Saint Valentin, entre business et romantisme

Saint-valentin, fête des amoureux ou foire des amoureux ? C’’est selon. Chaque couple tient à  célébrer ce jour assez spécial. Les cadeaux vont du bouquet de fleurs aux vêtements en passant par des présents personnalisés. Oumar Togola vendeur de prêt–à -porter à  l’ACI 2000 dit aimer cette fête en raison de la propension des uns et des autres à  beaucoup dépenser pour prouver leur attachement à  l’être aimé. « Vous savez, J’ai une clientèle cosmopolite mais pour cette fête singulièrement, même les couples Wahhabites se pressent dans ma boutique pour faire des emplettes et tout y passe : body, mini-jupe, linge de corps, pantalon, parfum et même des chaà®nettes en or pour le tour de taille. Je crois que C’’est la seule fête respectée par tous les couples ». Notre interlocuteur confie réaliser 40% de son chiffre d’affaires annuel à  l’occasion de la saint-valentin. Sur la même rue qui mène à  la place CAN, un tunisien gérant de restaurant a eu la lumineuse idée de lancer des « pizzas saint-valentin » cédées à  4000 francs et 7000 francs pour la familiale. Aly, C’’est son nom, explique « avoir tiré la langue durant la crise et profite de cette aubaine qu’est la fête des couples pour renflouer son coffre-fort ». Les artisans se frottent les mains Les menuisiers ébénistes et autres artisans ont compris les enjeux de ce moment unique pour les amoureux en créant des cadeaux personnalisés. C’’est le cas de Kamissoko dont l’atelier se trouve près de la pâtisserie Amandine à  Badalabougou. Il fait de jolis tableaux avec des formes diverses et on peut y lire « aimer, C’’est partager », « t’aimer toute la vie », « tu me combles d’amour », «I love you more and more » et d’autres complaintes sentimentales encore. Ces tableaux de Kamissoko sont achetés par des clients européens et des jeunes désireux de sortir des sentiers battus. l’artisan propose également des salons tissés à  la main avec un jeu de couleurs assez originales. l’originalité, on la retrouve sur la colline de Badalabougou o๠les étudiants s’offrent des cadeaux imprimés sur des CD-Rom et des tee-shirts. Ici, l’essentiel est d’offrir en dépensant peu et dans cette optique, un poème gravé sur CD fait l’affaire. A l’opposé dans une université privée sise à  Faladjé, les étudiants ont pris d’assaut un magasin de vente de produits de beauté. La patronne des lieux dit «vendre des fleurs synthétiques à  500 francs et à  1000 francs pour permettre aux étudiants de participer à  la fête ». Le business marche bien puisque selon madame Tangara « depuis lundi, la demande ne fait que croà®tre, J’ai écoulé mon premier stock et mon fournisseur chinois est en route pour la livraison d’une troisième commande ». En bonne mère de famille, la commerçante apprécie « cette fête qui n’a rien de mauvais, je ne le dis pas pour le chiffre d’affaires mais pour la noblesse des sentiments, je préfère des jeunes accrochés à  l’amour à  une jeunesse versée dans la drogue ou les bêtises ». Les fleuristes aussi… A Quizambougou, le magasin « floralies » ne désemplit pas. Ici, les clients sont des puristes. Ils prennent le temps de choisir la bonne fleur à  offrir. Les prix vont de 7 500 à  plus de 45 000 CFA. Point de synthétique, le magasin propose des fleurs naturelles aux effluves exquises. Une femme gabonaise rencontrée sur place dit « être à  la recherche d’une fleur qui fera plaisir à  son mari et je suis sûre de pouvoir la trouver ici ». La fleur ne suffira pas selon cette dame soignée et qui tient à  ne pas laisser une once de sentiments aux potentielles concurrentes. « Une belle chemise bleue Mitterrand assortie d’une cravate bleue ciel sera emballée et remise à  mon homme à  l’heure du dà®ner » a rajouté notre interlocutrice qui attend en contrepartie un joli et surprenant cadeau de son partenaire. A la question « et si monsieur ne vous offre rien ? », madame enlève ses lunettes et rétorque « vous êtes normal monsieur le journaliste ! Même dans ses rêves, il n’osera pas rater ce rendez-vous, il peut oublier notre date de mariage, mon anniversaire et ceux des enfants mais la saint-valentin, notre fête, ma fête, ça il n’osera pas !». La vendeuse de fleurs interloquée par la réaction de Madame s’éclipse pour s’occuper des autres clients. Nous l’apostrophons. Elle avoue « s’en tirer à  bons comptes puisque les années se suivent et se ressemblent. Nous avons une clientèle fidèle qui passe des commandes en temps normal et à  l’occasion de la saint-valentin nous avons des pics vertigineuses ». Le rouge en vogue… Au grand marché de Bamako, les vendeurs à  la sauvette réalisent de bonnes recettes depuis le début de la semaine avec une demande plus importante de fleurs et l’achat de vêtements rouges. Maro, jeune marchand ambulant s’interroge sur le choix de la couleur rouge : «Ancien maçon venu de Mopti, J’ai commencé ce métier en octobre et à  ce que je sache, le malien abhorre le rouge mais depuis quelques jours la frénésie du rouge sur le marché m’étonne. Mes devanciers dans le métier m’ont finalement expliqué qu’en octobre tous les articles de couleur rouge trouvent preneur d’o๠la prédominance de cette passionnée dans tout ce que je vends ». Un ingénieur commercial rencontré aux abords de la grande mosquée, polygame et wahhabite n’a pas caché son dilemme : « je suis à  la recherche de cadeaux pour mes trois dames qui m’attendent de pied ferme. Elles vivent dans la même cour et je me dois de les célébrer toutes en leur offrant des cadeaux identiques pour ne pas avoir de problèmes et pour la petite histoire, même la première épouse, la cinquantaine révolue, tient à  son cadeau ». Comme quoi, les sentiments ne répondent à  aucune logique fut’elle financière !

