Centrafrique: l’exode des musulmans continue

C’’est un convoi de dix-huit semi-remorques qui a quitté Bangui, la capitale centrafricaine, ce dimanche en milieu de journée. Escorté par des éléments de la MISCA,la force africaine déployée dans le pays depuis quelques mois. Partir pour survivre Les camions étaient chargés de meubles, bétails et autres biens, en plus de leurs propriétaires. Au total 1300 musulmans ont quitté la capitale, avec pour destination le nord de la Centrafrique. Ils avaient été contraints de rester tout le temps chez eux après s’être retrouvés piégés il y a cinq mois dans le Point kilométrique 12 (PK-12), cet étroit couloir sur la route menant vers le nord du pays, régulièrement victimes d’attaques d’anti-balaka. Ils vivront désormais à  proximité de la frontière de la Centrafrique avec le Tchad. Juste après leur départ, des centaines de jeunes, qui guettaient à  quelques dizaines de mètres des camions bondés, ont afflué sur le PK-12, o๠vivaient les musulmans, pour une scène de pillage sans précédent. Ils ne vont rien laisser, à  part les murs, car même les portes des maisons vont être démontées avant la tombée de la nuit. Pour le moment, ils sont quelques milliers de musulmans a tenter de survivre encore à  Bangui. Ils sont dans le quartier PK-5 o๠ils ne doivent leur salut qu’aux soldats burundais de la force africaine MISCA.

