Cédric Kanté : « Je n’ai pas senti de la part des dirigeants, une volonté de progresser et d’aller vers le football de haut niveau »

Capitaine des Aigles du Mali et titulaire de la 3è place à  la CAN 2012, Cédric Kanté affiche la sérénité du devoir accompli. A 33 ans, le vice-champion de Grèce, vit une période charnière dans sa carrière. Fier d’avoir hissé le Mali à  un niveau jamais atteint depuis 40 ans, Cédric est conscient des défis auxquels le football malien doit faire face. A commencer par celui de la continuité, chose qui selon lui, n’est pas partagé par les dirigeants du football malien… Malifootball : Avec le recul, quel bilan faà®tes-vous du parcours des Aigles lors de la Can 2012 ? Cédric Kanté : Sur le moment, je n’ai pas réalisé. C’’est lorsque nous sommes arrivés à  Bamako que J’ai pu pris conscience de l’ampleur du parcours effectué. Le peuple malien nous a offert un accueil chaleureux et populaire pour la 3è place obtenue. C’’est un sentiment de fierté car nous avons réalisé une belle performance, et représenté notre pays. Le maitre mot, C’’est la fierté. Quelles ont été les ingrédients de cette réussite ? Nous sommes arrivés à  la Can sans pression, du fait que nous avons eu une phase éliminatoire un peu compliquée. Nous n’étions pas super favoris. Cela a très certainement permis aux plus jeunes de jouer de manière libérée. Seydou Keita et toi , vous avez eu un rôle d’encadrement des plus jeunes En tant qu’anciens, nous étions les garants de l’état d’esprit du groupe. Cela a été déterminant. Il fallait les garder motivés. On vous a senti très épanoui lors de cette Can 2012 Que ça soit Seydou ou moi, C’’est la première fois que l’on ressentait une telle ambiance au sein du groupe. Il y avait une envie de bien faire et J’ ai pris du plaisir à  être avec des jeunes qui ont fait d’excellents matchs. Vous avez raté de peu la finale, quelle avait été l’obstacle majeur ? Nous avons affronté une équipe (de la Côte d’ivoire) qui avait plus d’expérience. Et nous sortions d’une prolongation (face au Gabon). Quelques joueurs clés étaient absents. Ce n’était pas évident. Il nous a manqué un peu de fraicheur pour réaliser l’exploit. Mais notre Can était déjà  réussie avec le quart de finale. Avec cette 3è place acquis à  la Can 2012, vous avez fait rêver, comment maintenir le Mali à  ce niveau ? Bon ! (rires)…pour améliorer l’équipe, il aurait fallu maintenir le staff technique de la Can 2012, se baser sur ce qui a été fait afin d’aller de l’avant… Justement, que pensez-vous du départ d’Alain Giresse ? Cela démontre que la volonté de certains joueurs et celle d’Alain Giresse de faire progresser cette équipe n’était pas partagée par tous. Les acquis de la Can devaient être le point de départ de quelque chose de solide, d’une nouvelle ère du football malien et non la fin de quelque chose. Malheureusement, le changement d’entraineur constitue la rupture d’un élan. Le football malien va en souffrir ? Quand on voit tout ce qui se passe au pays, C’’est compliqué de parler de football. Il y a des choses plus graves que le football. Mais concernant les Aigles, je n’ai pas senti de la part des dirigeants, une volonté de progresser et d’aller vers le haut niveau. Vous savez, nous avions eu beaucoup de problème en phase préparatoire…et le coach n’est plus là Â… [b Vous êtes absents de la liste des 23 qui devaient affronter la Cote d’Ivoire en match amical (le match a été annulé). Idem pour les éliminatoires de la Coupe du Monde 2014 (contre le Bénin et l’Algérie), pourquoi ? J’ai échangé avec le nouveau coach de la sélection, Amadou Pathé Diallo, qui est aussi mon ami. Et il a compris ma position. Ma situation contractuelle est un frein car à  mon âge, il faut éviter les blessures. Les clubs sont réticents à  engager des joueurs qui vont en sélection…peut-être aurais-je pu gérer ça si J’avais senti qu’il y avait un projet solide, une continuité au niveau de la sélection. J’ai l’impression que l’on retombe dans les travers d’il y a 10 ans…tout en étant conscient de la situation du pays. Le départ de Alain Giresse vous a-t-il démotivé ? Non, je connais très bien le nouveau coach qui est un ami alors qu’Alain Giresse je ne le connaissais pas avant la sélection. Malheureusement au Mali …et le départ de Giresse nous le prouve, ce n’est pas le sélectionneur qui le Chef mais il y a plutôt «Â beaucoup de petits chefs. Quand je suis revenu en sélection (avec l’arrivée de Giresse), il y avait de nouveaux jeunes et je sentais qu’il y avait un bon travail à  faire. Et ce que nous avons fait à  la Can m’a donné raison. Ce qui est important pour une sélection C’’est la continuité ! Nous avons vécu des éliminatoires compliqués mais nous sommes montés en régime. Et pendant la Can nous avons progressé tous ensemble, avec des nouveaux joueurs comme Samba Diakité, Seydou qui est revenu… il fallait une continuité pour que nous puissions progresser davantage. Mais là , en plus la situation de Amadou Pathé ( ndrl : la fédération compte recruter un autre sélectionneur après les deux matches de juin) n’est pas définitive, tout le staff va changer… Alors que Giresse avait commencé un bon travail, il connaissait la psychologie de tous les joueurs. Nous échangions beaucoup (Giresse, Seydou et moi) pendant la compétition ou en dehors des matchs. Il y avait une belle alchimie entre les anciens, les jeunes, l’entraineur…. Peut-on espérer vous revoir en sélection pour la suite des éliminatoires, la CAN 2013… ? Rien n’est définitif. Mais à  mon âge il y a des critères à  prendre en compte en fonction du club que je vais rejoindre. Pour la Can 2013, cela ne sera pas évident. J’aurai aimé continuer 2 années de plus avec la sélection et nous qualifier pour la Coupe du Monde 2014. Mais je ne vois pas un club m’engager en étant engagé avec la sélection nationale. Parle nous de ta saison en club…. Ma saison s’est très bien passé…nous sommes vice-champions même si notre objectif était de gagner le championnat. Nous sommes qualifiés pour le tour préliminaire de la ligue des Champions. Vous êtes en fin de contrat, allez-vous signer de nouveau au Panathinaikos ? Il y a une volonté de part et d’autres de continuer. Mais le club se trouve dans une situation très instable avec la crise économique en Grèce. J’explore toutes les possibilités qui s’offrent à  moi. Même si cela parait un peu lointain, comment voyez-vous l’après carrière ? Je me vois dans le management sportif. Je collaborerai certainement avec mon agent pour un début. Je compte aussi passer le Diplôme « Droit, économie et gestion du sport » à  Limoges (formation destinée aux anciens sportifs). Que pensez-vous de la crise politique au Mali ? Une grosse désillusion ! Nous n’avons pas eu le temps d’apprécier la Can, pendant la compétition, car nous savions ce qui se passait au nord Mali. Et là , le pays est coupé en deux, et le président par intérim a été agressé… J’étais optimiste lorsque la junte a remis le pouvoir aux civils. Désormais, je suis très pessimiste. C’’est une vraie désillusion de voir son pays sombrer surtout lorsque l’on est fier de son peuple. Il faut se remettre en question et voir ce que nous pourrons tous ensemble faire pour sauver le pays. Lorsque ma carrière prendra fin, je reviendrai au Mali car J’y suis attaché et J’ai des projets là -bas….