Côte d’Ivoire, Bientôt la fin ?

Reconnu par la communauté internationale comme président élu de la Côte d’Ivoire à  l’issue de la présidentielle de l’an dernier, Alassane Ouattara semble désormais décidé à  récupérer son fauteuil présidentielle. C’’est depuis son refuge de l’hôtel du Golf d’Abidjan, sous blocus des pro-Gbagbo, le sortant, qu’il dirige l’offensive armée des forces républicaines, son armée. Pour mener cette action militaire, Guillaume Soro, premier ministre de Ouattara a retrouvé son statut de chef de guerre et se trouve en ce moment sur le front. Avancée des FRCI Ce jeudi 31 mars, les troupes des FRCI se trouvent aux portes d’Abidjan. Les combattants ont été vus tôt ce jeudi à  110 kilomètres à  l’est d’Abidjan. Ces mêmes forces lancées dans une offensive contre les pro-Gbagbo étaient entrées mercredi dans la soirée à  San Pedro, premier port d’exportation de cacao au monde. « Ils sont entrés dans la ville, ils tirent avec des armes lourdes au centre-ville. Les miliciens qui pillaient la ville passent en courant dans tous les sens », avait déclaré un résident joint au téléphone. « Il y a eu un échange de tirs à  l’arme lourde à  l’entrée nord (de San Pedro) peu après 22 heures locales (23 heures heure française). Mais très vite, des tirs intenses et nourris se sont déplacés vers le centre-ville ». Hier mercredi, les combattants pro-Ouattara avaient pris la ville de Soubré, située à  120 km au nord de San Pedro, port stratégique pour la Côte d’Ivoire, premier exportateur mondial de cacao. Ils ont également pris le contrôle mercredi de la ville de Gagnoa (centre-ouest), dans la région natale du président sortant Laurent Gbagbo, après la capitale politique Yamoussoukro. Ces nouvelles du front semblent corroborer une information qui circule dans les milieux diplomatiques depuis plusieurs jours. Gbagbo, asphyxié par les sanctions n’a plus d’argent pour payer ses miliciens. Raison pour laquelle ces derniers n’opposent quasiment aucune résistance aux troupes de Ouattara, permettant une avancée sur Abidjan, qui semble inexorable. A présent, C’’est dans la garde rapprochée, parmi les fidèles de Gbagbo ; qu’il y a désormais des défections. Le chef d’Etat-major de l’armée ivoirienne Philippe Mangou s’est en effet réfugié mercredi soir à  la résidence officielle de l’ambassadeur sud-africain à  Abidjan, selon une annonce faite par le ministère des Affaires étrangères sud-africain. « Le chef d’Etat-major de l’armée, le général Philippe Mangou des Forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire (FDS) a trouvé refugé la nuit dernière à  la résidence officielle de notre ambassadeur en Côte d’Ivoire, Mme Zodwa Lallie », écrit le ministère dans un communiqué. « Le général est accompagné de sa femme et de cinq enfants », précise-t-il. Par ailleurs, on vient d’apprendre de sources ivoiriennes que le général Firmin Détoh, commandant en chef des forces terrestres, a été assassiné par un de ses gardes du corps. O๠est Gbagbo ? Le président sortant, qui devait s’adresser à  la nation mercredi soir avant d’y renoncer sans explication, n’a pas fait savoir quel choix il ferait, bataille d’Abidjan ou retrait. Il doit présider à  la mi-journée un Conseil des ministres. Laurent Gbagbo «n’a pas l’intention de démissionner» et «des milliers d’Ivoiriens vont prendre les armes pour défendre leur pays», a déclaré jeudi l’un de ses conseillers. Mercredi, Guillaume Soro, premier ministre d’Alassane Ouattara, avait averti que Laurent Gbagbo avait «encore quelques heures pour partir, sinon ce sera la marche sur Abidjan». Abidjan vit dans l’angoisse. Dans la capitale économique, la tension est à  son maximum. La plupart des rues étaient quasi-désertes dans la matinée. Les rares transports en commun faisaient souvent demi-tour devant les nombreux barrages de «jeunes patriotes» pro-Gbagbo installés ces dernières heures. Des tirs sporadiques d’armes légères ont été entendus dans plusieurs quartiers, notamment près du grand camp de gendarmerie de la ville et au Plateau, coeur du pouvoir de Laurent Gbagbo.

Nuit calme à Abobo sous couvre-feu

Aucun coup de feu ni détonation n’a été entendu selon des habitants des quartiers d’Abobo et Anyama (nord), o๠un couvre-feu nocture a été instauré depuis mercredi. « Cette nuit on n’a rien entendu », a déclaré l’un d’eux. Le couvre-feu a été « institué dans les communes d’Abobo et d’Anyama » de 19H00 à  06H00 et sera en vigueur jusqu’à  vendredi, selon un décret du président sortant Laurent Gbagbo, lu à  la télévision publique ivoirienne. Fief d’Alassane Ouattara, rival de M. Gbagbo pour la présidence, Abobo (nord d’Abidjan) a été ces deux dernières nuits le théâtre de violents affrontements entre des éléments armés et des membres des Forces de défense et de sécurité (FDS) fidèles à  M. Gbagbo. Le chef d’état-major des FDS a accusé le camp Ouattara d’être à  l’origine de ces « attaques armées assimilées à  des actes de guerre », qui placent ses forces en position de « légitime défense ». Dans la nuit de mardi à  mercredi, six policiers, « attaqués » au lance-roquettes RPG 7, et un civil ont été tués, selon un bilan donné par le ministère de l’Intérieur. Deux civils et deux membres des FDS avaient été tués la nuit précédente. La même nuit à  Abobo, trois Casques bleus de la force onusienne en Côte d’Ivoire (Onuci) ont été « légèrement blessés » dans une « embuscade » tendue par les forces pro-Gbagbo, a affirmé l’Onuci. Quatre véhicules calcinés, dont deux camionnettes des forces de sécurité, gisaient sur le bord d’une voie express. Ces violences illustrent un peu plus la persistance de la crise dans laquelle la Côte d’Ivoire est plongée depuis l’élection présidentielle du 28 novembre, pour laquelle tant Laurent Gbagbo qu’Alassane Ouattara reconnu par la communauté internationale revendiquent la victoire. Elles interviennent alors qu’une nouvelle médiation africaine est attendue ce week-end à  Abidjan, avec la venue du Premier ministre kényan Raila Odinga. Après un entretien à  Nairobi avec le président de la commission de l’Union africaine Jean Ping, M. Odinga a « une nouvelle fois » estimé que le recours à  la force contre M. Gbagbo devait être considéré comme un dernier recours. Par ailleurs, hier mercredi, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon a adressé un nouvel avertissement au camp du président sortant ivoirien Laurent Gbagbo dans un communiqué o๠il se dit profondément préoccupé par les événements en cours dans le quartier d’Abobo à  Abidjan. Le président Gbagbo est sous la menace d’une opération militaire, actuellement en préparation au niveau de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), s’il ne cède pas le pouvoir à  son adversaire. Mais les présidents guinéen Alpha Condé et bissau-guinéen Malam Baca௠Sanha ont appelé à  un « règlement pacifique ». La force n’est « pas la solution », a aussi jugé le président tchadien Idriss Deby, tout en considérant M. Ouattara comme vainqueur de l’élection. Dans un entretien à  la chaà®ne de télévision française Canal+, M. Gbagbo a affirmé que « la Côte d’Ivoire n’est pas au bord d’un bain de sang, n’est pas au bord d’une guerre civile, n’est pas au bord d’un génocide ».