FAMa : l’armée repousse deux attaques djihadistes « complexes »

Six soldats maliens ont été tués et 18 blessés, dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 janvier, dans le centre du pays, dans deux attaques djihadistes, a indiqué dimanche l’armée dans un nouveau bilan.

« Le bilan est de six morts et 18 blessés » parmi les soldats visés par ces attaques contre « deux postes de sécurité » à Boulkessi et Mondoro (centre), entraînant une riposte qui a fait « une trentaine de morts côté terroristes », a écrit l’armée dans un communiqué publié sur Facebook. Un précédant bilan de sources de sécurité avait fait état de trois soldats tués. Le communiqué a salué la promptitude des réactions et la coordination efficace entre les FAMa et Barkhane qui ont mis en déroute les assaillants.

Mali – Barkhane : les effectifs de la force bientôt réduits

La semaine qui vient de s’achever a été particulièrement meurtrière pour les militaires français au Mali. Au total cinq soldats y sont morts sur la période dans des attaques djihadistes. Dans ce contexte, la France va « très probablement » réduire les effectifs de la force Barkhane au Sahel après des « succès militaires importants » en 2020, a déclaré la ministre française des Armées.

« Nous serons très probablement amenés à ajuster ce dispositif : un renfort par définition, c’est temporaire », a expliqué Florence Parly dans une interview au quotidien Le Parisien à paraître ce lundi après le renfort de 600 soldats qui a porté les effectifs de Barkhane à 5.100 hommes en 2020. Une décision sera prise à l’occasion du prochain sommet conjoint de la France et des pays du G5 Sahel en février à N’djamena au Tchad, a ajouté la ministre. La ministre a en outre de nouveau exclu toute négociation « avec des groupes terroristes comme Al-Qaida ou l’Etat islamique, qui assassinent de manière aveugle et ont du sang sur les mains ». Mais la porte est ouverte pour « des gens qui ont déposé les armes et qui ne sont pas motivés par une idéologie radicale et criminelle », a-t-elle relevé. Ils doivent se rallier aux accords de paix d’Alger de 2015, a-t-elle ajouté.

Mali -Sécurité : Les FAMa infligent des pertes aux terroristes

L’armée malienne a annoncé, dimanche avoir infligé de lourdes pertes à des hommes armés non identifiés dans le village de Kèrèkara à 7 km au sud de Koro (région de Mopti). Selon les FAMa, les assaillants avaient emporté des bétails. Informé le Poste de Commandement Tactique a dépêché une mission de poursuite.  La mission s’est dirigée vers Kiri près de la frontière avec le Burkina Faso où elle a été accrochée par des hommes armés. Après avoir engagé les combats avec les assaillants, aux alentours du village de Ogodourou, les FAMa ont récupéré les bétails enlevés. À l’issue des affrontements deux ennemis ont été neutralisés et du matériel récupéré.  Ils seront par la suite désignés par les FAMa comme terroristes. Au cours de cet accrochage, aucune perte en vies humaines n’est à déplorer côté armée malienne. Sur le chemin de retour à 4 km de Koro la mission a été encore accrochée. Là aussi, quatre autres terroristes ont été neutralisés, un Pistolet Mitrailleur saisi. Les animaux enlevés ont été conduits à Koro.

Dr Aly Tounkara : « On ne peut pas parler de succès »

Dr Aly Tounkara, enseignant-chercheur, sociologue et spécialiste des questions de genre et d’extrémisme violent répond à nos questions sur le sommet du G5 Sahel en Mauritanie, six mois après celui de Pau.

Lors du sommet du G5 Sahel à Nouakchott ce mardi, le président français s’est montré optimiste sur une victoire contre les terroristes, le pensez-vous trop optimiste ?

A la suite du sommet de Pau, un certain nombre de changements restent observables dans les pays du Sahel notamment les trois pays les plus touchés par le terrorisme qui sont le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Les armées africaines et la force Barkhane seraient plus dans un rapport de partages et de fournitures de renseignements. C’est une avancée incontestable. Dans le même temps les actions menées par Barkhane appuyé par ces forces nationales, notamment dans la zone des trois frontières, elles ont été couronnées de succès. Je pense que c’est plus la mort de Droukdel qui a amené le président Macron à apprécier les efforts dans le Sahel, qui n’est pas une fin en soi du terrorisme. Mais il y’a quand même des difficultés majeures dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Puisque en dépit du partage de renseignements, si vous suivez l’actualité, vous vous rendrez compte que les armées africaines évoluent parallèlement à la force Barkhane. Si les deux armées menaient des actions conjointes de façon effective et réelle, les bavures qui sont reprochées à ces armées le seraient aussi pour Barkhane. Cela démontre donc que la coopération n’est que de façade. De la même manière quand vous regardez les besoins qui sont satisfaits notamment par l’Union Européenne à travers la France ou encore les Etats-Unis, ce ne sont ceux exprimés par les armées africaines elles-mêmes. On ne peut pas lutter efficacement contre le terrorisme lorsqu’on n’a pas d’avions de chasse, ce qui avait été demandé par nos armées. Ce sont des difficultés qui font qu’on ne peut pas parler de succès, ou de fin du terrorisme dans les années à venir.

Plusieurs pays avaient fait des promesses de financement pour le G5 Sahel, mais qui peinent à se matérialiser, qu’est-ce qui bloque ?

Les raisons du blocage sont plurielles. Il y’a déjà l’attitude des chefs d’Etat du G5 Sahel eux-mêmes. Vous ne pouvez pas prétendre à une quelconque souveraineté et au même moment délégué les négociations d’une levée de fonds à d’autres acteurs notamment la France. Ce ne sont pas les chefs d’Etat qui sont en contact direct avec les pays qui ont fait des promesses. Ces derniers ne font pas non plus confiance à ces chefs d’Etat du G5 quant à leur capacité d’endiguer le terrorisme, ni même à gérer les fonds qui seront alloués pour. Il y’a une question d’éthique, de morale, de capabilité de ces Etats africains. Je crois que c’est cela qui explique pour beaucoup que ces pays qui ont fait des promesses n’arrivent pas à les tenir.

Centre du Mali : La défiance gagne du terrain

43 personnes sont mortes, selon des chiffres officiels, dans l’attaque des villages de Niangassadiou et de Binedama, les 3 et 5 juin dans le centre du Mali. L’association Tabital Pulaaku a accusé l’armée malienne d’être responsable de ces massacres. Le gouvernement, « très préoccupé par ces graves allégations », a ouvert une enquête le 7 juin, afin « d’établir immédiatement les faits. La justice est également saisie ».

L’État a ouvert plusieurs enquêtes à la suite d’autres situations dramatiques du genre. La deuxième attaque d’Ogossagou, le 14 février dernier, en est une illustration, alors que les conclusions de la première se font toujours attendre. Le gouvernement avait promis « d’arrêter et traduire les auteurs devant les juridictions compétentes » et, depuis, c’est le silence radio. La récurrence de tels faits constitue le terreau de la défiance des victimes envers la justice malienne. C’est dans cette optique que Tabital Pulaaku a demandé une enquête internationale indépendante des Nations Unies ou des organisations de défense des droits de l’Homme à la suite des attaques des villages de Niangassadiou et de Binedama. « Plusieurs tueries ont été perpétrées et aucune des enquêtes ouvertes par l’État pour situer les responsabilités n’a donné de résultats », remarque Mody Diakhaïté, Président de Tabital Pulaaku à Bankass. Même son de cloche chez Ginna Dogon. « Les enquêtes n’ont jamais produit de résultats, mais nous sommes républicains et nous soutenons la justice de notre pays. Cependant, nous n’avons jamais fait confiance à ce que l’État nous dit par rapport à la situation réelle au centre », renchérit Dramane Yalcoué, Président de la jeunesse Ginna Dogon.

Néanmoins, M. Diakhaïté relativise : le premier rapport trimestriel 2020 de la division des droits de l’Homme de la MINUSMA a accusé les forces de défense nationale et d’autres acteurs de tueries de civils au centre du Mali. Cependant, il n’a jamais été suivi d’arrestations.

Afin que la crédibilité en la justice malienne renaisse, il propose de mettre fin aux « arrestations et exécutions extrajudiciaires de la part des forces armées de l’État ». « Si c’est l’État le premier responsable d’une tuerie, osera-t-il enquêter sur lui-même ? », questionne-t-il.

Pour Dramane Yalcoué, faire appel à une enquête internationale indépendante n’est pas la solution à long terme. « La solution, c’est que les Dogons et les Peulhs s’acceptent, qu’ils règlent ce qui se pose comme problème au centre. Les morts ne vont pas revenir, mais faisons en sorte qu’il n’y en ait plus ».

Boubacar Diallo

Niagalé Bagayoko : « L’arrivée des forces tchadiennes ne pourra pas fondamentalement modifier les rapports de forces »

Niagalé Bagayoko, présidente de l’African Securty Secteur Netwrok (ASSN), experte sécurité en Afrique de l’Ouest et centrale répond à nos questions sur la participation sollicitée du Tchad dans la zone des trois frontières.

La France et le G5 ont une nouvelle fois sollicitée la participation tchadienne dans les opérations le long de la zone des trois frontières. Il avait déjà été sollicité une première fois dans ce sens en 2019, quelle réponse peut-on attendre du pays cette fois-ci?

En effet, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense du G5 Sahel (Mali, Tchad, Niger, Burkina Faso, Mauritanie) et français se sont réunis en visioconférence le lundi 27 avril. Ils ont insisté sur «  l’importance de l’envoi dès que possible d’un bataillon tchadien dans la zone des trois frontières », dite du Liptako Gourma et située entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso.

La question du déploiement du contingent tchadien dans la zone du fuseau Centre (alors que le Tchad est situé dans le fuseau Est selon le découpage de l’espace sahélien opéré par le G5/Sahel) est une question ancienne, qui peut presque être qualifiée de « serpent de mer ». Le Président Déby a toujours insisté sur la très grande valeur ajoutée de l’intervention tchadienne qu’il a toujours su habilement négocier, parfois jusqu’à la surenchère. Il faut réinscrire cette négociation dans le cadre de la rhétorique tchadienne qui insiste toujours et ce de manière récurrente sur la responsabilité des pays occidentaux sur la déstabilisation de la zone sahélienne. La position toujours réaffirmée d’Idriss Deby est que c’est l’intervention en Libye décidée par les puissances occidentales qui est à l’origine de la déstabilisation du Sahel et notamment du Mali, et dans ce cadre-là, il y’a une dette de ces forces à l’origine de cette déstabilisation qui doivent en retour prendre en charge y compris financièrement les interventions menées sur le terrain par les forces africaines qui acceptent depuis 2012 de payer le prix du sang.

 

Le président Déby avait déclaré le 10 avril ne plus vouloir participer à des opérations en dehors de ses frontières, propos par la suite nuancés. Cela peut-il être interprété comme un coup de pression ou une réelle volonté de repli?

En effet, le président Deby est revenu par le biais d’un communiqué de son ministère des Affaires étrangères sur ses propos initiaux relatifs à la décision du Tchad de n’envoyer dorénavant aucun soldat au-delà des frontières nationales dans le cadre d’engagement individuel des troupes tchadiennes pour lutter contre le terrorisme. Le ministère des Affaires étrangères tchadien a indiqué par la suite qu’il n’a jamais été question pour le Tchad de se désengager ni de la force multinationale mixte, ni de la force conjointe du G5 Sahel et moins encore de la MINUSMA. Ce qu’il faut préciser, c’est que tous ces engagements sont extrêmement importants d’un point de vue financier pour le Tchad parce que notamment sa participation à la MINUSMA est aussi une façon comme pour tous les pays notamment africains d’obtenir des remboursements de ce que l’on appelle règle COE (Contingency owned equipment qui peut se traduire par « remboursement des matériels appartenant aux contingents ») qui leur permet aussi d’entretenir leurs forces armées. C’est très important comme source de revenus pour les armées notamment africaines, c’est donc une source dont le Tchad et son armée ne peuvent se passer. Ce qu’Idriss Deby a toujours voulu négocier dès le début, c’est la prise en charge financière de sa participation. Il semble que ce qu’il a réussi à obtenir, est que le contingent appelé à être déployé dans la zone des trois frontières soit pris en charge par les partenaires internationaux, notamment sans doute la France dans le cadre du soutien qu’elle apporte aux armées partenaires du G5 Sahel.

 

Concentré les efforts dans la zone des trois frontières ne contribuerait-il pas à déplacer le problème (création de nouveaux fronts terroristes) plutôt que d’y mettre fin?

C’est de toutes façons dans la zone des trois frontières  que les interventions de la Force Barkhane tout comme des armées du G5/Sahel ont été concentrées pour répondre aux violences commises par  les groupes djihadistes, notamment du Groupe de soutien à l’Islam et aux Musulmans/GSIM),  de l’Etat Islamique au Grand Sahara désormais affilié à l’ISWAP (Islamic State West Africa Province) ou plus anciennement par le Groupe Ansarul Islam.  Les manœuvres et opérations conjointes menées par ailleurs par la Force conjointe du G5/Sahel ont aussi, depuis la création de celle-ci, été largement concentrées dans cette zone des trois frontières.

Lors du Sommet de Pau, il a été officiellement décidé que la lutte anti-terroriste ciblerait plus spécifiquement l’EIGS. Cependant, La recrudescence des attaques perpétrées par Boko Haram (et notamment par la faction JAS d’Aboubakar Shekau) dans le Bassin du Lac Tchad a démontré que le front Est demeure également un enjeu crucial, même s’il a été un peu moins pris en compte dans l’approche française de la lutte anti-terroriste tout comme par l’effort mené en commun par les armées du G5/Sahel. L’Opération Bohoma, supervisée par le Président Déby lui-même démontre l’importance de ce front dans la gestion de l’insécurité au Sahel.

L’apport du Tchad en 2013 dans la reconquête des zones occupées au Mali a été déterminant, le pays peut-il encore y joué un rôle important ?

