Économie malienne : La faim a un coût considérable

Le Mali perd une manne financière considérable suite aux effets de la faim. Une étude sur son coût, dont la présentation officielle aura lieu le samedi 30 juin, a été menée. Journal du Mali a pu se la procurer.

Le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA), dans son bulletin de juin à août 2018, estime que 4,3 millions de Maliens seront en situation d’insécurité alimentaire durant la période de soudure. La FAO place le Mali sur sa liste des 39 pays ayant besoin d’une aide alimentaire et l’UNICEF parmi les 10 avec le taux de mortalité le plus élevé au monde. Les organismes des Nations-Unies ne se sont pas donné le mot pour faire du « Mali bashing ». La situation est vraiment alarmante. Au-delà des répercussions sociales que peuvent  avoir ces urgences, elles ont aussi une importante incidence financière sur le pays.

Le ministère de l’Économie et des Finances a conduit une étude sur le coût de la faim, en utilisant l’année 2013 comme référence statistique. Elle montre que cette année-là le Mali a perdu 265 milliards de FCFA, soit 4,06% de son PIB, suite aux effets de la sous-nutrition en termes de « dépenses de santé, dépenses scolaires et perte de productivité sur le marché de l’emploi ». Les enfants de moins de cinq ans en sous-alimentation courent un risque plus élevé de diarrhées, d’anémies et d’infections respiratoires, qui s’ajoutent au très mortel paludisme. Des maladies très coûteuses pour les familles et le système de santé, près de 9,221 milliards de FCFA. « Les résultats de l’étude ont montré qu’au cours des cinq dernières années (2009 – 2013), les décès d’enfants liés à la sous-nutrition s’élevaient à 161 065 cas, soit 34,3% du total, limitant ainsi les capacités du pays à atteindre l’un des principaux objectifs de développement, la réduction de la mortalité », dit le ministre de l’Économie et des Finances dans l’avant-propos.

Bien se nourrir pour mieux apprendre

Le document démontre la corrélation entre sous-alimentation et performances scolaires. « Les enfants sous-alimentés sont confrontés au défi de la concurrence à l’école et d’une capacité cognitive et physique plus faible que les autres ». Selon des données du ministère de l’Éducation nationale, sur les 528 191 enfants redoublants, 111 539 souffraient de retards de croissance, handicap qui pénalise financièrement leurs parents, contraints de couvrir des frais scolaires supplémentaires. Les pertes totales de productivité ont été estimées en 2013 à 245 milliards de FCFA et l’étude estime que réduire et maitriser la sous-nutrition permettrait à l’État de faire des économies potentielles de 345 milliards de FCFA.

La faim coûte chère en Afrique

Le Lancement officiel de l’Etude sur le Coût de la Faim en Afrique au Mali (COHA), a eu lieu, ce mardi 07 février au Centre International de Conférence de Bamako. Elle visera à faire le point sur la malnutrition afin de mieux la combattre.

Le ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération Internationale et de l’Intégration Africaine Abdoulaye Diop, le Ministre de l’Economie et des Finances, Dr Boubou Cissé et celui de l’Action Humanitaire Hamadoun Konaté ont pris part à la cérémonie. Étaient également présents Mme Silvia Caruso représentante du PAM au Mali, Mme Mbaranga Gasarabwé coordinatrice résidente du système des Nations Unies au Mali, SEM Marck André Fredette ambassadeur du Canada au Mali, et le Dr Margaret Agama-Anyetei, représentante de l’Union africaine. Organisées par le Gouvernement du Mali à travers la Direction Nationale du Budget, en partenariat avec le Programme Alimentaire Mondial (PAM), ces études seront mises en œuvre par un Comité National de Pilotage (CNP), composé de tous les services techniques centraux intervenant dans le domaine de la nutrition, de la production et des statistiques nationales

Cette étude débutera fin février et s’étendra sur une période de 6 mois qui pourra être raccourcie. Son objectif principal est de poser le diagnostic sur les effets néfastes de la malnutrition et de la sous-nutrition sur le développement et la croissance d’un pays, afin de mettre sur pied les moyens de lutter contre ce fléau. Pour ce faire, un comité multi-sectoriel sera mis en place pour l’élaboration et le déroulement des opérations sur le terrain. Les résultats obtenus à l’issue de cette étude permettront aux décideurs politiques de prendre les mesures nécessaires et idoines de lutte contre la malnutrition et la sous-nutrition, permettant une meilleure contribution à la vie économique et sociale d’un pays. « Cela nécessite une approche multi-sectorielle et la mobilisation de tous les Partenaires Techniques et Financiers, mais aussi et surtout, de toutes les forces vives de la Nation », explique Abdoulaye Diop. La malnutrition et la sous-nutrition causent environ 50% de mortalité infantile. Au Burkina, cela fait perdre au moins 400 milliards de francs CFA par an.

Les données de ces études seront analysées par le CNP avec l’appui des bureaux du PAM à Addis-Abeba et à Bamako et les résultats préliminaires feront l’objet d’un examen critique et d’une pré-validation par les experts régionaux de la Commission économique pour l’Amérique Latine et des Caraïbes (CEPALC) et du PAM.