L’opération française au Mali a déjà coûté 30 millions d’euros

30 MILLIONS D’EUROS Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, a estimé, mercredi 23 janvier, à  environ « 30 millions d’euros » le coût de l’opération militaire française au Mali, douze jours après le début de l’engagement français. « On peut considérer que l’opération la plus coûteuse pour nous jusqu’à  présent a été l’opération logistique, le transport… », a-t-il déclaré lors de l’émission « Politiques », de France24-L’Express-RFI. « Lors de l’examen du budget de la défense, annuellement, il y a une somme qui est affectée à  ce qu’on appelle les ‘opex’, les opérations extérieures, d’un montant de 630 millions, qui sont à  disposition du ministre de la défense, du ministre des finances, lorsque des opérations sont menées. Donc nous ne sommes pas en situation de difficultés de trésorerie », a souligné le ministre. « Nous n’avons jamais imaginé une opération éclair. Tout ce que nous souhaitons c’est mettre en place les conditions pour que la Misma [Mission internationale de soutien au Mali] puisse remplir la mission qui lui a été confiée par les Nations unies », a aussi déclaré le ministre de la défense. Le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a quant à  lui affirmé, mercredi devant l’Assemblée nationale, que la France allait « poursuivre son engagement, mais n’a pas vocation à  rester au Nord-Mali », soulignant, lui aussi, que Paris comptait sur la force ouest-africaine pour « prendre le relais » de son action. Alors que certaines interrogations ont commencé à  poindre sur un isolement de la France – engagée seule depuis le 11 janvier au côté de l’armée malienne pour stopper l’offensive de groupes islamistes armés et reconquérir le nord du Mali –, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a déclaré mercredi que tous les soutiens internationaux supplémentaires à  la guerre au Mali seraient « les bienvenus ». Le ministre a énuméré les participations logistiques des principaux pays européens – Grande-Bretagne, Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Italie –, mais aucun pays occidental ne s’est engagé à  participer sur le terrain. RENFORCEMENT DES EFFECTIFS La France a déjà  2 150 soldats sur le terrain et le nombre de militaires mobilisés pour l’opération « Serval » pourrait atteindre, voire dépasser, les 3 000 hommes. Les effectifs de la Misma, fixés à  3 300 hommes par la résolution 2085 du Conseil de sécurité, pourraient quant à  eux doubler, selon l’ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Nations unies, Youssoufou Bamba. « Les capacités des groupes armés occupant le nord du Mali se sont révélées fortes, car ils étaient mieux équipés et entraà®nés que ce qui avait été anticipé, a relevé le secrétaire général adjoint pour les affaires politiques, Jeffrey Feltman. Il existe un consensus parmi les acteurs principaux réunis à  Bamako selon lequel le niveau de la force de la Misma (…) doit être revu à  la hausse. » Selon Youssoufou Bamba, dont le pays préside actuellement la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), les pays membres de la Cédéao mais aussi le Tchad, l’Afrique du Sud, le Rwanda, le Burundi ou la Tanzanie se sont engagés à  contribuer en effectifs ou matériel au déploiement de cette force africaine. SOUTIEN DE L’ONU ET DE L’UE Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a salué mardi l’intervention « courageuse » de la France au Mali, mais a souligné les risques pour les humanitaires et le personnel de l’Organisation des Nations unies sur place. M. Ban a réitéré ses craintes concernant les conséquences de l’opération pour les civils et les droits de l’homme. « Des organisations terroristes menacent le mode de vie du peuple malien, et même l’existence de l’Etat », ajoute-t-il. Selon l’ambassadeur français à  l’ONU, Gérard Araud, il y a vu « une véritable mobilisation de l’Afrique aux côtés de la France ». Il a aussi assuré que les Etats-Unis allaient « contribuer de manière substantielle » au financement de la Misma. Le chef de la diplomatie russe, Sergue௠Lavrov, a quant à  lui