Le rôle du Tchad a en effet été déterminant, notamment lors de la mise sur pied de la MISMA (Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine) déployée sous l’égide de l’Union africaine: c’est précisément pour intégrer les forces armées du Tchad (qui, de par son appartenance, à la CEEAC relevait de la brigade centre de la Force africaine en attente) que cette force a été élargie au-delà de la seule CEDEAO. Les contingents tchadiens ont ensuite joué un rôle majeur au sein de la MINUSMA. Mais il ne faut pas oublier que les engagements du Tchad ne se sont pas au cours des dernières années limitées au seul théâtre malien. En effet, les forces armées tchadiennes ont aussi été très active au sein de la FMM (Force multinationale mixte) réactivée dès 2012 pour être déployée sous le pilotage de la Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT) pour lutter contre la secte Boko Haram. Le Tchad a aussi déployé des hommes dans le cadre d’un autre mécanisme de coopération transfrontalière en matière de sécurité qui existe depuis 2010 à travers la « Force Mixte Tchad-Soudan » (FMTS), mécanisme militaire transfrontalier permanent doté de 3000 hommes et déployé le long de la frontière entre les deux pays. On voit donc combien l’engagement tchadien a été actif sur différents fronts.

Cependant, l’arrivée des forces tchadiennes sur le théâtre malien ne pourra à elle seule fondamentalement modifier les rapports de forces. Tout d’abord parce qu’au-delà de la zone des trois frontières, la situation demeure complexe au Mali, notamment parce que l’Accord pour la Paix et la réconciliation au Mali n’est pas appliqué de manière satisfaisante tandis que les incidents récents survenus du côté de la frontière mauritanienne ou dans le Sud dans la région de Kayes sont des motifs de préoccupation. Par ailleurs, la situation n’est pas caractérisée par la seule violence des groupes djihadistes mais aussi par celle des HANI (hommes armés non-identifiés) souvent criminels ou des groupes d’auto-défense ou milices communautarisés. Les méthodes très expéditives de l’armée tchadienne ont souvent été dénoncées. Dans un contexte où les abus ou exactions commises par des unités des forces de défense et de sécurité des armées du Mali, du Niger et du Burkina Faso sont dénoncées de manière croissante par des rapports de plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme, l’intervention tchadienne comme celle des armées partenaires ne devra pas être jugée à la seule aune de l’efficacité opérationnelle et de la dite « neutralisation des GAT (groupes armés terroristes) » mais aussi à la capacité à apporter une protection aux populations dans le respect de leurs droits et de leur dignité.

Dialogue avec les chefs djihadistes : Amadou Kouffa incontournable ?

L’idée de dialogue avec les leaders djihadistes comme piste de solution à l’épineux problème du terrorisme au Mali reçoit de plus en plus l’assentiment de l’État malien. Après son Haut représentant pour les régions du centre, Dioncouda Traoré, qui a assuré leur avoir envoyé des émissaires, le Président de la République lui-même, après plusieurs refus, est désormais favorable à d’éventuels échanges avec eux. Mais Amadou Kouffa, l’un des interlocuteurs visés par l’État est, selon de nombreux observateurs, actuellement fragilisé par des dissidences au sein de la Katiba Macina et menacé par la montée de l’État islamique au grand Sahara (EIGS).

« J’ai le devoir et la mission de créer tous les espaces possibles et de tout faire pour que, par un biais ou un autre, nous parvenions à un apaisement. Le nombre de morts dans le Sahel devient exponentiel. Je crois qu’il est temps que certaines voies soient explorées (…). Nous ne sommes pas des gens butés, bloqués ou obtus », déclarait Ibrahim Boubacar Keita le 10 février dernier à Addis Abeba, en marge du 33ème sommet de l’Union Africaine.

Pour la première fois, le Chef de l’État, longtemps opposé à toute négociation avec les chefs terroristes et djihadistes, se montrait ouvert à une telle initiative. Mais, si dialogue il doit y avoir, encore faut-il que ce soit avec les bons interlocuteurs. Si Iyad Ag Ghaly parait incontournable, vu sa grande emprise au sein des organisations djihadistes dans le pays, principalement au nord, Amadou Kouffa semble de son côté loin de pouvoir endosser le même costume dans le centre.

Kouffa pas si incontournable ?

« Amadou Kouffa peut être l’un des interlocuteurs. Mais l’idée serait de ne pas s’arrêter à l’individu, et beaucoup plus de s’intéresser à son histoire. On sait d’où il est venu, comment il a eu cette audience qui a prospéré au sein de certaines communautés. Le plus intéressant, au-delà de sa personne, est le combat qu’il a fait sien, sa trajectoire, le discours qui l’a promu et comment les communautés ont adhéré à ce discours », estime Baba Dakono, chercheur à l’Institut d’études de sécurité (ISS Africa).

Pour lui, même si un dialogue est instauré avec Amadou Kouffa, sans que les griefs et les frustrations des communautés dont il est porteur ne soient traités et que tous les autres acteurs ne soient impliqués, il sera difficile de venir à bout de l’insécurité caractérisée par l’activisme des groupes terroristes djihadistes.

Le Professeur Bakary Sambe, Directeur du think thank Timbuktu Institute, assure que Kouffa a perdu de son influence. « Il n’a plus l’emprise sur la Katiba Macina, dont certains éléments ont commencé à rejoindre l’État islamique au grand Sahara, notamment à cause des différents l’opposant au groupe de Mamadou Mombo ».

Du point de vue de Mohamed Elkhalil, spécialiste des questions sécuritaires au Sahel, l’idée même d’entreprendre des échanges avec Amadou Kouffa et ses alliés au centre serait carrément suicidaire pour le Mali.

« Négocier avec Kouffa, c’est juste signer la mort du Mali. Cela va pousser l’État malien  dans une position de faiblesse, alors qu’avec la nouvelle opération Maliko qui vient d’être lancée et une bonne coopération en renseignements des populations au centre, il peut parvenir à neutraliser ce leader terroriste sans négociations », croit-il.

Le géopolitologue Abdoulaye Tamboura est pour sa part convaincu de la légitimité de Kouffa à être un interlocuteur important dans un quelconque dialogue avec les autorités maliennes.

« Amadou Kouffa ne parle pas au nom d’une région. Il parle au nom d’une Charia qu’il veut étendre sur toute l’étendue du territoire malien. Sa vision ne se limite pas au Macina ou au Gourma et il tire sa légitimité du soutien de son mentor, Iyad Ag Ghaly, sans lequel il ne peut rien entreprendre en terme de négociations. Pour moi, il est un interlocuteur incontournable aujourd’hui si dialogue il doit y avoir », soutient-il.

Mahamadou Sawadogo : « Il serait intéressant d’élargir le G5 Sahel à des pays plus attractifs »

Mahamadou Sawadogo, chercheur burkinabé spécialiste de l’extrémisme violent dans le Sahel répond à nos questions sur la situation sécuritaire.

La France a annoncé le renforcement de Barkhane, qui va passer de 4 500 à 5 100 soldats. Qu’est-ce que cela peut apporter concrètement sur le terrain, notamment dans la zone dite des trois frontières ?

Cela peut avoir un impact positif sur la zone, qui est l’épicentre de la violence. C’est de là que l’État islamique attaque les trois pays (Mali, Burkina Faso, Niger). Cela permettra de stabiliser la zone, mais les groupes terroristes ne vont sûrement pas attendre le déploiement de Barkhane pour continuer leurs assauts. Il y a donc le risque que leurs attaques soient dirigées ailleurs. Pour le Burkina, ce sera peut-être désormais vers l’est ou l’ouest, pour le Mali, ils vont remonter vers le centre.

Ce renforcement devrait aider au déploiement de la force Takuba, mais peu de pays européens semblent enclins à l’intégrer. Existe-t-il un risque qu’elle devienne une Arlésienne, comme le G5 Sahel ?

Oui, évidemment. Ce ne sont toutes les armées qui peuvent se déployer au Sahel. Ce sont des conditions assez particulières, difficiles et un risque d’enlisement n’est pas à exclure. Pour ce qui est du G5 Sahel, les pays qui le composent n’attirent pas vraiment les investisseurs. Il serait donc intéressant de l’élargir le G5 à d’autres pays plus attractifs, le Sénégal, la Côte d’Ivoire ou le Ghana.

Ces pays pourraient être bloqués par la crainte d’être pris pour cibles…

Oui, mais s’ils ne le font pas, ils seront des cibles quand même. Je suis convaincu que des terroristes s’y trouvent déjà. Autant unir les forces pour en venir à bout, au lieu d’être attentistes. Lorsque le Mali était le seul ciblé, le Burkina ne s’est pas trop préoccupé. Nous voyons le résultat.

Des observateurs affirment que les groupes terroristes qui se confrontent sur d’autres théâtres se tolèrent et coopèrent même au Sahel. Comment l’expliquer ?

Ils ont des combattants ayant servi plusieurs les mêmes groupes. Ainsi, Ansarul Islam a été dissout. Une partie des combattants s’est retrouvée dans l’État islamique et une autre dans le JNIM. Ils sont comme des frères et ont également compris que, dans le cas du Sahel, ils avaient tout intérêt à s’entendre, parce que cela leur donne de la puissance. Ils se complètent. Certains sont plus tactiques et techniques, d’autres sont en nombre et connaissent parfaitement le terrain. Certaines fois, ils ont des revendications hors nature, si je puis dire : un groupe vient revendiquer le territoire identifié d’un autre, cela leur permet de brouiller les pistes.

Le coût des mesures de lutte contre le terrorisme pour les populations civiles dans la région du Liptako Gourma

Les populations se perçoivent doublement victimes, prises en tenailles entre les groupes extrémistes violents et les mesures restrictives des États.

 

Les États du Liptako-Gourma, espace regroupant le Burkina Faso, le Mali et le Niger, ont instauré dans plusieurs parties de leurs territoires des mesures restrictives de mobilité pour endiguer la menace terroriste.

Depuis le 31 décembre 2018, le gouvernement du Burkina Faso a instauré l’état d’urgence dans sept de ses 13 régionsface à l’augmentation des attaques attribuées à des groupes extrémistes violents. Dans tous les pays du Liptako-Gourma, l’état d’urgence a permis aux autorités d’adopter des mesures spéciales notamment sur le plan sécuritaire telles que les restrictions de déplacement, l’interdiction de circulation des motos ou pick-up ou encore la fermeture de certains lieux comme les marchés ou les foires hebdomadaires dans les zones touchées.

Les autorités soutiennent que les groupes extrémistes violents utilisent les motos pour commettre des attaques, ainsi que les marchés, notamment les marchés hebdomadaires, pour s’approvisionner en nourriture. Elles soupçonnent également que les groupes dégagent des bénéfices des trafics illicites, tels que la contrebande de carburant, pour financer leurs activités.

Dans le Centre du Mali, la décision prise par le chef d’état-major de l’armée, le 1er février 2018, d’interdire l’utilisation des motos et pick-up dans de nombreuses localités, a suscité des réactions mitigées. Alors que les autorités sont convaincues qu’elles ont permis de réduire significativement le nombre des attaques, particulièrement celles perpétrées par des individus armés à moto, les populations se plaignent des conséquences de ces mesures.

Malgré les restrictions, la menace terroriste persiste et s’est étendue à d’autres parties du Liptako-Gourma

Si celles-ci visent à mettre un terme aux attaques terroristes, elles privent les communautés d’une grande partie de leurs moyens de subsistance et augmentent ainsi leur vulnérabilité.

Entre juin et septembre 2018, l’Institut d’études de sécurité (ISS) a mené des entretiens dans plusieurs localités du Liptako-Gourma pour comprendre les implications des mesures de lutte contre le terrorisme. Les résultats montrent que l’interdiction des motos et pick-up ont une incidence négative sur la circulation des personnes et des marchandises dans les zones périphériques dépendantes de ces moyens de transport.

Dans certaines localités, les restrictions à l’utilisation des véhicules ont entraîné une augmentation des coûts du transport et  des marchandises. Dans le cercle de Ténenkou, dans la région de Mopti, au Mali, le prix d’un kilogramme de poisson fumé est passé de 1 250 francs CFA (2,15 dollars US) à 2 250 francs CFA (3,87 dollars US).

L’approvisionnement des marchés est affecté par les difficultés de transport des producteurs de villages voisins tels que Nouh Bozo et Sènè Bambara. Cette situation accroît le risque d’insécurité alimentaire dans la région. La perturbation des chaînes d’approvisionnement réduit également les moyens de subsistance des agriculteurs qui ne parviennent pas à écouler leurs produits sur les marchés des centres urbains.

Dans la région de Diffa, au sud-est du Niger, où Boko Haram est actif, il est interdit de circuler et les marchés sont fermés depuis 2015. Ces mesures ont, ensuite, été étendues à la région de Tillabéri après de nombreuses attaques terroristes imputées à des personnes armées se déplaçant à motos.

Les restrictions imposées à l’utilisation de certains véhicules ont entraîné une hausse des prix du transport et des marchandises

À Tillabéri, les motos sont utilisées pour les évacuations sanitaires et l’approvisionnement en médicaments. Les mesures de sécurité restrictives ont dissuadé certains agents de santé de se rendre dans les zones où l’état d’urgence avait été décrété. Cette situation a entravé le fonctionnement des centres de santé intégrés ou des cases de santé, qui constituent les structures de base pour la prise en charge sanitaire dans la région.

Pour la plupart des personnes interrogées, les mesures prises n’ont pas permis de mettre fin aux attaques terroristes et ont eu un impact notamment sur le plan socioéconomique. Elles dénoncent également le fait que les actions ont été menées sans consulter les populations locales pour s’assurer de leur efficacité et de leur applicabilité dans des contextes spécifiques.

Dans plusieurs localités de la province du Soum (Burkina Faso), limitrophe de la région de Mopti (Mali) où des mesures d’interdiction de circulation sont en vigueur depuis mars 2017, les tendances ne permettent pas d’affirmer que les mesures ont été efficaces.

Immédiatement après la mise en œuvre des restrictions, le nombre d’attaques a diminué puis de nouveau augmenté. Ainsi, malgré les restrictions et l’interdiction de circulation, l’insécurité liée à la menace terroriste persiste et s’est même étendue à d’autres zones de la région du Liptako-Gourma.

La figure ci-dessous illustre l’évolution des attaques avant et après l’instauration des mesures restrictives dans la province du Soum.

L’impact économique de la fermeture des marchés hebdomadaires est sans équivoque. Outre la perte de revenus pour les commerçants, les marchés occupent une place centrale dans la vie des populations et représentent d’importants espaces d’échanges sociaux, politiques et culturels. Ils contribuent ainsi à renforcer la cohésion sociale dans les zones secouées par des tensions intercommunautaires.

