Procès Sanogo : Une affaire oubliée ?

Depuis son arrestation, le 23 novembre 2013, l’ex-chef putschiste du 22 mars 2012, le général Amadou Haya Sanogo, est en  prison à Selingué. L’ancien patron du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), accusé « d’enlèvement, d’assassinat et de complicité d’assassinat » dans l’affaire des bérets rouges, a comparu une première fois devant les juges, à Sikasso, le 30 novembre 2016. La récente nomination de Me Malick  Coulibaly, présenté comme chantre de la lutte pour les droits de l’Homme au ministère de la justice pourra-t-elle briser le statu quo ?

« Nous réclamons le jugement, mais, à défaut de cela, pourquoi ne pas négocier avec les victimes ? Nous avons vu des pays qui ont eu des cas plus graves que le nôtre, mais ils ont pu trouver des solutions. Je pense qu’il y a juste un manque de volonté », s’impatiente le colonel major à la retraite Soungalo Coulibaly, père d’un des bérets rouges assassinés. Pour la manifestation de la vérité, il intègre très tôt  l’association des parents des bérets rouges disparus. En décembre 2013, après plusieurs investigations, 21 corps ont été découverts, probablement des bérets rouges, dans un charnier à Diago, près de Kati. Son fils, auquel il avait parlé alors qu’il était détenu par des éléments de Sanogo, ferait partie des victimes.

Après six ans d’attente, le colonel major à la retraite espère que la nomination de Malick Coulibaly au département de la Justice relancera ce dossier, tant attendu. « Je ne peux pas rester comme ça, bien que j’ai de la peine à trainer mes compagnons d’armes devant un tribunal. Mais je suis obligé de le faire en tant que  partie civile », insiste-t-il. Le retour de Malick Coulibaly au ministère de la Justice, poste qu’il avait déjà occupé sous la transition de 2012, fait naitre de forts espoirs quant à la reprise du procès. « C’est quelqu’un que je sais à cheval sur le respect des droits de l’Homme, mais aussi surtout les dépassements de séjour en prison. La loi dit trois ans pour les crimes et Sanogo en est déjà à six ans sans jugement. Cela n’est pas admissible », martèle le Dr Abdourahmane Maiga, commissaire à la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH). Selon lui, il urge que la justice se fasse, et pour les victimes et pour les accusés. « S’il ne le fait pas dans les trois mois à venir, nous allons lui demander pourquoi, non parce qu’il est Malick, mais parce qu’il est le ministre de la Justice », annonce-t-il.

Pour les victimes et les accusés

Dans cette longue attente, les victimes ne sont pas les seules à plaider pour que la justice passe. Les droits de l’accusé Sanogo semblent également être piétinés. « Quand quelqu’un est en prison, sa femme et ses enfants aussi sont emprisonnés, d’une manière ou d’une autre. Il n’est pas condamné mais sa femme ne le voit pas, ses enfants non plus. On viole leurs droits », continue de dénoncer le Dr Abdourahmane Maiga, Président de la sous-commission promotion à la CNDH. Pour le politologue Mamadou Sissoko, la lenteur doit être liée à des difficultés juridiques. « Le procès Sanogo dépend-il de la situation politique ou de difficultés juridiques ? Politiquement, rien ne s’oppose à ce que Sanogo soit jugé. S’il n’a pas pu l’être à Sikasso, c’est parce qu’il y a eu des difficultés juridiques soulevées par les avocats », souligne-t-il. Parmi celles-ci figure notamment la demande d’expertise génétique des corps des victimes. Pourtant, le colonel major à la retraite Soungalo Coulibaly assure qu’il y a bien eu une expertise, menée sans l’aval des autorités de l’époque. « Il y a eu des tests ADN, mais le tribunal de Sikasso a estimé que ceux qui avaient fait ces tests n’étaient pas habilités par les autorités maliennes. Or, à cette époque c’étaient Amadou Haya Sanogo et ses hommes qui étaient les autorités », rapporte le colonel major. Depuis le report de 2016, c’est le statu quo. « La partie civile est en droit aujourd’hui d’exiger le règlement de cette affaire. Cela permettra à certaines personnes de faire leur deuil, mais aussi de comprendre ce qui s’est passé. Il est également dans l’intérêt des inculpés que la vérité soit dite », souhaite le politologue. L’un des avocats de Sanogo, que nous avons contacté, n’a pas souhaité s’exprimer sur l’affaire.

Le Mali d’un 22 mars à l’autre : Les paradoxes de la « démocratie »

« Les mêmes causes sont là et, comme on dit les mêmes causes produisent les mêmes effets. La situation aujourd’hui est la même que celle qui prévalait à la veille des évènements de mars 1991, et même pire. Injustice sociale, corruption et attaques contre les libertés. On dirait que nous n’avons pas tiré les leçons du passé ». Le propos de notre interlocuteur, militant associatif, résume l’opinion de nombreux Maliens, qui ne cachent guère leur pessimisme. Les quelques 25 années d’exercice démocratique, obtenues par le sang des martyrs du 22 mars 1991, n’ont pas réussi à mettre le Mali à l’abri du 22 mars 2012. Que va-t-il advenir au pays dont le peuple, en ce 22 mars 2018, se pose des questions sur son vivre-ensemble, ses valeurs communes et cette démocratie, dont les indicateurs ne sont plus au beau fixe ?

« Nul ne peut prédire l’avenir », répond Mariam Guindo. La jeune femme est commerçante à Kalaban Coura et reprend la rhétorique désormais commune à tous les « grins » de Bamako et d’ailleurs au Mali. « La situation est pire qu’avant la démocratie. Mes aînés ont lutté lors des évènements de 1991. Personne ne pouvait imaginer que, des années après, le Mali serait dans une situation pire que du temps de Moussa Traoré. Je comprends ceux qui regrettent cette période, parce que, au moins, les gens avaient peur de voler et de l’injustice », poursuit-elle. Ambroise Dakouo, spécialiste en gouvernance et coordinateur au Mali de l’Alliance pour refonder la gouvernance en Afrique (ARGA) n’est pas tout à fait du même avis. « Les aspirations des années 90, j’irai même plus loin, de 80, se sont estompées, parce qu’entre-temps la pratique de la gouvernance à l’ère de la démocratie en a fait déchanter plus d’un ». Mais il faut pousser plus loin la réflexion et s’interroger sur la situation actuelle, qui est le résultat d’une série de facteurs. « Nous n’avons pas dépassé l’euphorie des lendemains de la chute de Moussa et n’avons pas pu concrétiser nos rêves de démocratie. Le résultat est ce que nous voyons depuis des années et qui a culminé avec le malheureux coup d’État du 22 mars 2012 », poursuit-il.

Journées noires Le 22 mars 1991, Ndiaye Ba était dans la rue avec ses camarades. « C’était difficile. Cette journée est pour moi inoubliable. Ce que je retiens surtout du 22 mars 1991, ce sont les morts. Je me souviens que les jeunes manifestants s’étaient réfugiés dans l’immeuble Sahel Vert… Quelqu’un y a mis le feu et ils ont été brûlés vifs. C’est mon pire souvenir ». La lutte des jeunes maliens, qui sont descendus dans la rue pour réclamer leurs droits et libertés, n’a pas été aussi « facile » que les combats menés aujourd’hui, de nouveau par la jeunesse. « A l’époque, il n’y avait pas de portable, pas de possibilités de communiquer entre nous. On a donc tous été alertés par le bouche-à-oreille et avons vécu cela avec des gens connus aujourd’hui comme Hamidou Diabaté, Me Ibrahim Berthé ou encore Modibo Kadjoké. En 2012, ce sont les mêmes ou presque qui se sont levés pour défendre les valeurs républicaines ». L’évolution des communications, c’est ce qui fait la différence entre mars 1991 et mars 2012. Amara Bathily est commerçant et activiste. Il se fait connaitre sur les réseaux sociaux le 22 mars 2012, en dénonçant vigoureusement, voire violemment, le coup de force qui venait d’être acté au petit matin par les membres du Comité national du redressement de la démocratie et de la restauration de l’État (CNRDRE, les putschistes). « Mon combat avait commencé en fait en 2011, après les premières allégations sur le Président ATT à l’époque. Il y avait déjà de l’amalgame, des agressions contre les Touareg et les personnes « peau rouge ». J’ai commencé à en parler sur les réseaux sociaux et à alerter des gens qui étaient à l’extérieur, pour faire comprendre qu’il fallait arrêter d’agresser les Touareg. Le 22 mars, j’ai fait une publication dénonçant le putsch. Après, on a continué à en parler, à défendre le Président ATT et à tenter de rétablir la vérité. On a été menacés de mort, mais, heureusement, on avait des proches dans leurs rangs qui nous avertissaient ».

Le 22 mars 2012, alors que le Mali se réveille d’une nuit mouvementée et dans l’incertitude, nombreux sont ceux qui applaudissent les auteurs du coup d’État. « On en avait besoin, les militaires vont remettre les pendules à l’heure ! » se réjouissait un internaute. Les manifestations de soutien se multiplient. Hamadoun Traoré, Secrétaire général du bureau de l’AEEM à l’époque, n’est pas de ceux-là.  « Le 21, c’était une mutinerie. Je ne m’en suis pas inquiété, je pensais qu’on allait trouver une solution. Depuis environ un mois, la situation dans le pays n’était pas stable. Le rôle que nous était de faire tout afin qu’il n’y ait pas d’instabilité à Bamako. Cela aurait empêché les autorités de se concentrer sur ce qui se passait dans le Nord du pays », se souvient-il. « Vers 2 heures du matin, quelqu’un m’a réveillé pour m’annoncer un coup d’État, je n’y croyais pas, tout le monde disait que ce n’était pas possible ». Ce sentiment d’incrédulité, Ndiaye Ba l’a lui aussi ressenti. « Quand j’ai vu ce qui s’est passé dans la nuit du 21 au 22, je me suis souvenu du prix que nous avions payé… Je n’ai jamais pensé qu’il y aurait encore un coup d’État au Mali. Mais il était hors de question de laisser la situation perdurer. Nous avons donc créé, avec d’autres amis et personnes engagées, le FDR ». Kadiatou Sangaré, militante associative, s’est rapidement mobilisée. « Les coups d’État n’ont jamais porté chance au Mali. En 2012, la situation était d’autant plus dangereuse que c’était des hommes de rang qui avaient mené cette action, sans plan, sans savoir où aller. Si on les avait laissé faire, ça aurait été du pilotage à vue. Je n’ai jamais compris leurs motivations, d’ailleurs. On était à quelques semaines des élections et ils ont ramené le pays dix ans en arrière ».

