AEEM, une hydre à deux têtes

Depuis une quinzaine de jours, la vie scolaire et estudiantine est perturbée par une guerre des clans violente qui oppose Jack Bauer, secrétaire général, à  Willy également secrétaire général de l’association des élèves et étudiants du Mali (AEEM). Le congrès qui aurait dû élire un seul secrétaire général s’est transformé en deux congrès parallèles qui ont chacun élu un leader pour l’association. Le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et le ministère de l’Education Nationale qui ont annulé leur participation aux congrès, ne semblent pas vouloir trancher. à€ l’heure actuelle, il est difficile de déterminer qui est le secrétaire général légitime. Chaque camp accuse l’autre de malversation et se déclarent dans son bon droit. Interview croisé des deux leaders pour tenter d’y voir plus clair.

Interview de Ibrahima Traoré dit Jack Bauer

Journal du Mali : Comment est organisé le congrès ?

Jack Bauer (JB) : C’est une question pertinente. l’AEEM a des textes et nous mettons en place une commission d’organisation composée des membres du bureau qui assure la transparence des élections. Le programme du congrès était réparti en deux jours, samedi 16 avril et dimanche 17 avril. Il y avait 4 candidats qui postulaient pour le poste de secrétaire général. Je dois préciser que personne ne peut assister au congrès sans avoir été invité par le secrétaire général ou la commission d’organisation.

JDM : Que s’est-il passé exactement lors de ce congrès ?

JB : Le dimanche matin, des éléments à  moi parmi les congressistes m’ont rapporté qu’il y avait des banderoles pro-Willy dans l’amphithéâtre. Willy qui n’est que le secrétaire général adjoint, a fait venir des sotramas transportant des femmes et des jeunes récupérées dans la rue. J’ai alors demandé à  la commission d’informer la police, craignant que Willy prennent l’élection en otage. Mais l’intervention d’un député, Moussa Timbiné, qui m’avait appelé plusieurs fois pour que je me désiste, a empêché la police de faire son travail. Dimanche à  15 heures, Willy a été proclamé secrétaire général. à€ mon arrivée, j’ai été accueilli par des cailloux, il y a eu aussi des coups de feu. J’ai immédiatement demandé à  délocaliser le congrès à  l’école centrale pour l’industrie, le commerce et l’administration (ECICA) pour la sécurité des congressistes et des délégués. Les autres candidats se sont désistés à  la dernière minute et ont porté leur confiance sur moi, j’ai été élu secrétaire général par leurs voix.

JDM : L’AEEM peut-elle fonctionner avec une double direction ?

JB : Non, je dirais qu’il n’y a pas de bicéphalisme. Un congrès avec des gens de la rue et des bandits est plutôt une association qui n’a pas vocation à  représenter les élèves et les étudiants.

JDM : Les autorités reconnaissent-ils votre bureau ?

JB : J’ai été réélu mais Willy refuse de l’admettre. Le ministre de l’Enseignement Supérieur dit qu’il considère le secrétaire général sortant comme légitime, mais qu’ils préfèrent rester en retrait.

JDM : Avez-vous pensé à  une rencontre avec l’autre camp pour une sortie de crise ?

JB : Je pense qu’un échange avec Willy n’est pas la solution, Je ne vois plus Willy comme un adversaire. Si un de ses soutiens politiques, comme Moussa Timbiné veut échanger avec moi, j’accepterais à  condition que ce soit médiatisé et plus informel comme avant.

 

Interview d’Abdoul Salam Togola dit Willy

Journal du Mali : Comment est organisé le congrès ?

Willy : Le congrès s’est passé comme d’habitude à  la FAST. à€ la suite de l’arrivée des congressistes c’est généralement la cérémonie d’ouverture, puis nous faisons les élections et enfin la proclamation du bureau.

JDM : Que s’est-il passé exactement lors de ce congrès ?

