Administration publique : vers la validation de la stratégie nationale de dépolitisation

Pour redonner à l’administration publique malienne une meilleure image, une stratégie nationale de sa  dépolitisation est en cours d’élaboration depuis quelques mois. En vue de parfaire le document  élaboré par une équipe d’experts nationaux et validé par le comité de suivi, avec les acteurs de terrain qui ont pris part au processus de sa préparation, le ministère de la Refondation de l’Etat a initié pour deux jours, 10 et 11 novembre 2022 à Bamako,  un atelier national de validation et de partage pour une large adhésion des citoyens.

Cet atelier dont l’ouverture des travaux au CICB  a été présidé par le ministre de la Refondation de l’Etat, chargé des Relations avec les institutions, Ibrahim Ikassa Maiga, regroupe les représentants de toutes les 19 régions et du district de Bamako.

L’objectif général est d’informer les forces vives sur le processus et les efforts déployés par les pouvoirs publics en vue de mettre l’Administration à l’abri des influences négatives de certains acteurs politiques sur le fonctionnement de l’administration publique et la qualité des services.

L’atelier vise aussi à rechercher les soutiens politique et populaire nécessaire à l’appropriation et à la mise en œuvre idoine du document de stratégie, à obtenir l’adhésion et la contribution de tous les acteurs étatiques et non-étatiques à la mise en œuvre du document de stratégie et à offrir une opportunité et des créneaux aux partenaires techniques et financiers disposés à appuyer le Mali dans la modernisation de l’Administration publique.

« Le phénomène de politisation de l’Administration a pris des proportions inquiétantes ces dernières années avec son corolaire de crise de confiance  entre les acteurs de la gestion de l’Administration et les usagers des services publics », a indiqué le ministre Ibrahim Ikassa Maiga selon lequel, le défi qui demeure important ne peut être relevé que par une volonté politique inébranlable qui permettrait d’inverser la tendance.

« Pour ce faire, la vision proposée par l’équipe des consultants, à l’issue d’un état des lieux exhaustif de la question de dépolitisation de l’Administration, est révélatrice à plus d’un titre : une administration neutre, professionnelle, moderne, performante, assurant un égal traitement à tous les usagers  et inscrite dans la recherche continue et pérenne de l’amélioration de la qualité des services et de l’innovation », a-t-il salué.

Pour sa part Mme Diarra Racky Talla, ancienne ministre de la fonction publique et actuelle 5ème vice-présidente du CNT a rappelé que « des mécanismes sont déjà en cours, des textes ont été adoptés, et il est important que l’état des lieux soit fait et que cette dépolitisation fasse l’objet de partage ».

« La politique relève de la liberté d’expression qui est un droit fondamental. Il n’est donc pas question non plus de compromettre les droits fondamentaux des fonctionnaires. Mais c’est à l’administration de communiquer et de dialoguer avec l’ensemble des fonctionnaires et des partenaires sociaux pour arriver à une application des textes qui régissent cette dépolitisation » a-t-elle précisé avant de mettre l’accent sur deux éléments qui, selon elle,  sont capitaux dans l’exécution de ce projet. Il s’agit de l’élaboration des plans de secteurs dans tous les secteurs mais aussi un mécanisme d’évaluation des agents pour situer les responsabilités mais aussi sanctionner la faute et promouvoir le mérite.

Durant 48h, les travaux  de l’atelier se dérouleront sous forme de présentations des experts, puis des travaux en groupes. Les différentes présentations porteront sur le document de stratégie, le plan d’actions et le Répertoire des Hauts emplois techniques de la Fonction publique (RHET-FP). Des propositions d’amélioration du document de stratégie et son plan d’actions seront également formulées.

Six nouvelles applications de l’AGETIC pour booster la performance de l’administration.

 

 

A travers un workshop qu’elle a organisé le 6 octobre, l’AGETIC a présenté six nouvelles applications destinées à améliorer l’efficacité des services de l’administration malienne.