Tirer les leçons « 2012 a été un réveil brutal » reconnait notre expert en gouvernance. « C’était un mal nécessaire, car ces évènements nous ont montré qu’on s’était fourvoyé en pensant les discours et les volontés proclamées devaient être performants. On n’est pas passé à la réalisation du discours par des actions concrètes », assure-t-il. Autre facteur, « entre 1991 et 2012, on observe que c’est la même élite politique, au cœur du système, qui s’enrichit, accapare le pouvoir, alors que la population est de plus en plus pauvre. Au-delà de tout cela, on n’assiste pas à une véritable évolution économique. Si au plan macro les chiffres sont au vert, cela ne se traduit pas dans le quotidien des populations, de plus en plus vulnérables. C’est aussi un recul sur le plan des libertés, que ce soit la liberté de la presse ou les libertés individuelles ». « Si on continue dans cette dynamique, en camouflant les vraies problématiques et en pensant que ce sont des réformettes ou de petites solutions juxtaposées qui vont être la solution, dans quelques années on aura une crise encore plus grave », prédit un observateur.  Rompre le cercle vicieux et avancer ? C’est l’objectif de nombreux acteurs et regroupements qui initient, ces derniers mois, de nombreuses actions. Conférences et colloques se multiplient, avec des actions de sensibilisation pour « réparer notre socle commun », comme l’explique Kadiatou Sangaré, membre de plusieurs associations créées au lendemain du coup d’état. « L’avenir dépend de nous. Il nous faut nous remettre au travail, nous retrouver autour de nos valeurs communes, choisir les bonnes personnes pour nous conduire. Le changement que nous voulons, nous devons le matérialiser en luttant contre l’incivisme et le manque de patriotisme. Si on s’y met tous, on peut y arriver ». Pour que les Maliens se retrouvent, Ndiaye Ba a la solution. « Pour nous sortir de cette situation aujourd’hui, il faut aller aux élections. Le plus rapidement, pour choisir quelqu’un de fédérateur, qui mettra tout le monde ensemble pour travailler. Après les élections, on devra organiser une conférence nationale de réconciliation et donner la parole au peuple, qui veille et ne se laissera plus faire », conclut-il…

Où étiez vous, le 21 Mars 2012?

B. Sidibé : J’étais en ville. En fait, je n’ai pas su qu’il se passait quelque chose. J’ai fait mes courses et C’’est en rentrant à  Faladié o๠J’habite que J’ai remarqué une effervescence inhabituelle. Tout le monde semblait vouloir traverser le pont. C’’est à  la maison que l’on m’a dit qu’il y avait des troubles à  Kati…Quand ça a commencé à  tirer dans mon quartier la nuit, J’ai compris que quelque chose de sérieux se passait. Sory Ibrahim Touré, animateur radio: Le 21 mars je me trouvais au bureau. J’ai d’abord entendu des rumeurs concernant d’éventuels tirs d’armes à  feu dans la ville de Bamako. De prime abord, je ne voulais pas y croire. J’ai téléphoné en famille, ils ont confirmé cela et ont ajouté que l’ORTM était pris d’assaut par des militaires. J’ai vérifié en regardant l’écran de télé puis ma famille m’a conseillé de rester là  o๠J’étais en attendant. Issa : En ce moment, j’étais de l’autre côté de la rive droite à  Torokorobougou. La nuit a été très longue, on attendait les coups de feu un partout. Amadou, étudiant: On entendait des rumeurs disant que les Hommes de Kati descendaient à  Bamako. A 20h la famille était réunie comme d’habitude devant la télé pour suivre le journal, mais c’est plus tard dans la nuit que nous avons appris la nouvelle du putsch et la décision de décréter le couvre-feu. C’était la panique. Je me souviens que les élèves des écoles fondamentales étaient en composition, mais avec l’annonce du coup d’état ils n’ont pas pu continuer le lendemain. Adama Traoré, gestionnaire : J’étais au bureau, et vers 16h j’attends que des soldats ont pris l’ORTM et se dirigent vers l’aéroport. Du coup tout le monde a paniqué et est rentré à  la maison. Kalilou Tirera : Je me souviens, il était 15h30 ou je m’apprêtais à  faire mes ablutions pour prier, et voila J’entends des coups de fusils, ça a été la panique générale. Fatou Faye, communicatrice : J’étais chez moi, lorsque je reçois un sms me demandant de ne pas sortir et surtout ne pas aller en ville, si j’étais à  la maison. Ma famille qui est au Sénégal a commencé à  m’appeler pour me demander des nouvelles de ce qui se passait ici. M . Koumaré : J’étais au bureau!!! Dans la panique totale avec mes collègues, recevant des appels nous disant de rentrer chez nous, pendant que le DG (déjà  au courant) était rentré chez lui tranquillement! Bref c’est mauvais souvenir! Arouna, informaticien : Moi, J’ai passé la nuit au bureau. On est dans l’ACI et on était un peu concentré, replié sur nous-même ce qui a fait que nous ne sommes rendus compte de rien. C’’est un coup de fil d’un collègue vers 16h30 qui nous a alarmés. Il nous a demandé de ne pas quitter le bureau parce que ça tirait en ville et que le pont était bloqué. On s’est dit qu’on était en sécurité là  o๠on était, alors on est resté au bureau. Mais ça a été une nuit blanche, on était tous dépassé que cela se passe dans notre pays. Malien de l’extérieur : à‡a a été un moment horrible pour moi ! On a eu les infos sur ce qui se passait à  Bamako aux environs de 20heures (19h GMT). Un coup d’état !!! Pour moi, C’’était inimaginable au Mali. Mais la réalité nous a rattrapés quand on a capté l’ORTM et qu’il n’y avait rien que de la musique à  l’antenne. On est resté éveillés pour suivre le communiqué qui a confirmé nos craintes. Moussa D.: Le 21 Mars 2012, J’étais à  Kayes, pour une activité professionnelle. On entendait que des rumeurs, « il y a coup d’état à  Bamako ». Nous avons tous balayé cette info du revers de la main en disant que ce n’était pas possible. J’ai passé l’après-midi et la nuit entière au téléphone pour avoir des nouvelles mais personne n’arrivait à  me donner de précisions. Et dans la nuit, l’ORTM a commencé à  faire défiler le fameux message « dans quelques instants, un communiqué des militaires »Â…Je me suis dit « donc, C’’est vrai !» Abdoulaye Handane Djitteye, chef d’antenne, Radio Klédu: Je me rappelle que J’étais sur mon lieu de travail, à  la radio. J’y suis resté jusqu’après minuit pour relayer l’information à  nos auditeurs. C’’était le jour de la décomposition totale du régime. C’’était le début de la désintégration du Mali : perte des institutions, perte de l’armée, perte des trois régions principales du Nord (Gao, Tombouctou et Kidal). J’étais stupéfait, je ne comprenais pas que le régime d’alors puisse être basé sur rien. » Moussa Camara, à  l’époque étudiant au CESTI de Dakar : Il était 15h quand un camarade de classe m’a appelé pour me dire que ça chauffe à  Bamako. J’appelle aussitôt la famille qui me dit que C’’est une mutinerie de militaires qui avaient pris l’ORTM. J’entendais les coups de feu à  travers le téléphone, J’étais paniqué ! J’ai passé tout le temps ensuite à  appeler la famille pour savoir comment ça évoluait, mais les miens ne pouvaient rien me dire. C’’est un ami qui m’a appelé vers 23h pour m’annoncer que le pouvoir d’ATT venait de tomber. Les chaà®nes étrangères ont commencé ont annoncé qu’il y avait un putsch en cours à  Bamako. Et la confirmation a été donnée par RFI. Mes camarades de l’université n’en revenaient pas et moi non plus ! Lalla M.: Le 21 Mars, j’ai passé la matinée au bureau et ensuite, avec une collègue, nous nous sommes rendues au salon de l’agriculture du Mali, au Palais de la Culture. Nous étions en train de contempler de beaux spécimens de taureaux, je crois, quand on a entendu des coups de feu. Qui se rapprochaient et très distincts. Alertés par la sécurité, le remue-ménage dans le salon, la plupart des exposants ont plié bagage. J’ai vu pour la première fois de ma vie des véhicules faire demi-tour sur un pont ! Nous avons alors pris ma voiture avec ma collègue, et dans les rues de Bamako, il n’y avait plus de policiers aux postes, la rumeur d’une mutinerie à  Kati s’était propagée. Et le coup d’à‰tat s’est confirmé lorsqu’un confrère de l’ORTM m’a avertie par téléphone que la télévision nationale avait été prise par des militaires… »

Petites courtoisies entre Dioncounda et Sanogo…

‘ Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Le capitaine putchiste Amadou Haya Sanogo a désormais changé de langage à  l’endroit du professeur Dioncounda Traoré qu’il abhorrait auparavant, pour être un maillon du régime ATT tant décrié par l’ex junte‘. C’’est le constat amusé d’un enseignant du secondaire lors d’une discussion de grin. Pour d’autres, le capitaine Sanogo est tout simplement sous la pression de la communauté internationale et se voit obligé de pactiser avec les hommes politiques pour sortir le Mali de l’impasse. En revanche, une tendance estime que l’ex junte est la vrai détentrice du pouvoir et que Dioncounda Traoré, le Président de la République par intérim reste une marionnette manipulable à  souhait par les militaires. Un propos à  nuancer, juge un proche de ‘ancien Président de l’Assemblée : «Â Vous avez l’impression qu’il est mou, mais sachez qu’il prend toutes les décisions au final ! ». Dioncounda aurait-il ordonné à  Sanogo d’aller arrêter Cheick Modibo Diarra, ce fatidique 11 décembre ? Certains aiment à  le croire. Petites courtoisies De son côté, le capitaine dans la déclaration, qui a suivi la démission forcée de l’ex Premier ministre n’a pas tari d’éloges à  l’endroit de son aà®né Dioncounda : « l’ex Premier ministre Cheick Modibo Diarra ne respectait pas l’autorité du président de la République par intérim, Dioncounda Traoré. Il voyageait et logeait dans les hôtels les plus luxueux de la planète terre sans en informer qui que ce soit et aux frais de l’Etat » pérora Sanogo. Pour certains observateurs politiques, ces propos laudateurs du capitaine putschiste étaient une manière de séduire le Président de la République en trompant la vigilance de la communauté internationale, face à  l’ordre institutionnel tant réclamé. Il ya quelques mois seulement l’ancien président du CNRDRE, le capitaine Amadou Haya Sanogo estimait que le Pr Dioncounda Traoré avait été imposé par la CEDEAO, et voulait sa tête, car l’homme ne méritait point à  ses yeux d’incarner le Président de la transition à  même d’apporter le changement réclamé par le peuple. Or dans sa même déclaration le capitaine Sanogo flatte Dioncounda Traoré. Dégommer CMD a donc été poser un acte, accomplir un devoir pour remettre les choses dans l’ordre, estime le capitaine puchiste. De son côté, Dioncounda Traoré, dans sa dernière adresse à  la nation à  l’occasion du nouvel an, a ménagé les ex putschistes quant au coup de force du 22 mars 2012 : «Â  Durant deux décennies, nous avons organisé régulièrement des consultations électorales globalement acceptées par nous même et par la Communauté internationale. Beaucoup de pays nous ont envié la vitalité de notre expérience démocratique et souvent, n’ont pas manqué de s’en inspirer pour consolider la leur. Cet apprentissage plutôt réussi nous a donné le sentiment que nous étions arrivés à  un stade que les grandes démocraties ont mis des siècles à  construire et à  consolider. Mais les événements de mars 2012 sont venus nous rappeler brutalement la fragilité de notre pratique démocratique ». Ils sont venus nous prouver que les acquis étaient loin d’être irréversibles et aussi et surtout qu’en temps opportun, nous aurons à  faire face à  notre devoir de critique et d’autocritique ». Alors, ces propos ne donnent-il pas raison à  ceux qui pensent que la démission de l’ex Premier ministre rapproche désormais le Président de la transition et le capitaine Sanogo ?

