Centrafrique: bavure des soldats tchadiens à Bangui, l’ONU condamne

Ils étaient venus pour assurer la protection des ressortissants tchadiens dans la capitale centrafricaine et les rapatrier. Leur descente sur un marché de Bangui restera l’incident le plus grave impliquant des troupes étrangères dans le pays. 30 morts et 300 blessés « Dès que le convoi de l’armée nationale tchadienne a atteint la zone de marché du (quartier) PK12, ils auraient ouvert le feu sur la population sans qu’il y ait eu de provocation », a déclaré à  Genève un porte-parole de l’ONU aux droits de l’Homme, Rupert Colville, présentant aux médias les premiers résultats des enquêteurs des Nations unies sur l’incident. « Alors que les gens fuyaient dans la panique dans toutes les directions, les soldats ont continué à  tirer de façon indiscriminée. Pourquoi ont-ils commencé à  tirer ? Ce n’est pas clair », a-t-il indiqué. Il semble que les tirs aient cessé lorsque des troupes congolaises sont arrivées, a-t-il dit. Selon les premiers résultats de l’enquête, au moins 30 personnes ont été tuées et au moins 300 autres blessées, dont des enfants, des handicapés, des femmes enceintes et des personnes âgées. Précision de taille, donnée par M. Colville, les soldats tchadiens impliqués étaient des membres de « l’armée tchadienne », et non pas de la force africaine en Centrafrique (Misca). Selon les informations recueillies par les enquêteurs de l’ONU, « il semble que l’action des forces tchadiennes a été totalement disproportionnée, puisqu’ils ont tiré sur un marché bondé de civils non armés », a insisté le porte-parole qui a également estimé que le nombre de soldats tchadiens impliqués ne devait pas être très élevé et que ces individus « avaient dû repartir directement » dans leur pays. Acteur clé de la crise centrafricaine et incontournable puissance régionale, le Tchad a claqué jeudi la porte de la Misca, dénonçant une « campagne malveillante » contre ses soldats, à  nouveau mis en cause après avoir tué des civils le 29 mars à  Bangui.

RCA : un an après Bozizé, toujours le chaos…

On lui reprochait sa mauvaise gestion du pays et son incapacité à  résoudre les conflits sociaux. Après avoir menacé plusieurs semaines durant de rentrer dans la capitale, les rebelles de la Seleka, menés par Michel Djotodia, renversaient Fançois Bozizé. Le pays venait de traverser quatre mois de combats, entrecoupés de cessez-le-feu. Avec la chute du régime commençait une période de transition de dix mois, qui devait aboutir à  des élections dont étaient exclues les parties prenantes. Mais C’’est plutôt une période marquée par l’instabilité chronique qui s’est ouverte. De mars à  juin les exactions se multiplient, la situation dégénère en conflit intercommunautaire. La Seleka, assemblages de rebelles nordistes, de mercenaires tchadiens et soudanais, multiplie les massacres, les viols et les pillages. Michel Djotodia ne parvient pas à  imposer sa volonté à  la Seleka qui l’a propulsé au pouvoir. Dépassé, sans aucune prise sur les évènements, Michel Djotodia est poussé vers la sortie par la France et les pays de la région. Sa démission est remise le 10 janvier à  Ndjamena au cours du sommet extraordinaires de la CEAC. Il est remplacé par la maire de Bangui, Catherine Samba Panza. La peur et la haine, au quotidien La «haine entre communautés demeure à  un niveau terrifiant» en Centrafrique, o๠il n’existe plus d’Etat pour arrêter les criminels qui agissent en toute impunité, s’est alarmée jeudi dernier à  Bangui la haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Navi Pillay. La situation de quasi-guerre civile dans le pays ne s’améliore pas, malgré la présence de troupes étrangères, ayant pour mandat de maintenir la sécurité et contenir les groupes armés qui s’affrontent depuis plus d’un an maintenant. «Bien que les tueries à  grande échelle qui ont eu lieu en décembre et janvier paraissent être arrêtées pour le moment, principalement en raison de la présence des forces africaine Misca et française Sangaris, des personnes continuent d’être tuées quotidiennement», poursuit Navi Pillay au cours d’un point de presse, évoquant particulièrement les milices majoritairement chrétiennes anti-balaka qui «se métamorphosent en gangs criminels». «C’’est devenu un pays o๠des personnes sont non seulement tuées, mais aussi torturées, mutilées, brûlées et démembrées», s’est-elle indignée, indiquant que «les viols et violences sexuelles ont augmenté, spécialement dans les camps des personnes déplacées». La Misca, Sangaris et les agences humanitaires sont confrontées au terrible dilemme de choisir entre aider involontairement au « nettoyage » des populations musulmanes piégées, ou alors les laisser – contre leur volonté – dans des lieux o๠il y a un réel danger de les voir exécutées en masse. Mme Pillay appelle au retour de l’Etat, qui de l’aveu même de dirigeants centrafricains n’existe plus. «Il n’y a pas d’armée nationale cohérente, ni de police, ni de système judiciaire, pratiquement pas de lieux de détention des criminels», une situation qui n’augure pas d’une fin prochaine de l’état de non-droit actuel.

