RCA : un an après Bozizé, toujours le chaos…

On lui reprochait sa mauvaise gestion du pays et son incapacité à  résoudre les conflits sociaux. Après avoir menacé plusieurs semaines durant de rentrer dans la capitale, les rebelles de la Seleka, menés par Michel Djotodia, renversaient Fançois Bozizé. Le pays venait de traverser quatre mois de combats, entrecoupés de cessez-le-feu. Avec la chute du régime commençait une période de transition de dix mois, qui devait aboutir à  des élections dont étaient exclues les parties prenantes. Mais C’’est plutôt une période marquée par l’instabilité chronique qui s’est ouverte. De mars à  juin les exactions se multiplient, la situation dégénère en conflit intercommunautaire. La Seleka, assemblages de rebelles nordistes, de mercenaires tchadiens et soudanais, multiplie les massacres, les viols et les pillages. Michel Djotodia ne parvient pas à  imposer sa volonté à  la Seleka qui l’a propulsé au pouvoir. Dépassé, sans aucune prise sur les évènements, Michel Djotodia est poussé vers la sortie par la France et les pays de la région. Sa démission est remise le 10 janvier à  Ndjamena au cours du sommet extraordinaires de la CEAC. Il est remplacé par la maire de Bangui, Catherine Samba Panza. La peur et la haine, au quotidien La «haine entre communautés demeure à  un niveau terrifiant» en Centrafrique, o๠il n’existe plus d’Etat pour arrêter les criminels qui agissent en toute impunité, s’est alarmée jeudi dernier à  Bangui la haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Navi Pillay. La situation de quasi-guerre civile dans le pays ne s’améliore pas, malgré la présence de troupes étrangères, ayant pour mandat de maintenir la sécurité et contenir les groupes armés qui s’affrontent depuis plus d’un an maintenant. «Bien que les tueries à  grande échelle qui ont eu lieu en décembre et janvier paraissent être arrêtées pour le moment, principalement en raison de la présence des forces africaine Misca et française Sangaris, des personnes continuent d’être tuées quotidiennement», poursuit Navi Pillay au cours d’un point de presse, évoquant particulièrement les milices majoritairement chrétiennes anti-balaka qui «se métamorphosent en gangs criminels». «C’’est devenu un pays o๠des personnes sont non seulement tuées, mais aussi torturées, mutilées, brûlées et démembrées», s’est-elle indignée, indiquant que «les viols et violences sexuelles ont augmenté, spécialement dans les camps des personnes déplacées». La Misca, Sangaris et les agences humanitaires sont confrontées au terrible dilemme de choisir entre aider involontairement au « nettoyage » des populations musulmanes piégées, ou alors les laisser – contre leur volonté – dans des lieux o๠il y a un réel danger de les voir exécutées en masse. Mme Pillay appelle au retour de l’Etat, qui de l’aveu même de dirigeants centrafricains n’existe plus. «Il n’y a pas d’armée nationale cohérente, ni de police, ni de système judiciaire, pratiquement pas de lieux de détention des criminels», une situation qui n’augure pas d’une fin prochaine de l’état de non-droit actuel.

