La guerre de l’eau (minérale)

Autrefois, les sachets d’eau à  10 francs CFA suffisaient à  étancher la soif, les eaux minérales en bouteille étant considérées comme un produit de luxe. Si la prise de conscience des enjeux sanitaires n’est pas généralisée au Mali, l’eau en bouteille commence à  être considérée comme un bien de consommation courante. Il y a quelques années, seuls deux ou trois noms se partageaient le marché avec des marques étrangères. Aujourd’hui, les Diago, Kirène, Kati, Vitale, Tombouctou, et autre Roc Vert, ont relevé une offre locale qui suit une demande exponentielle. Tirées de sources profondes, les eaux minérales maliennes garantissent une concentration en minéraux et oligo-éléments (calcium, magnésium, sulfate) qui leur donnent des vertus vantées comme thérapeutiques. Ces eaux se sont taillées, en quelques années, une part de plus en plus grande, à  l’instar de la marque Diago, le leader historique du secteur dont le positionnement ne se dément pas avec une production annuelle de plus de 25 millions de bouteilles de 1,5 litres, 4,6 millions de bouteilles de 0,5 litres et 360 000 sachets. « Diago prend des marchés par rapport à  d’autres car elle est de meilleure qualité. Nos processus d’extraction de l’eau et de filtration sont éprouvés.», explique Laura Gana, responsable marketing à  la Société des eaux minérales du Mali (SEMM) qui la produit. Le secret de fabrication de l’eau, c’est sa méthode de filtration, procédé jalousement gardé par les marques. « Toutes les eaux ont quasiment les mêmes minéraux, les mêmes apports mais tout se joue au niveau du traitement », confirme Tania Azar, directrice générale des eaux Kati, un challenger qui depuis plus d’un an a considérablement augmenté son taux de présence avec une production moyenne de 12 000 bouteilles de 1,5 litre par jour et qui s’apprête à  lancer de petites bouteilles de 0,25 litre pour concurrencer les sachets. Ainsi, avec un peu de calcium ou de magnésium par ci, une pointe de marketing par-là , la guerre de l’eau va bon train. Et tout est fait pour que les Maliens se jettent à  l’eau.

Forages au Mali : un potentiel à exploiter

Le forage est un puits creusé par un procédé mécanique à  moteur (foreuse) en terrain consolidé ou non, pour tous usages sauf pour les ouvrages de reconnaissance ou d’observation (on parle alors de sondage). Selon Jean Firmin Dena agent du centre de documentation de la direction nationale de l’hydraulique (DNH) au Mali et technicien géologue de formation, « Il s’agit d’un trou cylindrique qu’on creuse dans le sol pour recouper des venues d’eau ». Suite à  plusieurs simulations, et selon différents modèles effectués lors de l’élaboration du document « Synthèse Hydrogéologique du Mali» le bilan global des aquifères calculé donne une recharge moyenne par infiltration de la pluie d’environ 65 milliards de mètre cube par an et une recharge d’environ 1,6 milliards de mètre cube par an par les eaux de surface, alors qu’on exploite actuellement 200 à  250 millions de mètres cube par an, à  peine 0,5 % et ceci sans compter les réserves des aquifères qui sont de l’ordre de 2 700 milliards de mètres cube. Les eaux souterraines sont exploitées au Mali surtout à  travers les puits et forages. Cependant l’eau n’est pas toujours potable. « Il y a une réelle mauvaise organisation du secteur. Le mieux serait d’octroyer des permis aux citoyens désireux de creuser des forages dans leurs habitations ou dans leurs champs et aussi aux industriels» explique M.Dena. Les forages sont de plus en plus utilisés pour obtenir de l’eau potable, propre à  la consommation humaine et animale, « A la fin de la construction du forage (foration), il est impératif de faire des analyses de l’eau et des analyses physico-chimiques et bactériologiques afin de déterminer la potabilité ou non de l’eau de forage » insiste M.Déna. Au Mali, il existe une base de données nommée Sigma à  la DNH/Mali o๠toutes les propriétés des forages ainsi que des autres points d’eau du Mali sont sélectionnées et stockées. Mme Fatoumata Sabé est chef de la section gestion base de données et du système d’information. « Dans notre pays, le développement de l’hydraulique a commencé avec la construction de points d’eau modernes vers les années 1970. D’après les dernières statistiques datées de décembre 2012, nous avons recensé 32.009 points d’eau modernes. Pour ces points d’eau modernes, il s’agit de 21.614 forages productifs et 10.395 puits modernes » explique Mme Sabé. Dans certaines zones reculées du Mali, ce n’est pas chose aisée de réaliser des forages. «Souvent nous ne demandons qu’une petite contribution de la communauté pour creuser le puits. Par exemple si le montant total est de 12 millions de francs CFA, nous demandons 10% et même cela, certains villages n’arrivent pas à  payer » se désole M.Diall. A côté de cela, un véritable problème environnemental se pose, « la troisième guerre mondiale sera la guerre de l’eau. Avec la rareté des pluies, les eaux souterraines risquent de s’épuiser aussi. La seule perspective pour le Mali C’’est de protéger les cours d’eau comme le fleuve Niger, victime déjà  d’ensablement et de construction dans le lit du fleuve » explique Modibo Diall, ingénieur géologue.