Maliens de Bangui: la vague continue

Le centre d’accueil des rapatriés de la protection civile accueille ces personnes depuis l’arrivée du premier vol le 6 janvier dernier. « Nous avons beaucoup de difficultés ici. Les personnes qui sont arrivées avec le 3e et le 4e vol n’ont pas tous pu bénéficier de couverture. Je trouve cela très grave car les gens ont été obligés de dormir dehors avec le froid sans couverture » s’indigne Djédy Sylla, malien né à  Dar Salam, un quartier de Bamako. Le manque de couverture s’explique selon le directeur du centre d’accueil Nouhoum Coulibaly « nous avions prévu 500 couvertures puisqu’initialement, C’’était l’arrivée de ce nombre de personnes qui était prévue finalement on se trouve avec plus de 1 000 personnes ». D’autres nationalités ont pu être ramenées grâce à  ce quatrième vol, C’’est le cas d’Aliou Bila Diankado un Centrafricain. « Je me suis enregistré au consulat du Sénégal o๠les Maliens ont organisé l’évacuation de leurs ressortissants. Mes parents ont été tués, J’ai tout perdu. Avec la guerre en Centrafrique, je voulais quitter ce pays. Maintenant, je voudrais regagner le Sénégal puisque J’ai des parents là  bas. Mais pour le moment, je ne sais pas comment faire pour y aller » explique-t-il. Quatre burkinabé, 24 Sénégalais et 6 Gambiens ont pu être identifiés. Ils ont tous été accueillis à  l’aéroport par les représentants de leurs pays au Mali. Leur cas sera géré selon ce qui est prévu, ainsi leur rapatriement vers leurs pays d’origine pourra être organisé. De nombreux Maliens, parmi ces rapatriés sont nés et ont grandi en Centrafrique, C’’est le d’Hussein Diabaté, « je ne sais pas o๠se trouve ma famille, nous sommes en train d’effectuer les recherches. Cependant, la difficulté que J’ai C’’est que les responsables du centre m’avaient demandé de quitter. Je leur ai expliqué que je ne pourrai pas quitter du jour au lendemain. Mons souhait est que le gouvernement nous trouve un logement en attendant que je retrouve ma famille et que je décroche un emploi » raconte-t-il, les yeux rougis par des nuits blanches. Des difficultés pour se loger « Si je pense que ces gens là  ont quitté l’enfer et ici encore, ils sont en train de vivre un autre enfer, cela me rend très triste. Moi-même J’étais en Centrafrique, je suis arrivé par le premier vol. Actuellement, je vis chez mon frère, nous sommes huit à  dormir dans la même chambre mais cela n’est pas grave en soi. Ce qui est important C’’est de retrouver sa famille. Un monsieur est ici, sa famille est venue le récupérer hier, soir mais il a du retourner car cette dernière dit ne pas disposer d’assez de places pour le garder avec ses deux filles et son épouse » relate Amadou Tiocary. Ce monsieur d’une quarantaine d’années dont parle Amadou Tiocary, n’a pas voulu se prêter à  nos questions, il a secoué la tête à  la question de savoir s’il voulait parler. De nombreux cas sont constatés sur le terrain. Les jeunes, pour se soutenir entre eux, et oublier les douleurs vécues en RCA, font du thé et se racontent des blagues. Souvent ce sont plutôt des souvenirs douloureux qui reviennent malgré tout. « Il s’est passé beaucoup de choses cruelles. Même les raconter est traumatisant » se remémore Amadou Tiocary. La récupération des bagages est une étape avant que certains puissent retrouver leurs familles ou même rester au centre d’accueil en attendant. « Chacun dispose d’un numéro inscrit sur son laissez-passer, C’’est grâce à  cela que les bagages sont délivrés. Certains ne disposent pas de numéro, dans ces cas là , une vérification est effectuée et la personne qui arrive à  identifier ce qui se trouve effectivement dans le bagage en question sera en possession de celui-ci » explique Nouhoum Coulibaly, directeur du centre d’accueil des rapatriés de la protection civile. D’autres vols pourront être affrétés pour ramener des Maliens à  Bamako. Il est à  noter qu’environ 2000 autres Maliens sont en Centrafrique. Ceux de la capitale Bangui se sont réfugiés dans le consulat du Sénégal, d’autres vivent dans des provinces du pays.