indiqué, mercredi, que Moscou avait proposé à  la France de prendre contact avec des entreprises privées russes de transport pour acheminer ses troupes. L’Union européenne « est très favorable aux actions de la France au Mali » et « veut jouer un rôle actif » pour résoudre la crise, a enfin assuré la représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères, Catherine Ashton. « D’ici quelques jours, 500 formateurs européens » seront au Mali pour participer à  la reconstruction de l’armée malienne, a souligné mercredi Laurent Fabius. L’UE a par ailleurs proposé d’organiser une réunion internationale sur le Mali le 5 février à  Bruxelles, avec l’Union africaine, la Cédéao et l’ONU. EXACTIONS MILITAIRES : LA FRANCE APPELLE à€ LA VIGILANCE Le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, a appelé mercredi l’encadrement de l’armée malienne à  être « extrêmement vigilant » envers les risques d’exactions, car leur « honneur est en cause ». Le président François Hollande « compte sur le sens des responsabilités des cadres de l’armée malienne pour éviter toute exaction », a-t-il déclaré à  France 24, RFI et L’Express. Mercredi, la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a accusé des soldats de l’armée malienne d’avoir perpétré « une série d’exécutions sommaires » dans l’ouest et le centre du Mali, et a réclamé la création « immédiate » d’une commission d’enquête indépendante. « La FIDH a pu établir qu’une série d’exécutions sommaires a été perpétrée par des éléments des forces armées maliennes, à  partir du 10 janvier, particulièrement à  Sévaré, Mopti, Nioro et d’autres localités situées dans les zones d’affrontements », a indiqué l’organisation de défense des droits de l’homme. Lors du sommet ouest-africain sur le Mali à  Abidjan, le président malien, Dioncounda Traoré, avait lui aussi mis en garde samedi contre d’éventuelles « exactions ». A Bamako, le chef d’état-major de l’armée malienne a promis, mardi, que « tout soldat qui commettra des exactions contre des population civiles sera immédiatement ramené du terrain et jugé par un tribunal militaire », mettant en particulier en garde contre des atteintes visant les « peaux blanches », comme on appelle Arabes et Touareg au Mali. Ceux-ci sont très largement majoritaires au sein des groupes islamistes armés. PREMIERS MOUVEMENTS D’UNITà‰S AFRICAINES VERS LE CENTRE Des unités africaines de la Misma « ont commencé » à  faire mouvement vers le centre du pays, a annoncé Laurent Fabius mercredi. « Il y a déjà  des forces qui sont arrivées à  Bamako. Un certain nombre de forces ont déjà  commencé à  monter vers des villes intermédiaires (Centre). Donc la Misma s’installe beaucoup plus vite que prévu », a-t-il déclaré à  l’Assemblée nationale. La veille, la France s’est attaquée directement à  Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), le plus important des trois groupes islamistes armés qui occupent le nord du Mali, en bombardant plusieurs cibles, dont « un centre de commandement des terroristes » près de Tombouctou. Le palais que Kadhafi s’était fait construire à  Tombouctou, utilisé par les islamistes, a été détruit par ces bombardements, selon des habitants et une source de sécurité malienne. Par ailleurs, Français et Maliens s’attelaient mercredi à  déminer et à  évacuer armes et munitions abandonnées par les islamistes dans les villes récemment reprises. FERMETURE DE L’AMBASSADE DU JAPON à€ BAMAKO Le Japon a décidé, mercredi 23 janvier, la fermeture temporaire de son ambassade à  Bamako, en raison de la dégradation des conditions de sécurité. « Le personnel continuera son travail à  partir de l’ambassade de France. Le personnel évacuera dès que les préparatifs seront achevés, soit vers le 27 janvier », explique le ministère des affaires étrangères. Le Japon est encore sous le choc de l’attaque d’islamistes armés contre un site gazier dans le Sud algérien, au cours de laquelle au moins sept employés japonais ont été tués, et trois sont toujours portés manquants. Les assaillants entendaient agir en représailles à  l’intervention militaire en cours au Mali voisin.