Travail au Mali, bonne foi ne fait pas loi

Pour le Directeur National du Travail le « code du travail du Mali est l’un des meilleurs de la sous-région ». « Du jeune employé à  celui qui part à  la retraite, tout est prévu pour protéger le travailleur», explique Fassoun Coulibaly. Il a droit à  un contrat, des congés annuels, un repos hebdomadaire, et la sécurité sociale. Cette dernière comporte quatre régimes qui sont les prestations familiales, la protection contre les maladies qui est devenue l’Assurance maladie obligatoire (AMO), les accidents du travail et les maladies professionnelles, et enfin la vieillesse, invalidité, décès. Tous les travailleurs du secteur privé devraient en bénéficier. Ceux du public ne bénéficient cependant pas encore du régime des accidents de travail et maladies professionnelles. Un projet de loi est sur la table des députés. Sur le terrain, la réalité a tôt fait de rattraper les salariés. « Je suis employée dans une entreprise de BTP depuis plus de cinq ans, et je ne suis pas inscrite à  la Caisse Nationale de Sécurité Sociale et nebénéficie d’aucune prestation», témoigne Bintou Sidibé. Son cas est loin d’être marginal. La cause principale est que la majorité des entreprises préfèrent minimiser leurs charges de fonctionnement. La deuxième est l’absence de contrôle des services tels que l’inspection du travail, qui n’interviennent qu’en cas de conflit signalé. Sans parler du cas des « éternels stagiaires », o๠dans certaines entreprises, même publiques, on retrouve des travailleurs cumulant des années de présence sans statut.Les 10,85% de taux de chômage officiel (chiffre OIT, 2014) découragent bien souvent ceux qui veulent réclamer leurs droits. Quel salaire pour quel travail ? Au Mali, le Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG)a progressé de 23%à  35 000FCFA depuis le 1er janvier 2015, après d’âpres négociations entre l’Union Nationale des Travailleurs du Mali (UNTM) et le gouvernementen octobre 2014. Une grève de 48 heures les 21 et 22 août 2014 avait campé le décor des revendications syndicales, qui ont finalement obtenu un wagon de mesures devant coûter plus de 48 milliards à  l’Etat malien. Au vu du coût de la vie (l’eau, l’électricité et le gaz sont parmi les plus chers de la région), le SMIG semble dérisoire. Il n’est pourtant pas systématiquement versé. Ce sont les métiers les plus difficiles qui sont les moins rémunérés. Un ouvrier du BTP gagne en moyenne 1500 FCFA par jour, une aide ménagère toucherait aux alentours de 10 000FCFA par mois,contre 100 000 FCFA par mois en moyenne pour une employée de bureau. Il existe également des disparités entre hommes et femmes pour le même poste, à  qualifications égales. Des considérations comme la pénibilité du travail, ou encore le nombre d’heures supplémentaires par rapport à  la norme des 40heures par semaines, ne sont souvent pas prises en compte par les employeurs. « Ton salaire dépend de la bonne volonté du patron », soupire Bourama D., qui a passé plus de vingt ans dans une usine de la zone industrielle de Bamako. Cette flexibilité est malheureusement la cause d’abus. «Dans les mines, nos compatriotes sont soumis à  10, voire 12 heures d’activité par jour, sans équipement de protection, sans véritable droit syndical, ni salaire conséquent, compensant d’énormes dépenses physique et intellectuelle», s’insurgeait le 1er Mai 2014, le secrétaire général de l’UNTM, Yacouba Katilé. Ainsi, pour leurs 84heures de travail hebdomadaires minimum, les travailleurs des mines d’or du Mali sont payés « en moyenne 200 000 FCFA par mois. Alors quand ces derniers comparent leurs rétributions à  celles de leurs collègues de la sous-région, C’’est la grogne. Un travailleur malien est payé en moyenne deux fois moins que son homologue sénégalais. Avec la Côte d’Ivoire, l’écart est encore plus important, avec un SMIG à  60 000FCFA, revalorisé de 64% en janvier 2014 !Les travailleurs « manuels » ne sont pas les seuls dans cette situation. Dans l’enseignement, le Mali ne tient pas non plus la comparaison. Un professeur d’université malien est cinq fois moins payé qu’au Sénégal, trois fois moins qu’au Niger. Certaines catégories échappent cependant à  ce déséquilibre. Ainsi, les députés maliens sont parmi les mieux payés de la sous-région, le Président de l’Institution perçoit même plus que le Président de la République française… Un faible niveau de qualification Comment expliquer ces écarts ? La plaie principale du marché du travail malien est bel et bien le manque de qualification des ressources humaines. « Le problème se situe à  deux niveaux », explique Biasson Dembélé, conseiller technique au ministère du Travail. « D’abord le niveau à  la sortie des écoles et universités, puis l’adéquation formation-emploi ». Le dispositif intensif de formation continue mis en place a permis de produire des milliers de jeunes diplômés avec un cursus professionnalisant, mais ils n’ont pas les compétences pour tenir dans une entreprise. « On a privilégié la quantité à  la qualité, et cela nous rattrape aujourd’hui » déplore M. Dembélé. Conséquence, à  peine 20% des diplômés sont absorbés par le marché, car la plupart ne correspondent pas aux profils recherchés. Et quand la ressource manque, on va la chercher… A l’étranger. Des pays de la sous-région sont venus depuis les années 1990 des dizaines de milliers de travailleurs, en général dans les services. Sénégalais, Togolais, et Béninois s’illustrent dans le BTP, ou encore dans la restauration et l’enseignement. Une main-d’œuvre que pointe du doigt les sans-emplois maliens. « La concurrence vient surtout de la diaspora », assure pourtant Desforges Adediha, spécialiste en gestion des ressources humaines. Ancien de RMO Mali, une agence de recrutement, il se souvient « du cas d’une mine d’or qui avait besoin d’un logisticien. Il nous a fallu finalement recruter un Malien de France qui avait une bonne expérience dans ce domaine ». De plus en plus de jeunes maliens décident en effet de rentrer au pays tenter leur chance et partent favoris face aux « locaux ». Pour espérer de meilleurs salaires et un travail épanouissant, « il faut viser l’excellence. Si l’on veut s’en sortir, il faut sortir du lot », conseille M. Adediha. Une maxime que les syndicalistes devraient prendre à  leur compte lors du défilé du 1er mai.