RCA: Djotodia parti, retour mitigé de l’espoir

Vendredi 10 janvier. Après avoir démenti quelques heures plus tôt la rumeur faisant état de sa démission, le président de la transition centrafricaine annonce qu’il renonce » au pouvoir pour permettre à  son pays de sortir de la crise qui dure depuis quelques semaines et a déjà  fait des milliers de morts. Dès la fin du sommet de N’Djamena (Tchad) Djotodia a pris la direction du Bénin, dans un avion affrété par la présidence tchadienne. Dans ce pays, il ne sera guère dépaysé, y ayant vécu des années et épousé une béninoise. Après la fête, les interrogations Quelques minutes après l’annonce par RFI de l’information, c’est d’abord la peur , le sentiment le mieux partagé à  Bangui. C’est la débandade, les commerçants ferment boutique, les parents ramènent leurs enfants à  l’intérieur des maisons. Mais ce sentiment est de courte durée. S’en suivront rapidement des scènes de liesse, mais elles ne sont pas très nombreuses. Pour la plupart des centrafricains, « tant que la Séléka est en ville et armée, ce n’est pas encore la joie. C’est juste le soulagement… » dira Hippolyte à  un journaliste de l’AFP. Pas vraiment entendu parler de la Séléka, même si quelques exactions ont encore eu lieu ça et là . On se surprend donc, dans les rues de Bangui, de Bossangoa et d’ailleurs, à  espérer. Un nouveau président dans 15 jours, situation encore tendue Pour mener les consultations et doter le pays d’un nouvel exécutif, un homme aura la tâche difficile. Il s’agit de Alexandre-Ferdinand Nguendet, président du Conseil national de transition, qui assure l’intérim. Les parlementaires disposeront de quinze jours pour trouver un successeur à  Michel Djotodia, mais les parrains de la région et la France les poussent à  choisir au plus vite. Plusieurs noms circulent à  Bangui, mais il est encore trop tôt pour déterminer celui qui sera chargé de mener le pays à  de nouvelles élections. En attendant, il faut trouver une solution au problème sécuritaire. De nouvelles violences et des pillages ont eu lieu ce week-end en plusieurs points de la capitale. Les ressortissants étrangers, et particulièrement ceux de confession musulmane, continuent de fuir le pays, o๠ils continuent d’être pris à  partie par les populations. Les chrétiens ne sont pas non plus à  l’abri. Dans l’église évangélique des Frères, devenue un camp de réfugiés, Pierrot, lui, ne veut plus entendre parler de cohabitation. « Ils viennent nous demander pardon avec des armes dans le dos. Les musulmans balancent des grenades dans les maisons. Ils ont incendié ce matin mon domicile », grogne ce diplômé en linguistique recyclé en couturier. Dans le centre de santé qui jouxte le site de l’église, à  16 heures, le personnel avait déjà  recensé 36 blessés et 8 morts, certains touchés par des éclats de grenade dans l’enceinte même de l’hôpital. Le président par intérim Nguendet semble vouloir faire évoluer la situation. Il a prononcé le soir même de son retour de N’Djamena, un discours solennel à  la Nation, appelant chacun à  déposer les armes. Il s’est ensuite rendu dimanche au tribunal de grande instance de Bangui, o๠la Cour constitutionnelle de transition en manteaux d’hermine a pris acte de la démission de son prédécesseur et l’a chargé de procéder à  la nomination de son successeur. Puis, il a rendu visite aux 150.000 déplacés entassés depuis un mois à  l’aéroport M’Poko, leur garantissant la sécurité et les appelant à  rentrer chez eux.

