L’unité du G7 se brise face à Trump sur le climat

Pour la première fois de son histoire, l’unité du G7 s’est brisée samedi à Taormina (Sicile) sur la question cruciale du climat, face à un Donald Trump plus résolu que jamais à jouer sa partition.

« La discussion a été franche, peut-être plus franche que lors des précédents sommets », a reconnu devant la presse le chef du gouvernement italien Paolo Gentiloni, dont le pays préside actuellement le G7.

Car en dépit des pressions répétées des Européens (Allemagne, France, Italie, Grande-Bretagne et Union européenne), du Canada et du Japon, M. Trump est resté de marbre.

Et même si son homologue français Emmanuel Macron a trouvé en lui un homme « ouvert », « à l’écoute » et « qui a envie de bien faire », le 45e président des Etats-Unis a surtout déstabilisé ses alliés du G7, après avoir franchement bousculé ceux de l’Otan, jeudi à Bruxelles.

« Le résultat du sommet du G7 montre combien Trump est isolé sur le climat », a jugé de son côté Greenpeace , mettant en avant l’engagement des six autres pays. « On ne changera pas d’un millimètre notre position » sur le changement climatique, a d’ailleurs promis Paolo Gentiloni.

La présidence italienne et d’autres délégations semblaient en tout cas soulagés de voir le président américain continuer à rester dans un cadre multilatéral.

Le point de vue du président américain « évolue, il est venu ici pour apprendre », avait assuré vendredi son conseiller économique Gary Cohn, même si, très vite, les pendules ont été remises à l’heure. « Il y a une chose qui ne changera pas, il prendra ses décisions en fonction de ce qu’il pense être le mieux pour les Américains », a ainsi averti le général H.R. McMaster, conseiller à la sécurité nationale.

Sur l’autre sujet épineux à l’agenda, le commerce international, les dirigeants du G7 se sont montrés plus souriants.

Ils se sont dits d’accord pour lutter contre le protectionnisme et les mauvaises pratiques commerciales, dans une formule équilibrée prenant aussi en compte la préoccupation des Etats-Unis pour un commerce juste et équilibré. La journée avait débuté par une rencontre avec les dirigeants de cinq pays africains: Niger, Nigeria, Ethiopie, Kenya et Tunisie.

Vendredi, les dirigeants du G7 avaient facilement trouvé un terrains d’entente sur la lutte contre le terrorisme, après l’attentat meurtrier de Manchester.

Le G7 a signé une déclaration commune sur le terrorisme dans laquelle il accentue la pression sur les grands groupes internet pour qu’ils luttent davantage contre les contenus radicaux, à la demande de la Grande-Bretagne.

Le G7 a également exprimé son inquiétude face au retour des combattants étrangers, particulièrement après l’attentat de Manchester commis par un Britannique d’origine libyenne qui pourrait s’être rendu en Syrie après une visite en Libye.

Le G7 de Taormina, où l’ombre de la Russie n’a cessé de planer après les nouvelles allégations concernant son rôle pendant la campagne électorale américaine, s’est dit aussi prêt à prendre des sanctions supplémentaires contre Moscou, en raison de sa « responsabilité » dans le conflit ukrainien.

Samedi en fin d’après-midi, quelques 2.000 manifestants ont défilé dans les rues de Giardini Naxos, au pied de Taormina, et la dispersion de ce cortège a donné lieu à quelques moments de tension entre policiers et une poignée de manifestants.

Le G7 face aux coups de butoir de Donald Trump

Les déclarations toniturantes et la gestuelle musclée du président américain Donald Trump risquent de mettre à mal la cohésion du G7, dont le sommet s’est ouvert vendredi à Taormina en Sicile avec un agenda chargé.

« Il n’y a aucun doute que ce sera le sommet du G7 le plus difficile depuis des années », a averti vendredi matin le président du Conseil européen Donald Tusk, alors que les sujets de contentieux -lutte contre le réchauffement climatique et commerce mondial- ne manquent pas avec les Etats-Unis.Les sept chefs d’Etat et de gouvernement se sont retrouvés vendredi midi dans le majestueux théâtre grec de cette petite station balnéaire sicilienne, pour une photo de famille, avant de se diriger à pied vers le lieu de la rencontre.