Des solvants naturels contre les eaux usées

La gestion des eaux usées, surtout en période d’hivernage, est devenue un problème sanitaire et environnemental majeur à  Bamako. Les populations riveraines ne cessent de se plaindre de l’odeur dégagée par ces eaux sales, malgré les efforts du ministère de l’Environnement et de l’Assainissement à  travers la l’Agence nationale de gestion des stations d’épuration du Mali (ANGESEM). Le canal de Quinzambougou, zone test Le ministre a donc finalement demandé à  l’Agence de prendre des mesures afin que cette question environnementale ne soit plus qu’un mauvais souvenir pour les populations. l’ANGESEM a fait appel à  la société sud-africaine, qui a mis à  disposition du Mali 100 000 litres de solvant naturels. Un premier essai a été effectué le 4 septembre dans les caniveaux de Quinzambougou et à  la station d’épuration de Sotuba, sous les yeux des directeurs nationaux de l’Environnement et de l’ANGESEM, du coordinateur de la société sud-africaine et du chef d’antenne du district de Bamako. Une première expérience concluante Les résultats ont été concluants pour cette première épuration. « Nous sommes désormais à  l’abri des maladies et autres fléaux dus aux eaux usées. Nous encourageons notre gouvernement et ses partenaires », ont commenté des riverains du canal de Quinzambougou. Une équipe technique a par ailleurs été mobilisée pour former et équiper une vingtaine d’agents de l’ANGESEM qui seront affectés à  la station d’épuration et à  certains grands collecteurs du district de Bamako. Reste maintenant à  faire la guerre aux déchets solides.

