Festival Ogo Bagna : Le pays dogon à Bamako

Du 22 au 28 janvier 2018, la capitale malienne vibrera au rythme de la culture dogon. Des dizaines d’acteurs viendront exposer plusieurs pans de leur savoir-faire en matière d’artisanat, de cuisine, de musique et de « Savoirs traditionnels en matière de santé », thème de cette année.

Pour sa troisième édition, le festival Ogo Bagna veut mettre en débat « la problématique des savoirs traditionnels en matière de santé ». Plusieurs raisons justifient le choix de ce thème, selon Casimir Sangala, l’un des organisateurs. Tout d’abord, il existe un potentiel important dans ce domaine et de nombreux Maliens ont recours à la médecine traditionnelle pour se soigner. Il est donc essentiel d’en débattre, de partager les connaissances et, surtout, d’accompagner cette médecine pour établir un cadre de collaboration entre elle et la médecine moderne. Montrer « à un public urbain », plusieurs aspects de la culture dogon, c’est l’un des objectifs de ce festival, né en marge des Journées culturelles dogon créées en 2005 et qui se tiennent en pays dogon tous les trois ans. C’est donc pour permettre au public urbain de découvrir les valeurs de la culture dogon que Ogo Bagna a vu le jour en 2015.

Dans le contexte de crise que le Mali traversait, Ogo Bagna s’est naturellement inscrit dans la recherche de la paix et de la cohésion sociale, à travers le brassage culturel et les mécanismes culturels comme le cousinage. Car les Dogons sont bien placés pour ce faire. « Nous sommes un peu les cousins de tout le monde. C’est pourquoi nous invitons toutes les communautés voisines à venir construire la paix », qui est une œuvre commune, ajoute M. Sangala.

Durant une semaine, les visiteurs auront la possibilité d’admirer « un village typique dogon », promettent les organisateurs. Sur la place du Cinquantenaire qui sera le site de l’évènement, les festivaliers assisteront à des conférences, à des soirées et à des journées culturelles, innovation introduite cette année. « Les journées seront gratuites, mais les soirées payantes », précisent les organisateurs. Ces derniers, qui attendent environ 30 000 visiteurs, espèrent que cette édition aussi sera une opportunité pour les artisans non seulement de vendre leurs œuvres mais aussi de nouer des contacts pour donner un coup de pouce au secteur du tourisme, en berne depuis plusieurs années. Placé sous le parrainage du Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, le festival Ogo Bagna, qui signifie « la table du chef », souhaite incarner un espace de dialogue et d’échanges entre toutes les communautés du Mali, y compris la diaspora dogon, attendue lors de la quatrième édition.

Le lent crépuscule des chasseurs dogons

Les chasseurs, « Donso » en bambara, sont au cœur de l’histoire culturelle malienne. Dans la société dogon, on admire leur bravoure et leur savoir. Les « Danaan » sont les gardiens des rites animistes et n’ont jamais failli à intervenir dans les cas de crise grave ou d’oppression. Mais même s’ils font partie d’une des plus anciennes organisations traditionnelles, leur permanence tant à s’effriter de plus en plus, avec l’usure du temps et les affres du monde moderne.

« Ce sont des gens respectés, détenteurs de savoir. Ils sont les gardiens de la brousse au pays dogon. Ils chassent, mais sont aussi souvent les protecteurs de nos traditions. On leur attribue des pouvoirs un peu surnaturels, des connaissances que le bas peuple n’a pas. Cela inspire le respect ; voire une certaine crainte », confie Ambadio Kassogué, 84 ans, un vénérable dogon ancien ministre et PDG de la SOMAP.

Au pays dogon, la confrérie des chasseurs est une organisation hermétique, avec ses rites, ses codes et ses règles de fonctionnement. Ses membres évoluaient dans la nature et ne craignent pas d’affronter les fauves. Preuve de leur position et de la singularité de ce corps social chez les dogons, dans les manifestations et les fêtes traditionnelles ils dansent ensemble, sur leurs chansons, accompagnés de leurs propres instruments. On les consulte pour connaître l’avenir, se procurer des plantes médicinales ou se faire soigner. « Ce sont des tradithérapeutes. Ils maîtrisent la pharmacopée traditionnelle, ils connaissent parfaitement les propriétés botaniques et les vertus médicinales de la brousse aride du pays dogon,. Si vous avez une maladie, c’est eux qu’il faut aller voir », poursuit Ambadio Kassogué.

Pour entrer dans ces confréries de chasseurs, il faut être initié et suivre des rituels secrets. On devient chasseur généralement de père en fils. Il fallait dix-sept ans pour être initié, mais, au fil du temps, les candidatures ont diminué et aujourd’hui, faute de relève, c’est tout un savoir qui disparaît.

Un lent déclin Depuis la colonisation, une nouvelle société s’est peu à peu dessinée. L’influence du libéralisme économique, du christianisme et de la religion musulmane, qui ont bouleversé les croyances et les rites, l’urbanisation galopante, l’augmentation de la population, qui a réduit des espaces dédiés à la chasse, la raréfaction du gibier du fait de l’avancée du désert, la rareté de l’eau et des déficits pluviométriques, ont entraîné une dénaturation progressive de cette culture et profondément impacté la caste des chasseurs. « Le rôle des chasseurs est en déclin ; c’est clair. Il n’y a plus aujourd’hui la même végétation qu’il y a cinquante ans, le gibier est rare et le chasseur n’a plus grand-chose à traquer. Le métier est plutôt devenu symbolique », explique Oumar Guindo, directeur de radio à Bandiagara.

La chasse ne tenant plus une grande place dans leur vie, les chasseurs deviennent paysans, guides de chasse pour touristes, mécaniciens et policiers ou travaillent dans la sécurité privée. D’autres exploitent leurs savoirs occultes ou médicinaux comme devins ou guérisseurs. « La nouvelle génération a intégré la culture moderne et est moins dans la culture ésotérique d’antan, avec ses mythes et son langage codé. C’est fini ça. La plupart des chasseurs que l’on voit aujourd’hui sont là pour animer les grandes cérémonies. C’est une manière d’amasser des gains. C’est devenu plus folklorique que représentatif », ajoute le vénérable Kassogué.