Passant tout près de la place centrale de cette petite ville, qui surplombe de plusieurs centaines de mètres la mer Méditerranée, plusieurs de ses dirigeants dont M. Trump, la chancelière allemande Angela Merkel ou le chef du gouvernement italien Paolo Gentiloni, se sont arrêtés pour profiter de la vue et bavarder un peu.

La gestuelle était scrutée avec attention, notamment celle de Mme Merkel et de M. Trump, après des fuites dans la presse sur des propos tonitruants qu’aurait tenus le président américain. »Les Allemands sont mauvais, très mauvais », a jugé le président américain lors de sa rencontre jeudi à Bruxelles avec les dirigeants de l’Union européenne, selon le site de l’hebdomadaire Der Spiegel. »Regardez les millions de voitures qu’ils vendent aux Etats-Unis. Horrible. Nous allons arrêter ça », a-t-il dit.

De quoi refroidir l’ambiance de ce G7 censé réaffirmer la cohésion de ses membres, notamment sur le terrorisme, après l’attentat meurtrier qui a fait 22 morts dont de nombreux enfants mardi à Manchester en Grande-Bretagne.

La chancelière allemande Angela Merkel n’a fait aucun commentaire à son arrivée vendredi matin à Taormina, qui vit littéralement en état de siège depuis plusieurs jours, avec quelque 7.000 hommes chargé de protéger les chefs d’Etat et de gouvernement de sept des pays les plus riches de la planète (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie et Canada)Le président de la Commission Jean-Claude Juncker et M. Tusk ont de leur côté tenté de minimiser les propos de Donald Trump, sans toutefois totalement démentir les révélations du Spiegel. »Il n’est pas vrai que le président (Trump) a eu une approche agressive. C’est un problème de traduction. Il n’a pas dit que les Allemands se comportaient mal, il a dit qu’il y avait un problème. Ce n’était pas agressif », a déclaré M. Juncker.

Mais après la poignée de mains très virile entre le président américain et son homologue français Emmanuel Macron jeudi à Bruxelles, ses partenaires du G7 veulent surtout obtenir des clarifications de la position américaine sur plusieurs sujets, dont le réchauffement climatique ou le commerce international.

Réunion utile

M. Gentiloni a promis de tout faire pour rapprocher les points de vue, afin de faire de ce rendez-vous « une réunion utile ».

Le G7 devrait réaffirmer dès vendredi son engagement et sa fermeté dans la lutte contre le terrorisme islamiste.Le Premier ministre britannique Theresa May, qui rentrera dès vendredi soir à Londres, devait prendre la parole en début d’après-midi devant ses collègues pour expliquer combien il est plus que jamais indispensable de ne pas baisser la garde. Elle a d’ores et déjà reçu l’appui du président français, qui assiste vendredi à son premier G7.Mais les choses s’annoncent plus délicates pour les discussions ultérieures sur le climat ou le commerce international.

Le réchauffement climatique, sujet sur lequel le président américain Donald Trump refuse toujours de se prononcer, « sera le plus compliqué », avait prévenu mercredi l’entourage du président français. Et ce dernier, que tout semble opposer au nouveau locataire de la maison blanche, compte bien faire pression sur l’administration américaine.

Toute la diplomatie européenne essaie de « pousser dans la même direction » les Etats-Unis sur le climat, a assuré la présidence française.

Mais, rien ne dit que les dirigeants du G7 parviendront à trouver un terrain d’entente sur ce sujet crucial. L’approche reste « ouverte », mais on ne fera rien qui donne l’impression que six pays font quelque chose contre un septième, c’est un processus ouvert, a-t-on indiqué cette semaine de sources diplomatiques italiennes.

Autre sujet de dissensions, le commerce international et le rôle d’arbitre de l’OMC, où les Etats-Unis veulent réviser leur position, tandis que Paris souhaite l’accord « le plus ambitieux possible sur la défense du système multilatéral ».

Le conseiller économique du président Trump, Gary Cohn, a dit s’attendre à une discussion « ferme » sur le sujet.

« Nous allons continuer à nous battre pour ce que nous pensons juste, c’est-à-dire un commerce libre, ouvert, mais équilibré », a-t-il assuré devant la presse.

