Convention collective, à quand l’application ?

Cette convention collective devrait en principe régir les rapports de travail entre les employeurs et les travailleurs des entreprises de presse exerçant leurs activités en République du Mali. Elle permet de garantir le droit d’exercice des libertés syndicales au sein des entreprises de presse conformément aux lois et règlements en vigueur. La convention collective a véritablement pour objet de protéger le journaliste dans l’exercice de ses fonctions. Elle traite ainsi d’aspects tel que la prime de risque, l’indemnité de responsabilité, et autres avantages qui permettraient d’améliorer substantiellement la vie des professionnels de la presse. Moins de dix. C’’est le nombre d’organes de presse qui appliquent en partie cette convention. Au Syndicat des journalistes reporters, le SYJOR, on estime que son application urge, car elle permettra aux journalistes de faire face au défi de la précarité, et à  la presse de devenir plus indépendante et professionnelle. Malheureusement, depuis son élaboration et son adoption en 2009, aucun organe de presse ne l’a appliquée en intégralité, déplore l’un des derniers nés des syndicats de journalistes. Pour le président de la maison de la presse, la convention collective n’est pas une fin en soi, le véritable problème demeurant l’assainissement de la profession. « Il faut une vision politique pour assainir ce secteur. l’application de la convention collective doit être l’objet d’une synergie d’action des organisations de la presse. Les journalistes ne sont pas au même niveau dans la bataille pour l’application de cette convention », déclare Aliou Dramane Koné, également promoteur du groupe Renouveau. Birama Fall, président de l’Association des éditeurs de presse privée (ASSEP) et directeur du Prétoire, n’est pas plus optimiste. Pour lui « elle est mort-née, car son application est quasi impossible au regard de l’état même de la presse et du peu de soutien dont elle bénéficie ». Indexer l’aide à  la presse au budget national lui parait une solution, afin que les patrons de presse puissent « supporter les charges des organes et mettre leur personnel dans les meilleurs conditions ». « Arguties », rétorque un jeune journaliste pour qui, seule cette convention collective peut garantir un minimum de dignité et de respect à  la fonction de journaliste. Ce qui poussent certains à  penser qu’il faudrait conditionner l’aide à  l’application de la convention…

Le spectre du coup d’Etat a-t-il définitivement disparu du ciel malien ?

