Régulation en période électorale: La HAC s’outille

La Haute autorité de la communication (HAC) du Mali, organe de régulation de l’audiovisuel au Mali, s’organise pour jouer pleinement son rôle lors des prochaines élections, en particulier la présidentielle de 2018. Ayant pour mission, entres autres, de garantir une couverture impartiale et responsable ainsi que l’égal accès aux médias des candidats, la HAC tient du 13 au 15 novembre une rencontre sur « la régulation des médias en période électorale ». La manifestation  réunit des participants venus des pays membres du Réseau des instances africaines de régulation de la communication (RIARC) représenté à Bamako par son secrétaire exécutif, Adam Boni Tessi.  Elle a pour objectif de contribuer à  l’organisation d’lections libres, transparentes et crédibles à  travers une régulation indépendante et équitable des médias.

Ouvert ce lundi 13 novembre à  l’Hotel Radisson Blu par le Premier ministre, la rencontre est surtout un cadre d’échanges pour les autorités de régulation représentées. Elles y évoqueront les bonnes pratiques en termes de régulation des médias en période électorale et dégageront des recommandations qui serviront de feuille de route à  la HAC Mali et les instances des nombreux pays africains pour qui les prochains mois recèlent de rendez-vous électoraux. Abdoulaye Idrissa Maiga, le Premier ministre malien a appelé les instances de régulation à  s’outiller pour être des « tuteurs bienveillants », garants de la mise en place d’un cadre d’action sain et contrôle pour les médias. Ces derniers sont également appelés à  plus de professionnalisme, « seul gage de survie des entreprises de presse », selon le chef du gouvernement. La communication inaugurale a été présentée par le président du Conseil supérieur de la communication du Niger, Abdrahmane Ousmane sur le thème « Quelle régulation pour la couverture des élections par les médias de l’audiovisuel».

Les travaux en ateliers permettront aussi de voir avec les médias et les partis politiques les bonnes pratiques pour mener à  bien les élections prochaines. Il s’agit entre autres, de la formation sur le traitement de l’information et du monitoring du discours politique en période électorale. A noter que ce séminaire international sera suivi d’ateliers nationaux qui permettront à la Haute Autorité de la Communication d’échanger et partager avec les structures nationales en charge des élections.

Médias au Mali :  Réguler, innover, se professionnaliser ou mourir ?  

 « Lorsque je commençais dans la profession, il n’y avait que deux ou trois journaux privés en presse écrite. Je trouve donc, en tant que partisan fieffé de la liberté d’expression et de la liberté de la presse, que c’est vraiment positif l’élan de création de médias qui existe au Mali. Cependant, toute abondance à son revers », déclare Sadou Yattara, doyen de la presse malienne. Cette abondance pose aujourd’hui le problème des conditions d’accès à la profession. La régulation en cours, les actions de formation, qui souffrent de l’absence de l’école tant attendue, et la menace des réseaux sociaux, désormais érigés en médias, tels sont les enjeux auxquels fait face une presse malienne qui cherche ses marques.

Selon le Baromètre des médias africains (2016), il existe aujourd’hui au Mali plus de 100 journaux, plus de 500 radios, dont 300 environ émettent régulièrement, une trentaine de site d’informations et plus d’une dizaine de télévisions privées. « Le paysage médiatique malien est en effet investi par beaucoup de monde, dont des non-professionnels. Ils n’ont pas les outils et les compétences pour exercer comme il se doit cette profession », reconnait Sadou Yattara, qui appelle de ses vœux ardents l’ouverture de l’école nationale de journalisme. Le projet, mis en branle depuis des années et largement avancé, notamment avec la construction des locaux et la nomination d’un directeur, est bloqué « sans que l’on ne sache pourquoi », regrette un journaliste. « J’interpelle les politiques, il n’y a qu’eux qui peuvent débloquer ce dossier. C’est vraiment un grand problème pour la profession aujourd’hui », déclare M. Yattara.

Pour Modibo Fofana, Directeur de publication du site d’information Mali24.info, il urge pour corriger certains manquements des acteurs de la profession qu’intervienne une révision de « la loi portant régime de la presse. Elle est aujourd’hui obsolète, dans la mesure où il n’y a aucun garde-fou pour réserver la création des organes de presse aux professionnels du métier. Chaque journaliste devient directeur de publication sans une bonne formation de base, ni la maîtrise de l’éthique et de la déontologie journalistiques ». « On se sait plus qui est qui dans la presse malienne, n’importe quel scribouilleur se dit journaliste et crée un organe, pour peu qu’il en ait les moyens », déplore en effet Abdoulaye Maiga, juriste. « Les articles inappropriés, voire dangereux, ne sont plus rares dans les journaux. Alors que plus nous avançons, plus le contexte est difficile et plus il y a besoin du traitement de l’information par des vrais professionnels », poursuit-il.