La Syrie au coeur du G7 avant la visite de Tillerson à Moscou

Le dossier syrien est encore au coeur des discussions des ministres des Affaires étrangères du G7 mardi en Toscane, pour tenter de faire passer un message de fermeté avant la visite à Moscou du secrétaire d’Etat américain, Rex Tillerson. »Tous les Etats du G7 veulent éviter une escalade militaire, et veulent une solution politique sans nouvelle spirale de la violence », a déclaré le ministre allemand Sigmar Gabriel, à l’issue d’une réunion élargie à plusieurs pays arabes et à la Turquie. »Nous voulons amener la Russie à soutenir le processus politique en vue d’une résolution pacifique du conflit syrien », a ajouté M. Gabriel, cité dans un communiqué. Le ministre allemand a précisé que c’était là la position du secrétaire d’Etat américain. « Il a tout notre soutien pour ses pourparlers à Moscou mercredi », a-t-il affirmé.

La position du chef de la diplomatie américaine est particulièrement attendue au lendemain des prises de positions fermes de l’administration Trump contre le régime syrien.

A Lucques, près de Pise, la journée a débuté vers 7H45 (5H45 GMT) avec une réunion d’une heure entre les ministres des Affaires étrangères des sept grandes puissances (Etats-Unis, Allemagne, Japon, Royaume-Uni, Canada, France et Italie) et de hauts diplomates de Turquie, des Emirats arabes unis, de l’Arabie saoudite, de la Jordanie et du Qatar.

Elle devait se poursuivre avec une autre table ronde à sept et des rencontres bilatérales, avant une conférence de presse prévue à 12H00 (10H00 GMT) du ministre italien, Angelino Alfano, hôte du sommet.

Ce dernier avait expliqué lundi que les discussions élargies de la matinée visaient à trouver les moyens de relancer le processus en vue d’une solution politique en Syrie et d’éloigner le spectre d’une escalade militaire.

Les alliés du président syrien Bachar al-Assad, en particulier la Russie et l’Iran, ont en effet menacé de représailles après la frappe américaine contre une base aérienne syrienne dans la nuit du 6 au 7 avril en réponse à une attaque chimique, imputée au régime syrien, qui avait fait 87 morts le 4 avril à Khan Cheikhoun, dans le nord-ouest de la Syrie.

Le ministre britannique, Boris Johnson, a lui aussi souhaité que M. Tillerson reparte avec un « message clair et coordonné » pour la Russie, principal allié du régime de Bachar al-Assad. De son point de vue, il s’agit de faire pression pour que Moscou cesse de soutenir M. Assad, qui est « maintenant toxique dans tous les sens du terme ».

Lundi, les Etats-Unis ont en tous cas averti une nouvelle fois le régime de Bachar Al-Assad de ne pas procéder à de nouvelles frappes chimiques, affirmant au passage avoir cloué au sol 20% de l’aviation syrienne dans leur bombardement de la semaine dernière.

– ‘Rendre des comptes’ –

« Les Etats-Unis ne resteront pas passifs quand Assad tue des innocents avec des armes chimiques », et la Syrie « serait mal avisée d’utiliser à nouveau des armes chimiques », a averti le général James Mattis, le chef du Pentagone.

Moscou et Téhéran, autre allié de Damas, ont eux menacé Washington de « réagir fermement » à toute nouvelle « agression contre la Syrie », après la frappe américaine de 59 missiles Tomahawk contre la base aérienne syrienne.Donald Trump s’est entretenu lundi sur la Syrie avec Theresa May et Angela Merkel, lors de conversations téléphoniques séparées. Les dirigeantes britannique et allemande ont soutenu la frappe américaine de jeudi et « se sont accordées avec le Président Trump sur l’importance de faire rendre des comptes au président Bachar al-Assad », selon un communiqué de la Maison Blanche.Lundi, quelque 200 personnes ont manifesté autour du centre historique de Lucques interdit aux voitures et quasiment vidé de ses touristes en raisons des mesures de sécurité, pour dénoncer le G7 derrière une banderole proclamant: « Vos guerres, nos morts, chassons les patrons du monde ».

Dans la matinée de lundi, plusieurs des ministres ont participé à une cérémonie du souvenir à Sant’Anna di Stazzema, un village près de Lucques où 560 civils ont été assassinés par des soldats nazis en août 1944.

« Nous nous engageons une nouvelle fois à faire en sorte que tous ceux qui commettent des crimes contre des innocents partout dans le monde aient à rendre des comptes », avait promis M. Tillerson à cette occasion.