Centrafrique : démission du président Michel Djotodia

Le Président de la transition centrafricaine, Michel Djotodia ne démissionnera pas, avait démenti la présidence par la voix de son porte-parole, Kodegue Guy Simplice, lorsque l’info circulait il y a quelques jours. Annoncé pour hier, c’est finalement aujourd’hui que les premiers responsables de la RCA ont présenté leur démission. Les chefs d’Etat de la Communauté économique des à‰tats de l’Afrique Centrale (CEEAC) étaient réunis depuis hier en sommet extraordinaire à  N’Djamena pour évoquer son départ. Les tractations se sont tenues jusqu’à  4 heures, entre les membres du Conseil national de transition centrafricain (CNT), des proches du chef de l’Etat centrafricain issus de l’ex-rebellion Séléka qui a pris le pouvoir à  Bangui en mars, et des représentants de milices antibalaka, hostiles à  Michel Djotodia, président par intérim auto-proclamé depuis le 24 mars 2013. La communauté internationale reproche au président de ne pas avoir mis fin aux violences inter religieuses et aux exactions dans son pays. Aujourd’hui, l’objectif est de rétablir l’ordre dans le pays et d’organiser le plus rapidement possible des élections qui permettront de rétablir la paix. Aux cris de « Djotodia démission », plusieurs milliers d’habitants de Bangui manifestaient vendredi aux abords du quartier de Boy-Rabe, non loin de l’aéroport, sous la surveillance de soldats français et de la force africaine (Misca). En début d’après-midi, au moins quatre chars français de type Sagaie ont pris position près du palais présidentiel à  Bangui. Le camp De Roux, o๠est cantonnée la garde de M. Djotodia depuis le début de l’opération française Sangaris le 5 décembre, se trouve non loin du palais présidentiel et de nombreuses armes lourdes y sont entreposées.

