Livre: Oumar Mariko vu par Aboubacar Eros Sissoko

Le coup de communication est d’une portée importante, et il a réussi en cette période marquée par une atmosphère de précampagne pour les prochaines élections générales de 2012. C’’est la première fois dans l’histoire du Mali indépendant qu’un auteur décide d’écrire sur un homme politique malien. Le secrétaire général du parti SADI peut se réjouir d’avoir cette chance. A 54 ans, un ouvrage lui est consacré par le jeune écrivain malien vivant en France. « Docteur Oumar Mariko. Une légende vivante », est en effet le titre d’un livre biographique écrit par Aboubacar Eros Sissoko et paru aux éditions « l’Harmattan ». Le lancement officiel du livre, qui a eu lieu samedi 3 décembre dernier au Centre Djoliba, a enregistré la présence des membres de l’Association « Alternative Mariko 2012 », ceux du Comité central du parti SADI, et amis de l’homme politique. Un homme et son parcours Préfacé par Touré Issoufi Arber Bedari, ce livre est un vibrant témoignage sur la rencontre de l’auteur avec le député de Kolondiéba. Une amitié de vingt ans prenant racine bien avant la création de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) qui propulsera Oumar Mariko au-devant de la scène politique malienne avec la chute du régime dictatorial de Moussa Traoré. l’auteur, à  cette époque membre ardent de l’AEEM, nous fait partager ses souvenirs avec ce militant qu’il qualifie de « légende vivante » dans un langage ferme. « Un récit captivant, véridique, d’une rare sincérité », apprécient certains lecteurs. Si les critiques littéraires font la différence avec les œuvres pédagogique enseignés dans nos écoles, ils conviennent en revanche, que le livre est écrit avec un génie rare dans les plumes maliennes contemporaines. Témoin oculaire et acteur de la journée sanglante du 26 mars 1991, Aboubacar Eros Sissoko nous fait part de son ressenti sur cet évènement meurtrier qui a ébranlé l’histoire de notre pays. Tout à  la fin de l’ouvrage, la lettre de félicitation du professeur d’Oumar Mariko rend hommage à  cet élève hors du commun devenu « une légende vivante ». En sa première partie (sur les cinq qu’il comporte) le livre fournit la note de l’auteur o๠il rend « la vérité sur Dr Mariko ». Une deuxième partie (mémorable rencontre) o๠l’auteur définit l’UDPM comme « un parti creux ». La troisième partie, elle, est un chapitre qui parle du portrait physique, la dimension humaine du Dr Mariko, sa dimension politique o๠l’auteur tranche qu’entre C’’est deux, « il n y a pas une différence fondamentale ». Une vingtaine de témoignages d’amis, de parents, de camarades de lutte se succèdent, et tous apprécient à  sa juste valeur le Dr Mariko qui, pour chacun des intervenants, reste « un espoir pour le peuple malien ». 20 ans de constance dans le discours Qu’est-ce qui justifie le choix du Dr Oumar Mariko comme sujet de ce livre ? l’auteur explique son choix par la « constance dans le discours ». Toute chose, pense-t-il, qui est rare chez les hommes politiques de notre pays. « Dr Mariko représente quelque chose pour ses camarades, pour le Mali, qu’on le veuille ou non. Oumar ne s’est jamais intéressé à  la ligne éditoriale de ce livre. C’’est un homme politique qui respecte les autres, qui ne cherche jamais à  manipuler les autres», rassure Aboubacar Eros Sissoko. Issoufi Albert Bédari Touré, lui, n’en dira pas moins. Pour celui qui a préfacé ce livre, le député SADI est « le seul homme resté constant de tous ces héros du 26 mars 1991. Seul homme qui a véritablement un programme pour le Mali, un homme dont l’histoire mérite d’être écrite et lue publiquement au Mali, en Afrique ou ailleurs, pour le bien-être du peuple», estime Issoufi Albert Bédari Touré. Qui appelle l’homme politique à  poursuivre son combat en faveur des luttes sociales. Oumar Mariko, très ému par ce qu’il a qualifié de « marque d’honneur et de fierté », a exprimé toute la reconnaissance du travail de l’auteur. Dans un appel lancé à  cette tribune, l’homme politique a rappelé le but et les motivations profondes du peuple de la révolution de mars 1991. «Le peuple malien, qui nous a soutenus en mars 1991, mérite qu’on le sauve des incertitudes dans lesquelles il a été plongé» a-t-il déclaré. Ajoutant que sa «ferme conviction est que cette tâche est une mission de génération et un devoir de mémoire ». « La justice sociale, la satisfaction des besoins élémentaires du peuple malien, l’éducation, l’état de bonne santé, l’autosuffisance et la sécurité alimentaire et le logement décent pour toutes les Maliennes et tous les Maliens pourront donner à  notre pays sa dignité d’antan », a lancé Oumar Mariko. Qui a appelé à  la mobilisation et à  la vigilance pendant les prochaines élections.