A la fondation Tuwindi, on jette un regard plus mitigé sur le paysage médiatique malien. « On remarque qu’il y a un souci grandissant de la qualité, mais aussi de l’innovation. La concurrence devenant de plus en plus importante, la presse doit se montrer plus exigeante envers elle-même, en produisant de l’information de qualité supérieure et en innovant dans son approche. Elle devra explorer de nouveaux champs, le journalisme de données, le journalisme d’investigation, etc », explique Tidiani Togola, Directeur exécutif. Son organisation travaille depuis deux ans avec les médias afin de les renforcer, non seulement en ce qui concerne les approches éthique et déontologique, mais aussi en termes de contenus, pour une meilleure information du public. « Cependant, ils n’ont pas souvent les moyens de jouer ce rôle pour plusieurs raisons, dont des raisons économiques, le manque de personnel qualifié, la peur de la répression, etc.  Ces facteurs empêchent les médias d’être le pouvoir qu’ils sont supposés être », poursuit-il. La quête d’un modèle économique plus efficace est également au cœur des réflexions en cours, afin d’aider les organes à vivre, prospérer et surtout améliorer les conditions de travail et de vie des journalistes, dont la plupart ne perçoivent même pas de salaire régulier.

Objectif régulation 2017 sera l’année du changement. C’est la conviction de la Haute Autorité de la Communication, qui a enfourché depuis quelques mois son cheval de bataille pour assainir, mais aussi poser les bases d’un fonctionnement plus efficace et une meilleure organisation de la profession. La fermeture pour non-conformité de dizaines de stations de radios a provoqué un tollé au sein de l’Union des radios et télévisions libres (URTEL) Mali en juin et juillet derniers. Mais, au sein de l’autorité, on estime que le temps n’est pas ce qui a fait défaut aux patrons de presse pour régulariser leur situation. « Tout a été fait pour que les promoteurs respectent la loi. Il faut rappeler que certains textes datent de plus de 5 ans et qu’un délai de six mois a encore été ajouté pour que les dossiers de demandes d’autorisations soient déposés. Mais rien n’y a fait et seuls quelques-uns ont fait les choses dans les règles » déplore un membre de la HAC. Le principal point d’achoppement est en effet « la précipitation avec laquelle la HAC veut gérer les choses. Elle a manqué de pédagogie et surtout n’a pas bien communiqué » déplore un patron de radio de la région de Mopti, qui estime par ailleurs que les conditions sont trop difficiles à remplir pour les organes de l’intérieur du pays qui désirent l’agrément. « La HAC est une instance au service de la profession », tient à rappeler Sadou Yattara. « Il faut garder à l’esprit que les entreprises de presse ne sont pas des entreprises commerciales comme les autres. Ce sont des œuvres culturelles, qui ne rapportent parfois pas d’argent. La HAC doit prendre des décisions, c’est son rôle, et les premières décisions sont toujours critiquées. Mais elle doit aussi travailler à mieux interagir avec les médias et surtout miser sur leur développement », conclut-il. Au niveau de l’Autorité, la tâche continue et elle s’annonce ardue. Après les télévisions privées, passées au crible actuellement, ce sera le tour de la presse écrite et en ligne, cette dernière faisant l’objet d’une attention particulière. Ses acteurs, réunis au sein de l’Association des professionnels de la presse en ligne (APPEL Mali), ont d’ailleurs pris les devants pour poser des balises à l’exercice du métier de « journaliste web ». Bien que datant de moins d’une dizaine d’années au Mali, la presse en ligne est en plein essor, même si elle est, comme la presse papier, largement menacée par une incursion à grand pas des réseaux sociaux dans la sphère de l‘information.

Des « médias » sociaux Les réseaux sociaux sont en effet aujourd’hui des médias à part entière. « Les réseaux sociaux aujourd’hui ont fait de tout le monde un journaliste citoyen. Les scoops ont cessé d’être réservés aux organes papiers. Un phénomène qui commence à leur faire même ombrage, car il suffit avoir un smartphone pour s’informer » reconnait Modibo Fofana de Mali24.infos. Conséquence, la mévente frappe de plus belle les journaux papier et la presse en ligne doit redoubler d’énergie et d’innovation pour ne pas se faire distancer sur l’information. « C’est un danger pour les organes. D’une part, la course au buzz peut faire commettre des fautes. On ne s’accorde plus le temps de vérifier, de croiser les informations avant de les publier. D’autre part, étant donné qu’ils attirent la publicité, principale source de revenus des organes, il y a un risque de déperdition des ressources qui menace aussi les organes de presse », explique un spécialiste des médias. Mais, les réseaux sociaux, « c’est un atout pour les sites », reconnait M. Fofana, « car ils permettent aujourd’hui de donner plus de visibilité aux informations dynamiques et crédibles. Au Mali, beaucoup de sites sont sur Facebook, le réseau social le plus utilisé ». « Quand tu es confronté à un bloggeur qui se prend pour un journaliste, tu comprends qu’il y a encore du travail. Les gens confondent encore quelqu’un qui publie et professionnel. Il convient de rappeler cependant qu’il existe des organes en ligne qui sont très présents sur les réseaux, qu’ils investissent avec professionnalisme : distance, impartialité et équilibre de l’information ». De plus en plus de formations spécifiques sont dispensées afin de permettre à la presse de tirer un meilleur parti de ces acteurs, et concurrents, nouveaux. Un défi à relever pour garder le dynamisme actuel et continuer sur la voie de la professionnalisation et de l’autonomisation du 4ème pouvoir.