Le CNRDRE devient le CMSRFDS !

Le Comité National pour le Redressement de la Démocratie et la Restauration de l’Etat (CNRDRE) n’existe plus. Le vendredi 29 juin, les députés ont en effet voté une loi portant création du Comité Militaire de Suivi de la Réforme des Forces de Défense et de Sécurité (CMSRFDS). Le projet de loi, défendu par le ministre de la Défense et des Anciens Combattants, Yamoussa Camara, a été voté à  l’unanimité des députés présents, soit 132 voix pour contre zéro abstention et zéro non. Cette structure a pour objectif la refonte du CNRDRE du Capitaine Amadou Haya Sanogo. C’’est la solution trouvée par le gouvernement pour « caser » les ex-putschistes, toujours très présent dans la vie politique du pays. Il faut signaler que cette mesure était prévue dans l’accord cadre du 1er avril entre l’ex-junte et la médiation de la CEDEAO. Pas tous d’accord Le vote à  l’unanimité de cette loi ne veut pas cependant pas dire qu’elle satisfasse tout le monde. Au sein même de l’Hémicycle, l’honorable Kassoum Tapo, par ailleurs membre du FDR la discute. Pour lui il faut associer le « CNRDRE au processus de reformes ». Il soutient que « ceux qui ont vécu ce mouvement insurrectionnel, ou cette mutinerie se souviennent, ce n’était pas un coup d’Etat. C’’est une mutinerie pour protester contre les conditions de travail de l’Armée». Au FDR, front des anti-putschistes, on pense au contraire qu’il faut mettre hors jeu ceux qui ont renversé le Président ATT. A quoi va servir le CMSRFDS ? Le Comité participera à  l’élaboration du programme de reforme des forces de défense et de sécurité, en collaboration avec les ministres en charge de la défense, et de la sécurité. Une fois le document prêt, il sera chargé du suivi des reformes et procédera à  leur évaluation. Le coup d’Etat du 22 mars, avait suivi une mutinerie de la garnison de Kati. Le Capitaine Amadou Haya Sanogo et ses camarades du CNRDRE reprochaient à  l’ex-régime d’avoir laissé l’armée s’effondrer face aux attaques des rebelles touaregs et leurs alliés. Le CMSRFDS sera l’occasion de corriger cet état de choses et de redonner au Mali, une armée digne de ce nom. Outre cette loi, les députés ont également voté à  l’unanimité, la loi d’indemnisation des victimes de guerre et du mouvement insurrectionnel du 22 mars dernier. Cependant, pour le moment, aucun montant n’a été avancé. Le projet de loi a été défendu par le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Malick Coulibaly, pour qui cette loi s’inscrit « dans une droite ligne de l’apaisement. Il s’agit d’un sujet lié à  la sauvegarde de l’unité et la cohésion sociale ».

Dissolution du CNRDRE : A quoi joue le gouvernement ?

Sur les antennes de la télévision nationale, Hamadoun Touré, l’actuel ministre de la communication et porte-parole du gouvernement, a annoncé vendredi 8 juin 2012, la création d’ une nouvelle structure qui devrait absorber le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE), à  défaut de le dissoudre complètement, comme l’ont exigé l’Union Africaine, l’ONU et la CEDEAO. Du reste, si la médiation a pour le moment réduit ses contacts avec l’ex junte, elle entend désormais s’atteler à  la résolution de la crise au Nord. Une délégation du MNLA, conduite, par Ibrahim Ag Assaleh, a été reçue ce week-end à  Ouagadougou par le médiateur Blaise Compaoré, en vue de négociations futures… Rapide dissolution ? La dissolution du CNRDRE ne serait donc qu’une formalité ? Pas si sur, à  entendre Hamadoun Touré, qui évoque une entité nouvelle. Si le nom en est pour le moment tenu secret, le projet de loi « sera examiné au prochain conseil des ministres extraordinaire et déposé devant le bureau de l’ Assemblée nationale pour examen et adoption », d’après le ministre. Objectif de cette structure nouvelle, la formation, le conseil, autrement dit, une mission consultative qui pourrait « aider » le gouvernement de transition à  « réussir » sa mission. «Â C’’est tout simplement ridicule, le CNRDRE devait être dissous depuis longtemps. On voit mal des militaires qui n’ont aucune expérience du pouvoir, épauler le gouvernement », estime un éditorialiste malien. «Â s’ils sont incapables d’aller au nord remplir leur mission première, celle de défendre leur pays face aux envahisseurs, ils n’ont pas à  faire de la politique », s’insurge Abou, un jeune étudiant. Pour certains , cette décision montre l’influence toujours présente de l’ex junte sur le gouvernement de transition : « Faire disparaitre définitivement le CNRDRE, signifie, l’inutilité d’un gouvernement qui est le fruit de l’Accord cadre entre la CEDEAO, et le CNRDRE », argue Abdramane Diarra enseignant. Harouna pense que « le Premier ministre Cheick Modibo Diarra travaille sous l’instruction du capitaine Amadou Haya Sanogo. s’il accepte que le CNRDRE disparaisse complément, C’’est comme se tirer une balle dans le pied ». Enfin de compte, la création d’une structure pour absorber le CNRDRE serait-elle une manière pour l’ex junte,de défier en deça, la communauté internationale ? « Après avoir accordé l’amnistie aux ex putschistes, on promet aux militaires, une entité pour ne pas les froisser. Le vrai homme fort reste le capitaine Sanogo et ses complices », lâche Mariétou, journaliste. Affaire à  suivre !

L’amnistie des putschistes votée

Après son adoption en Conseil des Ministres, le 6 mai 2012, il restait aux députés de voter la fameuse Loi d’amnistie des membres du CNRDRE, auteurs du coup d’Etat et des troubles sociopolitiques que traverse le Mali depuis le 22 mars 2012. Voté ce vendredi 18 avril, à  l’unanimité des députés présents, l’amnistie «Â bénéficie aux officiers, sous officiers, hommes de rang et toutes autres personnes leur ayant apporté un concours ». «Â Violation de la constitution » Condamné par la communauté internationale, les partis politiques et la société civile, le coup d’Etat du 22 Mars 2012 est contraire à  la Constitution du Mali. «Â Tout coup d’Etat ou push est un crime imprescriptible contre le peuple malien », stipule l’article 121 de la Constitution du 25 février 1992. Celui du 22 Mars, a été émaillé d’infractions et d’atteinte à  la sureté de l’Etat. Destruction de biens publics, violence, enlèvements, séquestration, et pillages etC’… Les nouveaux maitres du pays (CNRDRE) ont pris le pouvoir en destituant l’autorité d’Amadou Toumani Touré. Face à  l’embargo de la CEDEAO, les membres du CNRDRE se sont engagés à  rétablir l’ordre constitutionnel normal. En incluant dans l’Accord Cadre signé le 1er Avril entre les deux parties, une loi d’amnistie pour les militaires. Apaiser le climat social… Pour Me Kassoum Tapo, rapporteur de la Commission Loi, le vote de la loi d’amnistie des putschistes, «Â ne doit pas préjudicier aux droits des victimes ». Pour l‘avocat, la loi permettra à  toutes victimes de bénéficier d’une indemnisation. Autre justification du vote, le rétablissement de la paix civile et de la cohésion sociale. « Il subsistera certainement quelques amertumes. De part et d’autres, il y aura des frustrations à  inhiber. Tout dépendra de la capacité des maliens à  dépasser les ranC’œurs d’un passé récent », précise de son côté, Abouzeidi Ousmane Maiga, de la Commission des Affaires étrangères des Maliens de l’extérieur et l’intégration Africaine (CAEMEIA)… Cela en attendant de choisir un nouveau président de transition…

Sécurité intérieure : Diagouraga n’échappe pas au limogeage

A l’exception du D.G des douanes, il était encore le seul «Â survivant » dans la hiérarchie des forces armées et de sécurité à  ne pas avoir subi le coup de balai entrepris depuis le coup d’Etat du 22 mars. Depuis mercredi, C’’est chose faite. Le ministre de la sécurité intérieure et de la protection civile, le général Tièfing Konaté, a relevé Mahamadou Diagouraga de ses fonctions de directeur général de la police nationale. Il est remplacé par Odà¯ouma Koné. Forte pression Au ministère de la sécurité intérieure on se refuse à  tout commentaire quant aux raisons de ce limogeage. Cependant, tout porte à  croire que l’atmosphère délétère au sein de la police et les bon rapports entre Diagouraga et le président déçu ATT, ont précipité ce départ. Depuis le coup d’Etat du 22, une majorité de policiers a demandé sa démission. En témoigne la marche organisée le jeudi 26 avril dernier, o๠les manifestants scandaient des slogans hostiles au directeur général de la police. ». Au motif que ce dernier n’a pu résoudre, depuis qu’il est aux commandes, aucun des défis qui se posent à  la corporation. En sa qualité de secrétaire général adjoint du Syndicat de la police nationale (SPN), le sergent-chef Siriman Fané a critiqué le règne de l’ancien président. Selon lui, ATT et ses hommes ont violé les droits des policiers et volé leurs salaires en utilisant l’argent à  des fins injustifiées et inavouées. « Victoire du syndicat » «C’’est Diagouraga qui a donné vie à  des syndicats moribonds et a encouragé la tension au sein de la police. Il avait déjà  été relevé en 2005 pour incompétence, pourquoi devrons-nous le garder après la chute d’ATT qui a signé son décret ?»; s’interroge au cours d’un meeting le sergent-chef Siriman Fané, secrétaire général du Syndicat de la police nationale. Qui exigeait son limogeage dès le premier Conseil des ministres. On comprend ainsi la forte tension qui régnait entre le D.G et ses hommes. Et le changement intervenu le mercredi 16 avril, consacre la victoire la victoire du syndicat. Jusque là  très peu connu du grand public, le nouveau patron des policiers aura sans doute du pain sur la place. Car il hérite d’une corporation très divisée entre les pros Sadio Gassama (ancien ministre) et les policiers proches du Comité de redressement de la démocratie et de restauration de l’Etat (CNRDRE). La nomination d’Odà¯ouma Koné intervient dans un contexte d’extrême fragilité sur le plan sécuritaire à  Bamako et dans les villes de l’intérieur du pays.