Les putschs ne seront jamais la solution

Chinua Achebe vient de s’éteindre. Toute sa vie, il a rêvé, combattu à  travers son œuvre littéraire monumentale, pour l’avènement d’une Afrique libre, démocratique, unie et prospère. Son roman le plus connu, Le monde s’effondre, décrit la fin tragique d’un monde incarné par le suicide de son viril personnage, Okonkwo. Il y a une similitude frappante entre la tragédie qui frappe Okonkwo (ascension, exil et suicide) et la chute politique de François Bozizé. Malgré l’apparence de robustesse qu’offrait, à  première vue, le régime Bozizé, il a suffi de quelques heures de «combats» avec les rebelles de la Séléka, pour que le monde du dictateur putschiste, démocrate de façade, s’effondre. On avait vite compris, après le report de la visite du médiateur, Sassou Nguesso, et de son homologue du Tchad, Idriss Déby, à  Bangui, que le glas avait sonné pour Bozizé. Les fameux accords de Libreville se révèlent finalement comme un compromis politique pourri qui a tenté de maintenir en place le système dictatorial de Bozizé. Ces accords politiquement pathogènes sont devenus mortels pour la Centrafrique elle-même. Et Bozizé a voulu se servir de ces accords pour se protéger, au lieu de les utiliser pour servir la cause de la paix et de la démocratie. Un pays maudit A l’origine de l’histoire politique centrafricaine, il y a cet étrange sentiment d’un pays maudit. Et le peuple centrafricain fait ici figure de peuple déchu. Comme si ce pays avait inscrit sa propre existence dans une histoire immuable, pour ne pas dire immobile. Comment comprendre que depuis son indépendance en 1960, ce pays soit en proie à  des rébellions sporadiques qui se terminent toujours par des coups d’Etat? A tel point que ce pays est devenu, de nos jours, un objet d’effroi et de dégoût. On a même l’impression qu’ici, politique rime avec satanisme, C’’est-à -dire qu’elle équivaut à  une violence démonologique permanente. Car la société centrafricaine est une société o๠les individus, de manière hobbienne, se font la guerre en permanence. Quant à  Bozizé, un homme plat, sans intelligence et talent politiques sérieux, sa conception de la politique est primaire elle se réduit à  l’art de duper. Il a oublié que, comme l’a si bien vu Sunzi, «le bon stratège soumet l’ennemi sans combattre». Bozizé a été victime de sa propre sclérose intellectuelle et politique, basée sur une systématisation pathologique du mensonge, ce qui lui a masqué la vérité profonde sur la nature réelle de son régime. Depuis les accords de Libreville, il se débattait dans le vide, avant de se rendre compte, mais très tardivement, de sa propre fragilité et vulnérabilité politiques. Cet homme avait une mentalité sectaire, ce qui lui faisait nier l’évidence, et lui interdisait de voir la «Lumière». Croyait-il que le peuple centrafricain duquel son régime était complètement coupé, allait continuer à  rester à  ses côtés jusqu’au sacrifice suprême? Il faut être un imbécile ou un sodomasochiste pour mourir pour un tel régime, surtout que, comme C’’est devenu une coutume en Afrique, son principal inspirateur a pris la fuite et mis sa famille à  l’abri. Qui a dit que les dictateurs n’aiment pas la vie? Ceux qui pensaient que pour défendre son fauteuil, Bozizé allait choisir de se «bunkériser» comme Gbagbo, doivent, tout bonnement revoir leur copie. Le régime Bozizé, C’’était juste un régime de jouissance et de dilapidation, corrompu et reposant sur une conception patrimonialiste de l’Etat. Cela dit, après avoir assisté au spectacle du terrassement militaire de Bozizé, faut-il en déduire que la Centrafrique, avec la Séléka, va emprunter un chemin politique nouveau? Soulignons que, quoi qu’il en soit, ce coup d’Etat ne peut que contribuer à  noircir encore l’image de ce pays sur la scène internationale. Il traduit la médiocrité des élites politiques et intellectuelles du pays de Boganda. Le putsch, une mauvaise réponse A l’heure actuelle, rien n’indique qu’avec la Séléka, la Centrafrique se mettra en marche vers une conquête collective de la démocratie. Certes, les rebelles, en prenant Bangui, n’ont ni pillé, ni violé. Et leurs actions n’ont pas abouti au déclenchement d’une guerre civile. Mais ils ont tout de même emprunté, en ayant recours à  la voie des armes, le chemin le plus court pour prendre en main l’Etat, donc de la richesse matérielle. Soyons clairs: les coups d’Etat ne peuvent apporter aucune solution ou réponse durables aux maux qui minent les sociétés africaines. En Afrique, cette méthode de conquête du pouvoir d’Etat, a fini par acquérir une valeur à  proprement parler initiatique. Au XXIe siècle, la démocratie, parce qu’elle institue des sociétés ouvertes, doit être érigée en comportement moral et social dans nos pays. La Centrafrique représente à  la fois une négation de l’idée démocratique en Afrique et son expression la plus caricaturale. Or, bien appliquée et adaptée à  l’humus local, la démocratie apporte la sécurité et la paix, deux exigences capitales, et elle empêche que chaque citoyen se mette à  agir en dictateur. Agir en dictateur, en se fondant sur la force comme seul moyen de régulation politique et sociale, C’’est alimenter les coups d’Etat et les guerres civiles. La démocratie repose sur la transparence, que les dictateurs tels que Bozizé, considèrent comme d’ignobles inventions pour les empêcher de poursuivre le saccage politique de nos pays. La transparence démocratique révèle la vulnérabilité politique et humaine des dictateurs, et porte atteinte à  leur capacité de régner à  vie. Bozizé, l’ange centrafricain déchu, dans sa fuite et dans son exil, finira par méditer sur cette transparence et admettre son incontournable et essentielle puissance. Ainsi, il comprendra, enfin, les raisons de son suicide politique, après avoir refusé, d’appliquer intégralement, les accords de Libreville. Et qu’il sache qu’aucun Centrafricain n’est né pour souffrir éternellement. La chute de Bozizé signe la fin des politiques de résignation présomptive en Afrique, à  savoir que, par crainte d’être mouillés par la pluie, certains dirigeants africains finissent par se jeter dans la rivière. A l’arrivée, rien ne change à  leur étrange condition. Et de nouveau, le peuple leur tourne le dos, et leur «monde s’effondre». Adieu Achebe. l’Afrique entière te pleure et ne t’oubliera jamais.

