Suspension des cours : Une mesure diversement accueillie

Face aux perturbations dans l’approvisionnement en carburant, les ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur ont annoncé la suspension des cours du 27 octobre au 9 novembre 2025. Une mesure exceptionnelle qui suscite des réactions mitigées au sein de la communauté éducative.

Le communiqué conjoint publié le 26 octobre 2025 par les ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a mis fin aux rumeurs : les cours sont suspendus sur toute l’étendue du territoire national jusqu’au dimanche 9 novembre inclus.

« Les cours reprendront le lundi 10 novembre 2025 », précisent les deux départements ministériels, qui justifient cette décision par « les perturbations dans l’approvisionnement en carburant qui affectent les mouvements des acteurs de l’école ».

Depuis plusieurs jours, la rareté du carburant a fortement entravé la mobilité, à Bamako comme à l’intérieur du pays. Un grand nombre d’élèves et d’étudiants peinent à se rendre dans leurs établissements, tandis que des enseignants se retrouvent bloqués à plusieurs kilomètres de leur lieu de travail.

« Il devenait pratiquement impossible d’assurer la régularité des cours, surtout dans les établissements éloignés de la ville », souligne un responsable scolaire de Ségou, saluant une mesure « réaliste dans les circonstances actuelles ».

Cependant, d’autres acteurs du secteur éducatif craignent un nouvel allongement du calendrier académique. « On venait à peine de retrouver un rythme normal après les retards de la rentrée. Deux semaines d’interruption, c’est un vrai défi pour achever les programmes à temps », alerte Adama Diarra, enseignant dans un lycée de Bamako.

Les parents d’élèves, quant à eux, oscillent entre compréhension et appréhension. « On comprend que les conditions ne sont pas réunies pour continuer les cours, mais on espère que le gouvernement tiendra sa promesse de réaménager le calendrier afin que les enfants ne soient pas pénalisés », plaide Mamadou Keïta, un parent.

Le communiqué précise en effet que des dispositions sont en cours pour réaménager les calendriers scolaire et universitaire afin d’assurer la continuité pédagogique et l’exécution des programmes. Les autorités affirment par ailleurs tout mettre en œuvre pour un retour rapide à la normale dans l’approvisionnement en carburant.

En attendant, les établissements scolaires et universitaires sont contraints de fermer leurs portes, plongeant des milliers d’élèves et d’étudiants dans l’incertitude. Cette suspension, bien qu’annoncée comme temporaire, illustre une fois de plus la vulnérabilité du système éducatif national face aux crises conjoncturelles qui continuent de perturber son fonctionnement régulier.

Mohamed Kenouvi

Rentrée scolaire : Entre difficultés économiques et déficit en enseignants

Le 1er octobre 2025 marque la reprise des cours sur l’ensemble du territoire malien. L’annonce, faite par le ministère de l’Éducation nationale le 3 septembre, intervient dans un contexte tendu, où les familles et les enseignants font face à des obstacles majeurs.

À Bamako comme en régions, les préparatifs sont loin d’être à la hauteur des attentes. Dans plusieurs écoles, l’administration et les Comités de gestion scolaire (CGS) assurent l’essentiel, mais la fréquentation des parents reste faible. Beaucoup retardent l’inscription faute de moyens financiers. Certains recourent même à des crédits bancaires pour payer fournitures et frais scolaires. Dans certaines zones reculées, la situation est encore plus préoccupante, les établissements n’ayant pas reçu à temps les manuels scolaires ni les fournitures pédagogiques de base.

Les difficultés ne s’arrêtent pas là. Le Système intégré de gestion des ressources humaines (SIGRH) a placé en détresse 36 151 fonctionnaires, dont environ 5 000 enseignants concernés par des problèmes d’identification. La fusion de plusieurs directions scolaires dans des établissements, comme le groupe Marie Diarra d’Hamdallaye, a aussi pesé sur les préparatifs. « Avec la démoralisation liée au SIGRH, il y a un vrai risque de perturbations, malgré les compromis entre syndicats et gouvernement », confie Odiouma Sinayoko, professeur dans cet établissement. Les syndicats enseignants ont d’ailleurs réitéré leur appel à une régularisation rapide, soulignant que l’instabilité du personnel compromet directement la qualité de l’enseignement dès les premières semaines.

D’autres responsables affichent néanmoins plus d’optimisme. Aïchatou Camara, Directrice du groupe scolaire Mamou Goundo Simaga à Badalabougou, souligne que son école dispose des outils pédagogiques nécessaires grâce au fonds ADARS et à l’appui du CGS. Le Président du CGS local, Oumar Aboubacar Coulibaly, évoque des efforts d’entretien (désherbage, réparation des bancs, renoircissage des tableaux), mais regrette que « seuls deux à cinq parents par jour viennent inscrire leurs enfants », un chiffre insuffisant à la veille de la rentrée.

Au-delà des difficultés logistiques, l’insécurité continue d’aggraver la crise éducative. De nombreux enfants sont déscolarisés ou réfugiés avec leurs familles. Selon le rapport du Cluster Éducation Mali (juin 2025), 610 800 élèves et 12 216 enseignants restent directement touchés par la fermeture de près de 20% des écoles du pays.

Ce constat illustre un défi de taille, celui de garantir à chaque enfant son droit fondamental à l’éducation malgré la pauvreté et les violences. Comme le rappelait Nelson Mandela, « détruire un pays n’a pas besoin d’utiliser les armes, il suffit de priver ses enfants d’éducation ».

Ali Sankaré