Bassolé, point ultime sur les négociations

« Pour créer les conditions d’un dialogue fructueux, la Médiation s’est attachée à  obtenir le retour à  l’ordre constitutionnel comme l’a exigé la CEDEAO, afin que les nouvelles autorités maliennes soient reconnues et acceptées par la communauté internationale et qu’elles engagent avec les groupes armés du nord du Mali un processus crédible de sortie de crise », a déclaré Djibril Bassolé, devant les confrères burkinabés. « Poursuivre l’ordre constitutionnel » Après l’échec des dernières négociations avec la junte, Djibril Bassolé est revenu sur le processus de retour à  l’ordre constitutionnel enclenché avec la déclaration solennelle du Capitaine Sanogo le 1er avril 2012, et par laquelle il s’engageait à  rétablir la Constitution du 25 février 1992 et les institutions républicaines.Un ordre constitutionnel du reste troublé par l’omniprésence de la junte au pouvoir et de multiples incursions des hommes du CNRDRE dans la vie politique malienne. Mais la CEDEAO fonctionne par étape avec la signature de l’Accord cadre. Un accord selon Bassolé, qui a permis d’obtenir l’installation du Président de l’Assemblée Nationale M. Dioncounda Traoré comme Président de la République par intérim le 12 avril 2012 en application de l’article 36 de la Constitution malienne et la nomination de Cheick Modibo Diarra comme Premier Ministre de transition le 17 avril 2012, suivie de la formation d’un gouvernement de transition le 24 avril 2012″. Du reste, cet Accord ne mentionne en rien la prorogation du mandat du président intérimaire. Point sur lequel s’appuie Sanogo pour exiger le départ de Dioncounda Traoré. « Aller au delà  des 40 jours » Le désaccord est donc survenu avec la décision de la CEDEAO de prolonger la transition à  12 mois avec Dioncounda comme président : «La CEDEAO considère être soucieuse de la stabilité des institutions républicaines, et estime que ce délai de 40 jours pour organiser l’élection présidentielle ne saurait être considéré comme la durée limite du mandat du Président de la République par intérim, surtout que l’organisation de l’élection présidentielle s’avère matériellement impossible dans les conditions actuelles d’occupation des 2/3 du territoire malien par des groupes armés » « Le délai de 40 jours prévu à  l’article 36 de la Constitution pour l’intérim du Président de la République, qui polarise les débats au Mali, ne doit pas être une source de blocage ou de remise en cause du processus de normalisation », explique Bassolé. Pour contraindre la junte à  accepter ces dispositions, la CEDEAO a brandi de nouvelles menaces de sanction sur le Mali. « Intervention au nord » ? Dans sa démarche, la CEDEAO met désormais en avant l‘urgence du nord. Si elle a déjà  prévu d’envoyer une force militaire en Guinée Bissau, pour le Mali, il faudra élaborer un agenda de sortie de crise au nord du Mali. Il s’agira de parvenir dans les meilleurs délais, à  un accord entre le gouvernement de transition et les mouvements armés qui préserve l’intégrité du territoire national malien… La convention nationale proposée par Sanogo a elle été boycottée par certains partis politiques maliens. Ce sera donc la main de fer de la CEDEAO contre l’obstination de la junte.

Liberté de la presse au Mali : haro sur les arrestations arbitraires

Alors qu’en matière de liberté de la presse, le Mali s’est classé 25è, dans le rapport 2012 de Reporters sans frontières, il risque de perdre quelques points dans le classement, au vu du contexte politique et sécuritaire qui prévaut depuis le putsch du 22 Mars. Un contexte propice aux dérives et atteintes de toute sortes. « Deux interpellations en une semaine » En l’espace d’une semaine, deux directeurs de publication de journaux privés ont été interpellés à  Bamako dans l’exercice de leur fonction, par la Sécurité d’Etat. Il s’agit de Birama Fall, directeur du Prétoire et de Saouti Labass Haidara, patron du Journal l’indépendant. Le premier a été convoqué par la sécurité d’Etat le vendredi 11 Mai. Il subira un interrogatoire sur des entretiens téléphoniques relatifs à  l’existence d‘un « charnier ». Birama Fall sera libéré 4h plus tard dans l’après midi. Au deuxième, on reproche de s’être fait l’écho d’un tract mentionnant des attentats à  Bamako et des attaques contre le CNRDRE et signé de la main d’un certain capitaine Touré. Interpellé aux environs de 18h, le mercredi 16 Mai, Saouti Haidara a été interrogé. Les agents de la SE lui ont demandé de fournir toute information complémentaire concernant ce tract. Il a été relâché dans la soirée. « La Maison de la presse monte au créneau » En réaction à  ces interpellations et soucieuses d’en prévenir d‘autres, les associations de la presse réunies sous la coupe de la Maison de la Presse, ont émis une déclaration pour dénoncer ce qu’ils appellent  » des tentatives d’intimidation et de musèlement de la presse pour intentions inavouées et par des méthodes policières aux antipodes de la démocratie et de la liberté de presse utilisées par les autorités actuelles (la présidence de la république, le gouvernement et la junte militaire) ». Pour Makan Koné, président de la Maison de la Presse, les atteintes à  la liberté de la presse sont manifestes et sont citées dans une déclaration à  l’intention du grand public mais aussi des autorités actuelles : Alors que les acteurs de la presse reprochent aux autorités leur silence sur ces deux arrestations, ils entendent porter ces affaires à  la connaissance de tous et ne point passer sous silence ces atteintes à  la liberté de la presse. Affaire à  suivre…

Une convention nationale est-elle bien utile ?

Le président du Comité de redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (CNRDRE) a fini par revenir sur ce qu’il avait déjà  proposé à  la classe politique malienne au lendemain du putsch du 22 Mars. La tenue d’une Convention nationale réunissant l’ensemble des forces vives de la nation. l’annonce a été faà®te ce lundi 14 mai lors d’un point de presse au QG de la junte à  Kati. Cette Convention nationale, qui devra être convoquée par le Premier ministre et présidée par le président intérimaire, Dioncounda Traoré, doit permettre de choisir le président de la transition, de mettre en place les organes de transition et de définir sa durée. Cela en dépit des décisions prises par la CEDEAO. « Le MP 22 monte une nouvelle fois au créneau » A l’annonce de la nouvelle, le Mouvement Populaire du 22 mars « MP 22 » a immédiatement adhéré et proposé un document : « La création de structures devant conduire la transition. Nous proposons aussi que le capitaine Amadou Haya Sanogo conduise la transition », nous a confié Dr Etienne Oumar Sissoko à  sa sortie de la réunion du MP 22. Pour lui, la convocation d’une Conférence nationale constitue une victoire pour le MP 22 qui avait insisté depuis toujours sur sa nécessité. « Des assises utiles ?  » Pour le Front Uni pour la Sauvegarde de la République et la démocratie (F, on n’est pas disposé à  prendre part à  ses assises, selon le secrétaire à  la communication de l’ADEMA-PASJ. « Le FDR, qui tiendra ce mardi soir une réunion d’urgence sur la question, devra adopter une déclaration claire », nous explique Mamoutou Thiam. Pour qui cette Convention n’a aucune utilité. « Dès lors que nous avons accepté le rétablissement de la Constitution du 25 février 1992, et le fonctionnement normal des institutions, une Convention nationale ne s’impose pas », tranche le secrétaire à  la communication de l’ADEMA. Cette convention risque donc une nouvelle fois d’être avortée et de creuser le différend entre le CNRDRE et la CEDEAO.

Transition : Et après les 40 jours ?

«Â  Dioncounda dirige la transition  pendant 12 mois » Pour cet élu de la commune de Gao, le maintien de Dioncounda Traoré à  la tête de l’Etat est souhaitable, «Â cela pour ne pas ramener le processus de transition déjà  enclenché en arrière ». Laisser le président intérimaire et le gouvernement continuer leur mission, pendant un an, conformément aux décisions du Sommet de la CEDEAO tenu à  Abidjan le 26 Avril, serait la voie souhaitable pour s‘attaquer aux problèmes urgents comme le nord. En outre, Dioncounda Traoré bénéficie de l’adhésion de la communauté internationale plutôt encline à  appuyer un pouvoir civil que militaire au Mali. Alors, comment les deux médiateurs de la CEDEAO qui ont quitté Bamako ce week-end, peuvent-ils convaincre le capitaine Sanogo d’accepter cette option ? Du reste, même si Dioncounda a déclaré qu’il démissionnerait au terme des 40 jours, tout plaide en faveur de son maintien à  la tête de la transition. Si les Etats-Unis sont montés au créneau pour demander que le CNRDRE démissionne, plusieurs programmes d’aide ont été suspendus au Mali entretemps, ce qui pourrait axphyxier l‘économie malienne. l’Union européenne a également exprimé sa volonté d’assister le Mali à  condition de rester dans l’ordre constitutionnel… La CEDEAO va-t-elle durcir le ton et imposer un nouvel embargo pour forcer son choix ? «Â La junte revient au pouvoir ?  » Deuxième éventualité, voir la junte, avec à  sa tête le Capitaine Amadou Haya Sanogo, diriger le processus de transition. De l’avis de la plupart des observateurs, «Â Sanogo a déjà  obtenu beaucoup depuis le 22 Mars, dont trois ministères clés dans le gouvernement de transition, quelle compétence a-t-il pour mener une transition aussi sensible. Son rôle n’est-il pas de réorganiser l’armée pour aller à  la reconquête du nord ? », signale cet enseignant. Loin de courber l’échine, le capitaine Sanogo vient d’appeler à  une Convention nationale avec les forces vives de la nation. Sanogo cherche t-il le soutien du Mali contre la CEDEAO ou à  gagner du temps, pour un imposer le choix d’un homme, qui conviendrait au CNRDRE ? Les parties politiques prendront-ils part à  cette concertation ayant déjà  été exclus des négociations entre la CEDEAO et la junte, relatifs à  la signature de l’Accord Cadre du 6 Avril ? Ce qui est sûr, C’’est que la junte aura son mot à  dire… «Â  Pleins pouvoirs au PM » Troisième éventualité, à  défaut d’un consensus entre le CNRDRE et la CEDEAO, le premier ministre Dr. Cheick Modibo Diarra pourrait conduire la transition au nom du consensus qui a prévalu pour sa nomination. Les deux parties signataires de l’Accord-cadre auraient alors une nouvelle convergence de vue sur l’Astrophysicien, qui prendrait la tête d’un Mali coupé en deux. Dans l’éventualité o๠ce dernier était nommé Président de la transition, une autre personnalité pourrait le remplacer au poste de Premier ministre. Les négotiations elles sont au point mort entre le CNRDRE et la CEDEAO qui vient de brandir la menace de nouvelles sanctions. Le bras de fer reprend le dessus dans la médiation. Une autre alternative serait de renforcer le grade du capitaine Sanogo, en le plaçant à  la tête comité de Programmation militaire pour calmer les ardeurs des hommes en treillis. l’objectif final reste d’aboutir à  un climat sociopolitique apaisé pour permettre aux autorités de transition de s’atteler à  la libération du nord et d’organiser des élections générales. Surtout, rassurer le peuple malien sur son avenir proche…