Centrafrique : un autre régime africain à terre

François Bozizé, le désormais président déchu de la Centrafrique fuit son palais présidentiel dimanche, traqué par les rebelles de la coalition Séléka. François Bozizé était au pouvoir depuis dix ans et demeurait introuvable dans la soirée de dimanche. Les rebelles centrafricains de la coalition Séléka ont pris Bangui dimanche matin, après une rapide offensive. Ils avaient lancé une première offensive le 10 décembre 2012 dans le nord du pays et enchaà®né victoire sur victoire face aux forces gouvernementales. La rébellion avait stoppé sa progression sous la pression internationale à  75 km au nord de Bangui. Des accords à  Libreville avaient débouché sur la formation d’un gouvernement d’union nationale. Les rebelles ont déclenché à  nouveau les hostilités vendredi et déclaré vouloir mettre en place un gouvernement de transition s’ils prenaient Bangui. Ils annonçaient le non respect des accords de Libreville. Débandade… Les échanges de tirs ont été très intenses dimanche vers 08H00 (07H00 GMT) puis sporadiques, a constaté l’AFP dans le centre de Bangui. « On a entendu des tirs partout dans le centre ville, et c’était la débandade. Tout le monde s’est mis à  courir dans tous les sens », a relaté une femme partie à  la messe à  la cathédrale, proche du palais présidentiel. « On vient d’abattre quelqu’un. Je ne sais pas si c’était un militaire ou un civil, mais il essayait de fuir sur sa moto ». Dans le centre, les sociétés de téléphonie Orange et Télécel ont été saccagées, a constaté l’AFP. Les pillards ont presque tout emporté, repartant avec des ordinateurs, des bureaux et même des chaises. Les bâtiments institutionnels n’ont pas non plus été épargnés. Les rebelles ont attaqué le bureau de l’Unicef, et certains ont commencé à  circuler au volant de véhicules estampillés Nations unies. Dispositif militaire français renforcé La situation a conduit le président Déby à  appeler la Fomac (Force multinationale d’Afrique centrale), dont le Tchad fait partie, à  aider à  sécuriser la ville. Paris a annoncé avoir « renforcé » son dispositif pour assurer la sécurité des Français. Quelque 300 soldats ont été envoyés en renfort à  Bangui au cours du week-end, a indiqué l’état-major des armées françaises, portant à  quelque 550 soldats les effectifs en Centrafrique o๠vivent environ 1.200 Français. Aucun combat n’est mené dans la capitale centrafricaine par les forces françaises. l’objectif premier est la sécurité des Français. D’autres forces africaines sont présentes dans la capitale centrafricaine telle que l’armée sud africaine. Un éternel recommencement La Centrafrique, dont le sous-sol regorge de richesses minières, est enclavée entre le Tchad, le Soudan, la République démocratique du Congo (RDC), le Congo et le Cameroun. Dans ce pays, la peur de la démocratie érode toute possibilité de compromis politiques durables. La gouvernance du régime Bozizé était donc vide de sens puisqu’elle a toujours refusé tout dialogue avec l’opposition politique civile. Après leur coups de force, les rebelles de la Séléka ont affirmé vouloir organiser des élections, mais dans les trois prochaines années… Michel Djotodja est le nouvel homme fort de la Centrafrique, et dimanche 24 Mars, il s’est autoproclamé Président de la République. C’’est le début d’une longue marche entamée en Centrafrique. Jusque là , sur cinq présidents depuis l’indépendance de ce pays, trois ont le pris le pouvoir par les armes. On se souvient que feu le président Ange-Félix Patassé [1993-2003] avait eu recours aux miliciens du Congolais Jean-Pierre Bemba pour arrêter l’avancée de l’ex-chef rebelle, François Bozizé, qui vient à  son tour d’être renversé par les rebelles. L’ex président Centrafricain serait en fuite au Cameroun et sa famille réfugiée en République démocratique du Congo…