Vous en avez assez des longues files dans les administrations pour pouvoir retirer un document, vous n’en pouvez plus de faire des va et viens incessants à cause d’un dossier incomplet, ces maux ont désormais un remède. ‘’Démarches administratives’’ est une application développée par l’agence des technologies, de l’information et de la communication (AGETIC) pour rendre les services publics plus accessibles et plus fluide à la population. Depuis votre téléphone mobile désormais, vous pourrez avoir toutes les informations sur les documents à fournir, pour un permis de conduire ou pour un casier judiciaire. « Nous avions déjà lancé le site internet dédié, mais nous n’avons pas ressenti un engouement pour le site, la plupart des personnes utilisent plus leurs téléphones, nous avons donc lancé la version mobile disponible pour les Android, et à partir de maintenant vous avez toutes les informations sur les démarches administratives à portée de mains » explique le directeur général de l’AGETIC, Hamed Salif Camara. Du vrai pain béni, pour nombre de maliens qui se plaignent de la lourdeur dans les services publics.

L’application permettra également au citoyen, d’avoir accès à tous les textes (codes, lois, décrets) et à toute actualité liée à l’administration malienne en temps réel.

Au-delà de cette application qui sert un petit peu tout le monde, l’AGETIC a développé d’autres outils permettant une interconnexion entre les différents services de l’État. Parmi lesquels, le E-GESCO, qui est une application de gestion de courrier rapide et sécurisée. « Grâce à cette application, il n’y aura plus de circulation de papier entre les services de l’administration, tout l’argent que nous mettons dans les photocopies, les impressions, ça va être fini bientôt, c’est un gain énorme qui permettrait de financer des projets » assure Camara.

L’absentéisme récurrent dans certains services publics, devrait bientôt prendre fin, ou du moins être sanctionné. L’Office Manager, permet de gérer les informations relatives aux différents agents dans les structures, une manière d’avoir des informations précises sur leurs présences et une traçabilité de leurs activités.

Archivage électronique et appel d’offre transparent

Trouver des documents qui datent de l’indépendance ou d’avant s’apparente à une vraie mission dans un capharnaüm. L’application AGIC qui offre un service d’archivage électronique,  assurera un énorme gain de temps pour les services concernés. « Pour lutter contre la délinquance financière, nous avons développé le ‘’Core’’, une application qui assure transparence et fiabilité dans la création et la gestion d’appel d’offres » décrit le directeur de l’AGETIC.  De nombreuses innovations donc qui devraient à terme améliorer les services fournis par les administrations.

 

Administration : 15 directeurs financiers ont été limogés

Par un communiqué verbal, le ministre de l’économie et des finances, Boubou Cissé, a annoncé l’abrogation du décret de nomination de tous les directeurs des finances et des matériels (DFM) des départements ministériels au cours du conseil des ministres du 22 mars. Puis le conseil des ministres a validé sa proposition.

Selon une source proche du dossier, l’objet principal de ce limogeage est lié à la bonne gestion des ressources financières de l’Etat, qui semble-t-il ne devait pas être si bien géré que ça auparavant. « Cette décision est prise pour faire en sorte que les pratiques sur les ressources financières publiques soient faites dans les bonnes conditions et avec des personnes sereines » soutien cette source.

Dans ce dossier, d’après la même source, il sera de question de remplacer 15 directeurs des finances et des matériels sur 33 par des nouveaux. « Parmi ces nouveaux entrants figureront 6 femmes. Ce qui fera que 8 femmes au total. Les 18 restants seront permutés entre les ministères », précise cette même source.

Le directeur général du centre des œuvres universitaires de Bamako a aussi été relevé de ses fonctions au cours de ce même conseil des ministres.

Le ministre Boubou Cissé va signer, ce jeudi 23, un décret pour la nomination des nouveaux directeurs des finances et des matériels. Dans un bref délai, la liste des nouveaux directeurs entrants et ceux qui vont être permutés fera l’objet d’un communiqué.