Gestion des eaux usées de Bamako : Un véritable casse-tête

b Incivisme et laxisme] Nous sommes en commune 6 du district de Bamako, dans le quartier de Faladié Sokoro. Ici, il faut être un virtuose de la randonnée pédestre pour sortir de chez soi et atteindre le bord du goudron sans encombre. Partout, des flaques d’eau, des fosses septiques à  ciel ouvert, de véritables torrents d’eau souillée des ménages se déversent directement dans les rues. A l’instar de nombreuses grandes villes dans le monde, Bamako connait avec acuité le problème de la gestion de ses eaux usées. Au manque de moyens suffisants pour faire face aux besoins, s’ajoute un véritable je-m’en-foutisme des populations. C’’est en effet, l’inconscience et l’incivisme des populations qui sont les premières causes des énormes difficultés d’assainissement de notre capitale. Le peu d’efforts faits par les autorités gagneraient en efficacité si chacun y mettait du sien. Or, sous prétexte de la pauvreté, des familles entières s’installent dans des logis inadaptés avec des habitudes d’hygiène fort sujettes à  caution. La pauvreté, faux alibi Le manque de moyens justifie-t-il de jeter les restes d’aliments avec l’eau de la vaisselle directement dans le caniveau ou pire à  même le sol dans la rue ? l’argent est-il la seule justification quand on voit des maisons construites sans fosses septiques et dont les propriétaires se branchent directement au caniveau ? Evidemment non, puisque dans des quartiers dits huppés de Bamako comme l’ACI Golf ou la cité résidentielle à  l’entrée de Sébénikoro, des maisons cossues déversent au vu et au su de tous leurs eaux usées dans les fossés. Certains hôtels de la place sont aussi adeptes de cette pratique. Que dire des sociétés et autres usines qui font de même, alors qu’elles ont largement de quoi s’offrir les services de prestataires du secteur ? Prestataires qui eux-mêmes se rendent coupables de véritables crimes contre les populations et l’environnement en allant déverser leur chargement dans des zones proches d’habitation ou des champs en lisière de Bamako, par exemple à  Kati ou pire directement dans le fleuve, comme à  Samanko. Récemment, les populations de Kati Sirakorodoufing, ont réussi à  mettre en déroute des « vidangeurs » qui venaient de jour comme de nuit pour vider leur citerne sur un terrain vague. Victimes des odeurs mais aussi de toutes sortes de maladies qui sont survenues dès le début de ce douteux manège, elles ont mis en demeure les autorités communales pour arriver à  les arrêter. Les eaux usées ainsi déversées tout près du lit d’une ancienne rivière, se frayaient un chemin pour rejoindre tout naturellement le Diafaranako, direction le fleuve. Entre temps sur son passage, elles ont servi pour la baignade, la lessive, et l’arrosage de produits maraichers… Que font les autorités ? Si pendant longtemps, le principal problème était la gestion des eaux très polluées des usines, aujourd’hui ce problème est en passe d’être résolu. Même s’il existe encore quelques contrevenants, la plupart des unités industrielles de Bamako prétraitent leurs eaux avant de les rejeter dans le système d’évacuation général. Avec la construction de la station d’épuration de Sotuba, les autorités manifestent leur volonté de mieux gérer cet aspect de la situation. Reste maintenant à  faire face aux eaux usées domestiques qui sont aujourd’hui le gros du problème, explosion démographique et expansion de la ville aidant. Leur évacuation et leur traitement est du ressort de la Direction Nationale de l’Assainissement, du Contrôle des Pollutions et des Nuisances. Ce service du Ministère de l’Environnement et de l’Assainissement, dirigé par Mr Félix Dakouo, peine aujourd’hui à  faire face à  l’immensité de la tâche. Selon la DNACPN, la production des eaux usées domestiques de Bamako a été estimée à  40.000 m3/jour et celle des boues de vidange à  600.000 m3/an. Seulement 33% des ménages disposent de toilettes adéquates ; 65% de ménages disposent de latrines rudimentaires et 2% des ménages ne possèdent pas de toilettes. Les initiatives fleurissent, à  l’exemple des mini-égouts réalisés dans les communes du district, mais restent encore insuffisantes. Bamako bénéficie ainsi d’un réseau de mini-égouts long de 37,5 km (chiffres de 2006). Il dessert les quartiers de Banconi-flabougou sur 12 km, Baco-djicoroni sur 25 km et l’Hippodrome sur 0,5 km. Bamako est en outre équipée en ouvrage collectif d’une longueur totale est de 27 km et réparti en 9 tronçons mais qui ne desservent que 1,5% de la population. Des mini-stations de traitements des boues de vidanges ont également été expérimentées avec plus ou moins de succès. La carotte et le bâton Selon les agents de la DNACPN qui compte des démembrements dans les différentes communes de Bamako, chapeautés par une Direction régionale, on revient toujours à  la notion d’incivisme et de mauvais comportements des populations. Les ouvrages réalisés peinent à  remplir leurs fonctions parce que les populations riveraines ne se sentent pas concernées par leur entretien et leur pérennisation. Au contraire, ce sont elles-mêmes les principaux responsables des dégradations. Selon un agent de l’assainissement de la commune 5 qui a requis l’anonymat, il faut surtout « qu’on nous laisse travailler ». Il existe des textes et des règles qui régissent la gestion des eaux usées. Et des sanctions sont prévues pour dissuader. Mais force est de constater que « ce sont les chefs eux-mêmes qui interviennent quand tu veux sévir contre quelqu’un de leur entourage ». l’autre enjeu, C’’est la question du social. « Il nous est difficile d’aller infliger une amende à  un chef de famille que l’on voit dans des difficultés évidentes, même s’il est en infraction ». La véritable solution au problème reste donc la sensibilisation et l’information des populations. Il est important de faire comprendre aux gens quels sont les dangers qu’ils courent et ce qu’ils gagnent à  respecter les règles les plus élémentaires d’hygiène. « Une fois qu’ils ont compris, on voit quand même du changement dans leurs habitudes », nous confie l’agent. Le changement de mentalité prend des années pour s’installer. Il est donc plus que nécessaire de s’investir dans l’apprentissage des bonnes pratiques à  l’école et comme le dirait l’autre, user à  bon escient de « la carotte et du bâton ».