Le bac de tous les débats

Comme il fallait s’y attendre, les résultats du baccalauréat ont dépassé la barrière du « catastrophique », et n’en finissent pas de charrier colère, indignation, hystérie le tout mâtiné d’un buzz qui a fini par migrer dans la presse o๠des voix insistent pour demander qu’il soit décidé une année facultative pour les candidats malheureux. Le taux de réussite fourni par le DGA du Centre National des examens et concours est de 16,24%, ce qui est mieux par rapport aux trois dernières années o๠les taux de réussite n’ont pas dépassé les 13%. C’’est un fait, le bac de cette année a été celui de tous les débats avec les défaillances survenues in extremis dans l’organisation : démarrage des épreuves avec 5 à  8h de retard dans les centres ; changement des sujets ; composition dans certaines épreuves tard dans la nuit. De quoi inspirer à  un parent d’élève cette phrase : « Depuis que le Mali est le Mali, jamais un examen du bac ne s’est tenu dans de telles conditions ». Tout ce chamboulement, on le sait, a été provoqué après que le département de l’éducation a découvert que les sujets ont, encore une fois, – comme C’’est le cas depuis bientôt une décennie-, fait fuite. Alors que, par une bien petite naà¯veté, la ministre Mme Togola Jacqueline Nana, avait garanti que toutes les dispositions avaient été prises pour parer à  toutes éventualité, oubliant du coup la capacité de nuisance de la mafia de corrupteurs tapis dans l’ombre dans le département, les académies, et qui vendent chaque année des sujets d’examens nationaux. Ainsi, chaque année, les sujets font fuite, circulent dans les salons, les rues, entre les quartiers, sont envoyés par SMS, sont polycopiés dans les cybercafés avant même la date des épreuves. Tout le monde le sait depuis bientôt une décennie. Le phénomène gagnait en ampleur, était devenu un fait commun et banal pour ne pas dire une réalité qui dépasse tout le monde. Presque tous ceux qui ont eu à  gérer ce département ont été confrontés à  ce phénomène de honte. Entendons-nous bien, le but recherché n’est pas de dédouaner ou d’enfoncer l’actuel détenteur du portefeuille de l’éducation nationale. Oui, les dysfonctionnements, fraudes…qui ont émaillé les examens scolaires nationaux engagent la responsabilité du département. Oui, dans aucun pays sérieux au monde, on n’aurait accepté que le baccalauréat se poursuive dans de telles conditions. Un report ou une annulation serait envisagé, parce que le bac est l’examen qui couronne douze ans d’études, raison pour laquelle personne ne « badine avec ». Mais delà  à  demandé qu’il soit décidé un report d’année pour les candidats malheureux, il y a là  un pas qu’on n’aurait pas dû franchir. A ceux qui demandent une année facultative pour les candidats malheureux, on serait tenté de poser la question qui est de savoir si les admis n’ont pas passé le même examen, parfois dans les mêmes conditions, que ceux qui ont été recalés. Le fait est que le bac de cette année, malgré tout le mal qu’on puisse en dire, relance aussi le « sirupeux » débat sur l’école malienne. Cette école à  laquelle les différents régimes démocratiques ont destiné force discours, études, réflexion sans jamais parvenir à  la sortir de l’ornière. Chaque jour qui passe la fait basculer davantage dans la « nakba », au point que « l’école va mal » est devenu un slogan qui compose désormais l’hymne matinal dans les familles, rues, administrations et «grins », nos groupes informels de discussion. Mais il n’y a pas que ça. Ce qu’il faut ajouter, C’’est que l’école malienne est aussi celle de ces élèves qui ont préféré Rihanna, Gaspi, Iba One, Facebook… à  Marx, Sartre, Camus, BalzaC’…Ils s’émeuvent rien qu’à  entendre Céline Dion ou Amel Bent, mais éteignent la télé lorsque un débat ou le journal commence. Des élèves qui se mettent dans la peau d’une star d’Hollywood, ne reconnaissent le plus souvent d’autorité qu’à  celui qui fournit à  manger ou qui peut renvoyer à  coup de pieds aux fesses. Pour qui le livre est le repaire du pauvre, et l’enseignement est un pauvre type, indigne d’une once d’estime.