Willy : Ce qui s’est passé lors du congrès est un problème créé par Jack Bauer qui est le secrétaire général sortant et qui a terminé ses études. Il n’avait pas l’intention de laisser son siège et cela a causé le report du congrès plusieurs fois. Nous avons dû faire face à  des problèmes vu son refus de partir. Il a pu monopoliser l’organisation du congrès en tant que candidat sortant et nous ne pouvions pas accepter cela. Je pense qu’il faut respecter l’alternance dans toute structure et faire face à  son bilan, chose qu’il n’a pas voulu faire parce que son bilan n’était pas honorable. Il a érodé la confiance de sa base, et certaines accusations concernant des prélèvements avec le Centre national des œuvres universitaires sur la bourse des étudiants, y ont contribué. De plus, il a permis l’ingérence de bandits dans les affaires des étudiants, il est soutenu par un dénommé Bekaye Diawara, qui est un chef de gang notoire et aussi le secrétaire général de la fédération des bras de fer. Les gens n’étaient pas partants pour qu’il reste, mais il avait pris goût à  ces responsabilités, c’est pourquoi, Il a voulu saboter l’organisation du congrès. J’ai été élu secrétaire général car je suis celui que les élèves et les étudiants ont choisi pour les représenter.

JDM : L’AEEM peut-elle fonctionner avec une double direction ?

Willy : Pour nous il n’y a pas deux camps, il ya juste une façade. Ils peuvent dire tout ce qu’ils veulent à  la radio et dans les journaux moi je suis au travail et lui est chez lui et se proclame chef d’un camp. Qui a financé votre congrès. C’est l’à‰tat qui a financé le congrès. Ce qui prouve qu’il n’y a pas eu deux congrès, mais un seul congrès et comme d’habitude il a eu lieu à  la faculté des sciences et techniques (FAST).

JDM : Les autorités reconnaissent-elles votre bureau ?

Willy : Je suis celui que les élèves et étudiants ont choisi pour les représenter, et j’ai dors et déjà  commencé les activités pour l’association

JDM : Avez-vous pensé à  une rencontre avec l’autre camp pour une sortie de crise ?

Willy : Jack ne voulait pas de cela. Avant le congrès il y a eu toutes sortes d’échanges convoqués par des anciens de l’AEEM et des personnes ressources. Il ne souhaite pas la bonne marche du bureau, donc je pense que ce ne sera pas possible parce qu’il ne veut pas que les choses se stabilisent.

Guerre des clans à l’AEEM

Depuis lundi dernier la situation se dégrade dans certains établissements scolaires de la ville, theâtre d’affrontements et de fusillades entre deux clans rivaux de l’AEEM, soutenenant le nouveau bureau du comité avec à  sa tête Abdoul Salam Togola alias Willy de Badalabougou, récemment élu, et le candidat sortant Ibrahima Traoré alias Jack Bauer de Bagadadji.

Ces deux clans se sont tirés dessus et affrontés à  l’arme blanche, ces derniers jours, perturbant la vie scolaire et semant la panique. Compte tenu du climat d’insécurité et de violence qui règne actuellement dans certains établissements de la ville, l’administration de la Faculté d’histoire et de géographie (FHG), visée par ces attaques, a décidé de fermer l’établissement et de suspendre les cours durant 72 h. la direction n’exclut pas d’étendre ces mesures si le calme ne revient pas.

La violence entre différentes branches du syndicat estudiantin n’est pas nouvelle, cependant depuis l’élection de Willy comme secrétaire général de l’association, elle semble avoir pris de l’ampleur. Une lutte pour le contrôle du bureau de la direction nationale semble en être l’enjeu. Pour Willy, les coupables ne font aucun doute, « C’est Jack Bauer et un de ses soutiens dénommé Bekaye Diawara, un chef de gang bien connu qui réside à  Bamako, nous avons porté plainte plus de quatre fois contre ce dernier et jusque-là  il n’a pas été mis aux arrêts ».

De son côté « Jack Bauer », renvoi la balle à  son adversaire l’accusant d’avoir causé « de nombreux blessés dont un enfant percuté par un automobiliste lors d’une de ses descentes ». Malgré la présence quotidienne de la police, les actes de violence ne semblent pas être juguler, Willy prévient : « Si les autorités ne jouent pas leurs rôles, nous serons peut-être obligés de faire à  notre manière, on ne va pas rester en classe et laisser les gens venir nous agresser, laisser n’importe qui s’introduire dans l’espace scolaire et venir attaquer les gens avec des machettes et des couteaux ». Pour certains cette association estudiantine serait plus un gang, manipulé pour de générer de l’instabilité à  l’école plutôt que défendre les intérêts des élèves et des étudiants. Selon nos informations, ces clans auraient le soutien de certains politiciens dont des anciens membres de l’AEEM entrés en politique. Selon une source, un ancien de l’AEEM s’étant vu refuser un marché au ministère de l`Éducation, utiliserait l’association comme moyen de pression sur le ministère. La situation reste pour le moment préocupante, une réunion d’urgence se tiendra lundi prochain au FHG pour tenter de trouver de réelles solutions.

