Forages : La solution pour avoir de l’eau ?

Les défis climatiques, la pollution et l’urbanisation à grande vitesse de la capitale malienne font que l’approvisionnement en eau n’est pas une chose aisée. Néanmoins, une solution semble sortir du lot : le forage.

1 000m3, c’est le seuil de pénurie estimée en eau par habitant chaque année. Dans le cas du Mali, chaque habitant pourrait bénéficier de 10 000m3 de cet or bleu par an. Problème : une infime partie de ce potentiel est exploitée, seulement 0,2 %, ce qui fait que plus de 30 % de la population ne dispose pas aisément d’un accès à l’eau.

À Bamako, au Carrefour des jeunes, lieu de transit pour les étrangers de passage, depuis l’inauguration d’un système de forage en janvier dernier, c’est le soulagement pour les dirigeants de la structure. Mamadou Lamine Koné, Chef de la section administration et finance, s’en réjouit, d’autant plus que ce système de forage répond à un déficit. « C’est plus qu’une bonne alternative ! Aujourd’hui, pour qui connaît le fleuve Djoliba, on sait que l’eau du fleuve est très polluée. Pratiquement tous les fossés de Bamako drainent les eaux usées de la ville vers le fleuve. Les services de traitement de l’eau n’ont pas les moyens nécessaires pour la rendre vraiment potable au profit des populations. Pour avoir la chance d’accéder à de l’eau naturelle, tout à fait potable, il n’y a pas mieux que le forage. Cela va garantir notre santé ». Avant ce dispositif, le Carrefour des jeunes se fournissait en eau par le biais de fontaines publiques, ce qui entraînait des problèmes. « Il y avait des problèmes de débit, car il était excessivement faible. Nous avons constaté que l’eau n’était pas propre et qu’il y avait des résidus. Cela laissait à désirer », se remémore M. Koné. Il en est plus que convaincu, une aide de l’État est primordiale afin de mieux doter les quartiers de la capitale qui ont des difficultés à se procurer de l’eau potable. « Même si l’entretien des forages doit être à la charge des populations. Cela pourrait se faire à travers de petites cotisations », déclare le Chef de la section administration et finance.

Pour le bien-être de tous les Maliens, M. Koné tient à alerter les autorités. « Autant les gens se porteront bien, autant les dépenses de l’État se minimiseront. Autant il y aura des malades, autant les dépenses de l’État iront à la hausse. Il devra construire plus de structures sanitaires pour traiter et soigner ces personnes. L’eau, c’est la vie, trop de besoins sont centrés autour de cette denrée. Il est vraiment temps que l’État pense à ce problème pour nous doter de forages permettant aux gens de vivre dans un environnement hygiénique ».

 

Forages au Mali : un potentiel à exploiter

Le forage est un puits creusé par un procédé mécanique à  moteur (foreuse) en terrain consolidé ou non, pour tous usages sauf pour les ouvrages de reconnaissance ou d’observation (on parle alors de sondage). Selon Jean Firmin Dena agent du centre de documentation de la direction nationale de l’hydraulique (DNH) au Mali et technicien géologue de formation, « Il s’agit d’un trou cylindrique qu’on creuse dans le sol pour recouper des venues d’eau ». Suite à  plusieurs simulations, et selon différents modèles effectués lors de l’élaboration du document « Synthèse Hydrogéologique du Mali» le bilan global des aquifères calculé donne une recharge moyenne par infiltration de la pluie d’environ 65 milliards de mètre cube par an et une recharge d’environ 1,6 milliards de mètre cube par an par les eaux de surface, alors qu’on exploite actuellement 200 à  250 millions de mètres cube par an, à  peine 0,5 % et ceci sans compter les réserves des aquifères qui sont de l’ordre de 2 700 milliards de mètres cube. Les eaux souterraines sont exploitées au Mali surtout à  travers les puits et forages. Cependant l’eau n’est pas toujours potable. « Il y a une réelle mauvaise organisation du secteur. Le mieux serait d’octroyer des permis aux citoyens désireux de creuser des forages dans leurs habitations ou dans leurs champs et aussi aux industriels» explique M.Dena. Les forages sont de plus en plus utilisés pour obtenir de l’eau potable, propre à  la consommation humaine et animale, « A la fin de la construction du forage (foration), il est impératif de faire des analyses de l’eau et des analyses physico-chimiques et bactériologiques afin de déterminer la potabilité ou non de l’eau de forage » insiste M.Déna. Au Mali, il existe une base de données nommée Sigma à  la DNH/Mali o๠toutes les propriétés des forages ainsi que des autres points d’eau du Mali sont sélectionnées et stockées. Mme Fatoumata Sabé est chef de la section gestion base de données et du système d’information. « Dans notre pays, le développement de l’hydraulique a commencé avec la construction de points d’eau modernes vers les années 1970. D’après les dernières statistiques datées de décembre 2012, nous avons recensé 32.009 points d’eau modernes. Pour ces points d’eau modernes, il s’agit de 21.614 forages productifs et 10.395 puits modernes » explique Mme Sabé. Dans certaines zones reculées du Mali, ce n’est pas chose aisée de réaliser des forages. «Souvent nous ne demandons qu’une petite contribution de la communauté pour creuser le puits. Par exemple si le montant total est de 12 millions de francs CFA, nous demandons 10% et même cela, certains villages n’arrivent pas à  payer » se désole M.Diall. A côté de cela, un véritable problème environnemental se pose, « la troisième guerre mondiale sera la guerre de l’eau. Avec la rareté des pluies, les eaux souterraines risquent de s’épuiser aussi. La seule perspective pour le Mali C’’est de protéger les cours d’eau comme le fleuve Niger, victime déjà  d’ensablement et de construction dans le lit du fleuve » explique Modibo Diall, ingénieur géologue.