267 Maliens de Centrafrique arrivent à Bamako

Les Maliens venus de Bangui étaient accompagnés par l’ambassadeur du Mali au Gabon. « Nous sommes heureux d’accompagner ces Maliens, qui pour la plupart ne connaissent que la Centrafrique comme pays d’accueil. Aujourd’hui ils sont comme des réfugiés au Mali, dans cet avion il y a trois générations, ils sont âgés de 1 à  102 ans » révèle Diadié Yacouba Dagnoko, ambassadeur du Mali au Gabon. Maà¯mouna Diallo vêtue d’un ensemble wax, s’avançait avec ses deux petites filles, les yeux hagards, la dame semble pensive. « Je vis à  Bangui il y a de cela trente ans, nous n’avons jamais eu de problème là  bas. Aujourd’hui, la guerre nous a obligés à  quitter ce pays. A ma connaissance, un Malien a perdu la vie, il a été tué par les anti-balakas » témoigne-t-elle. Les 267 personnes ont quitté l’avion d’Ethiopian Airlines affrété pour l’occasion. Essentiellement des femmes et des enfants étaient dans ce vol. Ils sont maintenant arrêtés sur le tarmac et attendent les instructions. Des fiches en main, avec mention des civilités, une photo collée dessus et un tampon qui marque la date du 5 janvier. Deux cars les attendent pour les amener à  la protection civile afin qu’ils puissent s’y reposer et recevoir de quoi manger jusqu’au lendemain. Dès ce mardi, « des dispositions seront prises pour les accompagner dans leurs villages d’origine ou encore chez leurs parents respectifs selon les lieux o๠ces derniers se trouveront » explique Abdramane Sylla, ministre des Maliens de l’extérieur. Ce rapatriement a été organisé par le ministère des Maliens de l’extérieur en collaboration avec l’ambassade du Mali au Gabon qui s’est occupé du recensement et du rassemblement des personnes concernées. Il est à  signaler que le Mali ne possède pas de représentation diplomatique en Centrafrique, les Maliens vivant là  bas relèvent donc de l’ambassade du Mali au Gabon. Un autre avion devrait atterrir mardi 07 janvier 2014 à  Bamako transportant 267 autres Maliens. Environ 2 000 (deux mille) autres Maliens se trouvent aujourd’hui en Centrafrique, selon le ministre des Maliens de l’extérieur, Abdramane Sylla, « d’autres avions après celui de mardi seront affrétés pour pouvoir rapatrier le plus de Maliens de Bangui qui le souhaitent ». Les services de la protection civile ainsi qu’une équipe médicale étaient présents à  l’aéroport. Ils sont prêt à  évacuer les personnes qui auraient besoin de soins immédiats « C’’est la règle en cas de rapatriement, nous venons nous assurer de la bonne santé des arrivants. s’il y a des personnes dont létat nécessite des soins, nous les évacuons ou nous leur donnons les premiers soins sur place » raconte le médecin chef. à‚gée d’une quarantaine d’années, Hawa Cissé a atterri avec ses trois garçons. Ils ont entre 8 et 3 ans. « Je suis venue avec mes petits garçons. Leur père est resté là  bas, il a préféré nous faire sortir en premier, il viendra peut-être par un autre convoi. J’ai ma grande sœur ici, J’irai chez elle » confie-t-elle. Quant à  Ibrahima Sylla, visiblement touché par les conflits à  Bangui, il exprime son amertume « je suis dégoûté, les anti-balaka sont en train de tuer les gens en désordre, cela n’est pas pardonnable, ils sont cruels vraiment. De nombreuses personnes ont perdu la vie, les musulmans sont persécutés. Nous remercions le gouvernement malien d’avoir organisé ce rapatriement. Mais d’autres Maliens sont encore là  bas et souffrent beaucoup. Personne n’a nulle part o๠aller encore ». Ibrahima discute avec sa sœur, ils sont arrivés dans leur pays le Mali, leur pays d’origine. La plupart d’entre eux sont nés et ont grandi en Centrafrique, ils parlent la langue locale du pays et ne savent pas tous s’exprimer en bamanan, langue locale du Mali.

Bangui : « Sangaris » veut mettre fin aux exactions des chrétiens

L’opération française de sécurisation de la Centrafrique se poursuit. Après plusieurs jours à  patrouiller dans les rues de Bangui, sans vraiment réussir à  stopper les multiples exactions. Pour faire face à  ce climat d’insécurité chronique, « une opération militaire est en cours à  Boy-Rabe », a indiqué une source proche des français, sous couvert d’anonymat. Anti-balaka vs ex-séléka Sur la route menant à  l’aéroport (nord de Bangui), plusieurs véhicules blindés étaient déployés à  l’entrée du quartier, survolé par un hélicoptère. Dans le nord de la capitale centrafricaine, le quartier de Boy-Rabe est un fief de l’ancien président François Bozizé (renversé en mars 2013) o๠sont aujourd’hui basés de nombreux miliciens « anti-balaka », en lutte contre l’ex-rébellion de la Séléka (au pouvoir). A la faveur d’une vaste offensive coordonnée le 5 décembre sur plusieurs quartiers périphériques de Bangui, ces miliciens ont pris part à  nombreuses attaques contre des civils musulmans, qu’ils assimilent aux combattants de l’ex-rébellion Séléka, coalition à  dominante musulmane qui avait pris le pouvoir en mars 2013. Près de 1.600 militaires français sont actuellement déployés en Centrafrique, dans le cadre de l’opération Sangaris visant à  rétablir la sécurité dans le pays. Les soldats français avaient le 9 décembre dernier à  Bangui une vaste opération de désarmement des milices et groupes armés. Cette opération visait jusqu’à  présent essentiellement les combattants de l’ex-Séléka, seuls à  déambuler en armes dans les rues de la capitale. Milices paysannes d’auto-défense, les anti-balaka quant à  elles évoluent surtout en brousse et dans les quartiers périphériques de Bangui, o๠une grande partie de la population –chrétienne– leur est acquise. Leur armement est généralement très sommaires: vieux fusils, machettes et armes blanches.