Protecteur des villages Mais ces gardiens de la brousse n’ont pas encore tout à fait disparu. Compte tenu de l’insécurité actuelle au niveau du centre du pays, certains groupes de chasseurs ont pris l’initiative de sécuriser les populations et leurs biens. À l’instar du mouvement dogon « Danaan amba sagou », qui entend protéger, muni de ses armes traditionnelles, les quatre cercles de la zone exondée de la région de Mopti, Bandiagara, Bankass, Koro et Douentza, contre les bandits armés et les djihadistes. « Ils utilisent des vieux fusils indigènes qui ne tirent qu’un coup, ou des couteaux. Face à des agresseurs qui ont des fusils Kalachnikov et qui se déplacent à moto, ce n’est pas facile », explique Oumar Guindo, qui ajoute, « mais ils sont Dogons. Ils sont de ce milieu et connaissent ce territoire comme personne. Ils ont les moyens de disparaître, de se fondre dans la nature. En vertu d’un code d’honneur ancien, qui les pousse à intervenir dans les cas de crise grave ou d’oppression, ils sont déterminés à défendre leurs villages et leurs terres, quelles qu’en soient les conséquences », conclut-il.

 

 

Une trentaine de morts dans de nouvelles violences au centre du Mali

De nouvelles violences intercommunautaires ont fait une trentaine de morts dans le centre du Mali. Les affrontements ont pour l’heure cessé mais la tension reste toujours vive.

Un nouveau carnage intercommunautaire. Dans la nuit du vendredi 16 juin, Souleymane Guindo, chasseur dogon perd la vie dans le cercle de Koro situé dans la région de Mopti. Selon son fils d’une vingtaine d’année qui l’accompagnait, il a été assassiné par un peul. C’est ce dernier qui réussit à s’échapper qui alla donner l’alerte dans son village. Le lendemain (samedi 17), une expédition punitive est lancée par les dogons pour venger la mort de leur « frère ». « Les chasseurs dogons se sont rendus dans deux villages peuls où ils ont massacré et brulé des greniers de mils » affirme Madio Dame, maire de Dioungani. Le bilan est lourd. Selon les autorités, 31 personnes ont péri dont 27 peuls et 4 dogons.

Un détachement de l’armée malienne s’est rendu sur les lieux dimanche 18 pour essayer d’apaiser la situation. « Nous avons fait une expédition avec le gouverneur de Mopti (Sidi Samake) pour voir les différents protagonistes et les demander de calmer le jeu, et de ne pas se provoquer mutuellement » explique Dame. Les différentes parties ont fait montre de leur bonne volonté, mais la situation serait toujours précaire. « Il y’a toujours des tensions, ils ont promis d’arrêter, mais c’est toujours tendu » estime le maire. Pour éviter de nouveaux affrontements, les localités ont demandé l’appui du gouvernement. « Nous avons besoin d’une présence militaire qui pourrait prévenir d’éventuels débordements » souhaite Dame. Une enquête serait en cours pour situer les différentes responsabilités et punir les fautifs.

Les violences se multiplient dans le centre du Mali depuis plus d’un an maintenant. Le 14 février 2017, des affrontements ethniques avaient causé la mort de 20 personnes dans le centre du pays.

 

OGOBAGNA, quand la culture se mobilise pour la paix

La cérémonie d’ouverture de la 2ème édition du festival culturel dogon Ogobagna s’est déroulée hier lundi 23 janvier 2017 à la place du cinquantenaire en présence d’une foule nombreuse, tous venus magnifier la culture Dogon. Pendant une semaine le pays dogon s’installe à Bamako.

Les Dogons sont une ethnie du Mali dont la population est estimée à 700 000 personnes. Ils occupent la région, nommée Pays Dogon, qui s’étend de la falaise de Bandiagara jusqu’à la boucle du Niger.

En majorité cultivateurs (de mil surtout) ou artisans, les Dogons sont réputés pour leur cosmogonie (création du monde) et leurs masques.

La langue parlée par les Dogons est le ‘’Dogonon’’, Ils sont liés aux ethnies bozos, peulh et sonrhai, par la parenté à plaisanterie (appelée sinankunya).

Initié par l’association Ginna dogon (famille dogon), ce festival a pour but de promouvoir la culture dogon qui est resté très longtemps dans l’ombre. Le thème choisi cette année est ‘’la culture au service de la réconciliation et de la paix ‘’ . Par ce choix, les organisateurs veulent tout simplement «  regrouper tous les autres peuples du Mali, à travers la culture et adresser un message de paix et de réconciliation.

Pendant une semaine Bamako pourra découvrir la riche culture dogon,sur les berges du fleuve Niger. Au programme, des concerts lives (musique traditionnelle et moderne),des conférences débats, des défilés de mode, des danses traditionnelles, foire exposition. « Le festival dogon est là pendant une semaine, venez découvrir la riche culture dogon, soyez fiers d’être dogons, soyez fiers d’être maliens », déclarait Amassagou Dougnon, président de la commission d’organisation du festival en cloture de la cérémonie d’ouverture.

Dan na amba sagou : le rempart Dogon

C’est pour sécuriser la zone du plateau dogon et dissuader d’éventuels assaillants, que des chasseurs dogons ont pris les armes pour former la milice Dan na amba sagou (confier le territoire aux chasseurs). Elle entend rendre au pays dogon sa quiétude d’antan.

Dans la région de Mopti, il n’y a pas que les Peuls qui se plaignent de l’abandon de l’État. « Nous ne sommes pas en sécurité, personne ne dort. À chaque fois, des gens viennent commettre des assassinats en toute impunité et s’en vont sans être inquiétés. Nous avons constaté cela des mois durant à Bankass, à Bandiagara et à Koro », s’insurge Boureima Sagara, coordinateur du mouvement Dan na amba sagou, créé en 2012.

Depuis quelques mois, la recrudescence de la violence les pousse à donner à nouveau de la voix et à reprendre les armes. Le 1er octobre dernier, Théodore Soumbounou, conseiller communal à Bankass, a ainsi été froidement abattu par des bandits armés. Un mois plus tard, le maire du cercle de Koro a échappé de justesse à une tentative d’assassinat. Trois jours avant les élections communales du 20 novembre, la tête de liste du parti PRVM-Fasoko fut kidnappé. Autant de faits qui ont poussé le mouvement Dan na amba sagou à rappeler, dans un communiqué publié mi-décembre 2016, les conditions de sa création il y a quatre ans et à annoncer la reprise des armes pour assurer la défense du territoire. Le mouvement revendique à ce jour un millier de combattants, armés de vieux fusils de chasseurs et résolus à donner leurs vies pour le plateau dogon. Le leader du groupe, Youssouf Tobola, serait un chasseur réputé, natif de Bandiagara. Très déterminé à la protection du terroir dogon, il entend fédérer autour de lui et prévient que « plus rien ne sera comme avant ». Tout adhérant doit prêter serment, « dans le but de fortifier les liens et d’instaurer la confiance entre nos membres », explique Sagara.