Bassolé et Bictogo : le duo pour sauver le Mali

L’un est ministre de l’Intégration africaine de la Côte d’Ivoire. L’autre est ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso. Depuis le coup d’Etat du 22 mars ils ont fait plus de voyages entre Bamako, Abidjan, Dakar et Ouagadougou que les plus actifs des commerçants ou hommes d’affaires. Leur mission n’est pas simple : sauver le Mali. Le premier, Adama Bictogo, posait souriant derrière Amadou Toumani Touré (ATT) lors du sommet de l’Union africaine de Bamako le 20 mars. L’Ivoirien était alors loin de s’imaginer que deux jours plus tard, le président malien serait renversé par des militaires, et que lui-même serait appelé au chevet du Mali. Deux hommes d’expérience A 50 ans Adama Bictogo est un homme de mission. Cadre du Rassemblement des Républicains, il est un intime d’Alassane Ouattara pour qui il bat campagne en 2010 à  l‘intérieur du pays. Ses talents de négociateur, la finesse et la pertinence de ses analyses politiques sont appréciés par tous. Cet ex-conseiller spécial de Robert Guei – c’est dire s’il connaà®t l’âme militaire – aime parvenir rapidement à  des accords. L’homme a le contact facile et tend sa carte de visite avec courtoisie, rapporte une journaliste mandatée à  Ouagadougou. Djibril Yipéné Bassolé, ministre burkinabè des Affaires étrangères, est de 5 ans son aà®né. Il jouit de toute la confiance du président Blaise Compaoré. Il a occupé le ministère de la Sécurité puis celui des Affaires Etrangères. De 2008 à  2011, il est le médiateur de l’Union africaine au Darfour. « Bassolé est un homme discret, en retenue, il a le sens de l’‘écoute et de la diplomatie », confie un de ses collaborateurs. Derrière le duo, se cache un troisième homme, l’ambassadeur du Burkina Faso au Mali Mohamed Sané Topan. Il gère presque tous leurs déplacements. Décollage manqué L’entrée en scène de Bassolé et Bictogo est agitée. Le 28 mars, au lendemain du sommet post coup d’Etat de la Cédéao à  Abidjan, ils attendent dans le salon d’honneur de l’aéroport de Bamako Sénou l’arrivée des 5 chefs d’Etat mandatés. Ils ne les verront pas. Une manifestation de pro-putchistes envahit le tarmac, empêchant les atterissages. Après la confirmation de l’annulation de la rencontre, les journalistes assaillent de questions Djibril Bassolé. Il se contente finalement de déclarer qu’  » un certain nombre de conditions n’étaient pas réunies pour l’atterrissage des chefs d’Etat « . Repli à  Abidjan. Vient ensuite le temps des aller-retours à  Kati, le quartier général de la junte entre le 28 mars et le 6 avril, date de la signature de l’Accord-cadre entre la Cédéao et le CNRDRE. En toutes circonstances, Bassolé reste un homme calme, aux propos mesurés. Cela a sans doute joué pour parvenir à  la signature du fameux Accord Cadre du 1er Avril qui prévoyait l’installation d’un Premier ministre de transition et d’un gouvernement de mission. C’est désormais chose faite. Crise de confiance Le sort de Dioncounda Traoré, président par intérim se ficelle hors du Mali. A Ouagadougou il rencontre Blaise Compaoré et Djibril Bassolé. Les deux ministres l’accueilleront ensuite à  Bamako, le consulteront à  plusieurs reprises à  l’hôtel Salam, avant d’assister à  son investiture officielle comme Président par intérim le 12 avril 2012… La médiation menée par Djibril Bassolé a pour le moment la confiance de la junte. La donne change après le sommet d’Abidjan du 26 avril. Les chefs d’Etat africains décident de rendre à  Dioncounda Traoré ses pouvoirs constitutionnels, de le maintenir à  son poste pendant un an (durée maximum de la transition) et d’envoyer une force à  Bamako pour sécuriser la transition. Des décisions contraires à  l’Accord-cadre qui rendent furieux le CNRDRE. A Kati, on affirme que le président du CNRDRE se sent trahi par Djibril Bassolé, l’homme qu’il recevait avant tout autre visiteur. A Kati, o๠Bassolé et Bictogo accourent le 27 pour calmer les esprits, la tension entre les militaires et les médiateurs est à  son comble. Amadou Aya Sanogo doit calmer ses militaires face aux réactions hostiles à  l’égard des deux hommes. Bassolé tente comme il le peut de faire baisser la température :  » Nous sommes venus à  Bamako pour faire comprendre un certain nombre de mesures prises par la Cédéao.  » Et d’élargir le problème, en bon diplomate, à  la sous région, en insistant sur le danger que représente l’instabilité au Nord pour toute l‘Afrique subsaharienne. Bis répétita, le dialogue continue Nouveau rebondissement le 30 avril. Des bérets rouges de la garde présidentielle attaquent des positions des militaires putchistes. Nouvelle réunion de la Cédéao à  Dakar le 3 mai. L’organisation ouest-africaine met de l’eau dans son vin. Plus question d’envoyer unilatéralement sa force à  Bamako. On évoque le déploiement immédiat de la force « dès que les autorités en feront la requête ». Reste qu’au goût des voisins, le CNRDRE est toujours beaucoup trop présent. Ils demandent au médiateur de « procéder à  la revue du rôle du CNRDRE dans la transition ». La mission de Djibril Bassolé et d’Adama Bictogo est loin de toucher à  sa fin. Après le sommet de Dakar aucun accord n’est trouvé entre les militaires et la médiation, qui se retrouvent au Burkina Faso. Les deux ministres sont de retour au Mali le 9 mai. « Nous sommes revenus à  Bamako pour poursuivre le dialogue avec l’ex-junte, avec toutes les parties, déclare alors M. Bictogo. Le peuple frère du Mali mérite qu’on l’accompagne le temps qu’il faut. Tout le monde est mobilisé pour ça. » Le gant de velours de la médiation qui cache la main de fer de la Cédéao est pour le moment parvenu à  maintenir le dialogue ouvert avec des militaires échaudés par les revirements de l’organisation ouest-africaine. La fin des 40 jours de l’intérim présidé par Dioncounda Traoré sera un nouveau test pour le duo dont la patience sera mise à  rude épreuve…

Accord Cadre : la CEDEAO et la junte à couteaux tirés

Si l’institution panafricaine avait déjà  été décriée pour avoir imposé un embargo aux Maliens dès les premières heures du putsch, sa légitimité est désormais contestée par bon nombre d’observateurs. En cause, sa capacité à  gérer les crises maliennes et bissau-guinéennes. On se souvient que la mission de cinq chefs d’Etat, mandatée par le président en exercice Alassane Dramane Ouattara, n’avait pu atterrir à  Bamako pour discuter d’un retour rapide à  l’ordre constitutionnel avec la junte. Cette fois, la CEDEAO met le paquet et annonce une transition d’une durée de 12 mois, dirigée par le Président intérimaire Dioncounda Traoré, alors que la constitution ne prévoit qu’une durée de 40 jours pour ce dernier.  » La junte rejette les décisions de la CEDEAO  » Aussitôt la décision prise à  Abidjan, le capitaine Amadou Haya Sanogo n’a pas attendu pour monter au créneau. Dans une intervention télévisée, le putschiste a annoncé que le délai constitutionnel des 40 jours du président intérimaire sera respecté. En clair, avertit l’ex-chef de la junte, pas question de prolonger de ce délai. Que va-t-il se passer désormais du côté des putschistes, qui venaient d’obtenir trois ministères clés dans le nouveau gouvernement de transition que préside Cheick Modibo Diarra. La Cédéao a également annoncé l’envoi de 600 hommes à  Bamako pour sécuriser les organes de la transition. « A quoi va servir cette force ?, s’indigne un citoyen. Ce qu’il nous faut, C’’est de l’aide au nord, pas à  Bamako ! ». Face à  la radicalisation des décisions de la CEDEAO, d’aucuns estiment qu’elles sont dictées par les récentes arrestations de personnalités politiques à  Bamako par la junte.  » Violation de l’Accord Cadre » Alors que l’Accord cadre du 1er Avril, signé entre la junte et la CEDEAO, avait fixé une convention nationale o๠devait être discutées la durée et les modalités de la transition malienne suite au coup d‘état du 22 Mars, cette ingérence de la CEDEAO dans le processus normal de retour à  l’ordre constitutionnel, confirme une gestion bizarre de la crise malienne, selon un observateur. Au profit de qui ? «Ces chefs d’Etat qui sont pour la plupart arrivés au pouvoir de façon anti-démocratique, peuvent-ils appliquer de telles décisions au peuple malien ?, s’interroge un éditorialiste. Pour d’autres, la sortie médiatique du capitaine Sanogo, n’arrange pas le processus de sortie de crise. Si le capitaine est dans son droit de rester attaché à  l’esprit de l’Accord-cadre, il ne fait aucun doute que la junte compte revenir au pouvoir après les 40 jours du président Dioncounda Traoré, exigé par la Constitution. Les putschistes chez Blaise Selon plusieurs sources, une délégation de la junte militaire devrait se rendre aujourd’hui à  Ouagadougou chez le médiateur de la CEDEAO. Il s’agira pour les militaires de signifier au président Blaise Compaoré leur opposition à  la décision du sommet et de proposer une alternative. Mais en attendant, les observateurs sont formels. De grosses incertitudes planent désormais sur la transition. Et l’après 17 mai (devant marquer la fin de l’intérim), s’annonce sous haute tension entre le président Dioncounda, appuyé par la CEDEAO et l’ex chef de la junte. Ce blocage du processus intervient au moment o๠le gouvernement de transition, mis en place le 25 avril par Cheick Modibo Diarra, tient aujourd’hui une réunion de cabinet. Sur leur table, plusieurs dossiers brûlants, dont l’épineuse question du Nord et la crise humanitaire. Pour la gestion de la transition, tout reste à  jouer en attendant un compromis entre les émissaires de la junte et le médiateur Blaise Compaoré.

Gouvernement de transition : les jeux sont faits, rien ne va plus!