Où est passé le clan Gbagbo?

Les ivoiriens essaient tant bien que mal de tourner la page des moments difficiles qu’ils viennent de traverser. Ce mardi, après avoir célébré Pâques en priant pour la réconciliation, les élèves ont repris le chemin des écoles fermées depuis plusieurs semaines. A Yopougon, l’insécurité est encore d’actualité et des tirs à  l’arme lourde ont encore été entendus cette nuit dans ce fief pro-Gbagbo livré aux pillages et aux règlements de compte. Et voici qu’on a des nouvelles de l’ancien président et de ses proches. Selon notre confrère ivoirien « Le Nouveau réveil », Laurent Gbagbo a tenté le samedi dernier, dans la matinée, de mettre fin à  ses jours. On n’a pas d’informations précises pour le moment mais Mr Gbagbo aurait été retrouvé inanimé dans sa chambre par les casques bleus qui assurent sa garde dans le pied-à -terre présidentiel de Korhogo. Ces derniers ont appelés un médecin qui a réussi à  le réanimer et ses jours ne sont pas en danger. La tentative de suicide de Laurent Gbagbo n’a pas été officiellement ni confirmée ni infirmée par les autorités ivoiriennes. Laurent Gbagbo est seul, lui-même ayant demandé à  être séparé de son épouse, ne supportant pas la déchéance de celle qui fut son soutien le plus fort lors de tous ses combats. Une Simone Gbagbo, qui s’est réfugiée dans la prière et refuse de s’alimenter depuis son arrestation avec son mari dans le bunker du palais présidentiel le 11 avril dernier. Elle se trouve présentement dans la ville d’Odiénné, à  l’extrême nord du pays, elle aussi sous protection des casques bleus des Nations Unis. Et les autres? Car, ils étaient une bonne centaine, parents, amis, collaborateurs à  avoir arrêtés ce 11 avril. Enfermés pour la plupart à  l`hôtel du Golf d`Abidjan, quartier général (QG) du président Ouattara jusqu`à  sa prise du pouvoir, ils ont depuis ce week-end de nouvelles destinations. Le président du Front populaire ivoirien (FPI), Pascal Affi N`guessan, retenu à  l`Hôtel la Pergola de Marcory Zone 4 puis au Golf Hôtel aurait été transféré à  Katiola, au centre du pays, à  400 km d’Abidjan. Avec lui, il y aurait tous les autres pontes du régime Gbagbo et les membres de l`entourage de l`ex-président de la République déchu, qui séjourneraient encore au Golf. Ils devraient connaà®tre leur sort dans les semaines et mois à  venir. On est toujours sans nouvelles du leader des Jeunes Patriotes et non moins ministre, Charles Blé Goudé. Des informations avaient fait état de son arrestation, mais elles ont été infirmées par les autorités. Quant aux prisonniers militaires, leur prochaine destination serait la ville de Bouaké, capitale du Centre et fief de l`ex-rébellion, o๠ils iront attendre les décisions du nouveau régime. Quant aux exilés, ils continuent de rentrer pour faire allégeance au nouveau président. Le Général Matthias Doué a ainsi été reçu par Alassane Ouattara, quelques jours après le Président du Conseil constitutionnel Yao N’Dré, celui-là  même qui, en plein bras de fer post-électoral avait proclamé puis investi un Laurent Gbagbo déclaré perdant par la commission électorale. Il devrait présider une nouvelle cérémonie d’investiture, celle de Ouattara cette fois-ci à  la mi-mai à  Yamoussokro. Le Golf hôtel se vide de ses prisonniers, dispersés dans les zones dites CNO (Centre-Nord-Ouest) du pays. Une stratégie certainement pour étouffer les velléités de reformation du clan Gbagbo qui est resté soudé et qui dispose encore de nombreux soutiens et partisans.