Appel à l’État Le mouvement est néanmoins conscient de ses limites. Face à la menace croissante que représente la katiba Macina du prêcheur radical Amadou Koufa, les Dogons ont envoyé une missive au préfet pour demander l’installation de camps dans leur zone. « Nous souhaitons des camps militaires dans les quatre cercles et bien équipés en matériels ou des armements adéquats pour mieux sécuriser nos populations du pays dogon car à chaque réveil, nous retrouvons des personnes tuées par des bandits armés qui sont les djihadistes », peut-on lire dans cette correspondance. Ces camps assureraient la sécurité dans la zone et permettraient au tourisme d’y rayonner de nouveau. « À cause de l’insécurité, nous n’avons plus de touristes, le pays dogon est laissé pour compte, les jeunes ne travaillent pas. C’est aussi pour tout cela que nous voulons rétablir l’ordre sur nos terres », conclut Sagara.

 

Festival culturel dogon: une première réussie

Le mythique pays dogon a séduit plus d’un visiteur au Mali. Afin d’offrir un retour aux sources aux Maliens originaires de cette région aujourd’hui sinistrée par l’arrêt total du tourisme et de la faire redécouvrir aux visiteurs du festival, les organisateurs ont placé la barre haut. La première édition du festival culturel dogon s’est déroulé du 29 au 31 janvier dernier sur la Place du cinquantenaire à  Bamako avec un programme aussi riche que varié alliant tradition et modernité. Durant trois jours, les artisans dogon ont pu exposer leur savoir-faire à  Bamako puisqu’en raison de la crise qui frappe le tourisme, les produits du pays dogon ne s’exportent plus comme avant. Avec un budget de 150 millions, financé par les entreprises comme Toguna SA, le festival dogon aura marqué les esprits. Vivement la prochaine édition!

SOS Pays Dogon !