Les Maliens attendaient un gouvernement de combat resserré autour de 15-20 membres maximum. C’’est finalement une équipe de 24 ministres, contre 29 dans l’équipe sortante, qui a été annoncée. La nomination une semaine plus tôt de Cheikh Modibo Diarra à  la Primature avait déjà  suscité quelques émois, non pas à  cause de son profil, mais plutôt du procédé. Aucune concertation de la classe politique ni de la société civile n’avait eu lieu au préalable, donnant l’impression d’un choix imposé par la junte et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La classe politique, grande perdante Une semaine plus tard, les forces vives de la nation ont une nouvelle fois été mises devant le fait accompli. C’’est un gouvernement de technocrates qui a été nommé, au grand dam d’une classe politique qui n’y compte aucun représentant. Sans aller jusqu’à  intégrer des politiciens dans le nouveau gouvernement, le Premier ministre aurait été mieux inspiré de consulter toutes les forces vives, dont il aura forcément besoin pour relayer sa politique auprès des populations. Des découpages discutables Alors que le président renversé, Amadou Toumani Touré (ATT), avait découpé certains grands ministères uniquement pour satisfaire ses amis politiques, le nouveau gouvernement retrouve une architecture plus traditionnelle à  travers le regroupement de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, mais aussi de la communication et des nouvelles technologies, du tourisme et de la culture. Il est néanmoins regrettable que le grand ministère de l’Education nationale reste divisé, de même que celui des Affaires étrangères, toujours indépendant de celui des Maliens de l’extérieur. Plus surprenant encore, le ministère de la Jeunesse et des sports a été éclaté. En ces temps de guerre, de crise alimentaire et de ralentissement économique, le Mali peut-il se payer ce luxe ? Avantage à  Blaise Compaoré et au CNRDRE Depuis l’éclatement de la crise politico-militaire le 22 mars dernier, beaucoup craignaient que le Mali ne soit mis sous la tutelle du Burkina Faso. C’’est aujourd’hui chose faite. Après l’humiliation de la rencontre de Ouagadougou, les 14 et 15 avril, o๠quasiment toute la classe politique malienne s’était déportée pour une réunion qui n’a servi à  rien, le président Blaise Compaoré a obtenu la nomination de son conseiller spécial Sadio Lamine Sow au poste stratégique de ministre des Affaires étrangères du Mali. Ce dernier saura t’il s’émanciper de son ancien maà®tre qu’il a servi pendant plus de 20 ans? Difficile à  croire quand on sait que le médiateur désigné par la CEDEAO n’est autre que le président burkinabé… Les militaires à  la tête de ministères clés Un mois après son coup d’Etat du 22 mars, le Comité national de redressement de la démocratie et de restauration de l’Etat (CNRDRE) reste au centre du jeu. Bien que la junte ait concédé un semblant de retour à  l’ordre constitutionnel à  travers la désignation de Dioncounda Traoré comme président par intérim, elle garde la main sur les principaux leviers du pouvoir, comme l’atteste la présence de trois de ses membres à  la tête de ministères clés. Le colonel major Yamoussa Camara, qui connaà®t bien le Nord Mali, le Général Tiéfing Konaté, et le Colonel Moussa Sinko Coulibaly obtiennent respectivement la défense, la sécurité, et l’administration territoriale. Ce dernier, diplômé de la prestigieuse école militaire française St Cyr, est le directeur de cabinet du chef de la junte, le capitaine Amadou Haya Sanogo. Le message est donc clair : les anciens putschistes vont contrôler le processus électoral. Mais au profit de qui ? Le Général Moussa Traoré est de retour l’autre grand gagnant de ce casting gouvernemental est l’ancien président, le général Moussa Traoré, victime d’un putsch le 26 mars 1991 à  l’instigation d’un certain ATT. La nomination de son gendre à  la Primature était déjà  un premier signal, qu’est venu renforcer la désignation de certains de ses proches, tels que son ancien ministre Tienan Coulibaly, jusqu’ici PDG de la Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT), ou encore Léo Sidibé nommé à  l’agriculture. Un gouvernement d’union nationale ? Si le Premier ministre avait voulu donner un signal fort en direction des populations du Nord qui sont dans leur grande majorité hostiles à  la partition du Mali, il aurait nommé des ministres issus des communautés blanches, arabes et touarègues. Or, il n’en est rien. La nomination de Madame Alwata Ichata Sahi, une touarègue noire, est un cache misère qui ne fait que verser de l’eau au moulin du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ce dernier qui occupe avec ses alliés tout le Nord Mali a proclamé l’indépendance du «Â territoire de l’Azawad », le 6 avril 2012, prétextant leur exclusion par le pouvoir de Bamako. Dans le contexte actuel, Cheick Modibo Diarra et ses parrains ont donc commis une faute morale et une faute politique. Au lieu d’annoncer un véritable gouvernement d’union nationale qui réunisse toutes les composantes de l’ensemble national, ils ont choisi de prendre acte de la partition effective du grand Mali.

Le poing levé du FDR pour la démocratie

Ce qu’il faut retenir de ce meeting tenu samedi 21 avril au Palais de la Culture Amadou Hampaté Ba de Bamako, C’’est la salle archicomble et la fougue des membres du Front Uni pour la Sauvegarde de la République galvanisés par les récentes arrestations de personnalités politiques par la junte au motif d‘un contre coup d‘état. «Â  Les militaires ne font que distraire la population » Constitué d’une centaine d’associations de la société civile et d’une cinquantaine de partis politiques, le FDR a réuni plus de 3000 personnes pour faire passer un seul message, celui de la sauvegarde de la démocratie et le retour à  l’intégrité territoriale du Mali. Pour Siaka Diakité, Président du Front, la population malienne doit agir et ne peut continuer à  se laisser distraire par les militaires : D’autres leaders du FDR comme Tiéman Coulibaly ou Maà®tre Kassoum Tapo, tous deux galvanisés par leur 48h de détention au camp de Kati, n’ont pas fait dans la dentelle : «Â  Tolérance zéro face à  la violation de la constitution », a clamé l’avocat à  la foule, le poing en l’air. Expliquant les causes de leur arrestation par le CNRDRE, Maà®tre Tapo et Tiéman Coulibaly, ajouteront que la junte n‘a pas apprécié leur déclaration à  Ouagadougou concernant l‘application de l‘Accord Cadre et qui doit en principe respecter la Constitution maliennede 1992 : , précise Kassoum Tapo profitant de l’occasion. «Â  l’appel à  la CEDEAO pour libérer le nord «Â  Iba Ndiaye, premier vice président de l’Adema, a lui lancé un vibrant appel à  la CEDEAO pour qu’elle intervienne de toute urgence et renforce l’armée malienne pour reconquérir les régions occupées du nord. Au moment o๠Cheick Modibo Diarra, Premier ministre appelle à  la négociation avec les occupants du nord dans son premier discours à  la nation, certains, échauffés par les agissements de la junte à  Bamako, réclament l’offensive : Pour Amadou Koita, président de la jeunesse FDR, le CNRDRE ferait mieux d’encercler les régions du nord au lieu de faire pression sur la télévision nationale et transformer le camp Soundiata de Kati en « bounker ». Grands absents à  ce meeting du FDR, Soumaila Cissé, le leader de l’URD qui s’est envolé ce week-end à  Paris pour y recevoir des soins. Son interpellation la semaine dernière lui a valu quelques blessures sérieuses. Et Modibo Sidibé, le candidat indépendant qui en était à  sa troisième interpellation… Le Front poursuit lui son action.

Et la junte rentra dans sa caserne…

A tous ceux qui protestent contre les agissements de la junte, il est vain de croire que la formation du gouvernement va y changer quoique ce soit surtout, si les super ministères convoités par les membres du CNRDRE leur sont octroyés d‘office. Justice, Mines, Santé, Sécurité Intérieure, Défense bien entendu, les supputations enflent à  Bamako. Consultations nous dit-on. Elles devraient donc voir leur terme ce lundi. Dans son fief de Kati, Sanogo a reçu la visite de toutes les autorités dites constitutionnelles de ce pays, à  commencer par le président de la République par intérim, ce qui choque une bonne frange de la population. Mais C’’est oublier que C’’est de Kati qu’est parti la révolte. Que C’’est encore de Kati que C’’est négocié le fameux et flou Accord Cadre qui régit notre république à  trois têtes. Et que C’’est certainement à  Kati que tout s’achèvera, lorsque les militaires décideront de rentrer dans leurs casernes, en laissant V8, honneurs et courtisaneries à  tout va.. Du reste, l’homme qui nous intéresse, tout autant que le capitaine Haya, dont l’épouse est couverte de basins aujourd’hui, elle qui vendait fripes et «Â froufrous » il y a quelque temps, C’’est le Docteur Diarra, notre astrophysicien à  la barbe poivre et sel, à  la sagesse planétaire. Dans son discours, Cheick Modibo Diarra l’a affirmé : ‘ Nous ne négocierons jamais le couteau sous la gorge ». Certes, mais à  l’heure o๠nous devons négocier, le Mali se trouve tiraillé entre volonté de négocier et d’attaquer. Blessé dans son orgueil, le sursaut national est en marche, dans la rue comme dans les «Â grins.». Pourtant, il faudra encore patienter dans un pays o๠tout se règle d’abord par la langue, le verbe. La forme comptant autant que le fond, nous ne chercherons pas à  décrypter un discours qui n’a pas d’autre visée que de jouer le jeu politique normal et d’obéir à  une règle circonstancielle. Il est donc plus intéressant d’attendre la composition de ce futur gouvernement, qui n’aura qu’une seule mission : Recouvrer l’intégrité du territoire national. Et faire fi des considérations partisanes et surtout, arrêter de gesticuler autour du capitaine Haya Sanogo. Cela ne rendra pas service à  la nation malienne.

Les prisonniers ont été libérés

C’est un nouveau rebondissement dont la junte commence à  être coutumière. Les personnalités civiles et militaires arrêtées en début de semaine ont été libérées, a annoncé le CNRDRE jeudi soir. « Le Directeur général de la Gendarmerie nationale informe l’opinion publique nationale et internationale qu’il a été procédé ce jeudi 19 avril 2012 à  l’élargissement de l’ensemble des personnalités civiles et militaires mise en causes, à  l’issue de l’expiration du délai légal de garde à  vue », indique le communiqué en précisant que « les intéressés resteront à  la disposition des autorités compétentes pour les besoins de l’enquête ». Explications floues Parmi les personnes arrêtées (22 au total) figuraient l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé et l’ancien ministre des Finances Soumaà¯la Cissé, tous deux candidats à  l’élection présidentielle. Egalement Mahamadou Diagouraga, directeur général de la police, le général Hamidou Sissoko, chef d’état-major particulier de l’ancien président Touré, le général Sadio Gassama, ancien ministre de la Défense, Tiéman Coulibaly, membre de l’Union pour la démocratie et le développement (UDD) et Me Kassoum Tapo, ancien bâtonnier et porte-parole du Front du refus. « Tiéman Coulibaly est content d’être sorti », réagit Mohamed Dollo de l’UDD, selon qui le leader politique « s’attendait à  être arrêté ». Toutes ces personnalités avaient été arrêtées en début de semaine « sur la foi d’indications précises et d’informations graves et concordantes », avait affirmé la junte, qui avait laissé entendre qu’un coup d’Etat était en préparation. « Des éléments de l’armée continuent de violer l’Etat de droit » Ces arrestations avaient été dénoncé au Mali comme à  l’étranger. Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, avait appelé à  la libération des détenus et demandé à  la junte de « s’abstenir de toute autre action susceptible de compromettre le retour effectif à  l’ordre constitutionnel dans le pays ». « Ces arrestations montrent clairement que, malgré le rétablissement du pouvoir civil, des éléments de l’armée continuent de violer l’à‰tat de droit » avait pour sa part déclaré l’ONG Amnesty International.