L’exode des Maliens vers le Burkina Faso se poursuit

à€ pied, à  cheval ou à  dos de chameaux, ils sont des centaines par jour à  traverser la frontière qui sépare le Mali du Burkina Faso, pour atteindre la petite localité de Djibo perdue dans la poussière rouge burkinabè, à  quelque 400 kilomètres de la capitale, Ouagadougou. La plupart arrivent après une dizaine de jours de voyage à  travers le désert. Le haut commissaire de la province de Soum, Ima Barké Sylvestre, dont dépend la ville de Djibo est un peu perdu dans les chiffres. « Ils sont 20 000 à  peu près répartis dans les quatre camps de Mentao, autour de la ville de Djibo », explique-t-il. La frontière étant tellement poreuse, nul ne sait réellement combien de réfugiés sont présents sur le sol burkinabè. Les peaux-rouges fuient les exactions http://www.france24.com/fr/20130313-exode-maliens-vers-le-burkina-faso-poursuit-touaregs-noirs-peuls-reportage-mentao Ce sont essentiellement des « peaux-rouges », sobriquet donné aux Touaregs au Mali, mais aussi aux Arabes et aux Peuls. Certains ont quitté les grandes villes du Nord-Mali lors de l’arrivée des islamistes vers le printemps 2012. Mais depuis le lancement de l’opération Serval le 10 janvier 2013, l’exode s’est accéléré. Ces derniers craignent les représailles des populations noires qui les accusent d’avoir frayé avec les islamistes ou d’avoir tout simplement précipité le pays dans le chaos à  travers leur soutien du MNLA (Mouvement de libération de l’Azawad). Couché sur un matelas à  même le sol sous une tente à  moitié montée, reuve de son arrivée récente, Hamza Maà¯ga, un Touareg noir issu de la ville de Hombori (située à  deux heures de la ville de Djibo) a dû quitter précipitamment la ville avec sa femme et ses ses deux enfants. « J’ai collaboré avec le MNLA mais je n’ai pas pris le fusil. La situation était devenue défavorable pour moi. Pour éviter tout amalgame, J’ai décidé de rejoindre l’asile politique », confie-t-il. Comme lui, ils seraient des milliers à  quitter les grandes villes du Nord. La plupart arrivent dans l’un des quatre camps situés autour de la ville de Djibo. Celui de Mentao est un immense terrain vague qui s’étend à  perte de vue dans le désert, sur lequel sont installées des tentes blanches et bleues du HCR et des latrines. « Je devais partir, il y avait trop d’amalgames… » Dans les camps, il faut s’armer de patience pour s’enregistrer auprès de l’ONG. Des files d’attente impressionnantes se forment devant le bureau. Les exilés doivent établir leur état-civil avant de pouvoir obtenir l’aide du HCR : tentes, latrines et autres vivres. Certains arrivent dans des conditions de grande fatigue. à€ l’intérieur, une jeune femme berbère de 26 ans venant de Tombouctou attend, avec dans ses bras un bébé de huit mois souffrant de malnutrition. à€ ses côtés, sa petite fille de trois ans préfère fixer le sol plutôt que les personnes qui l’entourent. « Nous avons marché pendant des jours, J’ai perdu mon mari pendant la guerre et je suis venue avec ma belle-famille ». Quand les armées françaises et maliennes ont repris des villes du Nord-Mali, les Touaregs et autres sympathisants des MNLA ont été visés par des représailles. Des hommes ont été battus, des boutiques pillées et saccagées, des maisons mises à  sac. Deux mois plus tard, pour fuir les amalgames, disent-ils, beaucoup de Touaregs et autres arabes continuent de quitter le pays. Un vieil homme de 68 ans assis dans une tente au milieu de sa famille, dit ne pas avoir eu le choix. « Je devais partir, il y avait trop d’amalgames, ils me prenaient pour des islamistes parce que J’ai une barbe ». C’’est ainsi que, début février, Sidi Ahmed Ould Mouhamed a quitté Tombouctou avec les 34 membres de sa famille et traversé le désert pour s’installer au Burkina. Soulagé d’être à  l’abri même s’ils n’ont pas encore eu leurs tentes et tous les équipements fournis par le HCR. l’armée malienne accusée d’exactions Tout au long de la visite du camp, un homme suit notre équipe inlassablement. Il souhaite à  tout prix parler de son frère dont il est sans nouvelles depuis mi-février. « C’’est un soldat malien mais il est arabe. Et depuis, nous n’avons aucune nouvelle de lui, pourquoi l’armée malienne ne nous dit pas o๠il est ? », s’interroge-t-il. Ces allégations se multiplient dans tout le pays poussant le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’homme à  accuser l’armée malienne d’avoir mené des représailles à  l’encontre de plusieurs groupes ethniques. l’organisme a demandé au Mali l’ouverture d’une enquête à  ce sujet le 12 mars. De son côté, le gouvernement de transition élude la question. Le ministre de la Justice, Malick Coulibaly a déclaré que les allégations d’exactions imputables aux forces maliennes sont « le fait d’actes isolés dont les auteurs seront poursuivis et punis ». Un racisme ancien Dans le centre ville de Djibo, nous rencontrons un jeune Touareg professionnel du tourisme très à  l’aise avec les étrangers qui nous confirme cette assertion. Il se propose de nous servir de guide dans les camps de Mentao. Il fait partie des premiers à  avoir quitté Tombouctou dès les premières rumeurs d’arrivée d’islamistes en janvier 2012. « Je ne pouvais pas rester là -bas. J’ai entendu des rumeurs comme quoi les islamistes arrivaient, alors je suis parti avec toute ma famille, mon père qui était malade à  l’époque est mort en arrivant. » Le jeune homme de 26 ans a pu trouver une maison dans la ville de Djibo grâce à  quelques économies. Avec son argent et son réseau, il a retrouvé très vite de quoi subsister et n’a pas été obligé de vivre dans les camps. Sa vie à  Djibo est bien meilleure qu’à  Tombouctou, car dit-il les Burkinabè acceptent la présence des réfugiés du Nord-Mali. « Nous sommes faits pour vivre avec les Noirs, C’’est pour cela que nous ne partons pas en Mauritanie ou en Algérie, même si C’’est plus près de Tombouctou », lance-t-il goguenard. Ali souligne que le racisme anti-touareg n’est pas nouveau. Sa famille a été victime d’exactions lors de la rébellion des Touaregs en 1990. l’intervention française fut pour lui la meilleure nouvelle pour son pays. »Si la situation est calme et normale, je serai le premier à  revenir à  Tombouctou », affirme-t-il. Retour impossible des réfugiés ? Une parole rare sur le camp car la plupart des réfugiés n’envisagent aucun retour possible au Mali. Le Burkina Faso n’est pas seul dans cette situation. La Mauritanie, premier pays d’accueil des réfugiés maliens (75 000 selon le HCR), est devenue le point de rassemblement des Touaregs, Arabes et Peuls victimes d’exactions ou craignant des représailles. Des manifestations se multiplient à  Nouakchott, le président malien de transition Dioncounda Traoré a été accueilli hier par des protestataires qui scandaient, « Arrêtez la campagne d’épuration ethnique contre les Arabes et Touaregs ».Des cris qui devraient être entendus lors de la campagne présidentielle malienne prévue en juillet prochain.