Centrafrique: la voie étroite de Bozizé

« Flou et fluide »: voilà  comment un analyste français, familier du marigot banguissois, dépeint l’état des lieux en République centrafricaine, théâtre depuis le 10 décembre d’une vigoureuse offensive de la coalition rebelle du Séléka. A ses yeux, la chute de François Bozizé n’a rien pour l’heure d’inéluctable, mais la marge de manoeuvre du général-président apparaà®t plus étroite que jamais. « Les pays de la région ne se sentent pas tenus de le soutenir à  tout prix ou de lui sauver la peau, avance-t-il. Ils souhaitent favoriser un processus de négociation qui pourrait le cas échéant permettre à  Bozizé d’aller au bout de son mandat. Mais à  condition d’entreprendre des réformes de fond et d’ouvrir son gouvernement à  toutes les familles de l’échiquier politique. En clair, il lui faut consentir à  diriger autrement et à  partager le pouvoir ». Le Tchad, un parrain ambigu… Thèse professée notamment par le Tchad, parrain traditionnel du tombeur d’Ange-Félix Patassé, parvenu au pouvoir en 2003 au prix d’un coup d’Etat. Un parrain irritable au demeurant, voire ambigu: N’Djamena ne fait pas mystère de l’exaspération que lui inspirent son protégé et son incapacité à  sécuriser son territoire, base arrière de quelques factions insurgées hostiles au chef d’Etat tchadien Idriss Déby Itno. Les renforts dépêchés par ce dernier aux abords de Bangui ont d’ailleurs reçu pour instruction de ne pas intervenir. De même, le contingent additionnel de la Fomac -Force multinationale d’Afrique centrale-, qui devrait être déployé sous peu, a vocation à  s’interposer entre les belligérants, non à  épauler les Forces armées locales, ou Faca. Il s’agit dans l’idéal de figer le paysage militaire, histoire de donner quelque chance de succès aux négociations « sans délai ni conditions » censées s’ouvrir sous l’égide de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC). On en est encore loin : hier, d’intenses combats ont opposé les Faca aux Séléka à  Bambari, ville située à  300 km au nord-est de la capitale et conquise le 23 décembre par la rébellion. A l’évidence, « Boz » peine à  actualiser son logiciel politico-militaire. Il table encore, à  titre d’exemples, sur le concours de troupes congolaises ou la livraison d’hélicoptères de combat angolais. De même, son appel au secours lancé aux  » cousins  » français dénote de la persistance, chez lui, d’une lecture un rien anachronique du paysage postcolonial. « Le vent a tourné » pour Bozizé Jeudi après-midi, lorsque le patron du Quai d’Orsay Laurent Fabius l’a joint par téléphone, sans doute espérait-il un tout autre discours que celui auquel il eut droit: un ferme rappel à  l’ordre relatif, notamment, à  l’assaut sur l’ambassade de France par des  » patriotes  » acheminés et payés par le régime. « Il faudra bien qu’il comprenne que le vent a tourné », insiste un diplomate de haut-rang. La compagnie parachutiste -soit 150 soldats- arrivée hier de Libreville (Gabon) n’a d’autre mission, insiste-t-on à  Paris, que d’épauler les 250 hommes stationnés sur la base M’Poko de l’aéroport de Bangui, appelés si besoin à  assurer la protection des ressortissants français. Sur les bords de Seine, on veut croire que le Séléka n’envisage pas d’attaquer la capitale, mais plutôt de l’encercler afin de fragiliser, par le jeu des défections, l’ossature sécuritaire du clan Bozizé. « Cela posé, admet un expert, nous manquons de renseignements sur cette insurrection. Même si, à  en croire les témoignages recueillis sur place, la plupart d’entre eux ne parlent ni le français ni le sango -langue dominante en RCA-, mais l’arabe. » De quoi étayer la rumeur selon laquelle des supplétifs étrangers, notamment soudanais, combattraient au côté des opposants centrafricains. Joint ce samedi, un colonel de gendarmerie centrafricain soutient que « le calme règne à  Bangui ». « Les gens vaquent à  leurs occupations et les commerces fonctionnent, précise-t-il. Il y a même des mariages célébrés tout à  fait normalement ». Il n’empêche : comme l’atteste une dépêche de l’AFP, le prix des denrées de base tend à  flamber au marché central, et la peur s’instille dans les esprits.