La paisible retraite au soleil du général

Il l’avait plusieurs fois répété avant le coup d’état, qu’il était pressé de partir. Qu’il ne briguerait sûrement pas un troisième mandat. La déclaration avait plue. Eté considérée comme un acquis démocratique dans un pays stable politiquement. Le sort en a décidé autrement et précipité la sortie d’Amadou Toumani Touré à  la faveur d’une mutinerie transformée en coup d’état le 22 Mars 2012. C’est donc par le versant d’une colline qu’ATT descend des arcanes dorées du pouvoir. Porté par son fidèle aide de camp, il s‘enfuit sous les balles des putschistes mécontents. La chute aura été dure pour celui qui se voulait un sage, un chantre de la démocratie. Protégé par les Américains, ATT sera ensuite recherché par tous. Journalistes, junte, personnalités, tous se sont demandés o๠était le président déchu. A l’intérieur oà¹ à  l’extérieur du Mali… Mais en terre du Mandé, rien ne se cache et Samanko, à  quelques kilomètres de Bamako, en plein verdure, accueillera l’homme d’état que la providence a abandonné un soir du 21 Mars… Au lendemain d’un étrange retour à  l’ordre constitutionnel, ATT démissionne de son poste du fond d’une villa du quartier de l’ACI 2000, en toute discrétion et loin des caméras de télévision. l’on retiendra de cette lettre de démission, une phrase forte : « Je demande pardon à  toutes celles et à  tous ceux qui ont pu souffrir du fait des actes que J’ai posés, sans intention de nuire, durant mes deux mandats. » Ce seront enfin les murs de l’Ambassade du Sénégal à  Bamako qui serviront de transit à  l’ancien président qui embarquera à  bord de l’avion de Macky Sall. Bye-bye Bamako… De sa terre et vibrante du Mandé, ATT réside désormais sur les côtes douces et ensoleillées de la Téranga sénégalaise dans la résidence réservée aux hôtes de marque. Une retraite bien paisible pour le général et les siens… Voudra-t-il un jour parler ? Lorsque la nostalgie sera trop poignante.

Douanes : l’heure des comptes

Dans les jours qui ont suivi le coup d’Etat les passants de la Tour d’Afrique ont pu assister, médusés, au pillage de la direction générale des douanes. Des enfants, des hommes en uniforme sortaient de l’établissement les bras chargés de cartons. Aujourd’hui c’est l’heure des comptes. Retour au travail manuel «Â Jusqu’au 22 mars, la douane était dans une dynamique de modernisation très avancée. Toute la chaà®ne de dédouanement avait été informatisée », explique le directeur général Modibo Maà¯ga. Malheureusement, déplore-t-il, tous les équipements ont été saccagés ou emportés. «Â Chaque fois que l’on s’attaque à  des biens publics, C’’est un recul. » Les services tentent tant bien que mal de se remettre en marche. Certains bureaux stratégiques tels que ceux des régimes économiques, des exonérations et des Maliens de l’extérieur ont été relogés à  Sotuba. Certains services de la direction générale sont quant à  eux hébergés par le bureau des produits pétroliers. Pour le reste, c’est le retour aux anciennes méthodes manuelles. Les pertes occasionnées se comptent en milliards de FCFA. Sur une prévision de 26 milliards la douane n’a récolté que 16 milliards en raison des troubles qu’a connus le Mali ces dernières semaines. Les services n’ont pas travaillé entre le 22 et le 27 mars, notamment en raison de la fermetures des frontières qui a stoppé les mouvements de marchandises. La douane vache à  lait de la junte ? Répondant aux rumeurs selon lesquelles la douane serait devenue la vache à  lait de la junte, Modibo Maiga affirme que «Â la douane n’a ni le pouvoir, ni les moyens de donner l’argent à  qui que ce soit car elle ne manipule pas d’argent liquide ». l’administration des douanes, affirme-t-il, veille à  la régularité des procédures de dédouanement et au contrôle des opérations. « Le recouvrement et l’encaissement relèvent exclusivement du Trésor », précise-t-il.

IBK appelle à la libération des personnalités arrêtées

Depuis le 16 avril 2012, des personnalités militaires et politiques ont été victimes d’arrestations extrajudiciaires par des soldats en armes. Ces arrestations vont à  l’encontre de l’Etat de droit et du respect des libertés individuelles, des principes partagés par l’écrasante majorité du peuple malien. Ce sont des actes inacceptables que je condamne avec la plus grande fermeté. Alors que la nomination le 17 avril d’un Premier ministre de transition est un pas de plus vers la normalisation, ces actes portent une atteinte grave au processus de retour à  une vie constitutionnelle. Les arrestations arbitraires sapent la confiance entre les différentes parties prenantes alors que l’heure est à  l’union nationale. Je demande aux responsables du CNRDRE de libérer toutes les personnalités arrêtées, et encourage le Président de la République par intérim et le Premier ministre de transition à  tout mettre en œuvre pour que leur libération intervienne sans délai. Ibrahim Boubacar Keà¯ta Ancien Premier ministre Président du Rassemblement pour le Mali (RPM)

Cheick Modibo Diarra, de la NASA à la Primature du Mali

De Nioro du Sahel o๠il vit le jour en 1952, aux Etats Unis o๠il s’est distingué par ses travaux, Cheick Modibo Diarra a eu un parcours exceptionnel. Son baccalauréat en poche en 1972, il part étudier les mathématiques et la physique à  l’Université Pierre et Marie Curie à  Paris, puis l’Ingénierie Aérospatiale aux à‰tats-Unis à  Washington, o๠il obtiendra la nationalité américaine. C’’est à  la Howard University qu’il atterrit, grâce à  une bourse d’études. En 1989, l’année o๠le monde basculait avec la chute du mur de Berlin, une rencontre bouleverse le destin de Cheick Modibo Diarra. Alors qu’il se destinait à  une carrière d’enseignant, il rencontre deux chercheurs de la NASA qui lui proposent d’intégrer le laboratoire de propulsion des fusées, le fameux Jet Propulsion Laboratory. Quelques années plus tard, l’enfant de Ségou deviendra navigateur interplanétaire. Il travaille d’abord sur le projet d’envoi de la sonde Magellan dans l’espace, un univers qui l’a toujours fasciné. En juillet 1997, son heure de gloire est arrivée. Il conçoit et envoie une sonde qui atterrit sur Mars avec à  son bord un robot capable de se mouvoir, de réaliser des analyses scientifiques et de prendre des photographies de la planète rouge. La mission Pathfinder est un succès, et C’’est désormais une notoriété interplanétaire qu’acquiert Cheikh Modibo Diarra, devenu l’icône de tout un continent. Ses compatriotes maliens, notamment les jeunes, en sont fiers, même s’ils ne comprennent pas très bien ce qu’est un navigateur interplanétaire… Engagement social…et politique Après ses années au service de la NASA et des Etats-Unis, Cheikh Modibo Diarra se retourne vers son continent. Il y crée, en 1999, l’association Pathfinder Foundation pour l’Education et le développement, afin de susciter l’intérêt des jeunes, en particulier les filles, pour la science. A Bamako, il initie un laboratoire de recherche solaire. Cheikh Modibo s’envolera en 2006 vers Johannesburg pour y présider le département Afrique de Microsoft. Même s’il n’a qu’un rôle protocolaire et de représentation, il continue son combat pour réduire la fracture numérique et faire profiter le continent de toutes les avancées technologiques en promouvant de nombreuses initiatives sur le continent. Il est également Ambassadeur de bonne volonté de l’Organisation des Nations Unies pour la Science, l’Education et la Culture (UNESCO) depuis 1998. En 2011, ce père de trois enfants, marié à  la fille de l’ex-président Moussa Traoré se lance en politique. Le 6 mars, avec la bénédiction de son beau-père, il porte sur les fonds baptismaux un nouveau parti, le Rassemblement pour le développement du Mali, (RPDM), dont il devient le président. Le RPDM ambitionne alors de construire un projet de société basé sur l’égalité des chances pour tous les citoyens. Ses dirigeants présentent leur nouvelle formation comme « un parti qui défend les intérêts du peuple, l’égalité des chances, l’ équité, la souveraineté de l’Etat et respectueux des droits de l’Homme ». Cheick Modibo Diarra annonce dans la foulée qu’il sera très probablement candidat à  la présidentielle de 2012. «J’ai toujours fait de la politique. Au sens étymologique du mot, politique veut dire résoudre les problèmes de la Cité. Elle ne signifie pas aller faire des discours, courir de gauche à  droite. Je pense que J’ai toujours participé à  la résolution des problèmes de la Cité et continuerai à  résoudre autant de problèmes que je peux », déclarait-il ce jour là . La revanche du Général Moussa Traoré ? Comme le stipule l’Accord Cadre du 6 Avril signé entre la junte et CEDEAO, CMD devra pourtant renoncer à  son ambition présidentielle. Si l’on en croit les intentions de vote en sa faveur, il a sans doute fait le bon choix. Mais sera t’il à  la hauteur de l’enjeu ? La tâche ne sera sans doute pas facile pour ce Premier ministre « de consensus », pourtant nommé par le CNRDRE et le médiateur, sans que la classe politique et la société civile n’aient été consultées. Saura t’il s’imposer ? Aura t’il les coudées franches face aux militaires et au vieux renard politique qu’est Dioncounda Traoré ? Originaire de Ségou comme le capitaine Sanogo, chef de la junte, Cheick Modibo Diarra pourra aussi jouer de son lien de parenté avec Moussa Traoré, respecté par tous les militaires. Vingt ans après le coup d’état contre le Général dictateur, le capitaine Sanogo aura fait fuir son tombeur ATT, pour ensuite installer son gendre à  la Primature. Certains appellent cela la revanche de l’histoire. Quant à  l’attitude du peuple malien, elle dépendra sûrement de la capacité de l’homme de la Nasa, surtout connu dans les milieux informés, à  poser des actes justes dès les premiers jours. Selon ses proches, il a toutes les qualités pour être « l’homme de la situation ». Son charisme, sa stature internationale et surtout sa connaissance des réseaux financiers internationaux, ainsi que « l’estime » dont il jouit auprès des Partenaires techniques et financiers devraient lui servir pour l’immense tâche qui l’attend. A commencer par celle de former un gouvernement d’union nationale.

Bienvenue dans la République bananière du Mali

Entre la République Bananière de Kati et la République hôtelière du Salam, il y a 15km. Pour ceux qui n’ont pas compris grand chose à  cet Accord Cadre signé entre la junte et la Cédéao, il y a plusieurs niveaux de lecture. Et les Maliens sont entrain de s’en rendre compte. Chaque jour qui passe, montre une omniprésence de la junte dans les affaires du pays. «Â J’ai les forces armées… », déclarait le capitaine Amadou Sanogo, chef suprême dans son royaume de Kati à  nos confrères du Républicain. De Kati, les ordres continuent à  pleuvoir. Les nominations se poursuivent et les communiqués du CNRDRE pleuvent sur la télévision nationale… en langue bambara s’il vous plaà®t. Le capitaine Sanogo continue de s’adresser aux Maliens en faisant fi de la légalité constitutionnelle et avec l’aval de la CEDEAO. Dernière démonstration de la junte, l’arrestation en cascade ce mardi 17 Avril de personnalités politiques dont l‘ancien Premier ministre Modibo Sidibé, ou celle plus musclée de Soumaila Cissé, blessé et en soins à  l’hôpital de Kati. OnT suivi, Bani Kanté, un ancien conseiller à  la présidence et représentant des intérêts libyens au Mali tout comme un général de gendarmerie; «Â Pourquoi le capitaine ne respecte t’il pas la Constitution et les accords signés ? Il n’a qu’à  attendre son heure et le moment venu, au terme des 40 jours, il pourra se prononcer à  nouveau », commente un bamakois excédé. Entre la constitution malienne et l’Accord Cadre, il y a mélange des genres dans la pratique institutionnelle. La junte en acceptant de signer l’Accord Cadre joue sur les nerfs du peuple, tandis que le président par Intérim joue une course contre la montre face à  l’urgence du nord. La rencontre de Ouagadougou a elle abouti à  une déclaration vide, qui se répète et convoque une concertation des forces vives pour poursuivre la discussion sur les modalités de la transition. Passons ! Dioncounda Traoré peut-il se permettre de prendre part aux gesticulations de la junte à  Bamako en se mêlant de ses manœuvres politiciennes. En dépêchant un émissaire à  Nouakchott, pour mobiliser la Mauritanie dans la négociation avec les envahisseurs du nord, il a plutôt amorcé un début de solutions qui pourrait être compromis par les coups d’éclat du CNRDRE. D’un autre côté, le consensus voulu par tous autour de Dioncounda semble bien fragile. Durée de la transition ? Les partis politiques et la société civile ne sont pas d’accord. En attendant le retour total et définitif à  l’ordre constitutionnel, la junte du capitaine Sanogo semble décidée à  montrer les muscles au peuple malien. Bienvenue dans la République Bananière du Mali.