Ici c’est la zone rouge. Un territoire « formellement déconseillé » par le ministère des Affaires étrangères Français afin de dissuader les touristes de s’y rendre. La quasi totalité du Mali est classé dans ce rouge couleur sang : synonyme de peur et de danger. L’attribution d’une telle zone peut pourtant se révéler arbitraire et avoir des conséquences dramatiques pour certaines populations. C’est le cas du Pays Dogon, rayé de la carte du tourisme depuis 2012. Reportage. « Sans le tourisme, le Pays Dogon n’est rien » Le peuple Dogon n’a jamais entendu l’écho d’un coup de feu, ni senti l’ombre d’Ebola planer sur lui. Ce « pays dans un pays » classé patrimoine UNESCO en 1991 a pourtant subi de plein fouet sa mauvaise presse : de la venue de plusieurs centaines de touristes par semaine, le chiffre est tombé proche de zéro. L’inquiétude se mêle à  l’incompréhension et les témoignages sont unanimes : « On n’a jamais pensé que ça pouvait arriver ». Quand les touristes ont commencé à  déserter, les habitants se sont retrouvés en pleine torpeur, dans l’attente du retour de cette économie qui les faisaient vivre à  hauteur de 70%. Les mois se sont écoulées, puis les années, jusqu’à  atteindre un seuil critique o๠l’espoir ne suffit plus. La population a commencé à  souffrir de malnutrition et du manque de soins. On aperçoit aujourd’hui des enfants couverts de poussière, les habits en lambeaux et le ventre gonflé par les carences. Les campements auparavant pleins à  craquer sont tombés en décrépitude. Les boutiques artisanales regorgent d’objets abà®més par le temps, décolorés par le soleil. Des statues ont commencé à  pourrir, à  l’image d’une culture Dogon qui se perd. Seydou est éleveur de moutons, il était guide autrefois. Il brise le silence d’un peuple rendu mutique par fierté : « à‡a ne va pas ! Les gens n’osent pas le dire car c’est dans notre culture de ne pas se plaindre, mais je le dis haut et fort : ça ne va pas et mon peuple a faim. Vu la réputation du Pays Dogon dans le monde, on ne comprends pas. » Cette même réputation a profondément changé leur façon de vivre. Les jeunes ont touché à  la culture occidentale. On trouve aujourd’hui plus facilement du réseau et des téléphones portables que de la nourriture dans les montagnes. C’est le symbole d’une culture ancestrale en proie aux nouveaux besoins que la modernité engendre. « Nous sommes historiquement des cultivateurs mais sans le tourisme, le Pays Dogon n’est rien. Les jeunes ont été habitué à  la vie moderne et on ne peut pas reculer dans le temps. La culture des terres ne nous permettra jamais de vivre à  100%. On est dans un temps moderne, on vit au 21ème siècle, il faut comprendre ça. » Le niveau de dangerosité du Mali selon le ministère des Affaires à‰trangères (diplomatie.gouv). « Quand tu vois un blanc, c’est un albinos » Les porteurs de bagages, cuisiniers, chefs de campements, les jeunes qui faisaient les commissions, guides, vendeurs de colliers, jardiniers, commerçants, chauffeurs… tous dépendaient de l’activité touristique. Ils se sont retrouvés sans emploi du jour au lendemain. Beaucoup sont désoeuvrés, d’autres se démènent pour que la situation change. Ils cherchent des aides financières auprès d’anciens touristes devenus amis, mais les questions d’argent sont parfois synonymes de méfiance. Les aller-retour entre banques, familles et points d’accès internet sont leur quotidien. Avec ses déboires : les connections hasardeuses, l’essence à  payer pour rejoindre la capitale et les banques souvent à  court d’argent. Il faut prouver que les dons sont bien utilisés, écrire des récépissés… autant de démarches administratives pénibles alors qu’un peuple meure de faim. Djibril fait partie de ces jeunes qui se bat pour son pays. Si « l’herbe paraà®t toujours plus verte dans le jardin du voisin » il garde espoir. Cela faisait plus d’un an qu’il n’avait pas guidé. « J’étais porteur avant d’être guide, soit 11 ans d’expérience. Chaque jour j’écoutais les explications des vieux pour comprendre l’histoire de mon pays. Il y a plus de 540 kilomètres entre le nord et le Pays Dogon. Les rebelles ne sont jamais venus ici. Les ancêtres nous protègent avec les fétiches.» Le jeune homme faisait vivre à  lui seul huit personne durant l’âge d’or du tourisme. Il finançait les études de trois de ses jeunes frères. Ces derniers ont été renvoyé il y a deux ans, faute d’argent. Il ne comprends pas ce qui se passe. Pour lui les gens mélangent tout : la rébellion armée, la maladie Ebola… autant de choses qu’il n’a jamais vu de ses yeux mais dont il subit les conséquences. Et les voies alternatives sont difficilement envisageables : l’eau est rare et la terre inhospitalière. « Il arrive qu’on ne mange pas deux jours d’affilés. On habite sur le plateau et il n’y a pas assez de place pour cultiver le mil. Je garde toujours l’espoir, mais rien ne change. Il faut venir ici pour voir la réalité. Aujourd’hui quand tu vois un blanc, c’est un albinos. » « A l’époque tous les jeunes voulaient devenir guides » Thérèse est suisse et vit depuis trois ans dans un village du Pays Dogon. Elle témoigne de la crise que traverse cette région : « En 2012 les rebelles armés étaient à  150 kilomètres du Pays Dogon. Je suis rentré en Suisse pour rassurer ma famille, mais ça a été très vite nettoyé avec l’intervention de l’armée française. Le véritable danger ici c’est le palud, le manque d’eau et la santé. Il faut savoir que Point Afrique amenait 400 touristes chaque semaine, avant que les vols directs ne cessent fin 2010 ; après la mise en zone rouge de la région. Tout s’est alors arrêté d’un coup : les projets de développement, les coopérations et le tourisme. Les gens n’ont mis aucun argent de côté : leurs campements sont dévastés. Ceux qui ont connu ça se souviendront de la leçon si le tourisme reprend un jour. A l’époque tous les jeunes voulaient devenir guides. Maintenant tu n’en trouves plus un seul. La profession a disparu. Les gens ont une autre priorité : survivre. C’est le point positif. » « On n’a plus le courage d’entretenir les apparences » Jean-Baptiste, chef de campement d’un village niché sur la falaise, pointe du doigt les portes des maisons tombées en ruines. Il explique que l’ensemble des chambres étaient occupées avant. Plusieurs « anciens du tourisme » lorgnent l’enregistreur. Ils sont nombreux à  vouloir témoigner de cette situation difficilement vivable et prouver aux yeux du monde que leur pays ne présente aucun danger. Un ancien vendeur de colliers en raconte quelques bribes : « Je gagnais 2 000 CFA par jour en vendant des colliers aux touristes. J’ai commencé à  faire les jardins, mais il y a peu d’eau et pas de barrage. On veut que touristes reviennent car le Pays Dogon est très beau : avec la colline, le plateau et la plaine. La culture animiste et les objets d’art ». Le chef du village tient à  faire visiter sa boutique d’art, mais il peine à  trouver la clé. La porte reste coincée et il faut la déloger d’un coup sec. Il n’y a plus de nappes indigo et de chandelles pour accueillir les visiteurs, tout ça c’est de l’histoire ancienne. Place aux glacières vides et aux toilettes défectueuses. « à‡a faisait quatre ans que ma boutique n’avait pas été ouverte… La préserver, pourquoi ? Pour qui ? On n’a plus le courage d’entretenir les apparences ». Cet homme atteste que des filles quittent leurs familles à  l’âge de 11 ou 12 ans pour aller « laver les marmites » dans les grandes villes. Certaines se prostituent et reviennent avec des maladies sexuellement transmissibles. L’exode rural s’est accru, notamment après plusieurs mauvaises récoltes… Beaucoup de jeunes partent vers la Côte d’Ivoire « en aventure ». Certains ont quitté la région pour rejoindre l’Espagne. Ils ont eu une panne de pirogue et sont morts dans la mer. C’est tout un pan de la culture qui se perd. Le peuple Dogon lance aujourd’hui un véritable appel au secours : «à‡a ne nous dérange pas de dormir par terre, on demande seulement de l’eau potable. » Dans le village de Digui Bombo, un taurillon est cuisiné pour les fêtes. Nous sommes le 24 décembre et autour du repas les visages sont graves, les sourires timides et les regard absents. Théo du Couedic et Clément Guilbaud

L’IGP : l’échalote dogon en lice

Cette valorisation des produits, mise en œuvre par l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) avec l’Agence Française de Développement et le Cirad dans le cadre du Programme de renforcement des capacités commerciales (PRCC), permettra d’améliorer leurs capacités d’exportation, grâce également à  une assistance technique institutionnelle et à  un volet formation. Très convoité, le label IGP participe à  la protection d’un patrimoine et représente un véritable levier économique et un enjeu important pour l’Afrique. La garantie apportée à  la qualité du produit permet de le vendre plus cher, sa distribution et son exportation sont améliorées – notamment vers l’Europe -, le bassin de production peut être développé et préservé à  la fois. En contrepartie, ce titre prestigieux suppose un effort de la part des producteurs, qui doivent maintenir la qualité tout en garantissant un volume à  leurs acheteurs. Avec, à  la clé, l’espoir de vendre leurs produits 40 % plus cher. Le miel d’Oku a ainsi été homologué en mai 2012, le poivre de Penja en décembre, et le café Ziama-Macenta le sera prochainement. Mais ce n’est que lorsque OAPI procédera à  l’enregistrement de ces homologations – ce qui est imminent – que les producteurs acquerront le droit d’utilisation de l’IGP. Le poivre de Penja, parfumé et puissant, très recherché par les plus grands chefs, est produit sur les reliefs volcaniques du sud du mont Koupé, au Cameroun. Le miel d’Oku, blanc et naturellement crémeux, avec des arômes de fleurs et d’agrumes, provient de la forêt protégée de Kilum-Ijim sur les flancs du mont Oku, au Cameroun également. Le café Ziama-Macenta, un robusta aux caractéristiques proches de celles de l’arabica, est apprécié pour sa saveur acidulée, son intensité aromatique élevée et persistante. Cultivé en plantations agroforestières sur le mont Ziama, dans le sud-est de la Guinée, il n’est pas encore commercialisé en France. D’autres produits africains sont sur les rangs. « Parmi eux, l’échalote du pays dogon, au Mali, l’oignon violet de Galmi, au Niger, et la toile de Korhogo, en Côte d’Ivoire », détaille Cécé Kpohomou, responsable du programme IGP à  l’OAPI. Culture à  forte potentialité économique, l’échalote constitue une importante source de revenus pour les exploitants agricole des régions de Mopti, notamment le plateau Dogon (bassin traditionnel de production) et Ségou. L’attribution de ces IGP résulte d’une démarche collective, entamée il y a cinq ans. Après le repérage des produits et l’évaluation de leurs qualités, un cahier des charges est dressé, et toute la filière, structurée. Puis le comité national des indications géographiques homologue les produits. A l’image de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) et de l’appellation d’origine protégée (AOP) françaises, l’IGP protège les producteurs des contrefaçons et permet aux gastronomes de bénéficier en toute confiance des immenses qualités que le terroir confère à  ces produits. A l’heure o๠les consommateurs demandent davantage de transparence et d’information sur l’origine des biens qu’ils consomment, la valorisation de productions locales représente donc une voie à  explorer.