Centrafrique : trêve et négociations

« J’ai demandé à  nos forces de ne pas bouger de leurs positions à  partir d’aujourd’hui parce que nous voulons participer aux discussions de Libreville au Gabon pour trouver une solution politique ». Cette déclaration a été faite il y a quelques heures ce mercredi 2 janvier par Eric Massi, le porte-parole à  Paris, de la coalition Séléka, engeance rebelle qui menace depuis début décembre, le pouvoir de François Bozizé. Annonçant ainsi la suspension de l’offensive de la rébellion en direction de la capitale, Bangui. M. Massi a ajouté que des discussions étaient en cours avec leurs « partenaires pour avancer des propositions afin de mettre fin à  la crise mais une solution pourrait être une transition politique dont le président François Bozizé serait exclu ». Des soutiens pour Bozizé Quelques heures auparavant, le lundi 31 janvier, la coalition Séléka avait menacé de prendre la ville de Damara, dernier verrou à  75 kilomètres de la capitale centrafricaine, puissamment gardée par les troupes loyalistes, appuyées par des renforts tchadiens. Le général Jean-Félix Akaga, commandant de la Force multinationale d’Afrique centrale (Fomac) déployée en Centrafrique, avait averti la rébellion centrafricaine que toute tentative de prendre cette localité serait considérée comme une déclaration de guerre. « Si les rebelles attaquent Damara, cela veut dire qu’ils ont pris la résolution d’engager les dix à‰tats d’Afrique centrale. Je ne pense pas sincèrement qu’ils en arriveront là  », a-t-il déclaré lors d’un point de presse à  Bangui. « La ligne rouge est valable pour les Faca (les forces régulières centrafricaines) et pour les rebelles, a-t-il ajouté. Nous empêchons dans les deux sens de franchir la ligne rouge». Les effectifs en Centrafrique de la Force multinationale d’Afrique centrale devraient compter environ 760 hommes dans les prochains jours. Un premier groupe de 120 soldats gabonais est arrivé mardi matin dans la ville. Un autre contingent de 120 militaires du Congo-Brazzaville est arrivé lundi, tandis que 120 Camerounais doivent débarqués d’ici la fin de la semaine. Ces nouvelles troupes vont compléter les 400 soldats tchadiens déjà  en place à  Damara, ultime verrou avant Bangui, à  75 kilomètres au sud de la capitale. Pour la rébellion, la seule solution au conflit armé est le départ de François Bozizé, au pouvoir depuis 2003. Ce dernier, lors de son message de vœux du Nouvel an diffusé lundi à  la télévision nationale, avait fait des concessions en envisageant des pourparlers. Jeunes patriotes centrafricains A Bangui, même si la situation s’est quelque peu calmée ces dernières heures, la tension en tre pro et anti-Bozizé ne cesse d’augmenter. Des jeunes gens installent des barricades dans les rues de la capitale pour arrêter ceux qu’ils soupçonnent d’être des rebelles infiltrés parmi la population. Leur coordination s’appelle Coalition citoyenne opposée aux rebelles armés. « Nous sommes unis et nous sommes nombreux. Notre force, C’’est le groupe » a déclaré l’un de leurs leaders à  l’AFP. Tous assurent que leur action est légale. « On le fait à  l’amiable, sans agressivité », dit l’un. Pour ces « bénévoles », dont beaucoup sont au chômage, « le prix (la récompense), C’’est la paix ».