Les restrictions n’ont pas seulement privé les personnes de leurs moyens de subsistance et de l’accès aux services sociaux de base. Elles ont pu aussi accroître leur vulnérabilité à l’extrémisme violent, les groupes exploitant notamment cette situation pour attirer les jeunes.

Les mesures restrictives de lutte contre le terrorisme rendent difficile l’instauration d’un climat de confiance entre le gouvernement et les citoyens

Bien que les autorités considèrent les mesures restrictives comme efficaces et décisives dans la lutte contre l’extrémisme violent dans le Liptako-Gourma, les populations locales manifestent leur frustration et leur désapprobation. Elles se considèrent comme des victimes prises en tenailles, entre les groupes extrémistes violents et les réponses du gouvernement. Les États de la région doivent remédier aux lacunes associées à ces actions de lutte contre le terrorisme et améliorer la communication avec les communautés locales lors de leur mise en œuvre.

Les restrictions devraient être progressivement assouplies lorsque la situation sécuritaire le permet. Elles pourraient aussi être accompagnées d’autres efforts en matière de fourniture des services sociaux de base, notamment l’accès à l’alimentation et aux soins de santé. En offrant ces services, les forces de sécurité et de défense pourraient jouer un rôle social et compenser le manque de personnel de l’État et d’organisations humanitaires dans ces zones.

Les mesures restrictives de lutte contre le terrorisme peuvent être contre-productives si elles rendent difficile l’établissement d’une relation de confiance entre le gouvernement et les citoyens. Pour prévenir et combattre l’extrémisme violent, les États du Liptako-Gourma doivent élaborer des stratégies fondées sur la communication et l’implication des communautés. Cela renforcera les relations entre l’État et les citoyens ainsi que la résilience des communautés face à l’extrémisme violent.

                          

Cet article a d’abord été publié sur le site de l’Institut d’études de sécurité (ISS)

 

Insécurité : Le centre fait-il oublier le nord ?

Dans le nord du pays, des personnes sont assassinées, souvent en masse. Au centre de l’attention au début de la crise, cette zone est supplantée depuis des mois par des violences, tantôt de milices communautaires, tantôt de groupes djihadistes au centre. Qu’en est-il ?

« Le bilan est passé aujourd’hui à  49 morts, parce qu’un blessé a succombé », informe Mohamed Ag Albachar, porte-parole du Mouvement pour le Salut de l’Azawad (MSA). Ce chiffre macabre est le résultat du forfait commis par des « bandits armés » en motos à l’est de Ménaka, les 11 et 12 décembre. Les victimes étaient de la communauté Daoushak, principale base du mouvement. Quelques semaines plus tôt, le 12 novembre, une attaque terroriste menée par des hommes non identifiés faisait trois morts et de nombreux blessés à Gao, malgré la présence des nombreuses forces armées. À Tombouctou, le constat est similaire. Les  populations se sont habituées aux violences. « Le centre est devenue l’épicentre de la crise, mais l’arbre ne cache pas la forêt. Cela ne fait pas ombre aux exactions qui se passent au nord », rappelle Drissa Traoré, coordinateur du projet conjoint AMDH –  FIDH. Des mesures sécuritaires sont annoncées pour réduire le banditisme dans les régions de Gao et Tombouctou. « Il est vrai qu’il y a une recrudescence des exactions au nord, mais ce qui se passe au centre est très grave», reconnait le charge de communication du MSA. La situation « est préoccupante » parce que les milices locales sont devenues un véritable danger pour la cohésion sociale et la paix. « C’est au centre qu’il y a le plus d’affrontement intercommunautaires. Il a fait oublier le nord, mais c’est surtout parce que l’ennemi au nord est connu, alors qu’au centre il y a également des populations locales qui s’affrontent », souligne Dr Fodié Tandjigora, sociologue à l’Université des lettres et sciences humaines  de Bamako. Il y a urgence selon lui, « c’est à gérer rapidement parce qu’il y a un risque que cela se transmette à la future génération ».

La MINUSMA a déployé une équipe spéciale d’enquête sur le lieu des exactions à Ménaka « pour établir les faits et les circonstances » de ces exécutions. L’AMDH et la FIDH invitent les autorités « à mener des enquêtes sur ces crimes qui ne peuvent pas être tolérés », soulignant la recrudescence d’actes insoutenables.

Le chef de la Katiba Macina Hamadoun Kouffa serait mort

Le chef de la katiba Macina, Hamadoun Kouffa serait mort, selon un communiqué de Barkhane rendu public ce vendredi. L’opération annonce avoir dans la nuit du 22 au 23 novembre 2018,  frappé durement un groupe terroriste de la Katiba Macina, dans la région de Mopti.

L’opération qui selon le communiqué a combiné l’action de nombreux moyens aériens : avions Mirage 2000, hélicoptères Tigre et Gazelle appuyés par des drones Reaper, ravitailleur C135 et hélicoptères de manœuvre. Barkhane annonce que à « ce stade de l’évaluation de l’opération, il apparait qu’une trentaine de terroristes a été mise hors de combat, parmi lesquels figurent probablement le chef de la katiba Massina, Hamadoun Kouffa, et ses principaux cadres ».

« la neutralisation probable du chef de la katiba Massina est un nouveau coup très sévère porté au RVIM dont il était un des principaux leaders » ajoute le communiqué.

 

Wassim Nasr: « Tant qu’il n’y a pas de solution politique les groupes djihadistes vont continuer à proliférer »

Est-ce que les groupes djihadistes sont  plus forts aujourd’hui au Mali ?

Ils sont en train de monter en puissance. Après l’opération franco-malienne, les éléments de Moctar Belmoctar sont partis d’un côté, ceux du MUJAO d’un autre et Iyad Ag  Ghaly aussi. Mais c’est en avril 2017 qu’Iyad a réussi à les réunir pour former un groupe capable de faire beaucoup des dégâts. Il a élargi le rayon d’opération jusqu’à Ouagadougou et Grand Bassam (Côte d’Ivoire).

Est-ce qu’il mène des opérations avec Al Sahraoui ?

Abou Walid Al Sahraoui a voué allégeance à l’Etat islamique. Ce qui est spécifique au Sahel en général. Al-Qaïda et l’Etat islamique ne se confronte pas, ils se tolèrent. Le conflit et la compétition entre les deux n’ont pas lieu d’être. Ce sont des relations tribales, claniques et parfois des intérêts communs qui priment.

Barkhane a-t-elle de la peine à faire face à la montée de ces groupes ?

Cela dépend de quelle perspective on voit les choses. Parce que Barkhane aussi a des résultats sur le terrain. Mais est-ce que ces résultats militaires suffisent à eux seuls à trouver une solution ? Elle est parvenue à élimer des chefs djihadistes avec une empreinte militaire assez faible. Tant qu’il n’y a pas de solution politique les groupes djihadistes vont continuer à proliférer et profiter des situations instables.

Attaques terroristes : baroud d’honneur ou montée en puissance ?

Depuis 2012, le Mali est confronté à un phénomène devenu mondial : le terrorisme. Malgré l’assistance des forces internationales, le pays continue d’être endeuillé par des attaques djihadistes. Le 30 septembre, AQMI,  membre du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, diffuse une vidéo de propagande. Elle met en scène plusieurs attaques perpétrées au Mali, et des   menaces à  l’Occident. Parallèlement, les embuscades se multiplient sur le terrain. Fanfaronnade ou ascension ?

« Et la bataille continue… ». C’est l’intitulé de cette vidéo produite par Az-Zallaqa, un organe de propagande terroriste. Elle a été diffusée dimanche 30 septembre par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), fidèle au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM). D’une durée de plus de trente minutes, elle revient sur les  différentes attaques opérées par ce mouvement dirigé par Iyad Ag Ghaly depuis mars 2017. « Elle relate plusieurs attaques ayant eu lieu depuis la création du nouveau groupe. Il y a celle de Boulkessi en mars 2017, de Sevaré, de Gao, et d’autres contre la MINUSMA ou les FAMA », décortique Wassim Nasr, analyste des mouvements djihadistes et auteur du livre : « Etat Islamique, le fait accompli ». « Mais le plus important c’est qu’elle est labélisée avec tous les labels d’Al-Qaïda et AQMI », révèle-t-il, ajoutant qu’« on y voit aussi les préparatifs de l’attaque complexe de l’aéroport de Tombouctou le 14 avril 2018». L’attentat avait enregistré un mort et une vingtaine de blessés. Les djihadistes, avant de passer à l’opération, s’étaient déguisés en soldats maliens, en casque bleus et en soldats français. Une stratégie de plus en plus utilisée.

Pour Yvan Guichaoua, enseignant chercheur à la Brussels School of International Studies (Université de Kent), « en dehors de la glorification de l’engagement militaire, la vidéo convoque les leaders intellectuels d’Al Qaïda et axe le discours sur la guerre entre l’Islam et l’Occident». Entretenir la terreur, créer la panique et la psychose aussi bien au nord et au centre du Mali qu’au-delà, semble être le souci de cette organisation terroriste.

Des groupes en puissance ? Avec l’intervention en 2013 de la force Serval (devenue Barkhane) pour stopper la progression djihadiste vers le sud du pays, les différents groupes ont été dispersés. Mais la déliquescence de l’Etat leur avait permis de se réorganiser au fil des années. En mars 2017, Iyad Ag Ghaly crée le groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, une fusion d’Ansar Dine, d’Al Qaïda, de la  Katiba du Macina et d’Almourabitoune. « Ils sont en train de monter en puissance parce qu’Iyad Agaly a réussi à les réunir après la débandade de 2013 », précise une source sécuritaire bien introduite. Depuis, les attaques sont menées avec audace et  professionnalisme. Voiture piégée, mines ensevelies, embuscades, tirs d’obus, attaques frontales, les djihadistes usent de tous les moyens nuisibles pour détruire leurs cibles. La MINUSMA, la force Barkhane, les forces armées maliennes sont toutes, aux yeux du GSIM,  des « ennemis » à saigner.

L’initiative de l’attaque est finalement devenue la leur. Le 26 septembre, sept soldats maliens et un civil ont été tués entre Bambara-Maoudé et Douentza suite à des  engins explosifs improvisés. Des actes tragiques inombrables. « Ces récentes attaques sont une manière de défier la communauté internationale. Ces djihadistes sont de plus en plus forts », souligne Mohamed Abdellahi Elkhalil, spécialiste des questions d’insécurité sociale et sécuritaire du Sahel. Malgré les opérations de la force Barkhane dans le Sahel, la menace selon Mahamadou Savadogo, spécialiste de l’extrémisme violent et de la radicalisation au Sahel, va grandissant. « Il y a une montée en puissance et un changement des stratégies de ces groupes terroristes. Au Burkina, ils sont en train de faire basculer les populations dans l’extrémisme violent en s’intégrant et en se confondant à elles », souligne-t-il. Les initiatives prises jusque-là par le Mali et ses partenaires n’ont pas permis de contrer le fléau. Le mal semble plus profond.

Mais tout de même, il n’y a « ni baroud d’honneur ni montée en puissance », selon Yvan Guichaoua. « Les djihadistes travaillent leurs objectifs politiques dans la durée et la défaite militaire fait partie de leur routine », dit-il, ajoutant que « lorsque la tendance est négative pour eux, ils font le dos rond, se redéploientg4, se restructurent, patientent, et exploitent politiquement les erreurs de leurs adversaires ».  Les bavures  et massacres de l’armée sur les populations civiles comme à Boulkessi sont ainsi mises à profit par les djihadistes. De plus en plus, ils  se montrent résilients  face aux situations. « Pour les prendre en défaut, il faut plus que de la pression militaire », mais « aussi  persuader les populations parmi lesquelles ils évoluent qu’il existe des modèles de société plus attractifs que le leur », indique le chercheur.

Barkhane et G5 Sahel : pour quels résultats ? Face au flux terroriste et aux attaques asymétriques, les Etats du Sahel sont mis à rude épreuve. La présence de  la Force Barkhane, autrefois Serval, a affaibli les différents groupes terroristes au Sahel. Des chefs djihadistes sont ciblés et des armes détruites. Fin août, dans la région de Ménaka, Barkhane a neutralisé un certain Mohamed Ag Almouner, un des chefs du groupe Etat Islamique au Grand Sahara. Selon la ministre française des Armées, Florence Parly, sur les antennes de RFI le  8 octobre, « plus de 130 terroristes » ont été neutralisés par Barkhane depuis le début de l’année. Concomitamment, cette force soutient l’armée malienne avec laquelle elle mène souvent des patrouilles sur le terrain. Son bilan reste malgré tout de même « mitigé ». Cela s’explique. « Elle a infligé des très lourdes défaites aux mouvements djihadistes, notamment dans la zone de Ménaka. Mais on constate que ces groupes parviennent à se redéployer pour continuer à harceler les forces maliennes et étrangères, tout en maintenant la pression sur  les populations civiles et les groupes signataires, par le biais d’assassinats ciblés », étaye Yvan Guichaoua, enseignant chercheur à la Brussels School of International Studies. Plusieurs paramètres rentrent aussi en jeu. « La machine organisationnelle contre-terroriste est toujours  plus lourde à faire fonctionner que celle des djihadistes », indique le chercheur. Par jour, la Force coûte à la France 1 million d’euros (soit 655 millions de francs CFA).

Quant à la Force du G5 Sahel, sa mission, en plus du développement, est de combattre le terrorisme tout le long des frontières des Etats membres. Plus d’une année après sa création, cette initiative n’a pas répondu aux urgences. Pire, elle a été attaquée dans ses fondements par les terroristes.  Au problème de financement s’ajoute « la qualité des ressources humaines ». « Les groupes terroristes ont anticipé sur les opérations annoncées par le G5 en élargissant au maximum le front », note Mahamadou Savodogo. Selon lui, « le fait d’annoncer les opérations sans les exécuter contribue plutôt à renforcer la résistance et l’adaptation des groupes terroristes ».  Depuis août, au moins 36 personnes ont été tuées dans des actes terroristes au Burkina Faso, dans sa partie frontalière avec le Niger et le Mali.