Sékou Dolo : « Le pays dogon a reculé de 50 ans … »

Le Point.fr : Comment, dans ce Mali en crise, le pays dogon survit-il sans tourisme ? [b Sékou Dolo : La situation économique a reculé de 50 ans en arrière. Nous étions au début d’un développement touristique qui s’est arrêté brutalement. Tous les acteurs du secteur l’ont senti dans leur niveau de vie, mais les avis sont partagés, car certains parviennent à  garder un relatif équilibre grâce aux relations avec une clientèle fidèle qui envoie des aides. Nous avons eu ainsi la visite d’un couple du sud de la France, très attaché au pays, qui a fait le trajet jusqu’à  Paris pour nous voir. C’est très touchant, pour toute la troupe des danseurs. La population quitte-t-elle la région ? Il faut une grande sécheresse et de mauvaises récoltes pour provoquer l’exode. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, mais la crise du Nord a donné une grande leçon au pays : les Dogon ont compris qu’ils ne pouvaient pas dépendre d’une activité exclusive, comme le tourisme. Et ceux qui vivaient des auberges et des restaurants, mais également les porteurs ou encore les guides, comme l’est un des danseurs de la troupe, sont revenus à  l’agriculture locale. Sur l’un des masques de la troupe figure une jeune fille de chaque ethnie, bambara et peule, liée à  celle des Dogon. Dans quelle mesure les bonnes relations entre les ethnies au Mali vous semblent-elles en danger avec le problème touareg ? Le rapport est resté le même entre les Dogon et les autres ethnies du Mali, car ils ont gardé le respect des autres, et inversement. Mais l’un de nos adages dit : « On ne peut pas abattre un serpent sans frapper la terre. » Les Dogon, qui sont une ethnie du pays, ne peuvent donc pas complètement échapper à  cette situation de dimension nationale. Il m’est difficile de me prononcer en restant à  la surface, car nous avons des versions différentes d’une histoire dont nous nous demandons s’il en existe une vraie… Comment les musulmans du pays dogon réagissent-ils au visage extrémiste de l’islam ? Même ceux qui se sont convertis à  l’islam ont été complètement bouleversés par ce qu’ils ont vu. Ils ont choisi cette religion pour tout autre chose. Beaucoup se demandent s’ils ne vont pas y renoncer et revenir à  la religion d’origine. Je constate ainsi de la part des nouvelles générations un retour aux sources de la tradition. Il faut dire aussi qu’islam devait rimer avec prospérité et bonheur… La religion est là  pour améliorer les conditions d’existence de notre passage sur terre entre les deux mondes. Dans ce contexte, la troupe que vous dirigez a-t-elle davantage d’occasions de se produire à  l’étranger, en France notamment ? Je dois dire que c’est très difficile. Je tourne depuis vingt ans, et vous avez vu, au Mali, comme du plus petit au plus grand, tout le monde a acclamé la France venue sauver le pays et les Maliens innocents. Mais la crise a ses conséquences sur nos vies d’artistes. Depuis quelques années déjà , les visas sont de plus en plus difficiles à  obtenir. Pour cette tournée à  Cayenne et à  Paris, nous avons obtenu un visa de dix jours. Or, un retard d’avion nous a fait rester un jour de plus avant le départ pour Cayenne, hébergés par la Maison des cultures du monde. Mais si un incident se produit au retour, comment rentrerons-nous au pays après l’expiration du visa ? C’est calculé au plus serré. Bien sûr, certains artistes africains sont venus tourner en France et ont disparu. Je comprends la méfiance suscitée par le comportement de certains confrères, mais il ne faut pas en conclure que tous les artistes de notre continent sont à  leur image. Et pour nous qui tournons depuis tant d’années, la marginalisation est sévère. Quel message voudriez-vous faire passer aujourd’hui pour le pays dogon et pour le Mali ? Je pose la question : à  qui désormais peut-on demander quelque chose ? Il faut plutôt demander qui peut écouter. Qui écoute ? Je mets tout l’espoir en Dieu, pour la pluie et effectuer de bonnes récoltes. Après un enlèvement à  Hombori, dans un pays dogon si loin de tout danger, les touristes ne sont pas revenus et nous sommes contraints à  cultiver de nouveau la terre. Mais vous qui nous avez connus chez nous, à  Sangha, regardez-moi et dites-moi si vous sentez ce changement en moi. Et chez les autres ? Nous restons ce que nous sommes. (Sourires.) Un autre adage dogon dit : « Le mauvais vent qui souffle, un moment arrive o๠il s’arrête. » Je l’attends. Et ne compte que sur le Bon Dieu qui est le même pour nous, et sur nous-mêmes. Propos recueillis par VALà‰RIE MARIN LA MESLà‰E