Littérature : « Mais qui a tué Sambala? »

A travers ces 200 pages, l’auteur fait une peinture vivante de la société malienne. Un livre d’actualité, diront les critiques littéraires. Car, arguent-ils, «Â il sent le vrai ! ». Chacun peut y reconnaitre une galerie de personnes croisées et s’y identifier. Quelque soit son pays, sa région, son angle de perception, C’’est le fruit d’une observation aiguà« qui n’épargne personne. Le contenu de cet ouvrage est nourri d’une vitalité propre aux sociétés o๠tout est à  faire. Vitalité qui caractérise bien l’auteur. «Â Mais qui a tué Sambala ? » est un roman bien ancré dans le Mali natal de l’écrivain. Il nous plonge en pleine actualité malienne, sans détour o๠se mêlent les injonctions néocolonialistes et les résistances, la tradition et la modernité, la dépendance et la souveraineté. [B Au C’œur de l’actualité ] Dans cet ouvrage, le personnage central est Sambala, un de ces minables opportunistes à  qui le démantèlement des politiques nationales bien nommées de « déconcentration » fait le lit de ses forfaits. Sambala, comme tant de maires actuels, fait fortune en mettant en vente le bien commun vital qu’est jusqu’ici la terre villageoise et ruine des centaines de vie. Il suffit de prêter attention aux évènements relayés par les médias, qu’il s’agisse du démantèlement de l’Office du Niger, de la vente du Chemin de fer Bamako-Dakar, du sous-sol jeté en pâture aux multinationales ou des conflits et exactions politiques pour y voir des parallèles. Le livre est d’une actualité qui dépasse largement les frontières du Mali et atteint une dimension universelle. «Â Amilcar Cabral, Mariama Bâ, Modibo Keà¯ta, Sankara, Cheick Anta Diop et tant de grands hommes trop tôt disparus, ont payé de leur vie pour avoir voulu la souveraineté de leur peuple. Ils ont des filles, des fils, un peuple, des peuples, en qui ils résonnent, et par qui le devenir et l’espoir renait » commente le réalisateur Eric Pauporte, réalisateur du film «Â  Mali D’Or » et qui a préfacé ce chef-d’œuvre. Aboubacar Eros Sissoko en est, selon lui, un homme qui rayonne de la force, de sa lucidité, de ses blessures aussi. «Â Un homme, poursuit-il, dont la parole, l’inspiration et la pensée se construisent dans la vie, le présent, son vécu, celui de ses proches, de ses frères et sœurs ». Sa matière à  penser-écrire découle de là . Mais elle est vigoureusement enracinée dans une culture parlée, forte, ancrée loin dans l’histoire par des contes, les dictons, les chants et les dires des aà®nés. A rire, à  pleurer, à  rebondir. Comme tous ceux qui ont été dépossédés, il a pleinement sa richesse d’homme. l’écrivain sait s’en servir et la transmettre, tout en malice et en lucidité vraies, aimant, fait de force et de faiblesses, humaine. Il le démontre dans ce livre. » Pour le réalisateur Eric Pauporte, Eros est un passeur culturel, un acteur, un conteur qui s’est approprié l’écriture. Il charme, surprend, moralise sans s’appesantir et nous entraine. O๠? Un livre à  lire absolument.