Chantier du 3è pont : Où en sont les travaux ?

7 mois de retard dans les travaux Malgré les 7 mois de retard accusés lors du démarrage des travaux, on aperçoit des avancées réelles sur le site. Les travaux se font sur deux zones : la zone Est (coté Missabougou) et la zone ouest (coté Sotuba). En effet, les dalles ont été préfabriquées. Les poteaux principaux, sont sortis de terre. Selon un ingénieur du chantier, les travaux de la zone Missabougou sont dans un état relativement avancé par rapport à  ceux de la zone Sotuba. Transfert de technologie ? Le projet de construction du 3ème pont fait suite à  panoplie de réalisations faites par la République populaire de Chine au bénéfice du Mali. Au delà  de sa réalisation, le projet sous la houlette de la Société CGGC a permis la formation de la main d’œuvre malienne, ainsi que la création d’emplois au Mali. Mais y a t-il un véritable transfert de technologie réelle ? Chargée de la mise en œuvre du projet de construction du 3ème pont, la Société CGGC de la Chine travaille d’arrache pied pour concrétiser cet objectif. Le Directeur de la CGGC, Ma Jiangquan, estime que tout se déroulera dans les délais prévus dans le contrat. En effet, contrairement à  ce qui est véhiculé auprès de l’opinion, le contrat signé entre l’Etat malien et la Chine prévoit la réception du futur pont en 2012 et non en septembre 2010 pour le cinquantenaire du Mali.Pour Ma Jiangquan, en 2010 on ne verra que l’ossature du pont. Conditions de travail sur le chantier Contrairement à  certains ouvriers qui estiment être lésés dans leur droit en matière de sécurité sur le chantier, la Direction du chantier a laissé entendre que toutes les conditions sont réunies pour sécuriser les travailleurs. La preuve, « le seul cas d’accident de travail qui est survenu, a été entièrement pris en charge par la Direction » a signalé le chef du personnel. En outre, a indiqué Ma Jiangquan sont payés à  temps et leurs droits sont assurés. Des difficultés jalonnent inévitablement les étapes du travail, mais nous avons toujours agi pour que les problèmes ne s’amoncèlent pas. Nos réunions journalières entrent dans ce contexte ». Dans le souci de coordonner les différentes activités, éviter les dérapages et circonscrire les blocages survenus ça et là , à  divers niveaux, sur le chantier, la Direction de CGGC organise tous les jours (en fin de journée) une séance de réunion à  laquelle participent tous les chefs d’équipe oeuvrant sur le chantier. Au nombre des difficultés, le directeur du chantier a laissé entendre que l’aspect communication a parfois constitué un facteur préjudiciable au bon déroulement des travaux. Car, dit-il, le rôle qui incombe au traducteur est souvent difficile, et mieux, ces derniers ne sont pas en nombre suffisant sur le chantier. « Mais nous avons toujours su gérer au mieux les malentendus. L’avis des ouvriers Interrogé par nos soins, le chef du personnel, Mamadou Coulibaly, a indiqué que jusque là , aucun travailleur n’est venu se plaindre auprès de lui pour mauvais traitements. Et que toutes les conditions sont réunies pour sécuriser l’ouvrier. Certains travailleurs nous ont pourtant signalé sur le chantier qu’ils sont mal payés, à  raison de 1400 francs par jour, et que l’insécurité de l’emploi leur fait peur : « Nous pouvons être renvoyés à  tout moment ! », estime l’un deux. Le payment des salaires se fait sans bulletins et pour les cotisations de l’INPS, le chef du personnel a assuré que des dispositions sont entrain d’être prises pour y remédier.