Dioncounda investi Président du Mali par intérim : « Je ne me déroberai ni à mon destin, ni à mes responsabilités » !

Avec une forte présence de militaires représentant le CNRDRE, dans la grande salle Jelly Baba Sissoko du Centre International de conférence de Bamako, Dioncounda Traoré a été officiellement investi Président de la République du Mali par intérim, devant les 9 membres de la Cour suprême ce jeudi 12 avril, ce qui ouvre la période de transition de 40 jours, selon les dispositions de l’article 36 de la Constitution du 25 février 1992. Difficile de se frayer un chemin, entre les officiels, politiques et militaires armés qui se mêlaient à  la foule. A l’entrée de Dioncounda dans la salle, des applaudissements vifs, des acclamations plein d’espoir pour celui devra conduire une transition de quarante jours. Au premier rang, une forte délégation de membres de la junte, parmi lesquels le lieutenant Amadou Konaré, le président du CNRDRE, le capitaine Amadou Haya Sanogo et des politiques d’envergure. Ibrahim Boubacar Keita du RPM, à  ses côtés Modibo Sidibé, Soumaila Cissé ou encore Iba Ndiaye, premier vice président de l’ADEMA… Après énumération des dispositions de la Constitution et après constatation de la vacance du pouvoir, Dioncounda Traoré a levé la main droite et prêté serment : «Â Je jure devant Dieu et le peuple malien de préserver le régime républicain, de respecter et faire respecter la Constitution et l’intégrité du territoire du Mali ». Un discours-programme Dans son discours d’investiture, Dioncounda Traoré a sans ambages mis le nord en exergue en citant les villes occupées par la rébellion, Tessalit, Kidal, Gao et Tombouctou : Face à  la partition du pays, le Président du Mali par intérim a brandi des menaces à  tous ceux qui ont fait du nord une zone de non droit : Sans oublier de remercier la médiation de la CEDEAO qui a conclu à  l’Accord Cadre de sortie de crise, qui prévoit d’accompagner le processus de retour à  l’ordre constitutionnel, Dioncounda Traoré a aussi fait mention du processus démocratique à  reconstruire. Une tâche qu’il faudra poursuivre avec toutes les composantes de la société malienne, y compris les membres de la junte. Moment d’émotion lorsque le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef de la junte, salue le nouveau président intérim sur scène. «Â Dioncounda et la junte, C’’est du deux poids, deux mesures », commente un officiel dans la salle. La classe politique soutient Dioncounda La classe politique malienne dans son ensemble, s’est réjouie de cette investiture qui marque le retour à  l’ordre constitutionnel en redonnant de l’espoir au peuple malien : «Â Cette investiture est une bonne chose, ce pays avait besoin d’une capacité de décision pour faire face à  l’agression que nous subissons au nord. Le retour à  l’ordre constitutionnel est maintenant établi. Il nous faut maintenant tous nous donner la main pour redonner au Mali, la place qu’elle a perdu… », a déclaré Ibrahim Boubacar Keita du RPM. «Â C’’est un grand jour, puisque la constitution issue de la révolution démocratique de Mars 1991 est rétablie », commente Tiébilen Dramé du PARENA. Pour d’autres, comme Mme Fatoumata Siré Diakité, ex ambassadrice et présidente de l’APDF, «Â ce putsch était un coup de force inutile qui a fait reculer la démocratie malienne et mis le Mali en retard  ». Qu’à  cela ne tienne puisque le discours de Dioncounda est unificateur et appelle à  la mobilisation nationale. Iba Ndiaye, premier vice-président de l’Adema s’est dit satisfait du fait que le Mali va enfin pouvoir s’attaquer aux vrais défis. Mais la vigilance reste de mise quant aux instruments démocratiques. « Cette nouvelle période est l’occasion de questionner et de parfaire la démocratie malienne aujourd’hui mise à  mal. » Après cette investiture, la nomination du Premier Ministre de transition est la prochaine étape.

« Le CNRDRE restera maître du jeu », dixit Bakary Mariko

Selon Bakary Mariko, le coup d’Etat du 22 Mars est salutaire car il a permis d’étaler au grand jour la corruption du régime d’ATT. Le porte parole du CNRDRE n’y va pas de main morte avec l’ancien pouvoir : « J’ai été toujours contre le pouvoir d’ATT qui se réduisait à  une poignée d’individus s’enrichissant sur le dos de la population. ». Sur le nord, le constat est plus sombre : « Le président ATT a fait la gestion de la crise du nord une vraie mafia. Plus de 1500 milliards ont été investis dans le nord qui ne compte que 80 communes sur 703 communes. » «Â En France, le coup d’état est salué » En France en particulier, le coup d’Etat a été salué par beaucoup de Maliens, affirme Bakary Mariko. Une autre frange de la diaspora condamne malgré tout le coup d’état en multipliant les marches pour le retour à  l’ordre constitutionnel. Sur l’Accord Cadre, le jeune Bakary Mariko estime que le capitaine Sanogo a été patriote en rendant le pouvoir aux civils. Même si pour l’heure, le retour à  l’ordre constitutionnel se fait étape par étape, avec la restauration de l’article 36 de la constitution du 25 février 1992. Mais Bakary Mariko affirme que le CNRDRE restera maà®tre de jeu dans l’application de l‘Accord cadre et la nomination du premier ministre de transition. Un rôle clé pour la junte selon le porte-parole du CNRDRE et qui ira bien au-delà  des 40 jours de l’intérim. Bakary Mariko est l’ancien Secrétaire Général du bureau de l’Association des Elèves et Etudiants du Mali à  l’école normale administrative (l’ex ENA) en 1998. Il en a ensuite été exclu après sa soutenance avant de s’envoler en France.

La classe politique juge l’Accord Cadre

Enfin un compromis ! C’’est ainsi que se sont exclamés plusieurs Maliens à  l’annonce de l’Accord-cadre de sortie de crise entre la junte militaire au pouvoir depuis le 22 mars dernier et la CEDEAO. La classe politique, dans majorité, se veut optimiste, et pense qu’il s’agit d’un grand pas. A l’URD, on se réjouit de l’application de l’article 36 de la Constitution du 25 février 1992. «Â C’’est cela que nous avons demandé : sortir du problème par la meilleure façon », a commenté Adama Coulibaly, 2ème vice-président du bureau national de la jeunesse URD. « Le Mali vit sa plus grave crise constitutionnelle, estime Tiébilé Dramé du PARENA, qui estime qu’il y a deux choses positives dans l’Accord Cadre, le retour à  l’article 36, qui entrera en vigueur dès l’investiture du président intérimaire. Et le retour dans les casernes des militaires, même si cela n’est pas encore effectif » Pour le parti SADI, l’Accord semble ouvrir de nouvelles perspectives pour le règlement de la crise politique et institutionnelle que traverse notre pays. «Â Au jour d’aujourd’hui, ce document répond aux aspirations du peuple malien puisqu’il ne fait pas l’objet de contestations », apprécie le Dr Etienne Oumar Sissoko. Cependant, prévient ce responsable de la jeunesse SADI, «Â les termes de l’accord risquent d’être compromis si on ne respecte pas les textes, en essayant d’imposer Dioncounda Traoré après le délai de 40 jours prévu par la Constitution ». Pour lui, «Â la tenue donc d’une Convention Nationale à  laquelle prendront part les forces vives de la nation, permettra de dégager les orientations et les aspirations du Peuple malien ainsi que les exigences pour une démocratie débarrassées de ses fossoyeurs ». Tels sont, commente Etienne Oumar Sissoko, les souhaits du peuple malien. « Des bases très floues » A l’Alliance des démocrates patriotiques pour la sortie de crise l’ADPS (regroupant laCNAS de Soumana Sacko, le parti YELEMA de Moussa Mara, etc.), on estime que le présent accord représente un premier pas dans le sens de la Transition préconisée. Cependant, regrette le regroupement politique, il est impossible d’appliquer de manière stricte, sur le plan juridique, politique et matérielle, l’article 36 auquel il est fait référence. l’ADPS, par la voix de Soumana Tangara de la CNAS, regrette ainsi que « l’élaboration et la conclusion dudit Accord-cadre aient été menées en l’absence de la participation formelle d’importantes parties prenantes nationales, dont la classe politique et la société civile, alors même que celles-ci ont un rôle majeur et incontournable dans sa mise en œuvre et dans la réussite de toute stratégie efficace et durable de sortie de crise ». Aussi, M. Tangara constate que l’Accord du 06 avril « laisse subsister des zones d’ombre et soulèvent d’importantes questions qu’il convient de clarifier dès le départ afin d’éviter d’éventuelles complications susceptibles d’entrainer des blocages pouvant être préjudiciables à  une bonne conduite du processus de sortie de crise ». Violation de la Constitution l’Accord du 6 avril a suscité également des commentaires à  la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM). Son président Hamadoun Amion Guindo, qui préside la Coordination organisations patriotiques du Mali (COPAM), prend acte de la convention ainsi signée. Pour lui, ceci a de notoire qu’il lève l’embargo de la CEDEAO contre le Mali d’une part, et d’autre part l’embargo des tenants de l’ancien régime sur notre transition ». « Nous avons aujourd’hui un adversaire de taille qui est la rébellion au Nord du pays, dont la gestion par le régime sortant a été catastrophique. Nous demandons alors au peuple malien un sursaut d’orgueil pour ne pas tomber dans les mêmes erreurs », nous a confié Hamadoun Amion Guindo. Au Mouvement populaire du 22 mars, si l’on se réjouit de l’Accord, le temps est à  la mobilisation et à  la vigilance de la part des Maliens. Aussi, estime son représentant Mohamed Tabouré, l’accord revêt des insuffisances comme l’absence de la tenue d’une Convention nationale conformément à  la déclaration, le 1er avril dernier, du capitaine Amadou Haya Sanogo. Cette Convention, explique le militant du MP 22, devait définir la feuille de route de la transition et la mise en place des organes de gestion. Aussi, le MP 22 (membre de la COPAM), pense que la prolongation du mandat des députés prévue dans le présent accord, est anticonstitutionnelle. « A partir du 9 août, les députés seront non pas sou le mandat du peuple malien, mais celui de la CEDEAO », a dénoncé pour sa part Mohamed Tabouré.