ATT et l’univers dogon

La participation du président Amadou Toumani Touré à  cette manifestation culturelle témoigne de toute sa symbolique dans la valorisation notre patrimoine identitaire. l’exposition présente ainsi l’histoire de l’art et de la culture de ce groupe ethnique, depuis le Xème siècle jusqu’à  nos jours. Cela, à  travers plus de 330 œuvres exceptionnelles issues de collections du monde entier et rassemblées pour la première fois en France. l’exposition créée au Musée du Quai Branly entend, en effet, restituer toute la force de l’art de la sculpture telle que l’ont conçue les Dogon, qu’il s’agisse du bois ou du métal, de pièces imposantes ou de puissants objets de petite dimension.  Au C’œur d’un univers fantastique Dogon est le nom du groupe ethnique vivant sur le plateau central de la région (Mopti) allant du Mali au sud du Niger. Ce groupe hétérogène, en partie constitué de migrations successives, est devenu célèbre à  travers le monde par ses sculptures qui ont révélé de nombreux secrets dont leur cosmogonie. Science selon laquelle les créateurs sont un ou des dieux anthropomorphes qui gênèrent l’Univers et l’Homme par la volonté d’un esprit, par la parole, le geste, le souffle, un membre, des sécrétions… A travers plus de 350 œuvres, le Musée du Quai Branly invite, au cours de cette exposition, à  plonger dans l’art et la culture Dogon. Une exposition qui, grâce à  ces œuvres issues des musées et des collections privées du monde entier, fait figure d’évènement. l’exposition est organisée selon le lieu géographique des trouvailles et présente essentiellement les styles de la falaise de Bandiagara. l’évènement est très important, selon le président ATT. Qui a effectué le déplacement à  l’occasion. Au Musée du Quai Branly, l’exposition couvre plus de dix siècles d’histoire des peuplements, des influences artistiques, des traditions culturelles et des modes de vie du pays Dogon. Les sculptures enchantent par la finesse du trait et leur caractère expressif : beaucoup de ces sculptures figuratives sont considérées comme étant de nature commémorative et on prête à  certaines la vertu de soutenir la force de vie des défunts. D’autres encore nous renseignent sur la place de l’enfant dans la société et le rapport à  la mère. Sur le site du Musée, nous apprenons qu’une salle est également consacrée à  la «Â La société des masques », une des richesses séculaires de l’univers Dogon. Les masques chez ce groupe ethnique, dont la société est très ritualisée, sont source de diverses interprétations. Le parcours de l’exposition se termine par des objets du quotidien réalisé par les tisseurs et les forgerons, véritables entités dans les villages. Bref, cet évènement culturel permet d’aller au delà  du caractère contemplatif que peut représenter de telles œuvres pour des occidentaux.

L’art Dogon à l’honneur au Quai Branly

Depuis les expéditions ethnographiques françaises du début du XXe siècle, l’art dogon n’a cessé de fasciner l’Occident. L’exposition parcourt l’histoire du peuplement du pays dogon, territoire du centre-est du Mali bordé par la falaise de Bandiagara. A l’entrée de la Galerie Jardin du musée, une carte retrace ces vagues de migrations successives qui ont fait naà®tre un art sculptural aussi riche que multiple. Cette richesse éclate dès la première salle de l’exposition: 133 sculptures y sont réparties selon les peuples qui les ont forgées. A l’appui de la cartographie, un fléchage au sol permet de situer les pré-Dogon (Tombo, Niongom, Tellem), déjà  présents sur le plateau de Bandiagara au Xe siècle, les Dogon-Mandé venus du sud-ouest et les Djennenké arrivés de l’empire du Ghana, au nord-ouest, pour fuir l’islamisation. Puis viennent les pièces N’duleri, Tintam, Bombou-Toro, Kambari et Komakan. « Dans cette première salle se trouve la moitié de ce qui existe au monde en matière de chefs-d’oeuvre sculpturaux dogon », explique Stéphane Martin, le président du Musée du Quai Branly. « C’est l’exposition que tout commissaire rêve de faire », renchérit Hélène Joubert, responsable des collections africaines du musée. Pour la première fois, poursuit-elle, « ces pièces sont réunies par ensembles, et tout devient cohérent: on voit clairement l’évolution iconographique et la régionalisation des styles ». Parfois, aussi, « on sent le même sculpteur derrière certaines œuvres, et c’est très émouvant ». La plupart de ces sculptures sont datées entre le Xe et le XIXe siècle. Au style réaliste djennenké, illustré par cette figure hermaphrodite au bras levé qui clôt majestueusement l’exposition, succède au XVIe siècle l’élégance N’duleri. L’assimilation, dès le XVe siècle, des styles tellem et niongom donnera naissance au premier style vraiment dogon, celui des Mandé. D’une grande diversité stylistique, ces œuvres présentent aussi des caractéristiques communes: bras levés, hermaphrodisme, gémellité, zoomorphisme… Autant de rappels au mythe de la création dogon, qui veut qu’Amma, dieu créateur du monde, ait eu deux jumeaux. L’un d’eux, rebelle, sera changé en renard, l’autre se transformera en cheval. Au travers de ses œuvres, la civilisation dogon livre les secrets de sa cosmogonie. Mais percer ces mystères prend du temps, souligne la commissaire Hélène Leloup: »Pour comprendre la statuaire dogon, il faut aller sur place, parler aux gens. J’ai ainsi appris qu’un bras levé signifiait un appel au dieu et qu’une main fermée était un remerciement pour un don ». La deuxième partie de l’exposition revient sur la fascination des anthropologues français pour les Dogon. Dès 1904, Louis Desplagnes rapporte du village de Songo des peintures rupestres aujourd’hui exposées Quai Branly. Dans les années 1930, Marcel Griaule conduit la mission Dakar-Djibouti. Sa présentation de la cérémonie des masques à  l’exposition coloniale de 1931 connaà®tra un grand succès. Plusieurs masques de cette collection sont mis en scène. Souvent zoomorphes, ils représentent tantôt un singe, tantôt un oiseau, tantôt un cervidé. Des hommes les portaient à  l’occasion de cérémonies initiatiques, comme celle du « dama » (levée de deuil), dont un film de Jean Rouch et Germaine Dieterlen décrit le déroulement. La dernière section de « Dogon » présente 140 objets à  la fois quotidiens et sacrés (tabourets, portes de grenier, outils en fer et bronze, bijoux en forme de serpent), témoignant de l’inclination des sculpteurs à  évoquer le mythe originel dans leur travail. L’exposition se referme sur un « uldebe », linceul d’influence musulmane, et l’idée qu’en quelques décennie, l’islamisation du plateau de Bandiagara et l’augmentation des contacts avec l’Occident ont profondément transformé le mode de vie des Dogon. Après Paris, l’exposition se rendra à  Bonn, puis Milan. Verra-t-on un jour pareille rétrospective au Mali, et pourquoi pas au musée de Bandiagara qui se construit? Peu de chances, convient Hélène Leloup. « Depuis 50 ans, les populations se sont converties à  l’islam et il n’y a plus de pièces sur place… Il faudrait qu’un grand nombre de collectionneurs acceptent de prêter leurs objets ».