Incidence communautaire Bien que certains membres des groupes djihadistes soient des étrangers, force est de reconnaitre qu’ils opèrent avec des éléments locaux. D’où le traitement aussi complexe que sensible du sujet. Les rivalités communautaires anciennes sont le plus souvent vivifiéespar les accointances supposées avec des groupes terroristes. Des affrontements intercommunautaires, comme ce fut le cas entre les Daoussahak et les Peuls dans la région de Ménaka,  les Dogons et les Peuls au centre du pays et même au sein d’une même tribu (Iboguilitane et Idarfan) récemment à Ménaka. Les dernières  violences ont fait  plus de quarante morts parmi les civils. Pour Yvan Guichaoua, « il faut être prudent sur les causes qui peuvent être liées à des vendettas personnelles ou des affaires criminelles ». Aussi bien pour les groupes terroristes que pour les forces qui les combattent, les populations sont la matière à conquérir. « Chaque camp tente, dans son registre, de « gagner les cœurs et les esprits» des populations, fait savoir M. Guichaoua.

Les victimes du terrorisme se comptent chaque jour davantage et le quotidien des populations est ombrageux. Au regard du bourbier, l’horizon n’augure pas la fin prochaine des épreuves.

G5 Sahel : Et si le Mali avait eu tort d’avoir raison trop tôt !

Face à la sanctuarisation du Sahel par des pseudo-djihadistes qui ne sont, en réalité, que de vils criminels et trafiquants en tous genres ; et face à l’insécurité entretenue par ces hordes de terroristes avides de sang et exploitant à fond la pauvreté et parfois le désespoir des braves populations du Sahel éprouvées par les effets désastreux des changements climatiques, les Chefs d’Etat du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad ont porté le G5 Sahel sur les fonts baptismaux le 16 février 2014 à Nouakchott (Mauritanie). Dans son acte fondateur, le G5 Sahel ne fait pas mystère de son ambition de promouvoir le développement et la sécurité, la bonne gouvernance et la démocratie ainsi que le développement régional inclusif et durable en agissant sur le levier de la coopération régionale et internationale.

C’est que, entretemps, les doctrines en matière de lutte contre le terrorisme dans l’espace sahélo-saharien et à travers le monde ont fortement évolué, mettant en exergue la nécessité de combiner actions militaires et actions de développement. L’enlisement d’armées qui comptent parmi les plus puissantes au monde dans des théâtres d’opérations disséminés aux quatre coins du monde a achevé de construire de nouvelles doctrines en matière de lutte contre le terrorisme, cette odieuse hydre  de Lerne à la nature insaisissable et aux méthodes asymétriques. Pour l’histoire, flashback sur la genèse de ce qui aurait dû être une évidence.

Le Mali,  précurseur du G5 Sahel

Père fondateur de l’Organisation de l’Unité Africaine, ancêtre de l’actuelle Union Africaine (UA) et ayant gravé la construction africaine dans le marbre de sa Constitution, a toujours été un chantre de l’unité qui donne sa pleine mesure à la mutualisation des intelligences et des ressources pour construire le bonheur des populations africaines. C’est ainsi que des indépendances à nos jours,  le Mali a joué et continue de jouer les premiers rôles dans la construction d’un nombre impressionnant d’organisations qui comptent dans la sous-région ouest-africaine et sur le continent. Pas besoin d’égrener des listes ! Pour notre démonstration, suffiront largement l’OUA, l’UA, la CEDEAO, l’UEMOA, le CILSS, le Liptako-Gourma, l’OMVS… et bien entendu le bien nommé G5 Sahel. A propos de celui-ci, il vous souviendra que depuis le début de la décennie 2000, à l’heure des tout premiers rapts d’européens dans le Sahel, un pays a tiré la sonnette d’alarme. Le Mali. Un pays a tenté vainement de mobiliser pour faire face à la tête de Cerbère qui sortait des profondeurs du grand désert. Le Mali. Un pays a fait face, presque seul, à un fléau transfrontalier. Le Mali. Un pays s’est trouvé dans le rôle peu enviable de victime collatérale pour affronter les conséquences de l’intervention en Libye d’une certaine communauté internationale mal informée, mal préparée et savamment manipulée par MM. Sarkozy et Bernard-Henry Levy. Encore le Mali. Même la vénérable ONU a foncé tête baissée dans le piège libyen, véritable boîte de Pandore d’où se sont échappés le désordre, l’anarchie et la violence. La Libye, ce Styx aux contours aussi imprécis que la mer du Nord qui charrie la déchéance humaine des temps modernes  et qu’il convient de dessécher par tous les moyens.

Aujourd’hui, dans le prétoire du tribunal de l’histoire, là  où les faits têtus sont opposables aux discours creux et mensongers des ambitions égoïstes et mesquines, chacun devra assumer pleinement sa part de responsabilité. Victime du terrorisme au Sahel alimenté par le chaos libyen, le  Mali a eu malheureusement tort d’avoir  raison trop tôt. Il en est ainsi de certaines matières même si, par après, il faudra rendre à César ce qui est à César. Beati pauperes spiritu (Bienheureux les pauvres d’esprit !).

Le leadership d’IBK

Du Sahel aux Nations-Unies ; d’Addis-Abeba au château de La Celle-Saint-Cloud, près de Paris ; d’Abidjan à Bruxelles, le Président IBK aura été de toutes les « campagnes », se dépensant sans compter, afin de réunir toutes les conditions nécessaires à l’ancrage institutionnel du G5 Sahel et à la montée en puissance de sa Force Conjointe dont le poste de commandement opérationnel se trouve justement à Sévaré, en terre malienne. Et un certain Didier Dacko, Général de Division de son armée, n’en est-il pas le Commandant en chef depuis le 8 juin 2017 ? Aux côtés de la MINUSMA, de Barkhane, des armées nationales et de diverses forces européennes déployées dans le Sahel, le G5 Sahel agit tel un joker de luxe. Mieux ! Sa Force Conjointe cristallise tous les espoirs des autorités et populations du Sahel ainsi que de toute la communauté internationale dans l’âpre combat contre les forces du mal.

Il est sûr et certain que les historiens ne manqueront pas de faire le bilan de l’œuvre colossale d’IBK en sa qualité de président en exercice de la conférence des Chefs d’Etat du G5 Sahel, du lundi 6 février 2017 (Sommet extraordinaire du G5 Sahel à Bamako) à celui de Niamey (6 février 2018), au cours duquel il a passé le témoin à son homologue nigérien Issoufou Mahamadou.  En attendant cette échéance, il nous faut affirmer haut et fort que c’est sous son magistère que le G5 Sahel est sorti de ses limbes pour prendre véritablement son envol. Si aujourd’hui le monde entier se presse autour du berceau du G5 Sahel, il a bien fallu que des artisans infatigables fassent le boulot et qu’un leadership éclairé ait été à la manœuvre pour mettre fermement le cap sur le port d’attache et que, enfin, sa dédicace ait été à hauteur de ses ambitions. Sans autosatisfaction d’aucune sorte, le Président IBK aura satisfait à toutes ses exigences. Et même au-delà !

Bruxelles, l’apothéose

Le 23 février 2018 à Bruxelles, au siège de la Commission Européenne, s’est tenue la Conférence internationale de Haut niveau sur le Sahel ; elle était co-présidée par le Président de la République du Niger, Président en exercice du G5 Sahel, Issoufou Mahamadou, par le Président de la Commission de l’Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, par le Secrétaire Général des Nations-Unies, António Guterres et par le  Président de la Commission Européenne, Jean-Claude Juncker. Les 27 chefs d’État et de Gouvernement de l’Union Européenne s’étaient tous pressés au Berlaymont pour apporter leur soutien politique et financier aux pays du Sahel qui sont une « digue » qui les protège et dont toute infortune pourrait les affecter gravement. Venus aussi à Bruxelles, des hauts représentants des riches monarchies pétrolières du Golfe dont l’Arabie Saoudite et les  Émirats Arabes-Unis pour apporter leur solidarité à leurs frères du Sahel.

Le tour de table a abouti à une annonce de 414 millions d’euros dont 116 millions pour l’Europe. La moisson est bonne. Excellente. Par enthousiasme, on serait même tenté d’affirmer que le budget est définitivement bouclé pour la mise à flot de la Force Conjointe s’il n’y avait pas ce petit gap annuel de 9 millions sur les 75 millions du budget des opérations. Qu’à cela ne tienne ! Comme l’a laissé entendre le Président KEITA, il y aura un avant et un après-Bruxelles tant la mobilisation de la Communauté Internationale au chevet du Sahel aura été forte.

Il faut espérer que les modalités de décaissement des contributions annoncées ne soient pas un parcours du combattant de nature à hypothéquer les opérations complexes de la Force Conjointe. Il faut espérer aussi que les partenaires comprennent que, à menace égale, le traitement doit être identique ailleurs comme au Sahel. Malheureusement pour l’instant, il n’y a pas de commune mesure entre les sommes dépensées ailleurs pour éradiquer le terrorisme et celles consenties aux pays du Sahel. Ce deux poids, deux mesures a été fortement souligné par les cinq Chefs d’Etat du Sahel qui ont produit un sacré plaidoyer à Bruxelles dont il faut espérer qu’il génère des dividendes à la hauteur de leurs ambitions.

 

Ouagadougou : l’Ambassade de France et l’État-major des armées visées

La capitale burkinabé a subi ce vendredi matin aux alentours de 10h plusieurs attaques d’hommes armés. Des tirs ont été entendus à l’ambassade de France située dans le quartier de la Primature ainsi qu’à l’État-major des armées ou une forte explosions à retentit. Une fumée noire s’élève au-dessus des bâtiments. Les forces spéciales burkinabés sont rapidement intervenues. Selon le gouvernement burkinabé, les attaques visaient l’ambassade de France et l’état-major des armées. 3 assaillants dont l’identité n’est pas encore confirmée ont été ‘’neutralisés’’ selon le porte-parole du gouvernement, alors que le Service d’information du gouvernement (SIG) burkinabé a précisé que quatre assaillants avaient été « neutralisés » lors de l’attaque de l’ambassade . Le gouvernement français a appelé ses ressortissants à rester ‘’confinés’’ et indique que situation est ‘’ sous contrôle’’ à l’ambassade et à l’institut français.

et le ministre de la Défense, Jean Claude Bouda, a dit à Reuters que trois assaillants avaient été tués à l’état-major.

Bien que pour le moment l’identité et le mobile des assaillant soient encore flou, la piste terroriste semble très probable.

Ibrahim Maïga : « La Force conjointe G5 Sahel est un outil parmi d’autres au service d’un projet politique… »

 

Alors que la force conjointe du G5 Sahel vient d’entamer sa deuxième opération, « Tonnerre », des groupes djihadistes, au Nord et au Centre du Mali, envisagent de se mutualiser pour la combattre. Ibrahim Maiga, chercheur à l’Institut d’études de sécurité, répond aux questions de Journal du Mali sur la capacité de nuisance de ces groupes et propose des pistes pour « assécher » la menace.

Ces derniers mois, des sources sécuritaires occidentales et sous-régionales évoquent la présence dans le Nord du Mali de djihadistes venus de  Libye et de Syrie. Ces informations sont-elles à prendre au sérieux ?

Il est important d’indiquer que ces informations été relayées dès 2015 par les habitants de certaines localités du Nord du Mali. La faiblesse structurelle de la plupart des États sahéliens fait de cette région une destination attractive pour des groupes armés en perte de vitesse au Moyen-Orient. De plus, la situation spécifique du Mali commande une extrême vigilance. Il faut se rappeler que les premiers « djihadistes » provenaient de pays voisins et que la crise de 2012 tirait en partie sa source du reflux de combattants du théâtre libyen, sans minimiser les causes internes qui ont facilité le délitement de l’État.

La sortie récente du Président IBK sur le sujet montre que cette information est prise au sérieux au plus haut niveau politique. Mais les chefs d’État devraient en premier lieu s’inquiéter de la tendance au recrutement au sein des populations locales et trouver les moyens d’assécher ces groupes.

Deux groupes actifs dans le Nord et le Centre du pays, aux idéologies différentes, envisagent de mener ensemble des attaques contre la force conjointe du G5 Sahel et les « mécréants ». Qu’est-ce qui motive cette stratégie ?

La création du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, fusion d’Ansar Dine, d’Al Qaida au Maghreb islamique, de la Katiba Macina et d’ Al Mourabitoune), en mars  2017 – deux mois après la décision actant la mise sur pied de la Force conjointe du G5 Sahel – avait déjà démontré la capacité des groupes « djihadistes » à se regrouper pour faire face à un ennemi commun. Une alliance entre le GSIM et l’État islamique dans le grand Sahara (EIGS) semble avant tout répondre à des objectifs tactiques.

Constituerait-elle une menace d’envergure ?

En dépit de leurs divergences, ces groupes évoluent peu ou prou dans le même espace. Avec le déploiement progressif de la force conjointe du G5 Sahel, une alliance circonstancielle peut apparaître comme une option intéressante. Sans avoir une idée précise des effectifs de ces groupes, il est possible d’affirmer qu’ils sont largement en dessous de ceux des armées de la région. Un accroissement des capacités, une mutualisation des moyens et un partage d’expériences sont les risques les plus immédiats. Sur le terrain, il est intéressant de noter que les dynamiques locales permettent souvent une forme de collaboration entre membres de différents groupes armés « djihadistes » sans que cela ne soit formalisé.

La force sous-régionale a-t-elle les moyens de combattre un ennemi qui se dilue dans une zone aussi vaste ?

L’opérationnalisation de la FC – G5S est confrontée à d’importants défis, dont la question du financement et la qualité des ressources humaines. Car, malgré l’activisme diplomatique des États sahéliens, les promesses s’élèvent à 278 millions d’euros (192 milliards de francs CFA), sur le montant de 423 millions d’euros (278 milliards de francs CFA) nécessaire à la première année de fonctionnement. Cette incertitude, combinée à l’absence d’un mécanisme de financement pérenne, ne permet pas d’envisager des opérations d’envergure pour instaurer la confiance entre les forces de défense et les populations. Parlant des ressources humaines, de nombreux rapports et études soulignent l’impact de certaines méthodes « brutales » sur le recrutement de combattants par les groupes « djihadistes ». Les réformes des secteurs de la sécurité dans plusieurs pays et les initiatives de formation de certains acteurs internationaux doivent être poursuivies. L’avenir de cette force sera tributaire de la capacité des États sahéliens, avec leurs partenaires régionaux et internationaux, à trouver des réponses à ces défis dans la durée.

