Coupe du monde U-20 : Le Mali ambitieux

La phase finale est enclenchée. Dans un peu moins de dix jours, le Mali fera son entrée en lice à la Coupe du monde U-20 face au Panama. Une équipe a priori à la portée des joueurs de Mamoutou Kané Mourlé, mais dont il faudra néanmoins se méfier. Lors de la CONCACAF 2018, les Canaleros n’ont encaissé que 3 buts en 5 matchs, en inscrivant 17. C’est une formation qui se signale par la justesse de son jeu de passe, 90,1% de taux de réussite. Dans nos colonnes, en février dernier, le sélectionneur national adjoint des Aiglons, Birama Konaté, affichait clairement les ambitions du Mali dans cette compétition : faire mieux que les 3èmes places décrochées en 1999 et 2015. Pour cela, l’équipe devra engranger un capital confiance durant le premier tour, selon le consultant sportif Mohamed Soumaré. « L’équipe a toutes les chances de se qualifier. Au pire en tant que meilleure troisième et au mieux à l’une des deux premières places. Nous jouons le Panama et l’Arabie Saoudite (championne d’Asie) en premier. Le Mali peut donc être qualifié à l’issue de ces deux rencontres ». Le leadership du groupe devrait donc disputer entre Maliens et Français lors du dernier match de poule. « J’ai quelques informations sur le Mali, qui est une très belle équipe, avec beaucoup d’atouts offensifs. Parmi les équipes africaines, le Mali fait partie des favorites », commentait le sélectionneur français Bernard Diomède quelques heures après le tirage au sort.

Pragmatisme

Pour faire un parcours honorable en Pologne, la sélection malienne va miser sur ce qui fait sa force : son pragmatisme. « Lors de la CAN, en dépit de nombreux problèmes, l’équipe a montré qu’elle avait du caractère. Ce sera très important dans les matchs à élimination directe », affirme Soumaré. Mourlé a réussi à inculquer à ses joueurs la hargne de vaincre qui les a mené sur le toit de l’Afrique. Même si l’adversité sera tout autre, l’ancien gardien de but international a foi en ses joueurs. « Le mérite revient aux garçons », confiait-il après le sacre à la CAN. Sa liste n’a pas encore été officiellement communiquée mais ne devrait pas contenir de changements. Mourlé fera confiance à ceux qui ont offert au Mali son premier trophée chez les U-20.

El Bilal Touré : « Se surpasser et être performant»

À 17 ans, il a déjà tout d’un grand. Son nom, El Bilal Touré, est celui qui était sur toutes les lèvres après la finale victorieuse du Mali à la CAN U20. Athlétique, technique, à l’aise des deux pieds, le jeune Malien a fait étalage de tout son bagage durant la compétition. Plébiscité par la CAF, qui l’a placé dans l’équipe type du tournoi, c’est un champion tout juste auréolé qui a répondu aux questions de Journal du Mali.

Vous êtes Champion d’Afrique junior. Comment avez-vous vécu la compétition ?

Il y a de la fatigue, ce n’était pas facile. De la première rencontre à la finale, ce n’était pas simple. La défaite lors du premier match nous a compliqué la tâche. Nous avions plus de pression. Dieu merci, nous avons réussi à nous rattraper durant les rencontres qui ont suivi. Mais là, ça va, nous sommes soulagés, l’objectif est atteint.

Vous perdez votre premier match et aussi votre capitaine lors de cette rencontre. Vous est-il arrivé à ce moment-là de douter ?

Douter je ne dirai pas, plutôt une pression. Tu rentres mal dans la compétition. Perdre 2 – 0, c’est beaucoup trop, cela fait mal. C’était à nous de mettre la pression du bon côté, nous remotiver et aller de l’avant. Nous savions déjà que si nous perdions le deuxième match, c’était fini. Nous devions donc forcément gagner. C’est avec cet état d’esprit que nous avons abordé les matchs qui ont suivi, et il y a eu la victoire au bout.

Vous jouez dans le club Africa Football Élite (AFE), qui prône un jeu léché et porté vers l’offensive. A-t-il été compliqué de vous adapter au schéma de jeu du Mali ?

C’était un peu compliqué, mais chaque entraineur à sa vision du football. Il est demandé à un joueur de pouvoir s’adapter. Quand tu joues pour la Nation, c’est la victoire qui compte. Tu peux bien jouer et perdre, ce que les gens retiendront au final, c’est le résultat. Pour notre premier match, nous avons essayé le beau jeu et dominé le Sénégal, mais à la fin nous avons perdu. Après, nous avons été plus pragmatiques. En tant que joueur, je ne me focalise pas que sur une seule manière de jouer. Chaque entraineur fait ses choix, au joueur maintenant de se surpasser afin de donner le meilleur de lui-même et d’être performant pour l’équipe.