Ginna Dogon : La 3ème édition a vécu

Tous les dogons se sont retrouvés pendant quelques jours pour se ressourcer et vivre des moments de partage avec les festivaliers étrangers. Quand on sait qu’il existe plus d’une soixantaine de dialectes dogons, on peut imaginer le foisonnement de richesses culturelles auquel ont eu droit ceux qui ont fait le déplacement. Cette troisième édition était placée sous la présidence du président de la république Amadou Toumani Touré. Le chef de l’Etat a d’ailleurs été élevé au rang de Hogon dans le village de Hamma situé à  25 km de Bandiagara. Le nouvel Hogon Amadou Toumani Touré a reçu deux tracteurs en guise de cadeau de la part du président directeur général de Toguna Industrie, Seydou Nantoumé. Réservé aux initiés ! Les falaises de Bandiagara ont vibrés au rythme des chants, danses, défilés de costumes traditionnels, les parades de masques, des courses de chevaux et conférences-débats entre autres… Mais la grande particularité de ce festival se trouve dans la tenue d’une manifestation rituelle. Il s’agit d’une cérémonie spéciale dont les tam-tams et les danse ne peuvent être exécutés que par ceux qui sont initiés aux rites et traditions dogon. Le festival international Ginna Dogon C’’est également l’occasion de mettre en lumière le riche artisanat dogon. Les participants ont également pu y voir les lutteurs de la région qui étaient en compétition durant trois jours. A côté de cela, des conférences-débats animés d’imminents historiens tels Bakary Kamian ont permis d’éclairer le public sur la genèse de ce peuple qui vit dans les falaises. Notons que la Bandiagara possède une prestigieuse tradition sociale encore très présente. Elle se traduit par des cérémonies rituelles de dons aux ancêtres, à  travers des sacrifices aux différents masques dogons. Rappelons que les dogon sont connus pour leur cosmogonie complexe et leur style de vie austère et dépouillé. Grands agriculteurs, ils vivent essentiellement aux pieds des falaises Bandiagara. Le pays dogon est situé au centre du Mali, dans la cinquième région administrative du pays, Mopti. C’’est l’un des sites les plus visités de la sous-région. La fondation Orange Mali qui a accompagné le festival en a profité pour faire des dons. l’administratrice générale de la fondation, Mme Diawara Aminata Kamian a remis au ministre de la culture 2000 cahiers et 500 moustiquaires. Ce dernier les a ensuite remis au représentant de 8 villages et 4 écoles de la région de Mopti. Cette action, selon Mme Diawara, s’inscrit dans le cadre de l’aide au développement et la réduction contre la pauvreté.

La croisade de Michel Brent contre le pillage du patrimoine culturel Africain.

Contre le pillage du patrimoine culturel Il a mis 6 ans pour faire , un documentaire d’investigation de 52mn sur le vol d’une statuette dogon à  Bandiagara au Mali. Mais à  60 ans, Michel Brent est infatigable et sillonne le pays depuis une quinzaine d’années pour le compte de ses recherches, enquêtes et repérages. «Tout commence par là , affirme t-il. Une idée vient, un sujet prend forme et puis on passe à  l’écriture du film ». Pour ce «journaleux aguerri » comme il se définit lui-même, l’exercice n’est pas de tout repos, mais toujours empreint de sensations, de découvertes, de voyages. Après avoir fait ses armes de reporter-photographe au magazine Belge, le et parcouru le monde, Brent réalise en 2003, un film de 13’sur la sauvegarde du patrimoine culturel pour le compte de la Banque Mondiale. , C’’est le titre de ce mini documentaire qui lui donnera l’envie absolue de ne faire que ça ! Il se forme alors aux métiers de l’image et 8 ans plus tard, réalise : « Je suis toujours entrain d’apprendre, il se trouve que J’adore le Mali et que J’y ai des amis. Alors je prends tout mon temps pour faire un travail de qualité quand je suis sur un projet ». En croisade contre le pillage des objets d’art Africains Pourquoi le pillage en particulier ? « Parce qu’il faut que l’Afrique s’éveille », jure Brent indigné. Vous vous rendez compte, en pillant le patrimoine d’un pays, on détruit son histoire et l’on compromet son développement en même temps. » «Nous sommes dans la civilisation de l’image et quel meilleur moyen de faire passer un message fort? » Michel Brent qui connaà®t le sujet se révolte aussi que ce soit parfois les locaux qui contribuent au pillage. «Ca fait des années que je travaille dessus et il fallait que J’interpelle là -dessus. J’ai fait ce film pour sensibiliser. Quand on voit le Musée du Quai Branly à  Paris, il n’y a pas de quoi se réjouir mais le Mali se débrouille bien dans la restitution de son patrimoine ». Le film a quant à  lui bien marché et été projeté un peu partout dans le Monde.  » Pêcheurs de Sable  » ou l’extraction de sable dans le bassin du Fleuve Niger Après , Brent s’intéresse cette fois à  deux nouveaux projets dont l’un d’envergure. Produit par Zorn Lille, une structure française, Brent veut mettre en relief l’extraction du sable dans la zone du bassin du Niger. 26 ou 52′, tout dépendra des investigations. Et des financements. Le sujet touche l’environnement en s’intéressent à  l’hydrologie et à  la mécanisation des instruments de travail pour l’extraction.  » Et puis, ça va me changer un peu du pillage », confesse Brent qui est au Mali pour les repérages et peut compter sur une bonne équipe :  » J’ai des gens excellents et qui me suivent depuis des années ». Retour au pillage…archéologique Difficile d’abandonner ses premiers amours. l’autre projet, C’’est encore le pillage. Archéologique cette fois et s’étendant aux sites de cinq pays autour du bassin du fleuve Niger. Il s’agit du Ghana, du Niger, du Nigéria, du Bénin et du Mali bien sûr, o๠l’histoire a laissé des traces immenses, exulte Brent. «Ce sera un documentaire fiction de 90 mn qui s’appellera . Je sais d’avance que le faire me prendra encore du temps. 5 ans peut-être… Mais je suis heureux d’avoir l’appui de Cora Films, la structure de Cheikh Oumar Sissoko, un grand cinéaste. Je travaille aussi avec de nombreuses organismes comme le Centre national de la cinématographie du Mali(CNCM). J’ai fait sur fonds propres et pour ce projet, il me faudra près 450 000 euros et je compte également sur des financements européens, internationaux etC’… Michel Brent a les yeux qui brillent. On le sait le chemin sera fastidieux mais passionnant : « Je ne fais pas des films pour gagner de l’argent mais pour qu’ils soient vus. Avant tout, J’ai une mission d’information et de sensibilisation du public». Après avoir publié une dizaine de livres et près de 1000 articles dans des revues internationales, Michel Brent n’en est plus à  son premier coup d’essai. Et C’’est tout le mal qu’on peut souhaiter à  ce talentueux réalisateur Belge mais résolument malien de C’œur !