La force conjointe du G5 Sahel pourra-t-elle venir à bout du terrorisme dans cet espace et y a-t-il un risque d’enlisement ?

Répondre par l’affirmative reviendrait à prétendre qu’une opération militaire, à elle seule, pourrait résoudre cette problématique. Toutes les études, y compris celle menée par l’Institut d’études de sécurité au Mali en 2016, démontrent que le terrorisme prospère dans un environnement caractérisé par l’absence de justice, les inégalités sociales et l’absence d’un État utilitaire. La FC-G5S devrait donc surtout être vue pour ce qu’elle est : un outil parmi d’autres au service d’un projet politique d’intégration de populations longtemps marginalisées.

La force française Barkhane, bien équipée, ne s’est-elle pas finalement essoufflée, cinq ans après le début de son intervention au Mali ?

Barkhane, qui couvre cinq pays du Sahel et compte environ 4 000 hommes, coûte 1 million d’euros (656 millions de francs CFA) à la France par jour, pour des résultats mitigés et des pertes en vies humaines. Sa présence est de plus en plus remise en cause par les populations sahéliennes, en particulier au Mali. Par conséquent, même si la France se défend de promouvoir la FC-G5S pour se désengager, elle pourrait revoir son dispositif en réduisant considérablement son empreinte sur le terrain.

 

Forum de Dakar: Sécuriser, ensemble

La collaboration et la mutualisation des efforts et des actions, ce sont les maîtres-mots de la 4ème édition du Forum de Dakar qui s’est ouvert ce lundi 13 novembre à Dakar au Sénégal. La rencontre de haut-niveau est devenue au fil des éditions un rendez-vous important pour les experts en sécurité du continent et d’ailleurs.

Le Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité se tient les 13 et 14 novembre au Centre International de Conférences Abdou Diouf (CICAD) de Diamniadio sur le thème : « Défis sécuritaires actuels en Afrique: pour des solutions intégrées ». La gestion du terrorisme et la nécessité d’y apporter des réponses communes, harmonisant un ensemble d’approches selon la menace et le théâtre d’opérations, est désormais un défi existentiel pour les pays africains, en particulier ceux confrontés directement aux menaces terroristes.

« La force mixte multinationale et la force du G5 constituent les récentes illustrations de la doctrine africaine des opérations de soutien a la paix », a déclaré Moussa Mahamat Faki, président de la commission de l’Union Africaine, lors de la cérémonie d’ouverture. La Force conjointe du G5Sahel est en effet en cours d’opérationnalisation et mutualise les énergies des 5 pays membres (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) plus la France. Malgré des problèmes de mobilisation de fonds, cette initiative se veut un outil de lutte coordonnée contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière dans la région concernée.

L’Afrique connaît actuellement trois foyers du terrorisme : Boko Haram dans le nord-est du Nigeria, l’Aqmi au Sahara et au Sahel et les milices shebabs en Somalie. En 2017, pas moins de seize groupes identifiés comme étant liés au terrorisme par le biais d’activités diverses tels que les traffics illicites, les réseaux criminels, ou encore la piraterie sont actifs sur le continent africain.

Plus de 700 participants, au nombre desquels les Chefs d’Etat du Rwanda et du Mali, prennent part à cette rencontre. Lancé lors du Sommet de l’Elysée de 2013 organisé par la France, le Forum de Dakar avait tenu sa première édition en décembre 2014 à Dakar. Le Sénégal avait alors annoncé par la voix de son président , Macky Sall, son souhait d’accueillir désormais ce rendez-vous.

Des suspects terroristes arrêtés à Ansongo

 

Lors d’une patrouille coordonnée  le 20  octobre entre les forces armées maliennes et la force Barkhane, deux suspects terroristes ont été arrêtés à Tin-Hamma, à 67  km au Nord du chef-lieu du cercle.

Dans la lutte contre le terrorisme et le banditisme les forces armées maliennes en collaboration avec la force Barkhane avaient annoncé il y a à peu près un mois qu’elles allaient intensifier les patrouilles le long du fleuve Niger et environnant  dans la région de Gao, vers la frontière nigérienne. C’est dans la continuité de ces opérations qu’elles ont arrêté le 20 octobre deux individus présumés djihadistes  dans la commune rurale  de Tin-Hamma. Ils ont été remis à la gendarmerie d’Ansongo pour des enquêtes selon certaines sources locales. Un habitant d’Ansongo a affirmé avoir entendu que le chef des présumés djihadistes, dénoncé par ses camarades auraient été relâché par la gendarmerie de la localité. Un autre qui a voulu garder l’anonymat a confirmé avoir entendu cette information mais reste prudent à cause des rumeurs qui sont courantes dans la zone. «  Nous sommes dans un  milieu de rumeurs, moi-même j’avais appris cela »  disait-il.

Des allégations que rejette le préfet d’Ansongo,  selon qui, Barkhane et les FAMAs avaient arrêté deux suspects qui ont été transférés à Gao après. «  C’est deux suspects qui ont été arrêtés mais ils n’étaient pas armés, mais soupçonnés d’avoir des liens avec des éléments terroristes. Apres les auditons, ils ont été transférés à Gao car on ne peut pas établir l’accusation du terrorisme » explique-t-il. Il faut rappeler que  la zone d’Ansongo reste un espace où opèrent des djihadistes, des coupeurs de route, qui dévalisent en longueur des passagers de tous leurs bien et violent souvent même les femmes. C’est à cause de l’insécurité grandissante que le transport routier avaient été un moment suspendu entre Ansongo et Ménaka. D’après une source qui a préféré garder l’anonymat, le représentant de l’Etat islamique, Adnan Abou Walid s’est replié dans une forêt entre Ansongo et Ménaka depuis quelques semaines et coordonnent des incursions meurtrières aux FAMAs et aux forces internationales.

 

Prisons maliennes : Tout va mal !

 

Avec un ratio d’environ 10 prisonniers pour 1 surveillant, les prisons maliennes sont loin du standard international, 4 prisonniers pour 1 surveillant. Avec très peu de moyens, elles doivent faire face à de nouveaux défis et répondre aux normes. Vu l’insuffisance en personnel et les problèmes de gestion, pointés du doigt par la Section Syndicale des Surveillants de Prisons du Mali (SSSP), le pari est loin d’être gagné.

« Le personnel pénitentiaire ne peut pas être géré comme celui d’une administration classique », s’indigne le Capitaine Brahima Sogodogo, Secrétaire général de la SSSP. Qualifiant la situation actuelle, notamment celle des surveillants de prison de crise, le Capitaine Sogodogo regrette que, deux ans après leur recrutement, 105 surveillants attendent toujours leur formation militaire. Dernier corps de sécurité créé au Mali, le leur est pourtant toujours « en marge de la politique nationale de sécurité », selon lui.

Une de ses difficultés principales découle justement des conditions de la création du corps, en 1996, suite à la radiation des 800 gendarmes en 1993. Ceux-ci ont été pour la plupart répartis entre la Protection civile et l’Administration pénitentiaire. Les surveillants de prison ainsi recrutés qui réclamaient des conditions de travail adéquates se voyaient rétorquer que cet emploi était une indéniable opportunité pour eux.

Ce corps de sécurité, dont la création n’a donc obéi à aucune des règles prescrites en la matière, a évolué ainsi sans statut.  Ce n’est qu’en 2016 que la loi  n°031 du 16 juillet lui a donné un statut. Mais sa mise en œuvre n’est  toujours pas effective une année après.

Cette insuffisance en personnel, qui est loin d’être le seul problème de l’administration pénitentiaire, se pose avec davantage d’acuité aujourd’hui, à cause de la surpopulation carcérale, qui est « une réalité dans toutes les prisons du Mali », selon le Capitaine Sogodogo. « L’arrivée de terroristes et d’autres bandits, avec les faibles moyens actuels », pose un réel problème de sécurité, selon le spécialiste.

Les locaux, qui ne répondent pas aux normes internationales en termes d’établissements pénitentiaires, et l’absence d’équipements pour les agents (armes individuelles, matériel de maintien d’ordre et même tenue) constituent autant de goulets d’étranglement qui empêchent le personnel pénitentiaire d’assurer sa mission de sécurisation des établissements et des détenus.

Invitant les autorités à prendre conscience de « la gravité de la situation », le Capitaine Sogodogo estime que les actions en matière de sécurité pourraient être remises en cause si l’administration pénitentiaire ne dispose pas bientôt des moyens nécessaires.

 

Contre le terrorisme, sortir du « tout sécuritaire »

En un peu plus d’une décennie, le Mali comme le Sahel, est devenu l’un des points les plus chauds des conflits armés en Afrique et fait l’expérience, de façon inédite, du terrorisme, qui gagne du terrain. Les pays du G5 Sahel tentent de répondre à ces menaces en mettant sur pied une force commune pour combattre les groupes djihadistes, qui utilisent notamment le Nord Mali comme base de repli. Alors que cette force est en passe de devenir opérationnelle, des voix s’élèvent contre cette énième réponse sécuritaire et plaident pour une analyse plus profonde des causes des conflits qui ne soit pas uniquement axée sur le tout sécuritaire.

Le Mali, dont une partie importante du territoire échappe au contrôle de l’État, est une zone durement touchée par la crise sécuritaire sahélienne, où les conflits armés à grande échelle sont récurrents et la violence très répandue. Le principal facteur responsable de cette situation préoccupante serait, selon certains observateurs, si on devait le résumer en un seul mot, « l’injustice », rendue permanente ou persistante par son corollaire politique : État en déficit, mal gouvernance, corruption, crises alimentaires successives, frustrations accumulées. « Il y a une grande masse de la population qui est là, dans une situation désastreuse. D’année en année, les choses s’aggravent. Donc, à mesure que l’injustice grandit, il y a des réactions violentes et différentes forces qui essaient de tirer profit de cela », explique Moussa Tchangari, Secrétaire général d’Alternative Espaces Citoyens, à Niamey et membre de la Fondation Frantz Fanon. Les djihadistes profitent de ce « terreau favorable » créé par ces injustices pour islamiser le conflit, utiliser les frustrations pour recruter indéfiniment et attirer l’Occident dans le piège de l’intervention. « Les terroristes sont aussi des gens révoltés, qui pensent avec leurs actions pouvoir apporter un changement qui aille dans le sens de leur propre agenda politique», poursuit le chercheur.

Erreurs et stratégies Cette situation, qui échappe au contrôle de l’État, est gérée par les forces étrangères de la communauté internationale, installées dans le pays, qui doivent aider à trouver une solution. « Dans cette crise, la communauté internationale a au moins 40 ans de retard », lance le Dr Bakary Sambé, enseignant-chercheur, coordonnateur de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique et directeur du think tank Timbuktu. « Dans les années 70, elle n’avait pas les moyens de fournir de l’aide à l’Afrique, frappée par la sécheresse, à cause du choc pétrolier qui touchait l’Europe et les États-Unis. Les pays vendeurs de pétrole ont utilisé la prédication et l’humanitaire pour s’implanter au Sahel. Puis, dans les années 80, la communauté internationale a commis une deuxième erreur, d’appréciation. Elle a imposé aux pays des politiques d’ajustements structurels, qui voulaient dire en quelque sorte : investissez le moins possible dans l’éducation, la santé, etc. et les puissances dites islamistes sont venues carrément occuper le terrain, via des centres culturels, des écoles, des services sociaux de base, pendant que l’État tentait de faire face au défi du déficit d’État. 40 ans après, la communauté internationale élabore des stratégies Sahel pour combattre les terrorismes, alors qu’ils sont là depuis 40 ans. La situation conflictuelle est en partie due à ces deux erreurs », affirme l’enseignant-chercheur.

Armes contre idéologie Toujours est-il que pour faire face à la situation sécuritaire au Mali et dans le Sahel, les pays du G5 (Mauritanie, Tchad, Mali, Niger et Burkina Faso), soutenus par la France, se sont « unis face au terrorisme » et tentent de mettre sur pied une force régionale conjointe, qui comptera 5 000 militaires des cinq pays. Son centre de commandement a été inauguré le samedi 9 septembre, à Sévaré, par le chef de l’État malien, mais son financement, 450 millions d’euros annuels, peine toujours à être bouclé. Le premier bataillon de cette force dite du G5 devrait être opérationnel dès le mois de septembre et les premières opérations militaires transfrontalières menées dès le mois d’octobre. Pour autant, l’efficacité de cette énième force censée combattre le terrorisme au Sahel est loin de convaincre. « La façon dont on pose le problème n’est pas la bonne. On pense qu’on le résoudra avec une force militaire qui aura des moyens. Nos pays font fausse route. Il y a beaucoup de choses à destination de la population qui ne coûtent pas autant d’argent et qu’il faut faire. Il faut commencer par tout ce qui dépend de nous, ce pour quoi on a déjà les moyens, qui ne coûte pas d’argent mais demande de la volonté. Pourquoi ne commence-t-on pas d’abord par ça, au lieu de s’épuiser à obtenir le soutien de la communauté internationale quand on n’a pas celui de son peuple ? Ça montre vraiment le décalage », observe Moussa Tchangari. Pour le Dr Bakary Sambé, il faut privilégier les approches multiples et non seulement se concentrer sur le recours à la force pour résoudre un problème aux racines profondes. « Si la solution militaire était une solution pour combattre le terrorisme, il n’y aurait plus de Talibans en Afghanistan, alors que Trump veut y retourner. Il n’y aurait plus de djihadistes au Nord du Mali. Vous savez, je n’ai jamais vu une idéologie défaite par les kalachnikovs », conclut, sceptique, l’enseignant-chercheur.

 

Le ministre de la Défense malien souhaite que la Russie s’implique davantage au Sahel

Présent au forum international militaro-technique «Armée-2017» qui se tient à Moscou du 22 au 27 août, Tiéna Coulibaly, le ministre de la Défense et des anciens combattants de la République du Mali, a souhaité que la  « Russie participe au renforcement des forces armées au Mali » et qu’elle fasse « davantage dans la lutte anti-terroriste au Mali et au Sahel».