Au Nord, l’exode continue…

Le nombre de réfugiés ayant fui les violences dans le Nord du Mali entre l’armée et les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) a doublé ces dix derniers jours, a informé ce vendredi le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR). Selon l’organisation, près de 44 000 personnes auraient fui vers la Mauritanie, le Niger et le Burkina Faso, alors qu’elles étaient 22 000 le 7 février. Face à  la situation, le HCR a prévu de renforcer son aide et d‘alerter l‘opinion internationale. « l’aide humanitaire est d’autant plus importante. La région du Sahel fait face à  une crise alimentaire sévère due à  la sécheresse qui persiste depuis plusieurs années », a indiqué l’agence onusienne dans un communiqué. Sans oublier les conditions sanitaires dans lesquelles se trouvent ces populations réfugiées. Crise des «Â droits humains » Parmi les réfugiés, beaucoup ont fui vers les frontières du Niger, du Burkina Faso ou de la Mauritanie. Des populations touaregs auraient même été vues au nord de la Guinée, informe l’agence Xinhua. Elles seraient près de 200 âmes à  avoir franchi la frontière guinéenne. Une situation qui fait craindre le pire à  de nombreuses organisations. Selon Amnesty International : «Â Des dizaines de personnes ont été tuées depuis l’éclatement des violences il y a un mois, et des milliers de personnes ont quitté le Mali pour se rendre dans les pays voisins, le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie». Le Nord du Mali connaà®t aujourd’hui sa pire crise en matière de droits humains depuis 20 ans, suite aux combats entre les militaires maliens et un groupe armé touareg, soulgine l‘ONG. Parallèlement, de nombreux chefs d’états sont montés au créneau. Le Burkinabè Blaise Compaoré, dont le pays accueille de nombreux réfugiés, a la semaine dernière, en marge d’une rencontre avec le chef de l’état malien, appelé au dialogue afin que cessent les hostilités et les conséquences dramatiques qui en découlent, tout comme son homologue, Mahamadou Issoufou du Niger a évoqué l’insécurité grandissante qui pèse sur la zone sahélo saharienne. Mais si rien n’est fait, alerte l’ONG Amnesty, « cette partie du pays connaà®t depuis des années une absence d’état de droit et la région pourrait être plongée dans le chaos si les combats continuent ». Aussi l’ONG réclame de la part des autorités plus de mesures de sécurités pour protéger les populations. Au même moment, l’armée Malienne multiplie les offensives pour repousser ou en tout cas, circonscrire l’action des rebelles. Des combats se tiennent aux alentours de la ville de Tessalit. Malgré tout, l’exode des réfugiés continue.

Côte d’Ivoire : « C’est la guerre! »

