Semaine nationale de la réconciliation : une initiative et des interrogations

La Semaine nationale de la réconciliation a été lancée le 15 septembre et se poursuivra jusqu’au 21 septembre, avec pour objectif de faire de la diversité du pays un atout pour la cohésion sociale.

En application de l’article 7 de la Loi d’Entente Nationale instituant une Semaine nationale de la réconciliation, le ministère de la Réconciliation nationale a décidé de l’organiser pour « restaurer la paix et renforcer la cohésion sociale et le vivre- ensemble à travers l’éducation, les arts et la culture, la citoyenneté ou encore le sport ». Selon le ministre de la Réconciliation nationale, le Colonel-major Ismaël Wagué, cette semaine s’impose car « le cousinage à plaisanterie, le dialogue, le pardon et le vivre ensemble ont cédé la place à la méfiance et à la violence ». Seront organisées diverses activités dont des collectes de sang, une Nuit de la réconciliation, un concours sur la maitrise de l’Accord pour la paix et la réconciliation et la vulgarisation de celui-ci. La situation sécuritaire encore précaire dans le pays et les nombreuses plaies encore ouvertes font mesurer le chemin qui reste à parcourir. Les audiences de la Commission Vérité, justice et réconciliation (CVJR) illustrent les attentes des nombreux Maliens victimes des crises que le pays a connues depuis son indépendance. Beaucoup ont en commun la quête de la vérité sur ce qui leur est arrivé ainsi qu’à leurs proches. Des réponses pas encore apportées. Ces victimes, qui selon la CVJR sont plusieurs milliers, attendent aussi des réparations. Le 10 septembre 2021, le gouvernement a signé le décret d’approbation d’un Plan d’action d’environ 65 milliards de francs CFA pour la Politique nationale de réparation des crises au Mali depuis 1960. Dans le centre du pays, la séculaire entente entre les communautés est mise à mal, à Kayes subsiste toujours, sur la base de la violence, l’esclavage par ascendance, pour ne citer que ces exemples. « Il est essentiel d’aller au-delà de ce type d’activités, qui se démarquent par les effets d’annonces. Il faut des actes concrets qui vont au-delà des promesses », commente notamment le responsable d’une organisation de la société civile qui a requis l’anonymat. « Tous les Maliens vont communier ensemble enfin de se réconcilier et de se pardonner. La réconciliation n’est pas une question d’un seul jour. C’est un acte de tous les jours », assure de son côté Mahamane Maïga, chef de la Mission d’appui à la réconciliation nationale.

Ménaka : Le découpage territorial pose problème

Adopté lors du Conseil des ministres du 28 février 2018, le nouveau découpage du cercle de Ménaka ne fait pas encore l’unanimité. Une délégation des communautés non satisfaites de ce découpage s’est rendue à Bamako pour une série de rencontres avec les autorités. Déterminées à faire prendre en compte leurs préoccupations, les populations, par la voix de leurs représentants, sont engagées à poursuivre les pourparlers.

22 fractions et 7 villages représentant environ 80% du territoire du cercle de Ménaka, ce sont les « communautés lésées » qui réclament la création de 4 nouvelles communes, selon le chef de la délégation, Baba Oumar Maïga. Pour lui, les communautés dénoncent d’abord la non prise en compte de leurs préoccupations, exprimées pourtant avant la décision de création. « Les communautés se sont concertées et acceptées avec des potentialités », selon Baba Oumar Maïga et les conclusions de leurs assises ont été envoyées à Bamako en août 2017, soit  deux mois avant le Conseil de Cabinet d’octobre 2017.

Autre reproche fait à ce nouveau découpage, « il viole les textes de loi sur la décentralisation et met à mal le vivre ensemble ». Alors que les textes interdisent la création d’une commune pour une seule fraction, le nouveau découpage en autorise deux. « Greffer un village situé à 70 kilomètres de Ménaka à la commune urbaine, c’est freiner son développement », s’indigne M. Maïga.

Concentrées au sud-ouest, les 3 communes rurales nouvellement créées excluent les 2/3 de la population du cercle, selon les représentants des communautés. « Nous réclamons plus de maillage dans le cercle de Ménaka et la prise en compte des préoccupations », explique Harouna Abatane, l’un des membres de la délégation. Le découpage constitue en outre pour les représentants « une entrave à l’épanouissement et même à l’accès aux services sociaux de base ». « Les 3 communes rurales créées comptent 8 écoles, dont 4 fonctionnelles, et 1 enseignant pour 6 classes. Selon les communautés lésées, il y a 75 écoles fonctionnelles », explique M. Maïga.

Redoutant un manque de volonté politique, les représentants se disent cependant déterminés à poursuivre la mission que leur ont confiée leurs communautés. C’est pourquoi, alors qu’ils font le compte-rendu de leurs rencontres à la base, les concertations se poursuivent à Bamako, avec des prises de contact avec diverses autorités, y compris des chefs religieux et coutumiers. Même si les autorités gouvernementales sont réticentes à la création de nouvelles communes, à cause des incidences financières, Harouna Abatane prévient : « nous ne commettrons pas la même erreur qu’elles, qui ont décidé sans prendre en compte l’avis des communautés. Elles nous ont demandé de réclamer 4 communes. Nous nous en tenons à cela ».