 

 

 

 

 

 

Amine Idriss Adoum/ UA : « Sans l’UA, l’Afrique serait moins stable qu’elle ne l’est aujourd’hui »

A Addis-Abeba, la transition s’effectue au pas de charge. L’équipe Zuma a jusqu’au 14 mars pour céder ses bureaux à l’équipe Faki Mahamat, président élu de la Commission de l’UA qui prendra fonction le 15 mars. En attendant cette échéance, nous nous sommes intéressés au fonctionnement de cette grande maison qu’est le siège de l’UA. Interview de Amine Idriss Adoum, Directeur de l’administration et de la Gestion des Ressources humaines.

Votre département est la cheville ouvrière de l’instance continentale. Comment fonctionne-t-il ?

La direction de l’administration a cinq sous-directions qui sont les ressources humaines, les marchés publiques, les systèmes d’information et l’informatique, la sécurité de l’Union et l’administration générale elle-même. Nous sommes au centre du fonctionnement : nous recrutons, nous payons, nous achetons et contractons les services, nous mettons en œuvre les opérations dont les décisions sont prises au niveau des politiques. Nous sommes au début et à la fin de toutes les transactions administratives.

Quel est son effectif ?

Cela dépend des sous-directions: les ressources humaines, ils sont une trentaine, les  systèmes d’information une vingtaine, l’administration centrale elle-même une vingtaine de personnes, les achats et marchés publics également. A la sécurité, il y a une centaine de personnes. Maintenant il y a une centaine de personnel (chauffeurs, etc.) qui nous fait arriver à environ 300 et 400 fonctionnaires cadres mais aussi et surtout fonctionnaires de base. Nous avons un ratio de contrats locaux d’environ 30% de contrats locaux ici en Ethiopie.

On critique beaucoup l’UA, certains l qualifie de gros machin qui n’apporte pas grand-chose dans la vie des citoyens. Vu de l’intérieur, le point de vue est certainement différent ?

L’Union africaine fait beaucoup de chose pour le continent. Je vais prendre l’exemple de la lutte contre la maladie à virus Ebola. Nous avons réagi avec un tout petit peu de retard et avons été extrêmement critiqué pour cela. Il se trouve que dès que nous avons commencé à déployer nos opérations, nous étions la seule organisation à déployer plus de 1000 membres du personnel médical : médecins, infirmiers, personnel de support au Libéria, en Sierra Leone et en Guinée Conakry. Nous avons mobilisé des ressources financières pour ces opérations. Aucune des personnes que nous avons déployées n’a été contaminée sur place, parce qu’avant de recruter ces volontaires, il y a une procédure rigoureuse de sélection et de formation avant d’aller sur le terrain. Notre gros problème est en fait un problème de communication.

Si vous regardez au niveau des grands programmes et projets de développement au niveau continental, la plupart des projets d’infrastructures sont faits sur la base d’un plan directeur qui a été défini par la commission de l’Union africaine et adopté par les chefs d’Etat. C’est la même chose en termes de développement agricole, des sciences et techniques. Nous sommes une institution politique, nôtre rôle est de définir des plans et les faire adopter. Notre rôle n’est pas de faire des actions sur le terrain comme une ONG, nous ne sommes pas qualifiés pour cela, nous n’en avons pas les compétences techniques. En revanche, nous sommes très bien outillés pour créer des plans au niveau continental et surtout pousser les Etats à les mettre en œuvre. Là où nous sommes aussi très efficaces, mais ce n’est pas très connu, c’est sur les opérations de « paix et sécurité ». La Somalie est plus ou moins stabilisée aujourd’hui grâce à l’Union africaine, nous y avons 22000 soldats sur place. Nous avons également aidé les Etats membres à lancer les opérations contre Boko Haram. La première opération contre le terrorisme au Mali a été lancée par l’UA, c’est la MISAHEL, avant l’arrivée de la MINUSMA. Nous avons fait la même chose en Centrafrique, en Ouganda où nous avons réussi à réduire de façon visible l’impact négatif de l’Armée de Libération de Seigneur (LRA). Nous faisons énormément dans ce domaine et je peux vous assurer que n’eut été la présence de l’UA, l’Afrique serait moins stable qu’elle ne l’est aujourd‘hui.