Attentats en Espagne: les suspects devant le juge

Les quatre suspects encore en vie des attentats qui ont fait 15 morts en Catalogne sont arrivés mardi matin au tribunal de Madrid où ils devraient être inculpés, cinq jours après les attaques revendiquées par le groupe jihadiste Etat islamique (EI).

Les quatre suspects ont été amenés dans des fourgons de la garde civile peu après 08H00 (06H00 GMT), escortés par des voitures de police toutes sirènes hurlantes, à l’Audience nationale, spécialisée dans les affaires de terrorisme, a constaté l’AFPTV.

Il s’agit de Driss Oukabir, de Mohammed Aallaa, de Salh El Karib et de Mohamed Houli Chemlal, selon une source proche de l’enquête en Catalogne.

Le dernier, âgé d’une vingtaine d’années, avait été blessé dans la gigantesque déflagration qui s’est produite la veille des attentats dans une maison à Alcanar, à 200 km au sud-ouest de Barcelone, où la cellule aurait tenté de fabriquer des explosifs.

S’il comparaît c’est qu’un médecin légiste a estimé qu’il était en état d’être interrogé, a précisé un porte-parole de l’Audience nationale à l’AFP.

Les quatre hommes, en garde à vue depuis cinq jours, se trouvaient dans les cellules de l’Audience nationale en attendant d’être interrogés, a précisé ce porte-parole en estimant que l’audition ne démarrerait sans doute pas avant 11H00 (09H00 GMT).

Le juge d’instruction Fernando Andreu et la procureure en charge de l’affaire, étudiaient les derniers compte-rendus de police avant d’entamer leur auditions.

Pendant ces auditions à huis-clos, les quatre hommes, assistés au minimum d’avocats commis d’office, ont le droit de ne pas répondre aux questions.

Fernando Andreu, un magistrat chevronné qui a aussi enquêté sur de délicates affaires politico-financières, doit déterminer quelles charges il retient contre eux exactement et quel rôle leur est reproché dans l’organisation des attentats.

Ensuite, il décidera s’il les envoie en détention provisoire.

Les attaques ont fait 15 morts et plus de 120 blessés jeudi et vendredi, à Barcelone et dans la station balnéaire de Cambrils à 120 km au sud.

Aux dernières informations lundi soir, huit blessés étaient encore entre la vie et la mort.

Parallèlement, la police enquête sur les déplacements des suspects à l’étranger: ceux de l’imam Abdelbaki Es Satty en Belgique et l’aller-retour en France d’une Audi 3 utilisée à Cambrils vendredi. Elle a été « flashée » par un radar le 12 août avec quatre personnes à bord, a déclaré mardi le ministre français de l’Intérieur Gérard Collomb.

Des proches choqués 

Au total 12 hommes, la plupart Marocains, sont suspectés d’avoir composé la cellule qui a commis les attentats.

Cinq ont été abattus dans la nuit de jeudi à vendredi après avoir foncé sur les passants à Cambrils et tué une femme à coups de couteau.

Deux, dont l’imam, seraient morts mercredi en manipulant des explosifs.

Un huitième, le fugitif Younès Abouyaaqoub, accusé d’avoir tué 13 piétons sur les Ramblas de Barcelone au volant d’une camionnette lancée à vive allure, a été abattu lundi soir à 50 km de la ville, dans une région de vignobles.

Avant d’être tué, il avait montré une fausse ceinture d’explosifs et crié « Allah est grand! ».

Les suspects qui comparaissaient mardi ont été arrêtés après les attentats. Deux sont d’ailleurs les frères aînés de terroristes présumés abattus par la police.

Le premier, Mohammed Aaalla, 27 ans, est le propriétaire de l’Audi A3 de Cambrils.

Le deuxième, Driss Oukabir, 28 ans, est le frère aîné de Moussa Oukabir, un des cinq occupants de l’Audi.

Le père de Mohammed a déclaré à l’AFP que son aîné ne savait rien des plans du cadet qui n’arrêtait pas de lui emprunter la voiture, pour « chercher du travail ». Ce jour-là, c’était pour se rendre à la plage, a-t-il déclaré.

La plupart des membres présumés de la cellule ont grandi à Ripoll, une petite ville au pied des Pyrénées où s’étaient installés leurs parents marocains.

« Félicitations aux Mossos (police de Catalogne) et aux autres forces de l’ordre pour leur magnifique travail », a twitté lundi soir le chef du gouvernement Mariano Rajoy, « ensemble nous vaincrons le terrorisme! ».

L’Espagne n’avait pas été frappée par des attentats islamistes depuis 2004, quand des jihadistes avaient fait exploser des bombes dans des trains de banlieue bondés à Madrid, faisant 191 morts.

 

Attentat à Barcelone, fusillade à Cambrils : ce que l’on sait

L’Espagne à son tour ensanglantée. Jeudi après-midi, Barcelone a été victime d’une attaque terroriste. Quelques heures plus tard, une fusillade éclatait à Cambrils. Le point sur la situation.

Cinq terroristes présumés ont été abattus lors d’une fusillade sur la route du front de mer à Cambrils, station balnéaire de la Costa Dorada à 110 kms au sud de Barcelone alors qu’ils tentaient de forcer un barrage de police.

Dans leur fuite, ils ont blessé sept personnes dont un policier. Une victime est dans un état critique Ils étaient armés et certains portaient des ceintures d’explosifs factices.

Selon les autorités les individus préparaient une deuxième attaque à Barcelone avant d’être abattus. Ce deuxième attentat est lié à celui de jeudi sur les Ramblas.

Le bilan à Barcelone : 13 morts, 26 Français blessés

Le bilan de l’attentat à la camionnette perpétré jeudi à 16h20 sur les Ramblas à Barcelone, s’établit à 13 morts, 15 blessés au pronostic vital engagé, 23 souffrant de graves blessures, 48 plus légèrement touchés.

Parmi les blessés issus de 18 pays dont 13 Européens, 26 sont de nationalité français. Onze sont dans un état grave, selon le ministère des affaires étrangères.

L’enquête : trois hommes ont été arrêtés

Deux individus ont été appréhendés jeudi et vendredi matin à Ripoll à 80 km au nord de Barcelone, au pied des Pyrénées dont un d’origine marocaine.

Un troisième de nationalité espagnole et résident de l’enclave de Melilla au Maroc a été arrêté jeudi à Alcanar, à 200 km au sud de la capitale catalane, où mercredi soir une explosion de gaz a détruit une maison faisait un mort et blessant six pompiers. Cet événement serait lié aux attaques. Les trois individus ne sont pas fichés comme liés à des groupes terroristes en Espagne.

Le conducteur serait toujours en fuite. Le lien avec une fusillade qui, une heure après l’attentat s’est produite sur un barrage de police dans les quartiers nord-ouest de Barcelone, n’est pas établi. L’homme qui tentait de forcer le barrage en voiture est décédé.

Les réactions : deuil, solidarité et riposte

Trois jours de deuil ont été décrétés en Espagne. À Barcelone, une minute de silence sera respectée à midi et un rassemblement est prévu place de Catalogne à 300 m du lieu du drame.

Tous les dirigeants européens, américains, asiatiques et le président russe Poutine ont témoigné de leur solidarité avec l’Espagne. Plusieurs voix s’élèvent néanmoins pour la constitution d’un renseignement européen sur le terrorisme et d’une force.

La revendication : Daech comme à Paris et Londres

Daech a revendiqué l’attentat indiquant dans le communiqué de son agence que l’Espagne était frappée parce qu’elle participait à la coalition contre les djihadistes en Syrie et en Irak. Revendication validée par les services américains.

L’armée espagnole intervient au Levant uniquement via un appui logistique de ravitaillement.

Le contexte : la Catalogne était très exposée

Les principaux foyers islamistes en Espagne se trouvent quasiment tous en Catalogne et gravitent autour de groupes salafistes.

Depuis 2012, trente opérations contre des commandos djihadistes ont été menées à Barcelone, 12 dans le reste de la Catalogne pour 77 arrestations. C’est trois fois plus qu’à Madrid, deux fois plus que dans tout le reste de l’Espagne continentale.

Les personnes arrêtées sont pour moitié d’origine marocaine ou des enclaves espagnoles au Maroc Ceuta et Melilla. Quelque 120 Espagnols, dont 55 de Melilla et 40 binationaux se trouveraient en Syrie et Irak dans les troupes de Daech.

 

 

Attaque au Burkina : le commando « probablement venu du nord du Mali »

Le commando qui a attaqué dimanche soir à Ouagadougou le café restaurant Aziz Istanbul, faisant 18 morts, est « probablement venu du nord du Mali ou près de la frontière », a indiqué mercredi une source sécuritaire burkinabè.

« Vu le mode opératoire des assaillants, leurs traits physiques, ils peuvent probablement venir du Nord Mali ou encore plus près de la frontière » avec le Burkina, a déclaré à l’AFP un officier de l’armée sous couvert d’anonymat.

Lors d’un point de presse, la procureure du Faso Maiza Séremé avait évoqué des « similitudes dans le mode opératoire » avec l’attaque jihadiste du 15 janvier 2016, lorsqu’un commando avait attaqué avec des armes automatiques le café Cappuccino – situé à 300 mètres du restaurant Aziz Istanbul – et plusieurs autres établissements.

Cette attaque, revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avait fait 30 morts et 71 blessés, en majorité des étrangers.

En revanche, 72 heures après le drame du café restaurant Aziz Istanbul, l’attaque n’a pas encore été revendiquée.

« Le fait que l’attaque ne soit pas encore revendiquée se signifie pas que c’est une acte isolé, il peut être lié à Ansarul Islam ou à Aqmi. Ce sont des pistes que les enquêteurs explorent et l’analyse des armements et des munitions retrouvés sur le commando permettra d’affiner les recherches », a commenté l’officier supérieur.

Ansarul Islam est un groupe islamiste actif dans le nord du Burkina Faso, qui a revendiqué plusieurs attaques contre l’armée burkinabè ces derniers mois, dont une qui a fait 12 morts dans les rangs des militaires en décembre 2016.

« Toutes les pistes sont envisagées », a confirmé le ministre de la sécurité Simon Compaoré.

« Le processus d’identification des assaillants n’est pas achevé », a assuré l’officier supérieur, espérant que l’appel à témoin lancé par la procureure du Faso en vue d’identifier des complices ou des facilitateurs éventuels depuis la planification jusqu’à l’attaque terroriste, permettra d’aller « plus vite ».

« Lors de la situation que nous avons connu en 2016, il a fallu beaucoup de temps pour qu’on ait tous les éléments et savoir que c’est dans un pneu que quelqu’un a mis les fusils pour les transporter jusqu’à Ouagadougou » pour perpétrer l’attaque du café Cappuccino, a rappelé le ministre de la Sécurité.

« Ces enquêtes peuvent prendre beaucoup de temps et il faut collaborer avec d’autres pays », a insisté M. Compaoré.

Polémique autour de la visite du président IBK à Ouagadougou

Le Président de la République IBK s’était rendu le mardi 15 août 2017 au Burkina Faso pour témoigner de sa solidarité après l’attentat du dimanche à Ouagadougou qui a fait 18 victimes. Ce déplacement apparait normal, mais il a fait polémique par le fait qu’à Douentza et à Tombouctou, le lendemain, le terrorisme à fait aussi des victimes, sans qu’IBK ne se déplace sur le terrain.

L’attentat du dimanche dernier qui a fait 18 morts au Café restaurant Aziz Istanbul de Ouagadougou a motivé le déplacement du président IBK dans la capitale burkinabé. Le geste était fort et symbolique. Il s’agissait de témoigner de son soutien à son homologue Roch Marc Christian Kaboré et au peuple burkinabé en des moments aussi tragiques. Sur place, IBK a déclaré que « le G5 sahel est uni dans ces circonstances » face au terrorisme. Il a en outre visité avec son homologue, les décombres du restaurant Aziz Istanbul. Pour Ibrahim Boubacar Keita, « le doux temps de l’insouciance est terminé » et que «  nous sommes obligés d’accepter aujourd’hui, qu’à tout moment nous pouvons être agressés » a t-il souligné. Quoi de plus normal qu’un président aille s’incliner devant la mémoire des victimes d’un fléau devenu mondial et en plus s’il s’agit du Burkina, pays frontalier et membre du G5 Sahel. Seulement, la même barbarie qui a arraché la vie à des innocents n’a pas épargné le Mali.

Tombouctou et Douentza Au lendemain de l’attaque d’Ouagadougou, lundi 14 août, le camp de la Minusma à Douentza au centre du Mali, a subi une attaque terroriste qui a coûté la vie à (1) un soldat des casques bleus et à (1) un autre de l’armée malienne. Quelques heures plutard, c’est le camp de la mission internationale des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à Tombouctou qui a été pris pour cible. Là aussi des victimes à l’issu des combats ont été déplorées. Neuf personnes, toutes maliennes, ont trouvé la mort dans cette attaque contre la mission onusienne. En dénombrant tout les morts dans les deux attaques y compris les assaillants, les pertes seraient de 19 morts. Sur les réseaux sociaux, certains internautes reprochent au président son «  manque de considération » aux morts du Mali. En se rendant dans ce pays voisin, IBK s’est attiré, comme le plus souvent ces derniers temps, le mépris de ceux qui pensent qu’ils auraient pu rendre hommage à « ceux qui sont morts en défendant la patrie ». Le premier ministre Idrissa Abdoulaye Maiga et le Représentant spécial du secrétaire général de Nations unies, Mahamet Saleh Annadif, ont effectué le déplacement le 15 août dans la ville de 333 saints pour constater les dégâts et témoigner leur solidarité et soutien aux blessés et aux forces en présence. Une fausse note pour le président IBK dont la côte de popularité a considérablement baissé depuis 2013.

« Le terrorisme au Sahel, conséquence de la prévarication érigée en mode de gouvernance »

Le chroniqueur de Lemonde.fr, Laurent Bigot, souligne la prédation des élites ouest-africaines et l’aveuglement – voire l’approbation – de la communauté internationale.