Forum des peuples : l’occasion de découvrir les sites touristiques de Bandiagara

Plus de 700 participants sont venus de pays frères comme de la guinée Conakry, le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie, le Sénégal, la RDC et les 8 régions du Mali sans oublier la France et la Belgique. Pour les hébergements, les hôtels, campements, et sites touristiques côtoient les grandes salles de réunions et les amphithéâtres de plénière. Bandiagara offre un voyage au C’œur d’une grande civilisation africaine dans un pays sublime o๠cohabitent la rudesse de la nature et les trésors de l’architecture. Dans cette cité féconde l’Association Gina Dogon concilie le mythe, le mystère, la magie, les odeurs et la vie d’une civilisation fière de son passé et tournée vers l’avenir. Les danseurs dogons offrent une magie céleste, histoire de célébrer un «non» à  l’ordre et aux pratiques néo-libérales en passe d’ôter au terroir son potentiel culturel que les générations ancestrales lui ont légué. Avec une population à  vocation essentiellement agricole et pastorale, le cercle de Bandiagara regorge d’importantes ressources qu’il tire du Yamé (ramification des eaux du fleuve Niger), des prairies .Comme l’affirme le maire de Bandiagara ce forum met non seulement la ville sur orbite pendant trois jours mais donnera l’occasion aux participants d’aller visiter les sites touristiques. Il s’agit des paysages exceptionnels de falaises et de plateau gréseux intégrant de très belles architectures (habitation, greniers autels, sanctuaires et Toguna, abris des hommes). Le site de la région de Bandiagara possède des traditions sociales prestigieuses encore vivantes, les masques de fêtes rituelles et populaires et cultes périodiquement rendus aux ancêtres à  travers plusieurs cérémonies. Par ses caractéristiques géologiques, architecturales, archéologiques et ethnologiques et ses paysages, le plateau de Bandiagara est l’un des sites les plus imposants d’Afrique de l’ouest. Quand un chasseur fonda Bandiagara… A titre de rappel, Bandiagara a été fondée par un éminent chasseur du nom de Nangabanou Tembely qui est venu du village de Gankilema. Deuxième cercle après Bafoulabe, il y a 50 ans après l’indépendance du Mali, Bandiagara, sert de lieu d’échange aux ‘pauvres’ sur les grandes questions qui font l’objet d’actualité et parallèlement au forum du G8 qui se tient à  l’Aquila en Italie. Par ailleurs, le forum se déroule dans une atmosphère de fraternité, de convivialité et d’amitié pour les participants venus des quatre coins de l’Afrique. A la cérémonie d’ouverture, la danse des chevaux ont marqué les esprits des participants. Une démonstration faite par les cavaliers dogons devant une assistance riche en couleurs. Rappelons cette édition 2009 du forum des peuples vient après les précédents foras tels Siby I, II ,Kita, Fana, Gao Koulikoro. Un contre-forum pour rappeler au monde entier que les pays riches ne peuvent eux seuls décider du sort du monde. Au cours de ce forum, les participants auront abordé toutes les questions relatives à  l’économie capitaliste, la nouvelle crise de la dette en gestation, la crise financière internationale, l’immigration…

Forum des Peuples, rendez-vous à Bandiagara en pays Dogon

Le forum regroupera près de 600 participants, venant de plusieurs organisations de la société civile du Mali et d’Afrique, ainsi que des mouvements sociaux du Nord. Tous se retrouveront à  Bandiagara, en pays dogon, région, située à  l’est du Mali, dans le delta central du fleuve Niger, là  o๠les plaines sont vastes et mystérieuses… l’Initiative riz, la dette nationale, l’exploitations minière, les atteintes aux droits de l’homme, ou encore la crise économique et financière, seront les thèmes débattus lors de ce forum, de même que seront évoqués, les échanges commerciaux, l’immigration ou les difficultés d’intégration en Occident, sans oublier la pauvreté du monde rural au Mali et aussi en Afrique. Les objectifs du forum sont entre autres de consolider la mobilisation citoyenne en faveur des Assises de Bandiagara et les acquis des précédentes éditions ; Le forum se propose également d’analyser les politiques de développement, de proposer des alternatives Sud- Sud, et d’informer les participants sur la crise financière internationale et ses effets pervers sur les pays en développement, lesquels subissent déjà  ses conséquences néfastes ! A l’instar des grands mouvements altermondialistes,le Forum des peuples se veut un espace d’alternatives, et d’éducation populaire. Il promeut une approche différente des politiques néolibérales et vise à  interpeller les décideurs sur le plan national et international, quant aux conséquences désastreuses de leurs politiques sur la vie des populations. Un succès renouvelé à  chaque édition Lancé en 2002 à  Siby, un arrondissement de la 2è région du Mali(Koulikoro), le Forum des peuples a contribué, jusqu’ici à  montrer les insuffisances d’institutions comme l’organisation mondiale du Commerce ( OMC),la banque mondiale, le Fond Monétaire International et la suprématie du G8. Après Siby I et II ( en 2002 et 2003), Kita (cercle de Kayes) en 2004, Fana, (cercle de Koulikoro) en 2005, Gao 2006, Sikasso 2007, et Koulikoro 2008, cette année le choix s’est porté sur Bandiagara pour abriter le grand rendez-vous annuel des peuples. Mme Barry Aminata Touré est l’une des organisatrices du Forum des peules. Elle est aussi la Présidente de la Coalition Alternatives africaines Dette et développement(CAD/Mali). C’’était lors d’une conférence de presse organisé ce mercredi, qu’elle a présenté les grandes lignes des futures Assises du Plateau Dogon. Vivement la parole aux citoyens. http://www.forumdespeuples.org