Vos prestations durant la compétition sont un merveilleux tremplin. Des pistes déjà pour la suite de votre carrière ?

Je ne gère pas cela, c’est Seran Diabaté (son manager) qui s’en occupe. Il sait ce qui est bien pour moi, il décidera.

Un club dans lequel vous rêveriez de jouer ?

Pas de club en particulier, mais le championnat que j’aime est la Premier League.

Vous êtes déjà présenté par beaucoup comme le futur grand attaquant de l’équipe du Mali. C’est une pression supplémentaire ?

À moi de le prendre comme une source de motivation. Je ne dois pas me reposer sur mes lauriers parce que les gens me font des éloges. Il me faut au contraire continuer à travailler. Néanmoins, je suis content que certains aient ces avis sur ma personne. À moi maintenant de rehausser le niveau et de montrer que je mérite ces dithyrambes.

Vous avez fait vos gammes dans des centres en Côte d’Ivoire avant de suivre votre entraineur à l’AFE. Pourquoi ?

J’avais confiance en mon coach (Alain Tiémélé Kouadio « Charlton »). Je l’ai donc suivi au Mali. J’ai beaucoup appris auprès de lui et je me suis dit qu’il pouvait encore m’apporter énormément. Le E de AFE veut dire Élite, cela parle. Nous ne sommes pas les meilleurs, mais nous essayons d’être à un excellent niveau. Il y a un peu plus d’un an, nous étions en troisième division. L’année suivante en deuxième division et nous jouons la demi-finale de la Coupe du Mali. Nous remercions le Seigneur pour ce parcours et nous espérons faire encore mieux à l’avenir.

Une polémique a vu le jour sur votre nationalité, certains affirmant que vous n’étiez pas Malien. Cela vous a-t-il touché ?

Oui, j’ai été touché. Qu’il y ait des personnes qui spéculent sur ma nationalité, c’est étonnant. Je pense qu’en tant que joueur nous sommes libres de jouer où nous voulons. Mais, dans toutes les histoires, il y a de bonnes et de mauvaises personnes. Certains ont essayé de me créer des problèmes, d’autres, comme mon manager, m’ont soutenu, ce qui a permis de dénouer la situation. Je les remercie pour cela.

Le Mali remporte la CAN-U20

Une nouvelle fois sur le toit de l’Afrique. Après deux trophées de champion d’Afrique U-17 (2015,2017), le Mali s’est offert le premier de son histoire en junior. Les Aiglons sont venus à bout du Sénégal au terme d’une rencontre qui s’est décidée aux tirs aux buts.

Face à une équipe qui les avait battus en match de poule, les joueurs de Mamoutou Kané ‘’Mourlé sont bien entrés dans le match. En pressant bien et en mettant beaucoup d’impact, le Mali a longtemps empêché les Lionceaux du Sénégal de développer leur jeu. Très appliqué à la récupération, et porté offensivement par le talent d’El Bilal Touré et d’Hadj Dramé, les Aiglons vont ouvrir le score juste après le premier quart d’heure. A la 16ème minute, à la suite d’un centre, Boubacar Traoré contrôle bien le ballon, crochète tout en lucidité avant de marquer. Les Sénégalais, pourtant si brillants jusque-là dans la compétition ont eu toutes les peines du monde à se créer des occasions durant la première mi-temps.

En seconde période, les U20 Maliens, toujours plus entreprenants auraient pu marquer un deuxième but, et tuer les rares velléités de révolte sénégalaise. Il n’en a rien été. Les Aiglons ont vendangé. L’excellent El Bilal Touré butant sur le gardien sénégalais, bien sorti dans ses pieds, ou encore Boubacar Traoré voyant sa belle frappe tendue passée près des buts sénégalais. A force, le Mali a fini par se faire punir. Boosté par leurs nouveaux entrants, le Sénégal est revenu dans la partie. D’un retourné Amadou Dia Ndiaye a remis les deux équipes à égalité, après une frappe d’un de ses coéquipiers détourné par le gardien malien.

Mis en confiance par ce but et face à une équipe malienne lessivée par la débauche d’énergie, le Sénégal pousse pour passer devant au score. Mais les incursions sénégalaises sont repoussées par une belle défense malienne, qui résiste en dépit de la fatigue et qui tient bon jusqu’aux tirs aux buts. Trois des cinq tireurs sénégalais manquent leur tentative, envoyant le Mali sur trôner sur l’Afrique. Une belle victoire et une belle revanche pour le Mali et son entraineur. Critiqué pour avoir laissé sur le quai Abdoul Salam Ag Jiddou, un des plus grands talents, et pour son jeu, Mourlé est tout de même allé au bout de ses idées. Préférant pragmatisme et efficacité à un jeu léché et spectaculaire. En chiffres, le Mali a encaissé quatre buts et en marqué autant dans cette compétition. A « l’italienne ».