Ce département est pourtant critiqué pour la lenteur du processus de mise en œuvre de la Force africaine ?

La Force africaine en attente existe bel et bien. Il y a une base logistique qui est en train d’être mise sur pied à Douala au Cameroun. Il ne s’agit évidemment pas d’avoir des soldats qui s’assoient et qui attendent ! C’est en fait un mécanisme de mobilisation qui doit être enclenché quand il y a un problème. Les entrainements sont faits, vous avez dû entendre parler d’Amani 1 et 2, ce sont des manœuvres militaires conjointes qui sont faites dans le cadre de la mise ne œuvre de cette force.

L’actualité de l’UA, c’est la réforme de cette institution. Le président Kagamé a présenté un rapport qui a été adopté par les chefs d’Etat lors du dernier sommet. Est-ce que vous voyez une mise en œuvre rapide des ses recommandations ? Qu’est ce que cela va changer pour le département que vous dirigez ?

Le rapport Kagamé demande aux Etats membres de l’UA de réorienter le mandat de l’institution qui est assez large et très divers. Il demande très clairement de se focaliser sur les questions de paix et sécurité et sur les questions de représentation du continent au niveau mondial. Il demande aussi de réorienter le mandat du NEPAD pour en faire une agence de développement, de mise en œuvre des décisions des chefs d’Etat sur les questions des infrastructures, du développement agricole, d’industrialisation. Cette décision sera mise en œuvre très bientôt. Cela va évidemment avoir un impact sur la manière dont nous travaillons. Ça apporte de la clarté et de la souplesse dans notre travail, parce que quand il s’agit de mettre en œuvre des actions de développement, il n’y a pas besoin de toutes les négociations que nous devons faire quand il s’agit de mettre en œuvre une action politique ou diplomatique. Ceci permettra aussi d’attirer de meilleurs talents au sein de l’UA. Aujourd’hui nous ne sommes pas très attractifs, spécialement pour les meilleurs qui préfèrent le privé, quand bien même nos rémunérations pourraient être plus intéressantes. Le fait de reconcentrer la Commission et d’apporter de la clarté fera la différence et nous rendra plus « sexy ».

Il y a des efforts qui ont été faits sous le mandat Zuma. Ils seront donc poursuivis ?

Nous avons commencé la réforme il y a en fait bien longtemps et ces deux dernières années, nous l’avons accélérée. A l’interne, en modernisant notre façon de travailler, nos outils, nos mécanismes de planification. Vis-à-vis de l’extérieur, en essayant d’aller vers le numérique, en nous installant durablement sur les réseaux sociaux, en parlant et en écoutant davantage les gens.

Que retiendrez-vous du passage de Mme Zuma à la tête de la Commission ?

Trois choses. La première, c’est l’Agenda 2063. C’est la première fois que l’Afrique réfléchit et se projette sur 50 ans. C’est extrêmement important. La deuxième c’est son engagement extraordinaire sur les questions de genre. Avec elle, nous sommes à un moment arrivés à une égalité parfaite sur les postes de direction  entre les hommes et les femmes. Certaines collègues ont démissionné, ce qui a faussé un peu les chiffres, mais on devrait pouvoir équilibrer à nouveau d’ici l’année prochaine. Mme Zuma a réussi à convaincre le leadership de cette organisation que les femmes ont tout autant le droit que les hommes d’y occuper des postes de responsabilité. La troisième chose est plus personnelle. Mme Zuma est une personne avec un très fort caractère et qui écoute, avec des standards éthiques incroyablement élevés. C’est incroyable ce que cette femme a fait. Elle n’accepte aucune compromission et cela m’a marqué.

Qu’attendez-vous de son successeur ?

Nous attendons qu’il ait un leadership tout aussi fort, sinon plus, pour pouvoir porter la voix du continent. Qu’il soit irréprochable sur le plan éthique et je pense que le ministre Moussa Faki est connu pour cela. Nous attendons aussi qu’il soit un homme d’action qui soit pro-actif et qu’il continue la promotion des femmes et des jeunes au sen de cette organisation.