Forum de Ménaka : sous le signe de la paix

Le Forum de Kidal qui fut un rendez-vous manqué à  cause de l’absence de représentant malien et de la médiation internationale semble aujourd’hui du passé. Du vendredi 29 avril au dimanche 1er mai, le Forum de Ménaka est parvenu a rassembler les communautés et les chefs traditionnels, les représentants de l’à‰tat malien dont le ministre de la réconciliation Zahabi Ould Sidi Mohamed et le gouverneur de cette nouvelle région malienne, Daouda Maiga, la Minusma et les groupes armés du Nord, sous le signe de la paix. C’est environ 5000 participants, venus pour certains de pays voisins comme le Niger, qui ont pris part au Forum pour échanger autour des préoccupations que connaà®t la région. Un des thèmes principaux abordés, l’insécurité. « Nous avons décidé que toute la population devait participer et lutter contre ce phénomène d’insécurité dû aux bandits et à  la présence de groupes terroristes, cela crée aussi des conflits entre populations. Il y aura un meilleur échange entre les circonscriptions qui partagent la même frontière avec la Niger, la constitution de patrouilles mixtes pour une sécurité plus effective, car ce sont les mêmes individus qui opèrent de part et d’autres de la frontière », déclare Bajan Ag Hamatou, député de Ménaka. Recoudre le tissus social Les problèmes intercommunautaires ont été aussi au menu des thèmes abordés et des mécanismes traditionnels de concertation et d’échange ont été discutés pour privilégier la résolution pacifique des problèmes et le vivre ensemble. Sur l’Accord de paix, il ressort que tous souhaitent une accélération de sa mise en œuvre incluant toutes les parties et communautés, «Il faut accélérer la mise en place des autorités transitoires, le cantonnement. Il faut que les populations voient qu’il y a de nouveau l’aide que le communauté internationale et l’à‰tat malien peuvent leur apporter. Que les forces de sécurité soient visibles sur le terrain », explique un résident à  Ménaka. La régionalisation est en marche et même si le calendrier n’est pas encore établi on est prêt sur place à  accueillir l’administration malienne, « Rien n’empêche l’à‰tat aujourd’hui de revenir à  l’intérieur de la région de Ménaka, les 90 % de la région peuvent recevoir les autorités, il suffit qu’il y ait un effort du côté de l’à‰tat, du côté de la communauté internationale pour que les choses évoluent le plus rapidement possible, et ça convaincra tout le monde que la paix est de retour », ajoute Bijan Ag Hamatou. Cette rencontre intercommunautaire a permis le dialogue qui favorise la réconciliation. Dans tous ces échanges constructifs les participants ont montré qu’ils avaient à  coeur de mettre en avant la paix, pour que les choses puissent enfin avancer.

Cinquantenaires en Afrique : Les communautés Africaines du Mali se mobilisent

La FECAM pour l’unité africaine Créee depuis 2002, la FECAM regroupe en son sein, 22 pays membres. Elle regroupe toutes les communautés étrangères d’Afrique, vivant au Mali.Etant donné que 2010 consacre les cinquantenaires de 17 pays d’Afrique subsaharienne, elle a jugé utile et nécessaire de réunir ses membres. Et ce, afin de réfléchir sur les éventuelles activités à  mener pour contribuer à  la fête. Le président de la fédération, Mr Ignace Brissi explique que « les autorités des pays qui ont eu 50 ans cette année, s’engagent fermement à  célébrer l’évènement ». Il estime que 50 ans dans la vie d’une nation, de son peuple et de ses relations internationales, doivent être l’objet d’un bilan rétrospectif des années tumultueuses, afin de jeter de nouvelles bases de coopération, pour une autre vision de l’Afrique. Par ailleurs, cette rencontre selon Mr Bressi, s’inscrit dans le cadre de la participation sans faille des communautés africaines à  de différentes réflexions et aux festivités qui parqueront les cinquantenaires. l’année 2010 est placée par les instances internationales, sous le signe du respec de l’autre dans le pardon. Ainsi, les pays d’Afrique francophones se donneront la main, pour célébrer un continent, libre et indépendant depuis cinquante ans. C’’est l’occasion pour les uns et les autres, de se remettre en question et faire de le bilan. Constater et prendre conscience que l’Afrique est un continent d’avenir, un continent en perpétuel mouvement et qui mérite que ses enfants la regardent et la traitent avec dignité, et la tête haute. Les communautés Ivoiriennes au Mali Le président de la FECAM et non moins président de l’association des ivoiriens du Mali, Mr Bressi, explique que « la tempête est passée et qu’il est urgent pour les ivoiriens de se donner la main pour le retour de notre pays dans le conseil des grandes nations». Il rappelle que son pays fait partie des ceux qui ont arraché leur souveraineté nationale, l’indépendance, parce qu’elle n’est pas totale. Il déplore le fait que cette indépendance n’a malheureusement pas empêché les colonisateurs de piller nos ressources naturelles, qui sont les éléments catalyseurs de l’oppression des pays. « Ils ont jusqu’à  ce jour, la main sur nos matières premières et les élites africaines » Signalons que tous les 17 pays devant célébrer leur 50 ans d’indépendance, sont certes mobilisés au niveau interne, mais néanmoins, les diasporas de tous ces pays présentes au Mali, prévoient de nombreuses et gigantesques cérémonies dignes de ce nom. Chaque pays membre de la FECAM s’est acquitté d’une somme forfaitaire de 100.000 FCFA pour la tenue du cinquantenaire.

