Kidal : Regain de violence avant le retour de l’administration malienne

La région de Kidal renoue avec les affrontements intercommunautaires qui se sont soldés par des affrontements entre groupes armés jeudi 6 juillet dans la région de Kidal.

Tout est parti de la localité de Djounhan dans la région de Kidal, le mois de juin dernier. Ce jour-là, des éléments de la tribu Idnane très proche de la Coordination des Mouvements de l’Azawad ont attaqué des Imghads, très proche de la Plateforme et particulièrement du GATIA. Ce fut le début de multiples exactions commises de part et d’autre. Les images qui avaient circulé sur les réseaux sociaux, et ce, malgré le mois de Ramadan, témoignaient de leurs violences et des manifestes violations des droits de l’Homme.

Après une courte trêve, les affrontements entre la CMA et le GATIA ont repris, hier jeudi 6 juillet, aux environs de 5 heures du matin dans la localité d’Ibdakane, située à 80 kilomètres à l’ouest de Kidal.

Ce que l’on sait

Tout serait parti d’une embuscade tendue par des éléments de la CMA visant un certain Ahmedou Ag Asriw et ses hommes, qui serait, selon nos informations, un financier du GATIA et un trafiquant de drogue notoire, responsables de nombreuses exactions sur la population de la région. 14 véhicules du GATIA seraient tombés dans l’embuscade tendue par les 11 véhicules de la CMA. Après d’âpres combats, Le GATIA renforcé par l’arrivée de 15 véhicules est parvenu à contraindre les combattants de la CMA à se replier vers le sud-est, à Intachdayt. À l’issue de ce énième affrontement de l’année, des pertes en vie humaine et des dégâts matériels ont été enregistrés. Selon des sources à la CMA, le bilan provisoire de ces combats se porterait, côté CMA, à 1 mort et six blessés, qui ont été transportés à Kidal le même jour. Côté GATIA, on dénombrerait six morts, laissés sur place avec deux véhicules, dont un, avec une 12,7 (mitrailleuse lourde). Le GATIA se serait retiré à Tibardjaten, à environs 65 kilomètres au sud d’Anefif pour attendre l’arrivée des renforts en provenance de Gao, au moins dix (10) vehicules et Takalot au moins quatorze (14) autres. L’accrochage selon le chef d’Etat major du HCUA, Chafagui Ag Bouhada, a duré au moins trois heures de temps. « Ce qui se passe entre la Plateforme et la CMA ne date pas d’aujourd’hui mais les affrontements ne concernaient que les groupes armés. Les civils jusque-là épargnés ne le sont plus, car ils sont la cible des exactions », a-t-il souligné.

Des versions qui différent

Selon Ilad Ag Mohamed, porte parole de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), «  une patrouille de la CMA était dans la zone d’Ibdakane pour aller constater les dégâts causés par Ahmoudou Ag Asriw. Elle était partie pour rassurer les populations, car elles pensent qu’elles sont abandonnées à leur sort. Cette colonne a rencontré Ag Asriw et ses hommes et les affrontements ont commencé », justifie le porte parole de la CMA.

Dans le camp du GATIA, on affirme que c’est la CMA qui a attaqué, alors que leurs éléments étaient désarmés. «  Nos combattants qui ont été désarmés il y a trois jours par Barkhane ont été attaqués par la CMA. Donc nous disons qu’il y a connivence entre Barkhane et la CMA pour nous attaquer », affirme cette personnalité proche du GATIA. Le bilan diverge de part et d’autre, car selon notre interlocuteur, le GATIA a enregistré 1 mort et trois blessés, et la CMA a laissé sur ses positions trois morts et trois véhicules récupérés par le GATIA.

Selon des dernières informations, chaque groupe a fait appel à des renforts et la situation reste très préoccupante dans la zone.

La CMA a publié un communiqué, le 06 juillet, dans lequel elle informe la Médiation Internationale, le gouvernement du Mali, l’opinion nationale et internationale d’une attaque menée ce même jour dans la matinée « contre une de ses positions basée à une dizaine de kilomètres à l’ouest d’Intachdayt, par une colonne du Gatia venue d’Anefif sous la conduite d’un certain Akhmadou Ag Asriw.» Dans ce même communique, la CMA «  regrette et condamne cette violence qui lui est imposée depuis le début du processus de Paix par une organisation qui ne s’est jamais inscrite dans la logique de la Paix. » Toutefois la CMA «  demeure attachée à l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger et au cessez-le-feu » poursuit le communiqué.

De son côté, la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 d’Alger a publié un communiqué le même jour, dans lequel elle informe le chef de file de la médiation internationale, le représentant spécial du secrétaire général de Nations Unies à Bamako, les autorités du Mali et toutes les parties prenantes à l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger du fait que «  le 06 juillet 2017 à l’aube, une patrouille de la Plateforme a été la cible d’une embuscade de la part d’un autre convoi de la CMA qui quittait Kidal, à Tahalte, 90 kilomètres au nord-ouest de la ville ». Au même communiqué d’avertir que « si aucune disposition n’est prise pour abréger les souffrances des populations, elle ne pourra continuer à croiser les bras face à cette situation » précise le communiqué.

La MINUSMA elle aussi, dans un communiqué a condamné ce qu’elle considère comme des « violations de l’Accord de paix et des résolutions du Conseil sécurité. » Des violations qui pourraient être une réelle menace pour la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale. « Si elles persistent, elles affecteront non seulement la mise en œuvre de l’Accord de paix, profitant ainsi au terrorisme pour gagner davantage du terrain » a souligné Mahamat Saleh Anadif, le chef de la MINUSMA.

Selon d’autres sources bien introduites ces affrontements viseraient à perturber, une fois de plus, le chronogramme de l’installation du MOC le 20 juillet prochain et des autorités intérimaires, le 31 juillet, dans cette région qui échappe depuis plusieurs années à la souveraineté de l’État et où se croisent, groupes armés, djihadistes et trafiquants de drogues.