 Lorsque les médias parlent du Sahel, c’est pour évoquer la menace terroriste sous toutes ses formes – une menace bien réelle, comme l’ont récemment montré l’attentat à Ouagadougou, le 13 août, ou les attaques contre les Nations unies au Mali, le lendemain. C’est également le cas pour les autorités françaises, qui communiquent abondamment sur le sujet afin de vanter et de justifier le déploiement de l’opération militaire « Barkhane » dans la bande sahélo-saharienne (BSS en langage militaire). Or le sujet central du Sahel n’est pas celui-là.

Le terrorisme, ou plutôt la montée en puissance des groupes armés dans le Sahel, est la conséquence d’une grave crise de gouvernance qui touche toute l’Afrique de l’Ouest. Cette crise de gouvernance se caractérise par une disparition de l’Etat au service des populations, car l’Etat moderne est privatisé par les élites politiques à leur profit. Cette privatisation – Jean-François Bayart parle de patrimonialisation – s’est accélérée ces dernières années pour atteindre un niveau tel que, désormais dans les pays sahéliens, les populations sont livrées à elles-mêmes, plus aucune entité (Etat ou autre) n’étant chargée d’une forme d’intérêt général.

C’est particulièrement le cas au Mali, au Niger et en Mauritanie. Ces Etats ont tous en commun un système politique miné, accaparé par une élite prédatrice dont les méthodes ont non seulement porté l’estocade à ce qu’il restait de l’Etat et de son administration, mais en plus ont fait entrer au cœur même du pouvoir le crime organisé. La conquête du pouvoir et sa conservation ne sont perçues que comme un accès à une manne intarissable.

Les dégâts des ajustements structurels

Les Etats sahéliens ont été fragilisés, dans les années 1980, par les ajustements structurels imposés par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale au nom du libéralisme doctrinaire ambiant. Il fallait « dégraisser » la fonction publique, dont les secteurs les plus « gras » étaient l’éducation et la santé. Quelle politique « visionnaire » pour une zone qui allait subir quinze ans plus tard un choc démographique sans précédent dans l’histoire de l’humanité !

Le Niger est aujourd’hui le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé au monde, soit plus de sept enfants par femme. Le Mali n’est pas loin derrière, avec un peu moins de sept. Ce n’est plus une bombe à retardement, c’est une bombe qui a déjà explosé et dont les dégâts sont en cours d’estimation. Serge Michailof rappelle dans son remarquable livre Africanistan que le secteur manufacturier au Niger crée 5 000 emplois par an quand le marché de l’emploi doit absorber chaque année 200 000 jeunes…

Le secteur de l’éducation est sinistré. Les classes du primaire dans les quartiers populaires de Niamey ont des effectifs habituels proches de la centaine d’élèves, avec des enseignants si peu formés qu’une part importante ne maîtrise pas la langue d’enseignement qu’est le français. Au Sénégal, pourtant un pays qui se maintient mieux que les autres, le système éducatif est dans un tel état que le français, langue d’enseignement, recule au profit du wolof. Si la promotion des langues dites nationales est incontestablement un enjeu, aujourd’hui leur progression est d’abord le signe de la faillite du système d’enseignement.

Que dire des systèmes de santé ? Le niveau des soins est accablant. L’hôpital de Niamey est un mouroir. L’accès aux soins est un parcours du combattant semé d’étapes successives de corruption. Les cliniques privées fleurissent dans les capitales ouest-africaines pour une clientèle privilégiée, mais le peuple doit se contenter de soins qui relèvent plus des soins palliatifs que curatifs. Il faut dire que les élites politiques n’en ont cure, elles se font soigner à l’étranger et scolarisent leurs enfants dans les lycées français (hors de prix pour le citoyen lambda, une année de scolarité pouvant représenter plusieurs années de salaire minimum) ou à l’étranger.

Des élections grossièrement truquées

Précisons à leur décharge qu’étant donné les dégâts causés par les ajustements structurels et la démographie actuelle, aucun Etat ouest-africain ne peut désormais relever sur ses seules ressources propres les défis de l’éducation et de la santé. Le rapport sénatorial sur la politique française d’aide au développement au Sahel (« Sahel : repenser notre aide au développement », juin 2016) rappelle un chiffre vertigineux : de 2005 à 2035, le Mali devra multiplier par 11 ses dépenses en la matière. La solidarité internationale pourrait en effet contribuer à financer ce type de dépenses, mais on butte sur le problème structurel qu’est la patrimonialisation ou la privatisation de l’Etat.

Aujourd’hui, les budgets de l’Etat sont exécutés en dépit du bon sens avec l’aval du FMI et de la Banque mondiale, qui froncent parfois les sourcils quand les ficelles de la prévarication deviennent trop grosses (on pense à la fâcherie de six mois des institutions de Bretton Woods, en 2014, après les surfacturations massives des marchés de défense au Mali, l’aide ayant repris sans qu’aucune procédure judiciaire n’ait été ouverte ni les méthodes changées…). Quand on sait que plus de 50 % du budget d’investissement de ces Etats proviennent de l’aide publique internationale, on peut légitimement s’interroger sur la désinvolture avec laquelle la communauté internationale gère l’argent du contribuable.

Cependant, l’irresponsabilité du système international de développement (Nations unies et coopérations bilatérales) est tel que cet argent est déversé sans aucun souci de rendre des comptes. Le critère de performance utilisé par l’Union européenne en la matière est le taux de décaissement. L’objectif est de dépenser les budgets. Savoir si cela est efficace et conforme à l’objectif fixé importe peu. Pour les autorités bénéficiaires, cette absence de responsabilité a développé un réflexe d’assistanat, le premier geste étant de tendre la main avant d’envisager quelque action que ce soit. Ensuite, c’est de se répartir la manne de l’aide, et ce d’autant plus facilement que les contrôles sur la destination finale et l’efficacité sont des plus légers.

Les élites politiques ont depuis une vingtaine d’années fait de la prévarication le mode de gouvernance le plus répandu. La démocratisation qui a suivi la vague des conférences nationales au début des années 1990 n’a rien empêché. Nombre d’élections qui se sont tenues depuis n’ont guère été sincères, parfois grossièrement truquées (deux cas d’école parmi tant d’autres : l’élection d’Alpha Condé en 2010 en Guinée, élu au second tour alors qu’il n’a fait que 17 % au premier tour et son adversaire 40 %, et celle de Faure Gnassingbé en 2015 au Togo, durant laquelle le dépouillement était environ à 40 % quand les résultats ont été proclamés…).

Tout cela avec l’approbation de la communauté internationale et les chaleureuses félicitations des différents chefs d’Etat français. La lettre de François Hollande adressée au président nigérien Issoufou en 2016 est un modèle du genre. Féliciter un président élu au second tour avec plus de 92 % des voix alors que son opposant principal a fait campagne depuis sa prison, c’est osé. Le monde occidental se targue d’être le défenseur de la cause des peuples en promouvant la démocratie, mais les peuples africains n’ont vu qu’une chose : ce monde occidental soutient les satrapes africains sans aucune considération pour les populations qui en subissent les dramatiques conséquences.

La politique financée par le narcotrafic

Cette situation dans le Sahel est un terreau propice au développement d’idéologies radicales et la lutte armée devient un horizon séduisant pour une partie de la jeunesse qui sait que, hors de l’émigration vers l’Europe ou de l’affiliation aux groupes armés, point de salut. L’affaissement de l’Etat dans les pays sahéliens s’est accéléré avec la montée en puissance des divers trafics en zone sahélo-saharienne et notamment avec le trafic de cocaïne en transit vers l’Europe.

La vie politique de ces Etats s’est financée auprès de narcotrafiquants notoires qui n’ont pas hésité à prendre la place du généreux guide libyen Kadhafi. C’est ainsi qu’un conseiller du président malien Amadou Toumani Touré (2002-2012) était un trafiquant notoire, aujourd’hui reconverti au Burkina Faso. C’est aussi l’affaire emblématique du Boeing chargé de cocaïne qui se pose en 2009 dans le désert malien et dont le déchargement a été supervisé par un officier supérieur de l’armée malienne, aujourd’hui général. L’un des principaux soutiens financiers du parti du président nigérien Issoufou était Chérif Ould Abidine (décédé en 2016), dont le surnom était « Chérif Cocaïne »…

La frontière entre l’Etat et le crime organisé s’est estompée progressivement, laissant les populations livrées à leur sort. L’islam radical s’est répandu comme un modèle alternatif à la démocratie, laquelle est perçue par une part grandissante de la population comme une escroquerie idéologique visant à maintenir en place des kleptocraties. Le réarmement moral passe désormais par l’islam dans sa version la plus rigoriste (et étrangère aux pratiques confrériques du Sahel), soutenu par une classe politique qui a utilisé la religion pour faire du clientélisme.

Les groupes armés dits djihadistes tels qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou Ansar Dine, qui eux-mêmes recourent volontiers aux réseaux et aux pratiques mafieux, évoluent désormais dans un environnement de moins en moins hostile. Quand j’entends parler de terrorisme djihadiste au Sahel, je pense souvent à un magicien qui, pour réaliser son tour, attire l’attention du public avec la main droite et réalise son tour avec la main gauche. Le terrorisme, c’est la main droite. La réalité du tour, la main gauche, c’est la grave crise de gouvernance dont personne n’ose parler.

Les Etats sahéliens ont parfaitement compris tout le bénéfice qu’ils pouvaient tirer de notre peur du terrorisme djihadiste : Jean-François Bayart parle de « rente diplomatique de la lutte contre le terrorisme ».Moyennant un discours engagé contre le terrorisme et l’autorisation pour l’armée française d’opérer sur leur territoire, ces dirigeants ont compris qu’ils ne seraient pas du tout inquiétés pour les graves dérives de gouvernance. La communauté internationale reproduit la même erreur qu’en Afghanistan lorsqu’elle avait soutenu le régime indécemment corrompu de Hamid Karzaï, ce qui n’avait fait que renforcer les Talibans et accélérer le rejet par la population des forces étrangères.

Rôle trouble des services algériens

A cette cécité sur les causes profondes, ajoutons celle relative au rôle joué par les services de sécurité algériens. Comment le mouvement d’Iyad Ag Ghali a-t-il été financé ? Où se replient Iyad et ses combattants ? Comment se fait-il que Mokhtar Belmokhtar sillonne en toute impunité la zone depuis vingt ans ? Des questions qui trouvent des réponses dans la complicité d’une partie des services de sécurité algériens.

Je me souviens d’un entretien à Bamako en 2009 avec Ahmada Ag Bibi, député touareg, à l’époque bras droit d’Iyad Ag Ghali et resté depuis lors proche du chef d’Ansar Dine. Il me disait que lorsque AQMI s’est installé en 2006-2007 dans l’Adrar des Ifoghas (Nord-Mali), Iyag Ag Ghali et ses hommes l’ont combattu. Le soutien logistique algérien dont bénéficiait Iyad Ag Ghali depuis des années s’est immédiatement interrompu. Il en a déduit que s’attaquer à AQMI, c’était s’attaquer à une partie des services de sécurité algériens. Il a donc composé.

Ahmada Ag Bibi a conclu cet entretien en me disant que l’Algérie poursuivait au Sahel sa guerre de décolonisation contre la France. Il a ajouté qu’il ne comprenait pas comment la France n’avait pas saisi que l’Algérie la considérait toujours comme un ennemi. Au cours de ma vie de diplomate, j’ai pu constater, en effet, l’angélisme dont fait preuve la France à cet égard. C’est troublant.

On pourrait aussi parler des autorités des pays sahéliens qui négocient des pactes de non-agression avec ces groupes armés. C’est le cas de la Mauritanie, comme l’attestent des documents saisis par les Américains lors du raid mené contre Oussama Ben Laden en 2011 au Pakistan.

Bref, résumer la situation sécuritaire du Sahel à sa seule dimension « terroriste » est un raccourci dangereux car il nous fait tout simplement quitter la réalité du terrain.

Le destin du Sahel ne nous appartient pas

Il ne peut y avoir d’ébauche de solutions sans un constat de vérité. Si ceux qui prétendent contribuer à la solution se racontent des histoires dès l’étape du constat, comment l’élaboration de réponses aux défis du Sahel pourrait-elle être un processus pertinent ? La communauté internationale tombe dans le même aveuglement qu’elle a savamment entretenu pendant cinquante ans sur la question de l’aide au développement.

Refusant de regarder une réalité qui dérange, on s’obstine dans des réponses qui n’ont aucun impact durable sur les réalités. Aujourd’hui, nous pensons l’Afrique depuis des bureaux et des salons de ministères ou de grandes organisations internationales dont la déconnexion avec la réalité est effrayante. Plus grave encore, notre réflexion repose sur des postulats inconscients qui pourraient expliquer notre manque d’humilité.

Et si la solution était que nous cessions de vouloir tout gouverner ? Quel est ce postulat intellectuel qui consiste à considérer comme admis que nous avons la solution aux problèmes du Sahel ? Pour ma part, je pense que la solution est entre les mains des peuples concernés. Il est temps de mettre les dirigeants de ces pays face à leurs responsabilités et qu’à leur obsession d’accroître leur patrimoine personnel se substitue enfin celle de s’occuper de leur propre pays.

J’entends souvent dire que nous ne pouvons pas ne rien faire. Ah bon ? Pouvez-vous le démontrer ? Accepter que la solution puisse se mettre en place sans nous, est-ce à ce point inacceptable pour notre cerveau d’Occidental ? Des milliers d’heures de réunions dans les ministères et organisations internationales pour parler du Sahel, avec, 99 % du temps, aucun représentant de ces pays et, 100 % du temps, sans aucun point de vue des populations concernées, est-ce la bonne méthode ? Ne pourrions-nous pas accepter l’idée que nous ne savons pas ? Ne pourrions-nous pas accepter que le destin du Sahel ne nous appartient pas ?

Ou alors, si nous estimons en être coresponsables, accordons aux pays du Sahel la même coresponsabilité sur la gestion de notre propre pays. La relation serait ainsi équilibrée. Mais sommes-nous prêts à recevoir des conseils venus du Sahel ? Les trouverions-nous pertinents ? Pas plus que les populations sahéliennes lorsqu’elles nous entendent disserter sur leur sort…

Attaque contre un camp de l’ONU à Tombouctou, 9 morts.

Neuf personnes, dont un Casque bleu et cinq agents de sécurité maliens, ont été tuées lundi lors de deux attaques distinctes contre la mission de l’ONU au Mali (Minusma).