22 mars 2012 – 22 mars 2014. Il y a deux ans de cela, une mutinerie de sous-officiers du camp Soundiata de Kati a débouché sur un coup d’Etat militaire qui a dépossédé du pouvoir Amadou Toumani Touré, à  quelques semaines seulement de la fin de son mandat. Alors qu’au nord du pays, la rébellion MNLA, ayant charrié la horde de barbares d’AQMI, du MUJAO et d’ANSARDINE, battait son plein. Le Mali a donc été projeté au beau milieu d’une crise sécuritaire et institutionnelle dont il n’est pas sorti indemne : chaos politique, armée tombée en lambeaux et divisée, une partie du pays a échappé au contrôle du pouvoir central, un gouvernement de transition secoué par des évènements fort malheureux comme l’agression du président Dioncounda Traoré a mis à  mal des institutions jugées fragiles, en dépit de l’exemple démocratique que constituait le Mali dans la sous région… Coup d’Etat, C’’est fini ? Une élection présidentielle ayant conduit au pouvoir Ibrahim Boubacar Keà¯ta, et la tenue des législatives ont permis un retour à  l’ordre constitutionnel. Le Mali tente de redécoller économiquement, de remonter la pente creusée par le putsch et la rébellion armée du MNLA, de tourner une page des plus tristes de son histoire politique. Il s’agit surtout de reconstruire et rendre solide l’Etat de droit en renforçant les institutions. Comme le disait Barack Obama lors du discours d’Accra. « l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes ». Deux ans après, les Maliens se souviennent encore, le 22 mars bouillonne dans la mémoire collective. Mais, deux ans après, il est difficile de balayer cette (fâcheuse) question : le Mali est-il à  l’abri d’un nouveau coup d’Etat, militaire ou civil ? Cette question est importante, la poser ne fait de personne un partisan à  tous crins des putschs. Avant d’aller loin, il serait intéressant de relever que le putsch du 22 mars est venu s’ajouter à  une longue liste de coups d’Etat que le Mali a connu : Celui du 19 novembre 1968 qui renversa Modibo Keà¯ta, celui du 26 mars 1991 qui déposa Moussa Traoré et celui du 22 mars 2012. Le constat est simple : tous ceux qui ont renversé ont été renversés ! La leçon doit être tirée par d’éventuels prétendants au putsch… Contexte socio-politique On le sait, comme tout coup d’Etat, celui du 22 mars 2012 est intervenu dans un contexte sociopolitique très tendu : projets de grève générale de l’UNTM, les mobilisations de la CSTM, des syndicats d’enseignants et policiers à  couteaux tirés, la journée ville morte des commerçants et transporteurs des 19 et 20 décembre 2011, la cherté de la vie dans un pays classé en 2011, 175e pays le plus pauvre du monde sur 177 dans l’Indice du Développement humain (DH) du PNUD. Encore plus important, C’’est que la corruption, l’impunité, la mauvaise gouvernance, le pillage organisé des deniers publics, étaient érigées en mode de gestion, créant des frustrations dans les couches défavorisées des populations. Chaque jour qui passe mettait au grand jour la faiblesse, l’effritement graduel de l’Etat. Au point que nombre d’observateurs locaux voire étrangers étaient parvenus au constat que tous les ingrédients d’un soulèvement populaire étaient réunis, mais tardaient à  éclater. Et les sous-officiers du camp Soundiata, menés par Amadou Haya Sanogo et sa bande, sont venus « couper l’herbe sous les pieds » du peuple. Dresser le bilan Deux ans après le 22 mars, il est en tous cas difficile de dresser un bilan pour savoir si la situation a connu une embellie totale. Mais, il est une analyse qui revient en permanence à  propos des leçons à  tirer des coups d’Etat que le Mali a connus. Une analyse selon laquelle, depuis le coup d’Etat du 26 mars 1991, ce sont les mêmes revendications sociales qui demeurent : manque d’amélioration des conditions de vie des populations, d’accès à  une éducation de qualité, aux soins de santé, pauvreté extrême, insécurité alimentaire, faiblesse du pouvoir central. Et il est clair que ces problèmes ne sont pas fortuits, mais sont plutôt engendrés par la négligence des secteurs prioritaires que sont l’éducation, la santé, l’économie. Or, pour qui s’est intéressé à  la vaste contestation populaire qui a secoué nombre de pays du monde Arabe, Tunisie, Egypte, Bahreà¯n…, les populations se sont révoltées à  cause de leur dignité offensée, du mauvais partage des richesses, mais aussi le manque de libertés politique et individuelle. Et puis, le plus saisissant C’’est que ces révoltes sont parties des couches les plus démunies de ces sociétés dirigés par des autocrates tombés comme Ben Ali, Hosni Moubarak… Comme indiqué plus haut, un coup d’Etat n’est pas que civil mais aussi militaire. Comme ceux que le Mali a connus par le passé. On le sait, l’institution militaire n’est pas encore sortie et saine et sauve du putsch du 22 mars, car une division a pris forme en son sein. Des bérets rouges ont été victimes de chasse à  l’homme, et dans le régiment des bérets verts les colonels étaient sous le commandement des subalternes, ce qui est insensé dans la hiérarchie militaire. C’’est connu, dans l’armée, on assiste à  un retour à  la normale, avec une hiérarchie qui se reconstitue, des hommes formés par l’Union Européenne. A la question de savoir si le Mali est encore sous la menace d’un coup d’Etat, une chroniqueuse, qui connait très bien ce pays, écrit : « qui dit potentiel renversement d’un pouvoir ne doit pas oublier que le Mali est « sous occupation » militaire internationale, et qu’il y a peu de chances qu’un tentative de mouvement déterminé puisse aboutir, car il serait anéanti dans l’œuf, que ce soit au Sud comme au Nord. ».