 

Les médias maliens face aux nouvelles mesures

La Haute autorité de la communication, créée il y a presque deux ans, a pris des mesures pour une meilleure organisation du paysage médiatique malien. Un processus qui ne va pas sans grincement de dents. Les patrons de presse s’expriment sur le sujet.

« Dans ce pays, tout le monde s’improvise journaliste. D’ailleurs c’est le seul métier sensible que tous peuvent pratiquer au Mali. Le contenu de tous nos médias le dénote et c’est dommage », regrette Lassana Kouyaté, cadre des impôts à la retraite en train de faire sa revue de presse quotidienne devant la Bourse du travail de Bamako.

Un constat qui a poussé le gouvernement à mettre en place la Haute autorité de la communication (HAC) qui a, depuis son installation en décembre 2015, pris des dispositions pour la mise en conformité des médias existant dont la plupart exerçait avec des documents temporaires, fermé 47 radios qui ne disposaient d’aucune autorisation d’émettre et édicté de nouvelles règles pour réguler le secteur. La réforme de la presse écrite et la délivrance de la carte de presse est également en cours de préparation.

Alexis Kalambry est l’un des pionniers de la presse écrite au Mali et directeur de publication du journal « Les Échos ». Selon lui, « il est temps de remettre de l’ordre dans la famille de la presse malienne. Cela ne se fera pas sans douleurs et sans cris, mais c’est un mal nécessaire ». Même si certains patrons de presse, parmi lesquels Sambi Touré, directeur de publication du journal « Info Matin » et promoteur de radio, avouent ne pas avoir connaissance du contenu de ces nouvelles mesures, nombreux sont ceux qui sont déjà acquis à la cause. « On ne peut pas continuer à laisser tout le monde faire ce qu’il veut », appuie le président de la Maison de la presse, et non moins patron d’un groupe de médias. Dramane Alou Koné déplore le fait qu’il existe des medias qui nont « ni siège, ni employé, donc aucune charge pendant que les autres se débattent à mettre leurs travailleurs dans les meilleures conditions de travail. Ce n’est plus acceptable ». « Ce que nous devons reconnaître à la HAC, qui a à sa tête des personnes ayant assez de respectabilité au niveau de la corporation, c’est qu’elle nous (patrons des médias) a toujours associés dans les prises de décision. Donc nous allons nous plier et les accompagner », assure Alexis Kalambry. « Si les mesures s’appliquent à tous, sans distinctions, je ne pense pas qu’il puisse y avoir de résistance. La HAC n’aura d’effet que lorsqu’elle sera juste et rigoureuse », conclut M. Koné.

 

 

Paysage médiatique : la fin du désordre

Installée en décembre 2015, la Haute autorité de la communication (HAC) est en charge de la régulation du paysage médiatique malien qui compte plus de 300 radios, une centaine de titres de presse écrite et une trentaine de télévisions privées. Ses membres ont élaboré les textes permettant d’ « assainir » le secteur. Les premières conventions autorisant des médias et sociétés de distribution d’images à opérer sur le territoire malien ont été signées le 12 juin, ouvrant la voie pour tous les autres organes qui désirent se conformer aux nouvelles dispositions. Comment va se poursuivre cette opération de nettoyage du paysage médiatique ? Quels sont les acteurs concernés ? Pour quels résultats ? Entretien exclusif avec le président de la HAC, le magistrat Fodié Touré.

 À quel besoin répondait la création de la HAC, il y a près de 18 mois ?

La Haute autorité de la communication a été mise en place il y a bientôt 18 mois pour répondre à un besoin crucial de mise en ordre de l’espace médiatique au Mali. Parce que depuis les premières heures de l’ère démocratique, cet organe de régulation avait été annoncé mais la Constitution de 1992, qui est aujourd’hui en révision, a endossé un organe chargé de l’égal accès aux médias d’État. Vous savez que ceci, par sa conception même, est très restrictif. Le besoin s’est donc fait sentir de mettre en place un organe de régulation dont les missions sont plus étendues et surtout plus pragmatiques, pour œuvrer au quotidien à la régulation. Parce que lorsqu’on parle de l’égal accès aux médias d’État, c’est vrai que ça concerne les médias, mais surtout ceux qui ont besoin d’avoir accès à ces médias à une période bien déterminée. Alors qu’un organe de régulation comme cela existe dans tous les pays a pour mission d’embrasser tous les secteurs. Voici ce qui a amené les autorités à impulser la création de l’organe que je dirige.