Aboubacar Eros Sissoko : Un jeune écrivain prolixe

Pour les critiques littéraires, Aboubacar Eros Sissoko est un écrivain de son temps. Il trempe la plume dans la plaie d’une société en quête de repères. La particularité de son écriture C’’est surtout son intérêt pour les questions d’actualité, et ce que fut le Mali jadis. Au total le jeune auteur capitalise déjà  9 ouvrages dans les librairies, tant dis que le dixième est incessamment attendu. Elève brillant Ce jeune écrivain (la quarantaine) est sans doute bien parti pour assurer la relève des grands écrivains que le Mali a connu. D’une passion inouà¯e pour l’écriture, ses œuvres ont fait le tour des librairies. Diplômé de l’Ecole des Beaux Arts de Toulouse (France), o๠il obtient le DNAP (diplôme national d’arts plastiques) en section Art Communication Multimédia en 1996, Eros (comme l’appellent ses amis) fut un brillant élève. Il entame sa carrière d’animateur socio-culturel la même année à  la Maison de Quartier des Epinettes à  Evry. Grâce au système d’études par alternance, il passe en 1998 le DEFA (Diplôme D’Etat dans la Fonction D’animateur au CEMEA) au Centre d’Entraà®nement aux Méthodes d’Animation Active à  Gennevilliers. Aboubacar Eros Sissoko devient tour à  tour Educateur spécialisé au GRAJAR (Groupe de Recherches et d’Actions auprès des Jeunes et Adolescents de la Rue, puis Educateur au club de Prévention OSER à  Evry. Riche de ces formations, il décide de créer des outils pour le public enfant, jeunes, adolescents et adultes en écrivant des livres. Ecrivain de son temps Sa fille Emma Maà¯mouna Bâ Sissoko, fut le facteur déclencheur d’une riche carrière d’écrivain pour l’homme. Cela, en lui transmettant des contes qui ont bercé son enfance. «Â l’écriture devient alors une passion » nous dit-il. A 46 ans, ses œuvres cartonnent déjà  dans les libraires maliennes et européennes de l’espace francophone. Son premier livre, publié en 2005 par «Â Collection Légendes du Monde » (Harmattan), fait découvrir son talent littéraire. Promis à  une riche carrière, Eros fait parler de lui à  travers son livre «Â Sadio et Maliba l’Hippopotame » qui traite de l’amitié qui régnait entre l’homme et la nature. l’année suivante il revient avec «Â La Mort de Maliba, l’Hippopotame au temps des colonies », chez «Â Collection Contes du Monde pour Tous » aux Editions Monde Global. Cette œuvre, qui a fait beaucoup de bruit, constitue la réponse à  ce que sous-tendaient certains députés français pour imposer les bienfaits de la colonisation au continent noir. «Â Mariama Kaba du Mali, une enfance excisée », publié en 2007 aux éditions «Â l’Harmattan » se veut le procès contre l’excision. Une pratique que l’auteur (pour des raisons qu’il a évoquées dans son livre) juge «Â cruelle, barbare et appartenant à  une autre époque ». «Â Chakozy, un drôle de chat » (en parlant de Nicolas Sarkozy, le président français) est édité la même année (2007) par «Â l’Harmattan », et vient mettre le pied dans le plat d’un débat comme l’immigration qui défraie la chronique. Ce livre, qui intervient au moment o๠les conditions de vie de nos compatriotes vivant en France ne sont pas les meilleures à  cause des nouvelles politiques d’immigration, dresse le parcours extraordinaire d’un chat téméraire qui croyait à  son destin… «Â Bakari Dian, le fils rebelle de Ségou » est aussi publié en 2007 aux «Â Editions Anibwé ». Il parle de «Â Bilissi », le monstre de Ségou qui a fait régner la terreur sur la capitale des Bambaras jusqu’à  l’arrivée de Bakari Dian. La bataille fut rude au pays des balanzans. En 2008 «Â Une enfance avec Biram au Mali » sort chez «Â Collection Ecrire l’Afrique » et se veut un roman autobiographique. Car, après la mort de son père (ancien compagnon de feu président Modibo Keà¯ta), Aboubacar Eros consacre ce livre qui retrace sa vie de militant, de pédagogue et de père exemplaire. Le «Â Suicide Collectif », publié en 2010 est un roman qui raconte la traversée chaotique de centaine de jeunes africains, candidats à  l’immigration clandestine. La même année «Â Moriba Yassa, une incroyable histoire d’amour » sort dans la «Â Collection «Â Ecrire l’Afrique Harmattan ». Il remet au goût du jour la vieille légende des amoureux Moriba et Yassa. Enfin «Â Une mort temporaire » est un essai biographique inspiré d’un accident grave de circulation dont il a été victime à  Bamako en mai 2010. Au C’œur de l’actualité «Â Des fauves dans le buisson » est une pièce de théâtre, qui sortira bientôt. Elle traite de sujets d’actualité comme la crise de l’école, la corruption, l’immigration, les rapports difficiles entre les populations et les autorités etc. «Â Meurtres à  Niobougou » est un roman du jeune auteur bientôt dans les librairies sur les limites de la décentralisation et le comportement de nos élus locaux, les privatisations d’entreprises et des sociétés d’Etat, etc. Politique, immigration, économie, légende et histoire, culture, etc, Aboubacar Eros Sissoko touche à  tous les domaines. Avec une écriture limpide, il produit une œuvre chaque année. A son jeune âge, Aboubacar Eros Sissoko constitue l’une des relèves de la grande littérature africaine. Bon vent à  ce jeune écrivain talentueux.