Crime d’indifférence

Sans vouloir être trop pessimiste, on doit avouer qu’au Mali, actuellement, où que l’on tourne la tête, rien ne va.…

Sans vouloir être trop pessimiste, on doit avouer qu’au Mali, actuellement, où que l’on tourne la tête, rien ne va. En haut, le blocage politique qui s’est intensifié début juin fige le pays dans l’attentisme, revendicatif pour les uns, las et désabusé pour les autres. À droite, les élèves, qui depuis 2 ans ne vont que sporadiquement à l’école, pour cause de grève ou de coronavirus, c’est au choix, pour des cours dont le niveau se dégrade d’année en année. Un peu plus loin, ces champs de détritus, aux abords de Bamako ou dans les quartiers, où les ordures s’amoncèlent en des montagnes malodorantes et malsaines. À gauche, les hôpitaux, en mal de matériel et de ressources humaines et financières. En bas, Fatoumata, qui doit faire bouillir la marmite pour ses 5 enfants, ses 3 neveux et ses beaux-parents avec les 1 000 francs que son mari lui a tendu ce matin en baissant les yeux. Avec la perte de son emploi et son second mariage qui approche, il est fauché…

Tout est lié, inextricablement, et l’immensité du chantier donne le tournis. Mais les Maliens, docteurs en résilience dès leur cinquième anniversaire, tiennent bon. Avec courage. Car il faut bien vivre. Cependant, cette fameuse résilience ne doit pas rendre insensible. Chacun en aurait-il tant sur les épaules qu’il ne verrait même plus qu’il y a pire ? Le pire et l’urgent est au Centre. Des infrastructures en décrépitude ou inexistantes, des écoles fermées, des terres qui ne sont plus cultivées, des troupeaux volés, des greniers brûlés et des gens massacrés. Le tissu social se consume aussi vite que ces villages, qui cesseront bientôt d’exister car le feu se répand. Les armes font loi et la vie ne vaut plus rien. Pourtant, à Bamako, de bas en haut, on a souvent l’impression que cela n’émeut pas grand monde. Comme si l’on n’était pas concerné… Émouvons-nous et agissons avant qu’il ne soit trop tard, car aujourd’hui, au Mali, l’indifférence tue.