Dr. Hamadoun Haidara : « On ne peut pas dire que cette transition ne répond pas à ce que veut le peuple »

Ce 18 août 2022 marque les deux ans de l’avènement d’un pouvoir de transition à la tête du Mali. Dr. Hamadoun Haidara, sociologue, chercheur en gouvernance et décentralisation, enseignant vacataire à la Faculté des Sciences administratives et politiques, nous livre son opinion.

2 ans de transition. Quel bilan en faites-vous ?

À mon avis, le bilan n’est ni totalement décevant ni totalement satisfaisant. Il y a eu du bon et du moins bon. Mais dans l’ensemble c’est un bilan acceptable. On peut l’évaluer en fonction du programme du gouvernement. Sur le plan sécuritaire, par exemple, il y a eu suffisamment d’acquisitions de matériels et on nous fait savoir que la situation sur le terrain a changé, même s’il y a toujours beaucoup de flou. Ce qui est réel, c’est que certaines actions ont permis de renforcer les positions de l’armée. Ce bilan sécuritaire peut être donc compté parmi les acquis, même si la situation reste pratiquement inchangée, avec plusieurs zones qui ne sont pas totalement sous contrôle et une insécurité qui s’oriente vers les centres urbains.

Beaucoup de choses ont changé durant ces deux ans, notamment les rapports avec la communauté internationale. La transition est-elle sur la bonne voie ?

Je peux dire qu’elle est sur la bonne voie dans la mesure où elle essaye de faire ce à quoi aspirent les populations. Les actions sont en quelque sorte orientées par le peuple dont aujourd’hui la grande majorité la soutient. On ne peut donc pas dire que cette transition ne répond pas à ce que veut le peuple, même si parfois elle prend des décisions inappropriées ou inconfortables. Mais je pense que cette posture des autorités de prendre les devants sur tout n’est pas confortable pour un État qui s’ouvre sur plusieurs plans. Lorsqu’on a besoin du soutien de tout le monde et qu’on veut se débarrasser de certains, j’estime qu’il y a incohérence.

Le Président de la transition fait presque l’unanimité mais son Premier ministre est décrié par une partie des politiques. La nomination d’un nouveau Premier ministre contribuerait-elle à une suite plus apaisée ?

Pour moi, cette question ne doit pas être à l’ordre du jour. Quel que soit le Premier ministre qui sera nommé, il aura toujours une coloration quelconque et ne fera pas l’unanimité, même s’il est issu de la société civile ou est un technocrate. L’essentiel, c’est d’avoir un chef de gouvernement capable de prendre des décisions et de les assumer pendant des moments difficiles. C’est ce qu’essaie de faire le Premier ministre actuel.