Que se passe-t-il en Centrafrique?

Enclavée au C’œur de l’Afrique centrale, la République centrafricaine est l’un des pays les plus pauvres du monde, malgré ses richesses potentielles, minières et agricoles. Ses cinq millions d’habitants ont subi le règne de l’empereur Jean-Bedel Bokassa de 1965 à  1979, marqué par ses frasques et ses exactions, dont le massacre d’écoliers en janvier 1979. Arrivé au pouvoir par la force en 2003, le président centrafricain François Bozizé voit son autorité contestée par la rébellion du Séléka (« alliance » en sango, la langue nationale), qui a pris les armes depuis le 10 décembre. Mardi, Kaga Bandoro a été le quatrième chef-lieu de préfecture du pays a être attaqué et occupé par la rébellion après Ndélé (nord), Bria (centre) et Bambari (centre-sud). Bien que la rébellion ait assuré qu’il n’était pas dans son intention de conquérir la capitale, François Bozizé a appelé, jeudi 27 décembre, la France et les Etats-Unis à  l’aider à  la stopper. Les armes pour réclamer la paix En 2003, le général François Bozizé renversait Ange-Félix Patassé, élu dix ans plus tôt. Trois ans après, les rébellions de l’Armée populaire pour la restauration de la République et la démocratie (APRD) et de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UF se sont emparées de plusieurs localités du Nord-Est, dont Birao, reprises avec l’aide de la France et de ses Mirage F1. En 2010, la rébellion de la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP) est entrée dans Birao, reprise cette fois par l’armée tchadienne. Les trois rébellions avaient conclu sous l’égide du Gabon un « accord de paix global », prévoyant la démobilisation, le désarmement et la réinsertion des combattants. Le 10 décembre dernier, la coalition rebelle du Séléka, composée de factions dissidentes, prend les armes pour réclamer « le respect » de ces accords. Ils se sont rapidement emparés, dans le centre du pays, de la ville diamantifère de Bria, dans le sud, de la ville aurifère de Bambari et de Kaga Bandoro. Des renforts étrangers En face, l’armée régulière centrafricaine a opposé peu de résistance. Hier, François Bozizé a appelé à  l’aide Américains et Français. La France a déclaré qu’elle n’enverra pas de troupes à  Bangui mais a demandé aux deux parties de déposer les armes. Le Tchad a quant à  lui répondu positivement à  l’appel de Bozizé. Les renforts tchadiens campent aux portes de Bangui. Le contingent de l’armée tchadienne, doit servir de « force d’interposition », selon N’Djamena. Les Tchadiens, rompus au combat et plus lourdement équipés, pourraient être le dernier rempart contre une victoire des rebelles. N’Djamena, allié historique de François Bozizé, avait déjà  envoyé ses troupes en 2003 pour l’aider à  prendre le pouvoir. De son côté, la force multinationale d’Afrique centrale (Fomac), qui compte plusieurs centaines de militaires en Centrafrique, a annoncé jeudi matin l’envoi de nouvelles troupes. « Bangui est sécurisée au maximum par les troupes », mais « d’autres troupes vont arriver pour renforcer cette mission de sécurisation de Bangui », a déclaré à  la radio nationale le commandant de la Fomac, le général Jean-Félix Akaga. Il n’a toutefois donné aucun détail sur le nombre et la date d’arrivée de ces éventuels renforts.Cette force multinationale, mise en place en 2008, avait pour mission d’aider à  consolider la paix dans le pays miné par des années de guerres civiles et de nombreuses rébellions.