Centrafrique: la voie étroite de Bozizé

« Flou et fluide »: voilà  comment un analyste français, familier du marigot banguissois, dépeint l’état des lieux en République centrafricaine, théâtre depuis le 10 décembre d’une vigoureuse offensive de la coalition rebelle du Séléka. A ses yeux, la chute de François Bozizé n’a rien pour l’heure d’inéluctable, mais la marge de manoeuvre du général-président apparaà®t plus étroite que jamais. « Les pays de la région ne se sentent pas tenus de le soutenir à  tout prix ou de lui sauver la peau, avance-t-il. Ils souhaitent favoriser un processus de négociation qui pourrait le cas échéant permettre à  Bozizé d’aller au bout de son mandat. Mais à  condition d’entreprendre des réformes de fond et d’ouvrir son gouvernement à  toutes les familles de l’échiquier politique. En clair, il lui faut consentir à  diriger autrement et à  partager le pouvoir ». Le Tchad, un parrain ambigu… Thèse professée notamment par le Tchad, parrain traditionnel du tombeur d’Ange-Félix Patassé, parvenu au pouvoir en 2003 au prix d’un coup d’Etat. Un parrain irritable au demeurant, voire ambigu: N’Djamena ne fait pas mystère de l’exaspération que lui inspirent son protégé et son incapacité à  sécuriser son territoire, base arrière de quelques factions insurgées hostiles au chef d’Etat tchadien Idriss Déby Itno. Les renforts dépêchés par ce dernier aux abords de Bangui ont d’ailleurs reçu pour instruction de ne pas intervenir. De même, le contingent additionnel de la Fomac -Force multinationale d’Afrique centrale-, qui devrait être déployé sous peu, a vocation à  s’interposer entre les belligérants, non à  épauler les Forces armées locales, ou Faca. Il s’agit dans l’idéal de figer le paysage militaire, histoire de donner quelque chance de succès aux négociations « sans délai ni conditions » censées s’ouvrir sous l’égide de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC). On en est encore loin : hier, d’intenses combats ont opposé les Faca aux Séléka à  Bambari, ville située à  300 km au nord-est de la capitale et conquise le 23 décembre par la rébellion. A l’évidence, « Boz » peine à  actualiser son logiciel politico-militaire. Il table encore, à  titre d’exemples, sur le concours de troupes congolaises ou la livraison d’hélicoptères de combat angolais. De même, son appel au secours lancé aux  » cousins  » français dénote de la persistance, chez lui, d’une lecture un rien anachronique du paysage postcolonial. « Le vent a tourné » pour Bozizé Jeudi après-midi, lorsque le patron du Quai d’Orsay Laurent Fabius l’a joint par téléphone, sans doute espérait-il un tout autre discours que celui auquel il eut droit: un ferme rappel à  l’ordre relatif, notamment, à  l’assaut sur l’ambassade de France par des  » patriotes  » acheminés et payés par le régime. « Il faudra bien qu’il comprenne que le vent a tourné », insiste un diplomate de haut-rang. La compagnie parachutiste -soit 150 soldats- arrivée hier de Libreville (Gabon) n’a d’autre mission, insiste-t-on à  Paris, que d’épauler les 250 hommes stationnés sur la base M’Poko de l’aéroport de Bangui, appelés si besoin à  assurer la protection des ressortissants français. Sur les bords de Seine, on veut croire que le Séléka n’envisage pas d’attaquer la capitale, mais plutôt de l’encercler afin de fragiliser, par le jeu des défections, l’ossature sécuritaire du clan Bozizé. « Cela posé, admet un expert, nous manquons de renseignements sur cette insurrection. Même si, à  en croire les témoignages recueillis sur place, la plupart d’entre eux ne parlent ni le français ni le sango -langue dominante en RCA-, mais l’arabe. » De quoi étayer la rumeur selon laquelle des supplétifs étrangers, notamment soudanais, combattraient au côté des opposants centrafricains. Joint ce samedi, un colonel de gendarmerie centrafricain soutient que « le calme règne à  Bangui ». « Les gens vaquent à  leurs occupations et les commerces fonctionnent, précise-t-il. Il y a même des mariages célébrés tout à  fait normalement ». Il n’empêche : comme l’atteste une dépêche de l’AFP, le prix des denrées de base tend à  flamber au marché central, et la peur s’instille dans les esprits.

