devant la loi ». A Gagnoa (fief électoral de Laurent Gbagbo), à Divo, Daloa ou encore à Dabou tous acquis à l’ancien chef d’État ; des débordements ont également été signalés. « On peut aller voter oui ou on peut voter non. Donc on n’a pas besoin d’aller casser ou de mettre des barricades » analysait ‘’ADO’’.

Pour le chef de file de l’opposition Pascal Affi N’Guessan, leur appel de boycott a été largement suivi: « Ce vote a été un vaste désaveu pour le projet de Monsieur Alassane Ouattara puisque les Ivoiriens ont répondu massivement à notre mot d’ordre de boycott. Ils sont restés chez eux. »

Les résultats du scrutin sont attendus au plus tard demain mardi.