Ces attaques sont survenues la veille d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies sur la paix et la sécurité en Afrique.

 Une première attaque d' »hommes armés non identifiés » a visé des camps de la Minusma à Douentza dans le centre du pays, a annoncé la force de l’ONU au Mali.

Un Casque bleu, dont la nationalité n’a pas été précisée, et un soldat malien ont été tués, selon la Minusma. Un autre Casque bleu a été blessé. En outre, deux assaillants ont été tués dans la riposte des soldats de l’ONU.

« Un premier groupe d’assaillants a tiré sur un camp de la Minusma à partir d’une colline adjacente. En réaction, les forces armées maliennes, établies à proximité du camp, ont riposté », a expliqué la Minusma.
« Un deuxième groupe se dirigeant à pied vers l’autre camp de la Minusma a ouvert le feu. Les Casques bleus ont riposté et deux assaillants ont été abattus », a ajouté la Minusma, qui a condamné « cette attaque terroriste révoltante ».

Lors d’une deuxième attaque, des hommes armés ont attaqué le QG de la Minusma à Tombouctou (nord-ouest).
Selon « des éléments préliminaires », cinq gardes de la Minusma, tous de nationalité malienne, un membre de la gendarmerie malienne et un agent civil contractuel de la Minusma, ont été tués, a indiqué la Minusma. En outre, un garde de sécurité malien et six Casques bleus ont été blessés, dont deux grièvement.
« Six assaillants ont été abattus lors de la riposte de la Minusma à l’attaque », a précisé l’ONU.
La Minusma a ensuite déployé une force de réaction rapide destinée à « sécuriser le quartier général de la Mission et des hélicoptères d’attaque pour traquer d’éventuels assaillants », a-t-elle expliqué.

Le chef de la Minusma, Mahamat Saleh Saleh Annadif, a condamné un « acte lâche et ignoble ».

Un peu plus tôt, un responsable du gouvernorat de Tombouctou avait indiqué que les « terroristes » étaient armés de grenades et de Kalachnikov.
« Dès qu’ils sont arrivés devant l’entrée principale de la Minusma à Tombouctou, ils ont ouvert le feu sur les agents de sécurité d’une société de gardiennage qui travaille pour la Minusma », avait déclaré de son côté à l’AFP une source sécuritaire malienne, ajoutant que « six terroristes » avaient été tués.

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda à la faveur de la déroute de l’armée face à la rébellion, d’abord alliée à ces groupes qui l’ont ensuite évincée.
Ces groupes armés en ont été en grande partie chassés à la suite du lancement en 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement. Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères, régulièrement visées par des attaques meurtrières, malgré l’accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes.

Mardi, une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU doit se tenir sur la paix et la sécurité en Afrique.
Les 15 membres du Conseil doivent notamment parler de la force en cours de création par les pays du G5 Sahel (Bukina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad) qui vise à combler les lacunes des dispositifs militaires nationaux et multinationaux dans la région, qui semblent avoir du mal à enrayer l’expansion des groupes jihadistes.
Cette force de quelque 5.000 hommes devrait être opérationnelle à l’automne mais son financement est encore loin d’être assuré.

Ouagadougou : au moins 18 morts dans l’attaque terroriste d’un restaurant

Des terroristes présumés ont attaqué, dimanche soir, un café de Ouagadougou avant de se retrancher dans un immeuble du quartier. Deux d’entre eux ont été abattus. Un dernier bilan fait état de 18 morts et d’une dizaine de blessés.

Des terroristes présumés islamistes ont tué au moins 17 personnes dimanche soir à Ouagadougou, après avoir ouvert leur feu sur les clients du  restaurant Aziz-Istanbul, un lieu très fréquenté par les étrangers de la capitale burkinabé. « Aux environs de 21 heures, une attaque terroriste a touché le restaurant Istanbul sur l’avenue Kwame Nkrumah à Ouagadougou», a déclaré le gouvernement dans un communiqué.

« Trois hommes sont arrivés à bord d’un véhicule 4×4 vers 21h30, sont descendus du véhicule et ont ouvert le feu sur les clients assis sur la terrasse », a indiqué sous couvert d’anonymat un serveur de ce café fréquenté par une clientèle expatriée. Sur une vidéo diffusée sur Twitter, on voit des gens s’enfuir en courant et en criant. Dans une séquence suivante, on entend des tirs nourris. L’avenue s’est vidée de ses passants immédiatement après l’attaque, seuls des véhicules des forces de sécurité et des ambulances étaient visibles.

Une cliente qui était au restaurant, célébrait l’anniversaire de son frère quand la fusillade a éclaté. « J’ai couru mais mon frère est resté à l’intérieur », a-t-elle déclaré à l’agence Reuters.

«Le bilan est de 18 morts dont 14 gisent toujours sur le site de l’attaque. Parmi ces 14 morts se trouvent deux assaillants tués par les forces de sécurité, selon cet officier. Le nombre total des assaillants est inconnu », selon un officier de l’armée burkinabè. 

Selon ce même officier de l’armée s’exprimant sous couvert d’anonymat, « il y avait des otages retenus au premier et au deuxième étages du bâtiment de deux étages», qui abrite le café-restaurant se trouvant au rez-de-chaussée.

Il n’y a pour le moment aucune revendication concernant cette attaque qui a frappé la capitale burkinabé. Vers 8h45, Remi Dandjinou, ministre des Communications du pays, annonçait que l’opération avait pris fin. Il a aussi déclaré aux journalistes qu’il s’agissait d’une « attaque terroriste ».

Il y aurait des victimes de plusieurs nationalités différentes, a poursuivi Mr Dandjinou, mais au moins l’un des morts était un ressortissant français.

« Nous avons évacué 11 personnes, mais l’une d’elles, un turc, est mort en arrivant à l’hôpital », a déclaré une source médicale, refusant d’être nommée.

Le capitaine de police, Guy Ye, a déclaré que trois ou quatre assaillants étaient arrivés au restaurant sur les motos, puis ils ont commencé à tirer au hasard sur les clients. Les forces de sécurité ont tué au moins deux attaquants, mais les gens sont restés dans le bâtiment qui abritait le café-restaurant turc. Un soldat a déclaré qu’il y avait des otages au premier et au deuxième étage de ce bâtiment de deux étages.

La police a évacué des civils avant de lancer le contre-assaut.

L’ambassade de France à Ouagadougou a déclaré qu’elle était en contact avec les autorités locales et a conseillé aux Français d’éviter la zone autour du restaurant, a rapporté Reuters.

Cette attaque s’est déroulée à quelques 200m du café Capuccino qui avait était la cible d’une attaque terroriste le 15 janvier 2016, faisant 30 victimes et 71 blessés en majorité des étrangers.

 

 

 

 

 

Amadou Ndjoum : 100 jours de captivité

Voilà cent jours que notre compatriote Amadou Ndjoum agent de l’Institut National de Prévoyance Sociale (INPS), est fait otage. Rappelons que sa disparition a été constatée le 26 avril 2017 et sa prise d’otage confirmée depuis par la Katiba de Macina.

Amadou Ndjoum se rendait sur des lieux habituels de paiement de pension de réversion,  lorsqu’il a été capturé par un groupe armé, dans le centre du Mali précisément à Youwarou. Un mois après sa captivité, l’opinion publique se trouve alertée par un jeune fonctionnaire de Badiangara, enclenchant une mobilisation. Une plainte par la suite est déposée à Sévaré, le 15 juin 2017,puis transmis au tribunal de la commune V de Bamako.

La mobilisation est suivie et couverte par certains médias nationaux, principalement ceux en ligne. Au deuxième mois de la mobilisation, le constat amer du silence du gouvernement pour ce qui concerne ses otages se montre inquiétant. Si nous référons à l’article de RFI du 04 août 2016 , le Mali enregistre actuellement six otages y compris Amadou Ndjoum : en effet, cinq FAMAS sont capturés par Ansar Dine le 19 juillet 2016, lors de l’attaque contre la base de Nampala. Nonobstant, des communications officielles remarquées dans la prise d’otage d’Occidentaux découvrent le silence régnant quant aux otages maliens, aujourd’hui entre les mains de Djihadistes. Deux articles dont une lettre ouverte au Président Ibrahim Boubacar Keïta, sur le cas d’Amadou Njoum, sont restés sans réponse.

En effet aucun signe du gouvernement sur le sort de nos otages jusqu’alors, si ce n’est des déclarations à demie-teintes portées par le Ministre de la solidarité et de l’action humanitaire, Hamadou Konaté pendant le lancement du dispositif « Les pupilles de la République » qui vise à protéger : « Les enfants mineurs des personnels des forces armées et de sécurité et autres corps paramilitaires, des fonctionnaires et agents de l’Etat et tout autre citoyen dont l’un des deux parents ou le tuteur légal sont morts, portés disparus ou déportés »1 (article L’Essor du jeudi 22 juin 2017). L’action est salutaire mais ne répond aucunement pas sur le sort des maliens retenus entre les mains d’Ansar Dine et de la Katiba de Macina.

Puisque le vent est favorable à la négociation aujourd’hui au Mali, avec les groupes armés, partant de la donne que l’Europe négocie et même parfois, paye pour ses ressortissants, l’opinion malienne, ne verrait d’aucun mauvais œil le retour de ces dignes enfants du Mali au sein des leurs, par le biais de la négociation. Le gouvernement du Mali en toute humanité, pourrait intenter par quelque moyen, afin de ramener ces hommes à leurs familles, auxquelles ils manquent tant et auxquelles leur manque est quotidien, sans compter l’anxiété que la situation génère. Nous devrons faire appel à ce sens humain qui anime chacun de nos actions, car la captivité n’est que grisaille quotidienne. Contribuer ou permettre à leur liberté serait cet espoir à donner à ce peuple qui demande tant à ses gouvernants, compte tenu du climat actuel, tant la situation leur semble complexe et révoltante.

Dans le cas d’Amadou Ndjoum nous avons frôlé plusieurs fois l’espoir d’une libération, contenu de tractations volontairement non divulgué ici. Nous avons  également touché du doigt l’espoir d’une action en faveur de la famille lorsque la femme de l’otage est agréablement appelée par Tieman Hubert Coulibaly, Ministre de l’administration territoriale. Mais hélas, nous observons en même temps, que les actions peinent à se concrétiser. Cependant il n’est point permis de perdre ESPOIR. La mobilisation garde espoir pour Amadou Ndjoum, pour sa famille et également pour nos soldats. La mobilisation continue : Aidons Amadou Ndjoum, ainsi que nos braves soldats.

Dia Djélimady Sacko (Diaspora malienne, France) pour le collectif Aidons Amadou Ndjoum.

Libération de l’otage Sud-africain enlevé au Mali par Al-Qaïda en 2011

Près de six ans après son enlèvement, le Sud-Africain Stephen McGown, kidnappé par Al-Qaïda avec trois autres touristes dans un hôtel de Tombouctou dans le nord du Mali, a été libéré fin juillet et a retrouvé sa famille en Afrique du Sud, a-t-on appris jeudi.

L’ancien otage âgé de 42 ans suit actuellement des examens médicaux de routine et a déjà pu revoir son père et sa femme.

« C’était une énorme surprise quand il a passé la porte. Quand je l’ai étreint, il était en bonne santé et aussi fort qu’avant. Il a été bien traité », a déclaré son père Malcolm McGown, visiblement ému, lors d’une conférence de presse à Pretoria.

« Il m’a regardé et m’a dit que mes cheveux avaient poussé. Je lui ai répondu que les siens étaient encore plus longs! », a plaisanté son épouse, Catherine, cheveux blonds aux épaules.

Interrogé sur les conditions de la libération de Stephen McGown, le ministre sud-africain de la Sécurité intérieure David Mahlobo a assuré que le gouvernement n’avait payé « aucune rançon ».

« Notre politique étrangère est très claire: nous ne payons pas de rançon. Nous avons pu le libérer sans conditions », a-t-il expliqué.

« Le gouvernement nous a aidés depuis le début. Ca a pris du temps mais mon fils est libre, il va bien », s’est réjoui le père de l’ancien otage kidnappé dans la ville historique de Tombouctou le 25 novembre 2011.

Ce jour-là, un groupe d’hommes armés avait fait irruption sur la terrasse d’un hôtel fréquenté par des Occidentaux. Un Allemand avait tenté de résister et été tué.

Le commando avait ensuite emmené M. McGown, ainsi que deux autres touristes, Sjaak Rijke – un Néerlandais libéré en 2015 par les forces françaises – et un Suédois Johan Gustafsson relâché fin juin 2017.

L’enlèvement avait été revendiqué par le groupe jihadiste Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

Simple touriste

« La famille (de M. McGown), le gouvernement, le peuple sud-africain et la communauté internationale ont fait campagne pour sa libération. Nous sommes heureux d’annoncer que ces efforts ont abouti. Nous lui souhaitons un excellent retour chez lui », a salué la ministre des Affaires étrangères, Maite Nkoana-Mashabane.

Elle s’est également dite « ulcérée par les activités des groupes comme Al-Qaïda, l’Etat islamique (…) qui kidnappent des citoyens innocents. Souvenez-vous qu’il était un simple touriste à Tombouctou ».

Dans un communiqué, Pretoria a également remercié « le gouvernement malien et les organisations non-gouvernementales (…) pour leurs efforts qui ont permis la libération de M. McGown ».

Pendant sa longue captivité, la mère du jeune homme est décédée. « Stephen rentre chez lui et découvre que sa mère n’est plus là. C’est très très dur pour eux », a déclaré sur la chaîne Enca Imtiaz Sooliman, le directeur de Gift of the Givers, une ONG sud-africaine qui avait envoyé en 2015 un négociateur pour obtenir la libération du touriste.

Fin juin 2017, quelques jours après la libération de Johan Gustafsson, le père de Stephen McGown avait assuré à l’AFP que son fils allait « bien » et qu’il ne subissait pas de mauvais traitements.

Le mois dernier, Al-Qaïda avait publié une vidéo de six otages étrangers, dont M. McGown, où le groupe jihadiste assurait qu’aucune négociation n’avait commencé pour leur libération.

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda. Ils ont depuis été en grande partie chassés de cette région par une intervention militaire internationale, lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France, et qui se poursuit actuellement.