Décès du rappeur Lord Makhaveli : la jeunesse malienne perd l’une de ses voix les plus prometteuses

Le monde de la musique urbaine malienne est en deuil. Le jeune rappeur Abdoulaye Macalou, plus connu sous son nom…

Le monde de la musique urbaine malienne est en deuil. Le jeune rappeur Abdoulaye Macalou, plus connu sous son nom de scène Lord Makhaveli, est décédé dans des circonstances tragiques ce 10 juin à Bamako. L’enterrement de l’artiste est prévu ce vendredi 13 juin 2025 dans son quartier natal de Lafiabougou.

Selon les premiers éléments recueillis, Lord Makhaveli aurait été victime d’un lynchage collectif dans le quartier de Bacodjicoroni ACI. L’altercation, survenue en plein jour, aurait démarré de manière banale, impliquant selon certaines sources une dispute avec une vendeuse de galettes. La situation aurait rapidement dégénéré en agression physique.

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Grièvement blessé, le rappeur a été transporté d’urgence à l’hôpital Gabriel Touré, où il a succombé à ses blessures quelques heures plus tard. Les causes exactes de sa mort seraient liées à des traumatismes multiples, notamment au niveau du crâne et de la cage thoracique.

Une enquête a été ouverte par les services du commissariat du 5ᵉ arrondissement pour faire la lumière sur les circonstances de ce drame. Des témoins auraient déjà été entendus, et une reconstitution des faits serait en cours.

Une étoile montante du rap malien

Âgé d’environ 23 ans, Lord Makhaveli incarnait une génération d’artistes maliens conscients, porteurs d’un rap engagé et sans compromis. Révélé sur la scène bamakoise par des morceaux comme Fly, Un Autre Malien Américain ou Gangsta Écrivain, il s’était produit dans plusieurs lieux emblématiques de la capitale, du Centre international de conférences de Bamako (CICB) au Stade du 26 Mars.

Son style, mêlant réflexions sociopolitiques, introspection personnelle et dénonciation des inégalités, lui avait valu une reconnaissance croissante au sein de la jeunesse urbaine.

« C’était un gamin sincère, intelligent, qui voulait changer les choses avec sa musique », témoigne un confrère artiste ayant partagé la scène avec lui.

Vague d’émotion sur les réseaux sociaux

L’annonce de sa mort a déclenché une vive émotion sur les réseaux sociaux. Des milliers d’internautes ont exprimé leur colère, leur tristesse et leur incompréhension face à ce qu’ils considèrent comme un acte de barbarie.

Des artistes de renom comme Iba One, Mylmo, Master Soumy ou encore Gaspi lui ont rendu hommage, appelant à des réflexions profondes sur la montée des violences urbaines et le phénomène des « justices populaires ».

« Ce n’est pas seulement un artiste que nous perdons, c’est un frère, une voix, un miroir de nos luttes », a déclaré Mylmo dans une vidéo relayée sur TikTok.

Enterrement ce vendredi à Lafiabougou

La levée du corps aura lieu après la prière du vendredi (Jummah) au quartier Lafiabougou, dans la commune IV du district de Bamako. De nombreuses personnalités du monde de la culture, amis, proches et anonymes sont attendus pour cet ultime hommage.

Un appel au calme a été lancé par plusieurs leaders communautaires afin d’éviter tout débordement lors des funérailles, qui s’annoncent particulièrement suivies.

Un drame révélateur

Au-delà de l’émotion, ce drame soulève une fois de plus la question de la montée des violences collectives à Bamako. Les lynchages publics, alimentés par une méfiance croissante envers les forces de l’ordre et la justice, semblent se banaliser dans certains quartiers.

Le cas de Lord Makhaveli illustre tragiquement cette dérive : un différend mineur, un soupçon, un attroupement… et la mort d’un jeune homme, d’un artiste, d’un citoyen.

La mort de Lord Makhaveli n’est pas seulement celle d’un rappeur. C’est une perte pour une jeunesse qui cherche à s’exprimer, à être entendue, à être comprise. C’est aussi un avertissement sur la fragilité du vivre-ensemble, sur les risques d’une société où la colère déborde plus vite que la justice ne répond.

Il laisse derrière lui des textes, des rimes et une voix – qu’on espère assez forte pour ne pas s’éteindre.