Les combats à  l’arme lourde qui ont éclaté à  Duékoué, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, mais aussi au nord de Daloa dans le centre-ouest et au nord de Bondoukou, près de la frontière ghanéenne, font penser à  la progression des insurgés en cours en Libye. Quatre mois, jour pour jour après le second tour de l’élection présidentielle ivoirienne, l’offensive est bien réelle. Les combattants pro-Ouattara ont conquis cinq villes de l’Ouest du pays depuis février et continuent leur avancée. Avec Abidjan en ligne de mire. Une guerre en bonne et due forme, avec ses fronts ouverts, mouvants, et ses inconnues politiques. Guillaume Soro, l’ancien chef de la rébellion des Forces nouvelles (FN), a quitté les chambres orange et mauve de l’hôtel du Golf d’Abidjan, fief du président Ouattara, pour aller dans l’ouest. L’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo (2007-2010), devenu celui d’Alassane Ouattara après la présidentielle du 28 novembre 2010, a repris du service en tant que chef de guerre. Il se trouve à  la manœuvre pour diriger les combats dans une région hautement stratégique, et mener une offensive qui paraà®t généralisée. Des combats ont eu lieu lundi 28 mars simultanément à  Duékoué, dans l’ouest, Daloa, au centre, et Bondoukou, à  l’est, ces deux dernières villes étant passées dans la nuit sous contrôle des pro-Ouattara. Duékoué serait tombée le 28 mars, tôt le matin, aux mains des Forces républicaines (FR, ex-FN), qui ont encerclé la ville. Une information aussitôt démentie par le camp Gbagbo. «Nous contrôlons une partie de la ville et les rebelles une autre», assure Yao Yao, le chef des opérations d’une milice pro-Gbagbo dénommée Front pour la libération du Grand Ouest (FLGO). Le scénario du pire Duékoué, 72.000 habitants, située dans une région forestière et montagneuse, à  la frontière du Liberia, se trouve sur un axe Nord-Sud qui mène à  San Pedro, le principal port d’exportation du cacao. Une matière première dont la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial. Pour mémoire, Duékoué se trouve aussi dans la zone sud du pays, en principe contrôlée par Laurent Gbagbo depuis la partition du pays en deux zones, Nord et Sud, entraà®née par la rébellion des officiers nordistes de l’armée, en 2002. Mais ce n’est pas tellement le cacao qui intéresse les stratèges du camp Ouattara. A l’hôtel du Golf, on anticipe surtout sur les capacités de nuisance de Laurent Gbagbo après sa chute, qui paraà®t inéluctable. Des foyers de rébellion pro-Gbagbo pourraient perdurer pendant de longues années à  l’intérieur du pays, redoute-t-on. Pour empêcher ce scénario, la maà®trise militaire du sud de la Côte d’Ivoire paraà®t essentielle. Il s’agit aussi, pour le camp Ouattara, de sécuriser la frontière avec le Liberia et de chasser les mercenaires libériens qui exportent en Côte d’Ivoire les méthodes de leur sanglante guerre civile (1989-2002). Selon certaines sources, les spécialistes de la violence libériens travailleraient pour les deux camps rivaux en Côte d’Ivoire. Une chose est sûre: ces Libériens sont «des centaines à  piller, violer et tuer», selon Jacques Franquin, directeur du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) à  Abidjan. Plusieurs fronts dans la ville d’Abidjan A Abidjan, l’autre épicentre du conflit, la guerre suit une géographie plus fluctuante. Les fronts sont ouverts en plusieurs endroits de la ville, à  Abobo, Cocody ou Port Bouà«t, apparaissant et disparaissant au fil des jours, au gré des barricades et des combats nocturnes. Les forces acquises à  Laurent Gbagbo paraissent extrêmement contrôlées: elles peuvent être appelées à  marcher ici ou là , et donnent l’impression de pouvoir rentrer chez elles sur un simple claquement de doigts. Pas moins de 15.000 jeunes partisans de Laurent Gbagbo se sont enrôlés dans l’armée depuis le 21 mars, selon l’agence Reuters. Les forces acquises à  Alassane Ouattara, en revanche, paraissent moins disciplinées: un certain colonel Bauer, membre du commando invisible du général Ibrahim Coulibaly, le célèbre «IB»,a déclaré défendre la démocratie, mais pas nécessairement Ouattara. IB fait pour lui figure de seul chef, en tant que membre du noyau dur des commandants de la rébellion nordiste de 2002. Malgré tout, un certain optimisme continue de prévaloir à  l’hôtel du Golf, o๠l’on sent le camp Ouattara confiant dans le sens qu’a pris «le vent du changement sur le continent», selon l’expression célèbre du Premier ministre britannique Harold Mac Millan, lors d’un discours prononcé en 1960 en Afrique du Sud. Selon certains experts occidentaux à  Abidjan, la partie est loin d’être jouée. Les forces restent très inégales sur le terrain.«Les anciens rebelles des Forces nouvelles se sont embourgeoisés après la signature des accords de Ouagadougou en 2007, rappelle un diplomate européen. Le camp Ouattara ne dispose pas des équipements nécessaires pour faire le poids, face aux trois grands groupes de « corps habillés » qui défendent Gbagbo, les Compagnies républicaines de sécurité (CRS), le Centre de commandement des opérations de sécurité (Cecos) et la garde républicaine.» Stratégie politique des chefs de guerre La grande inconnue porte aussi sur l’évolution de la stratégie politique des chefs de guerre ivoiriens. Jusqu’o๠la loyauté de Guillaume Soro ira-t-elle, en cas de victoire militaire, à  l’égard d’Alassane Ouattara? Le président élu, ancien directeur pour l’Afrique du Fonds monétaire international (FMI), âgé de 68 ans, n’est pas dans un état de santé resplendissant. Il ne montre pas un sens politique des plus affûtés, et sera toujours perçu, qu’il le veuille ou non, comme un «Burkinabè» par une partie de l’opinion ivoirienne. Guillaume Soro, lui, aura 40 ans en 2012. Ce catholique du Nord pourrait présenter l’avantage de clore toute polémique liée à  l’ivoirité, étant incontestablement ivoirien… De même, Charles Blé Goudé, qui a le même âge que Soro et est passé comme lui par la direction de la Fédération des étudiants et scolaires de Côte d’Ivoire (Fesci), pourrait faire figure de relève politique, au sortir de la guerre civile. L’exode L’aéroport d’Abidjan, qui était vide en janvier, ne désemplit pas depuis deux semaines. Les salles de départ sont pleines d’étrangers, étudiants marocains, familles de commerçants libanais, femmes et enfants d’Ivoiriens pouvant se permettre le billet d’avion et disposant d’un point de chute à  l’étranger. Pour l’anecdote, les enfants de Pascal Affi N’Guessan, le chef du parti de Laurent Gbagbo, ont été évacués vers le Ghana, tandis que l’épouse de Charles Blé Goudé se trouve en… France. Un exode qui incite certains, comme le «modérateur» du site Ouattara Gbagbo Dégagez, à  demander haut et fort le départ de tous les prétendants à  la succession du «Vieux», Félix Houphouà«t-Boigny, pour faire place aux jeunes.