Vendeurs de fleurs à Bamako: un métier d’avenir

Au moins une plante verte Depuis quelques temps, la demande en espace vert et autres ornementations florales a flambé à  Bamako. Tout le monde veut avoir sa décoration verte chez soi même si l’espace pour ce faire est réduit. Les jeunes maliens ont vite flairé la bonne affaire et les commerces de plantes fleurissent partout maintenant. Il n’est pas de sot métier dit-on et ce dernier semble très bien nourrir son homme. Même si la notion de fleur n’est pas encore très bien ancrée dans les mœurs et le quotidien des maliens comme le voudrait de nombreux vendeurs, il n’en demeure pas moins qu’ils fassent régulièrement d’importantes ventes. Des particuliers font même appel à  certains d’entre eux, moyennant une rémunération plus ou moins importante, pour leur créer de véritables jardins chez eux. Sinon, la mode est d’avoir au moins une plante verte dans son salon ou son bureau. Un chiffre d’affaires raisonnable Les fleuristes sont repartis en deux catégories, les grossistes et détaillants. En ce qui concerne les détaillants, ils peuvent vendre quotidiennement plus de 20 000 francs CFA ou parfois plus. La plus basse vente varie entre 5000 et 10 000 francs CFA. Les grossistes quant à  eux, peuvent vendre plus de 70 000 à  100 000 francs CFA de fleurs par jour. Soumaila Traoré est un jeune fleuriste du quartier Hamdallaye à  Bamako ; Il explique que la saison o๠il enregistre énormément de chiffres d’affaire, C’’est bien évidemment la saison hivernale. « Les gens achètent beaucoup à  cette période parce que C’’est le moment propice pour les plantes de pousser vite et bien. Autrement, tout le monde n’a pas les moyens d’arroser ses plantes avec de l’eau du robinet qui coûte cher pour eux et tous n’ont pas des puits à  domicile. » Les plantes les plus demandées La plupart des fleuristes que nous avons approchés, précise que « les plantes les plus demandées par les clients, sont les manguiers mais surtout les gazons.» Cela dit, certaines autres plantes telles : les rosiers, l’ibiscus, le neem, le baobab, le jasmin…ne sont pas en reste. Elles sont majoritairement utilisées pour les décorations de maisons, de bureaux et de jardins. Dans le jardin de Soumaila Traoré, on voit défiler de nombreux acheteurs parmi lesquels des particuliers recherchant la meilleure plante pour leur maison et des agents de services administratifs, d’ONG etc. Ceux-ci préfèrent plus les manguiers et nà®mes parce que produisant à  long terme, de l’ombre. Les fleurs les plus appréciés sont les jasmins et les roses. Ces deux fleurs sont bien appréciées selon un acheteur, pour leur bonne odeur et pour leur beauté. Mr Lionel Coulibaly est employé dans une ONG à  Bamako et est chargé de l’entretien des lieux. Il estime que « les fleurs sont indispensables pour la bonne image d’une entreprise. Une fois par mois, nous allons chez le fleuriste acheter du nouveau gazon afin de mieux préserver la bonne texture du sol et des plantes. Il est essentiel d’entretenir son environnement et le milieu dans lequel on vit au quotidien. » Nabi Diallo est fleuriste à  Bamako Coura et s’occupe du jardin public du quartier voisin Bolibana. Il explique que ce n’est pas toujours facile de vivre de la vente de fleur au Mali. « Certes, les achats se font de plus en plus réguliers depuis quelques temps, mais jusqu’à  présent, on manque de gens assez intéressés par ce secteur. Nous manquons surtout de soutien de la part de l’Etat. » Il déplore la cherté de la taxe fixée par les mairies. « Elles nous demandent bien plus que ce que nous vendons. Vous comprenez donc qu’il est très difficile pour nous de profiter comme il faut de notre commerce. Nous appelons les autorités communales à  revoir à  la baisse, les taxes qu’ils nous imposent. ». Madani Niang est conseiller à  la mairie de la commune IV du district de Bamako. A la question de savoir si les jeunes fleuristes payent des taxes à  la mairie, il répond que oui. « Mais vous savez, rares sont les fleuristes qui payent leur taxe. On est obligé d’user parfois de moyens peu orthodoxes pour les amener à  s’acquitter de leur tâche». Quoi qu’il en soit, et les mairies, et les fleuristes trouvent leur compte dans ce commerce qui commence à  prendre une place importante dans l’économie du pays. l’exportation de fleurs à  commencer à  être effective depuis la fin l’année dernière à  l’intérieur du pays. Il faudra attendre encore un peu pour qu’elle se fraye un chemin vers l’extérieur du pays.