Le lévirat, une pratique encore répandue au Mali

Cette coutume est particulièrement appliquée si le défunt a laissé derrière lui des enfants en bas âge. C’’est une coutume indiquée en cas de décès de l’époux chez certaines ethnies du Mali Dans nos sociétés traditionnelles, la vie est collective comparativement à  la société moderne ou la famille se limite à Â «Â  papa, maman et les enfants ». C’’est pourquoi nos ancêtres ont légué des valeurs sociétales pour le bon fonctionnement de nos sociétés en instituant le lévirat. Pourquoi cette pratique ? Elle vise à  assurer la pérennisation dans la prise en charge sociale et psychologique des enfants du défunt. Bien vrai que dans la pratique, elle connaà®t plusieurs formes diverses selon les ethnies. La plupart des cas, cette union a pour but de perpétuer le nom du défunt et de sécuriser la transmission du patrimoine. Cette rituelle, souvent forcée, combinée avec la polygamie est encore pratiquée malgré le modernisme. Selon le sociologue, Boureima Tereta, le lévirat ou le sororat(l’homme épouse la soeur de sa défunte femme ), étaient des manières de consolider, le tissu familial pour éviter la dispersion des enfants du défunt ou de la défunte. A la différence des veuves esseulées qui se livrent à  des pratiques peu recommandables pour faire vivre leur progéniture, le lévirat et le sororat constituent un excellent moyen pour contrer ce genre de solution extrême. Tradition et religion Dans le centre, comme le sud et l’ouest, cette pratique reste vivace au Mali. Certains érudits justifient le lévirat par le poids de la tradition. La religion accorde aussi une valeur aux hommes qui “héritent” des femmes de leur grand frère défunt. Pour la soeur d’une défunte, il s’agit de ne pas laisser les neveux habiter sous le toit d’un autre homme. En milieu rural, les enfants constituent des bras pour les travaux champêtres. Cette pratique, souvent forcée et combinée avec la polygamie, est notamment encore pratiquée dans certains pays africains. Le Bénin l’a interdite en même temps que la polygamie le 17 juin 2004. Elle est encore pratiquée dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, dont le Burkina Faso, le Sénégal ou le Togo. Elle existe également dans certaines communautés du Tchad La tradition considère les femmes comme des « biens versés » dans le patrimoine du défunt à  partager entre héritiers. Ces épouses elles-mêmes n’étant pas héritières, l’islam a inversé cette relation avec la société. Elle interdit de façon absolue les mariages du type lévirat et sororat, sans le consentement des deux personnes concernées. les témoignages “Cette pratique (lévirat) a été réfléchie par nos ancêtres pour le maintien de la cohésion sociale. C’est aussi une manière de consoler les orphelins laissés » explique Sidiki Tangara thérapeute. Djeneba Sangaré enseignate à  la retraite estime elle que la fille qui accepte de prendre la place de sa grande sœur défunte est choyée par toute la famille et son mariage est célébré avec faste. Pour Haby, 30 ans,  » cette pratique est révolue et d’un autre temps et enferme la femme dans un carcan qu’elle ne maà®trisera pas forcément, soumise qu’elle sera aux lois de la famille d’accueil ». Dangers du lévirat Au Mali l’Association des femmes Juristes lutte contre la pratique du lévirat. Selon la présidente de cette association : «Â dans la tradition tribale, quand une femme perd son mari, elle est mariée de force au frère de celui-ci. En plus de son caractère rétrograde, le lévirat peut être dangereux pour la santé du futur époux car selon Maà®tre Maà¯ga, « si un homme est mort de sida, il a sans doute infecté sa femme, qui transmettra à  son tour son nouveau mari et par ce biais à  toutes ses femmes. » Certaines campagnes de prévention du sida, en Afrique, stigmatisent aussi la pratique du lévirat en indiquant que celle-ci favorise la propagation de la maladie. Cela dit, certains auteurs font remarquer que la pratique du lévirat est la seule mesure de protection sociale dont bénéficient les veuves dans ces pays et qu’il n’est pas forcément bienvenu de lutter contre cette pratique sans en remplacer l’aspect social. Mais cet argument suffit-il à  dissuader cette pratique encore répandue chez certaines ethnies ?