Pollution urbaine : 5.000 m3 d’eaux usées déversées dans le fleuve Niger

Le 7 avril de chaque année, les Etats membres commémorent la création de l’Organisation mondiale de la santé communément appelée OMS. Et C’’est l’occasion d’attirer l’attention de l’opinion nationale et internationale sur les problèmes de santé importants que nous vivons. « Urbanisation: un défi pour la santé publique » Le thème retenu pour la journée mondiale 2010 est « Urbanisation: un défi pour la santé publique ». Cela parce que l’urbanisation est à  l’origine de nombreux problèmes de santé. On peut citer, entre autres, les maladies non transmissibles comme le diabète, le cancer, les maladies cardio-vasculaires et affections respiratoires chroniques, la mauvaise alimentation, la sédentarité et les risques inhérents aux épidémies. En plus, les pauvres des villes, souffrent davantage en ce sens qu’ils sont exposés à  un risque accru de perturbations, de maladies chroniques et de certaines maladies transmissibles comme la tuberculose ou le VIH/sida. Un risque lié à  l’augmentation des polluants organiques, des déchets, des accidents de la circulation routière et de l’intensification des catastrophes naturelles telles que les inondations. Le réchauffement climatique, ajouté à  ce mélange de facteurs liés à  l’urbanisation rapide, contribue également à  fragiliser la santé des populations. Eaux usées et pollution « Je mentionnerais aussi le fait qu’à  Bamako, par exemple, les principales unités industrielles rejettent chaque jour environ 5.000 mètres cubes d’eaux usées chargées de polluants chimiques et organiques et de métaux lourds et plus de 16.000 mètres cubes d’eaux usées sont rejetées par les teintureries. Sans oublier que la pollution de l’air dans notre capitale, résulte principalement de la poussière dans sa complexité, des fumées, des gaz et des particules rejetées dans l’air par les engins à  2 roues et les véhicules dotés de moteurs diesel. Elle est aussi due à  des pratiques blâmables, comme l’incinération des pneumatiques dans la ville. Tout ceci représente un ensemble de facteurs entraà®nant l’irritations du nez, des yeux et de la gorge, ainsi que des essoufflements et des toux, qui menacent considérablement les tissus pulmonaires ». Urbanisme et santé C’’est fort émue que Mme Gakou Salamata Sidibé, Ministre du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme, s’est adressée au public, en sa qualité d’Ambassadeur de la Journée mondiale de la santé 2010 au Mali. Selon elle, le thème directeur de cette journée, s’inscrit en droite ligne des politiques et stratégies de logement du Gouvernement de la République du Mali que son département a la charge de mettre en œuvre. Comme l’a laissé entendre Oumar Ibrahima Touré, tous les citadins ont intérêt à  ce que l’on créé des villes qui n’excluent personne, et qui soient accessibles et accueillantes pour les personnes de tous âges. Dans ce cadre, une coopération accrue entre le secteur de la santé et les autres secteurs, en vue de la résolution des problèmes de santé liés à  l’urbanisme est nécessaire, dira t-il. Signalons qu’une « marche pour la santé » qui concerne tous les citadins de Bamako, est prévue le dimanche 11 avril à  9 heures sur le boulevard de l’indépendance. Elle concerne tous les citadins de Bamako.