Développement durable : L’Afrique peut-elle défendre son propre agenda ?

Plus de 800 délégués de 51 pays différents, dont 45 africains. 22 ministres et Secrétaires d’État. 28 événements parallèles et le lancement de nouvelles initiatives, dont le premier Forum africain sur la science, la technologie et l’innovation et le Fonds africain pour les femmes leaders. Le 5ème Forum régional africain sur le développement durable (FRADD), qui vient prendre fin à Marrakech, avait pour principale ambition de porter haut la voix unifiée du continent dans ce domaine. Mais vouloir ne veut pas obligatoirement dire pouvoir !

Les contributions régionales collectives de l’Afrique au Forum politique de haut niveau pour le développement durable, organisé sous l’égide du Conseil économique et social de l’ONU, qui se tiendra du 9 au 18 juillet prochain à New York, et au Sommet des Objectifs de développement durable (ODD) prévu dans la même ville les 24 et 25 septembre 2019, ont été discutées et adoptées, sous la forme d’une déclaration. Avec une feuille de route pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et de l’Agenda 2030 pour le développement durable et ses 17 Objectifs à l’échelle régionale au cours des prochaines années. Et un credo à défendre : « Donner des moyens d’action aux populations et assurer l’inclusion et l’égalité ».

Le FRADD, fruit de la collaboration entre les organisations du Système des Nations Unies, la Commission de l’Union Africaine, la Commission économique pour l’Afrique, la Banque Africaine de Développement et d’autres partenaires et présidé par le Maroc jusqu’en avril prochain, a invité « l’ensemble des pays africains à renforcer la coopération Sud – Sud et le partage d’expériences entre les pays du continent pour relever les défis multiples et complexes et mettre en place des partenariats multipartites, des plans et programmes d’action, aux niveaux régional et sous régional, susceptibles de réaliser le développement escompté pour ne laisser personne pour compte ».

Des statistiques effarantes !

Mais il faudra aux Africains se battre et parler d’une seule voix au reste du monde pour que cela ne reste pas un vœu pieux. Car les chiffres sont effarants. Selon la Burundaise Biha Giovanie, Secrétaire exécutive adjointe de la Commission économique de l’ONU pour l’Afrique (CEA), qui s’est s’est longuement appesantie à Marrakech sur les déficits de l’Afrique en matière de développement, notamment sur les volets de la santé, de l’éducation, de l’inclusion et de l’emploi des jeunes, pour atteindre les 17 objectifs onusiens de développement socio-économique pour la période 2020 – 2030, l’Afrique a besoin d’un investissement global minimal de 600 milliards de dollars. Un rêve !

Et l’ampleur de la tâche en fait un travail herculéen. Par exemple, pour l’ODD 4, une éducation de qualité, la CEA confirme dans son rapport 2018 que la plupart des enfants quittent l’école avec des acquis insuffisants pour répondre aux besoins du marché du travail. Le continent affichant aussi la plus faible proportion d’enseignants formés, si les tendances actuelles se confirment, la part de l’emploi vulnérable restera à 66% jusqu’en 2022, le plus élevé au monde. L’objectif de l’Union africaine, à l’agenda 2063, est de moins de 41% d’ici 2023!

Mais c’est surtout la question du climat qui est la plus sérieuse entrave à la réalisation des ODD. Pour rappel, en mars dernier, le cyclone tropical Idai a touché plus de 2,6 millions de personnes et causé plus de 700 décès et des conséquences humaines et économiques graves au Malawi, au Mozambique et au Zimbabwe.

Alors que, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les flux financiers liés au climat en direction de l’Afrique sont passés de 615 millions de dollars en 2000 à 408 milliards en 2017. Ce qui reste extrêmement faible, peu prometteur et bien en deçà des 100 milliards de dollars par an promis par la « communauté internationale » des pays développés lors de la 15ème réunion de la Conférence des Parties tenue à Copenhague!