Aide publique aux partis politiques : Des réactions partagées

3 milliards 374 millions 442 mille 789 francs CFA. C’est le montant de l’aide financière publique de l’Etat aux partis politiques du Mali comptant pour l’année 2018, révélé en Conseil des ministres du 14 août 2019. Si la tradition est encore une fois respectée depuis l’adoption de la  Loi n°05-047 du 18 août 2005, les avis divergent aujourd’hui sur cette somme octroyée à une partie de la classe politique.

Ils sont au total 66 formations politiques à bénéficier de la manne financière, sur les près de 200 que compte le pays selon les chiffres du ministère de l’Administration territoriale. 

Si l’écart entre ceux qui sont éligibles et ceux qui ne le sont pas, est considérable, c’est parce que « Aujourd’hui l’on crée les partis politiques soit pour être plus proche de la majorité, soit pour être proche de l’opposition pour pouvoir se positionner et profiter d’une situation donnée », estime Khalid Dembélé, chercheur au CRAPES. 

« Les partis sont créés non plus autour de convictions ni d’idéaux mais autour des intérêts individuels et quand c’est comme cela, ils ne sont pas fondés et les critères les disqualifient facilement », ajoute celui pour qui cette aide de l’Etat n’est juste qu’une opportunité pour un certain nombre de groupuscules de se faire plein la poche.

Vitale pour la démocratie

« Si nous avons choisi de faire la démocratie, nous devons  aider les piliers que sont les partis politiques, qui supportent cette démocratie. On ne peut pas parler de démocratie sans eux, ni d’apprentissage et de formation. Aujourd’hui,  les partis ont besoin de cette aide et c’est important et normal qu’on puisse la leur apporter », soutient Moussa Seye Diallo, Secrétaire adjoint chargé à la communication de l’URD. 

Pour lui, le Mali étant encore à l’étape d’apprentissage de la démocratie, cette aide de l’Etat aux partis politiques est indispensable pour la bonne gestion des affaires de la cité. 

« Ce n’est pas parce qu’il y a la pauvreté, qu’il faut distribuer de l’argent ailleurs qu’aux partis politiques. Si la démocratie ne marche pas, nous allons nous retrouver dans une dictature et les dictatures en Afrique finissent toujours par celle d’un clan », insiste t-il.

Même son de cloche chez les Fare An Ka Wuli, où cette aide publique de l’Etat est perçue comme une légalité républicaine qui restera en vigueur tant que la loi qui l’a instaurée ne sera pas abrogée. 

« Ce financement est destiné à accompagner les partis politiques dans leurs œuvres de citoyenneté, de cohésion sociale et de formation continue de leurs militants », justifie Bréhima Sidibé, Secretaire général adjoint du parti de l’ancien premier ministre Modibo Sidibé.

Formation insuffisante ?

Parlant de formation des militants, la réalité dans les partis politiques est parfois différente de ce qu’affichent les dirigeants. « Aujourd’hui quand on regarde ces partis politiques, qu’est-ce qu’ils effectuent concrètement sur le terrain ? », s’interroge M. Dembélé.  

« On se rend compte facilement qu’il n’y pas de réelles formations. Ce sont des partis personnifiés, autours des leaders et qui cessent de fonctionner quand ces derniers ne sont pas là », constate le chercheur.

Sans pour autant prôner la suppression de cette aide, il appelle à plus de responsabilités car  « si ces sommes sont décaissées pour des raisons nobles parce que cela doit servir entre autres à former les militants des partis, c’est tout sauf le cas en réalité ».