Que se passe-t-il en Centrafrique?

Enclavée au C’œur de l’Afrique centrale, la République centrafricaine est l’un des pays les plus pauvres du monde, malgré ses richesses potentielles, minières et agricoles. Ses cinq millions d’habitants ont subi le règne de l’empereur Jean-Bedel Bokassa de 1965 à  1979, marqué par ses frasques et ses exactions, dont le massacre d’écoliers en janvier 1979. Arrivé au pouvoir par la force en 2003, le président centrafricain François Bozizé voit son autorité contestée par la rébellion du Séléka (« alliance » en sango, la langue nationale), qui a pris les armes depuis le 10 décembre. Mardi, Kaga Bandoro a été le quatrième chef-lieu de préfecture du pays a être attaqué et occupé par la rébellion après Ndélé (nord), Bria (centre) et Bambari (centre-sud). Bien que la rébellion ait assuré qu’il n’était pas dans son intention de conquérir la capitale, François Bozizé a appelé, jeudi 27 décembre, la France et les Etats-Unis à  l’aider à  la stopper. Les armes pour réclamer la paix En 2003, le général François Bozizé renversait Ange-Félix Patassé, élu dix ans plus tôt. Trois ans après, les rébellions de l’Armée populaire pour la restauration de la République et la démocratie (APRD) et de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UF se sont emparées de plusieurs localités du Nord-Est, dont Birao, reprises avec l’aide de la France et de ses Mirage F1. En 2010, la rébellion de la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP) est entrée dans Birao, reprise cette fois par l’armée tchadienne. Les trois rébellions avaient conclu sous l’égide du Gabon un « accord de paix global », prévoyant la démobilisation, le désarmement et la réinsertion des combattants. Le 10 décembre dernier, la coalition rebelle du Séléka, composée de factions dissidentes, prend les armes pour réclamer « le respect » de ces accords. Ils se sont rapidement emparés, dans le centre du pays, de la ville diamantifère de Bria, dans le sud, de la ville aurifère de Bambari et de Kaga Bandoro. Des renforts étrangers En face, l’armée régulière centrafricaine a opposé peu de résistance. Hier, François Bozizé a appelé à  l’aide Américains et Français. La France a déclaré qu’elle n’enverra pas de troupes à  Bangui mais a demandé aux deux parties de déposer les armes. Le Tchad a quant à  lui répondu positivement à  l’appel de Bozizé. Les renforts tchadiens campent aux portes de Bangui. Le contingent de l’armée tchadienne, doit servir de « force d’interposition », selon N’Djamena. Les Tchadiens, rompus au combat et plus lourdement équipés, pourraient être le dernier rempart contre une victoire des rebelles. N’Djamena, allié historique de François Bozizé, avait déjà  envoyé ses troupes en 2003 pour l’aider à  prendre le pouvoir. De son côté, la force multinationale d’Afrique centrale (Fomac), qui compte plusieurs centaines de militaires en Centrafrique, a annoncé jeudi matin l’envoi de nouvelles troupes. « Bangui est sécurisée au maximum par les troupes », mais « d’autres troupes vont arriver pour renforcer cette mission de sécurisation de Bangui », a déclaré à  la radio nationale le commandant de la Fomac, le général Jean-Félix Akaga. Il n’a toutefois donné aucun détail sur le nombre et la date d’arrivée de ces éventuels renforts.Cette force multinationale, mise en place en 2008, avait pour mission d’aider à  consolider la paix dans le pays miné par des années de guerres civiles et de nombreuses rébellions.