Exécrables conditions de vie des étudiants maliens

La création en 1996 des différentes facultés du Mali,(la faculté de lettres, langues, arts et sciences humaines (FLASH),la faculté des Sciences juridiques et politiques, la faculté des Sciences économiques et de gestion, la faculté de médecine, de pharmacie et d’odontostomatologie (FMPOS), la faculté des sciences et techniques(FAST)), fut à  l’époque accueillie avec enthousiasme. La plupart des étudiants maliens étaient obligés d’aller poursuivre leurs études à  l’extérieur du pays dans les années 70, notamment en Russie ; Hélas, la création de ces structures universitaires n’ a pas pris en compte la capacité d’ accueil des étudiants. Certains étudiants de la faculté des sciences politiques et économiques, prenaient leurs cours au cours au Palais de la Culture Amadou Hampâté Bâ de Bamako, à  cause du manque de salle de classes. Et malgré la construction au mois de juin dernier de deux nouveaux bâtiments trop petits pour contenir les effectifs, certains étudiants continuent de suivre leurs cours à  la salle Bakaina de Magnambougou (Un quartier de Bamako). Pour les étudiants de la FLASH (Sciences Humaines), certains cours se font à  l’école normale supérieure (ENSUP ), à  la FAST ( Sciences et Techniques ) et au supermarché Azar Center. Dure réalité pour ces jeunes obligés de s’entasser comme de vulgaires marchandises dans des locaux initialement destinés au commerce. l’épreuve est surtout terrible en période de chaleur et devient invivable; A tel point que certains professeurs refusent catégoriquement d’y dispenser leurs cours. Résultat : les performances des étudiants, s’en trouvent réduites et leur avenir professionnel par la même occasion ! Les salles de classes, elles ne disposent pas de conditions normales d’étude. En 2008, une étudiante désespérée, s’est ouvert les veines en voulant sauter par la fenêtre de la salle B9 de l’ENSup. Les fenêtres en verre abà®mé ont fait le reste ! La vétusté des salles entraà®ne chaque matin une véritable bousculade et d’autres s’ asseyent à  l’extérieur pour tenter de suivre les cours. C’’est dire à  quel point les autorités de ce pays doivent être informés de cette situation. Le faible niveau des étudiants maliens empire Pendant longtemps, le Mali est resté un exemple d’éducation dans la sous région. Il a formé de hauts cadres Africains qui venaient y étudier pour la qualité de l’enseignement. Mais depuis la chute du 1er régime après l’indépendance, l’éducation a connu un déclin important. Le diplôme malien n’est quasiment plus reconnu dans la sous région, associé à  une baisse de niveau éducatif. Souvent, les cours débutent au mois Mars et se terminent en Août. 5 mois de cours au lieu de neuf. Rares sont les étudiants maliens capables de construire une phase correcte en français. A croire que la langue de Molière leur fait peur… Le forum National sur l’éducation Le forum national sur l’éducation organisé au mois de novembre dernier avait pour but de réviser l’ensemble du système éducatif malien. Il n’en est rien ressorti de nouveau. Les grèves continuent, tantôt orchestrées par les étudiants ou les enseignants. Jusque là , aucune amélioration notable des conditions de vies et de travail des étudiants n’a eu lieu. Les bourses d’études prennent du temps à  être délivrées. Nombreux sont ceux qui vivent uniquement de ces bourses. Les parents n’étant pas là , ils sont obligés de payer le loyer, l’électricité, la nourriture et les fournitures avec seulement 25000fcfa. La qualité des études s’en trouve gravement affectée. La réforme de l’éducation,de l’enseignement supérieur, l’accompagnement des jeunes maliens et leur avenir professionnel sont des questions cruciales auxquelles le gouvernement prête une oreille trop distraite. Pourquoi ne pas écouter les plaintes de ces apprenants qui constitueront l’élite du Mali de demain ? On parlera aujourd’hui de survivants de la connaissance !