Signature de la première convention collective de la presse au Mali

le 26 mars 2009, à  la Maison de la presse de Bamako, la première convention collective de la presse a été ratifiée. l’évènement est d’ autant plus marquant que le 26 mars commémore la date anniversaire de l’insurrection populaire qui a amené la démocratie au Mali, et dans laquelle, la presse a joué un rôle majeur. Signée en présence du Ministre de la Fonction Publique, Mr Abdul Wahab Berthé et de la Ministre de la communication, Mme Diarra Mariam Diallo, la convention collective de la presse est l’aboutissement d’un long processus, enclenché depuis 1990. Jusqu’alors, il n’existait aucun texte, à  caractère juridique, régissant les rapports entre journalistes et entreprises de presse. Cette absence de texte a beaucoup fragilisé le statut des journalistes maliens, confrontés à  la précarité, à  la corruption et à  une liberté d’expression limitée. Pour Ibrahim Famakan Coulibaly, président de l’UJAO, l’Union des journalistes d’ Afrique de l’ Ouest « Il ne peut y avoir de liberté d’ expression quant les journalistes sont exposés à  la précarité, à  la pauvreté ou à  la peur…». Ce qui a amené les organisations comme l’UJAO, à  tracer pour le journaliste, « un cadre légal définissant les conditions légales, lui permettant le libre exercice de sa profession ». Pour Makan Koné, le président de la maison de la presse « la presse a joué un rôle déterminant dans l’avènement de la démocratie au Mali , et aujourd’hui, les entreprises de presse doivent devenir rentables afin de ne subir aucune sorte de pression… » Cette convention collective prévoit de rendre obligatoire l’obtention d’une carte de presse qui précisera le statut du journaliste (cadreur, photographe, animateur, journaliste etC’…), l’adhésion à  une union syndicale, les grilles salariales des journalistes maliens, qui touchent environ 50000 fcFA par mois. Une somme dérisoire au vu du coût de la vie. Certains ne sont même payés. Cette précarité a souvent favorisé les publi-reportages, les arrangements de toutes sortes, qui permettant à  un journaliste de s’en sortir financièrement et contre toute règle inhérente à  la profession même de journaliste. Selon le texte, la nouvelle Convention garantit aussi le droit d’exercice des libertés syndicales au sein de l’entreprise de presse conformément aux lois et règlements en vigueur sur le territoire de la République du Mali. Mariam Diallo, la ministre de la Communication du Mali, a approuvé la signature de cette convention « qui va permettre d’améliorer les conditions de travail des journalistes ». Elle a également annoncé la tenue des 3è journées nationales de l’Information et de la Communication, un évènement lors duquel,l’autorégulation et l’ accès à  l’ information seront débattus. Séparer le bon grain de l’ Ivraie « Je suis sûr qu’avec cette convention, les vrais journalistes sauront respecter et tenir leur engagement», a insisté Moussa Ballo Coulibaly, le patron du Patronat du Mali. « Ne peut s’improviser journaliste qui veut ! » Quant aux journalistes présents à  la signature, beaucoup sont satisfaits d’avoir un texte sur lequel s’appuyer afin de garantir leurs droits les plus élémentaires de journalistes. Si la signature de cette nouvelle convention, ( ratifiée par les organisations syndicales représentatives des Médias, comme l’ ASSEP ( l’association des éditeurs de Presse Privée), l’ AJSM,( l’association des journalistes sportifs du Mali ) et aussi l’UNTM ( l’Union nationale des travailleurs du Mali ), est une avancée pour le droit de la presse au Mali, qu’ en sera-t-il de son application réelle ? Pour Fofana, journaliste au Nouvel Libération, un quotidien malien, «cette convention n’arrange pas tous les patrons de presse…». Pour d’autres comme Maurice Dabo, du Nouvel Observateur, « la convention ne va rien changer au statut des journalistes qui se précarise davantage…». Le Mali compte plus d’une cinquantaine de titres de presse, une centaine de radios publiques et privées et le droit des journalistes ne saurait être négligé, au profit du monopole de certains magnats. Mais depuis longtemps, le communiqué final* règne, les « gombos » de toutes sortes, comme on dit dans le jargon journalistique et il faut pourtant s’ en sortir tout en excerçant son métier avec la déontologie inhérente à  la profession ! C’’est là  le défi quotidien des journalistes maliens, tous supports confondues !