Quel contexte avez-vous trouvé à la création de la HAC ?

Un désordre. Mais aussi une situation de désolation. Pourquoi désordre ? Tout le monde était installé, chacun faisait ce qu’il voulait, sans aucun contrôle. Désolation, parce que ceux qui sont les vrais acteurs, les vrais professionnels des médias étaient envahis par ceux qui n’y connaissaient rien mais qui venaient les concurrencer, les empêcher d’évoluer normalement et de façon saine. C’est pourquoi je parle de désolation et je pèse mes mots. Le désordre s’expliquait par une situation qui a caractérisé un moment l’administration malienne. On a délivré dans le cadre d’un début timide de régulation, pour la création de radios privées, des arrêtés interministériels. Ceux-ci annonçaient des conventions, des cahiers de charges qui ne sont jamais venus, au bout de 25 ans. Aucune autorité n’a élaboré quelque texte que ce soit pour venir renforcer ces amorces. La nature ne s’accommodant pas du vide et certains étant toujours prompts à en profiter, ils se sont installés. Et lorsque ce désordre a été constaté au bout de quelques années d’exercice, personne, et là aussi je pèse mes mots, personne n’a eu le courage de les arrêter. Chacun selon sa position, son option du jour, a laissé faire et a encouragé. Et on est venu, pour compliquer la situation, délivrer ce qu’aucun texte n’a prévu : des autorisations provisoires. En attendant quoi ? Rien du tout, parce que la HAC n’était même pas annoncée. Mais lorsque cela a été le cas, on a trouvé le soin de dire qu’on attendait sa mise en place, puis en attendant qu’elle ne valide les autorisations provisoires. Il fallait faire face à tout cela, de façon méthodique et avec beaucoup de tact. Voilà pourquoi nous avons pris tout ce temps, pour évaluer la situation avec calme mais aussi avec une approche technique, administrative et juridique.

Revenons sur l’approche avec laquelle vous avez évolué jusqu’ici. Quelle a été la réaction de vos partenaires et des autres acteurs du monde des médias ?

Il fallait d’abord mettre notre propre règlement intérieur en place. Puis nous avons pensé aux conventions et aux cahiers de charges. Mais ces conventions sont signées avec les partenaires. Ils ont donc été conviés à la HAC pour discuter sur les premiers projets qui ont été partagés avec eux, nous avons pris leurs observations. Certains ont fait des contributions qui ont été intégrées. C’est pourquoi aujourd’hui, au grand étonnement de certains, tout le monde a accepté. Les cahiers des charges n’ont pratiquement fait l’objet d’aucune contestation parce que leur contenu a été partagé, les conventions ont été signées et on remettra les conventions à tous ceux qui voudront suivre la procédure de mise en conformité. Je peux vous garantir que, sauf tremblement de terre, il n’y aura pas de contestation, parce que tout le monde connait le contenu.

Et pourtant, le ton est monté quand la HAC a publié la liste des médias concernés par ses mesures de fermeture.

Ces contestations, on s’y attendait un peu. Mais je me dis qu’objectivement, certains gagneraient à rester modérés dans leurs réactions. Parce que lorsqu’on prend sur soi la responsabilité, dans une république, d’acquérir des fréquences, par d’autres voies que celles autorisées, d’aller s’installer dans un immeuble d’une certaine valeur et de commencer à exploiter une chaîne de télévision, alors que l’on n’a même pas une feuille de papier d’une quelconque autorité, et qu’on se rebiffe quand on vous dit que vous êtes illégal, je dis qu’on frise le ridicule. C’est simple, la HAC demande de produire un document d’une quelconque administration. C’est beau de dire que la HAC veut restreindre la liberté de la presse, mais c’est quand même difficile d’expliquer comment on en est arrivé là. Autre chose : aujourd’hui, on compte une trentaine de chaînes de télévision qui émettent sans autorisation. Lorsqu’on parle d’acte administratif tenant lieu d’autorisation et qu’on tend une feuille de papier ! Pensez-vous qu’on puisse engager la responsabilité de l’État sur une feuille de papier ? Les conventions que nous avons signées hier (12 juin 2017, ndlr) ont un minimum de 44 articles, parce que l’on prend tout en compte. Les promoteurs avec qui nous avons signé étaient à l’aise parce que les vrais acteurs des médias veulent évoluer dans la légalité, ils veulent savoir comment leur secteur est régulé. Ce sont ceux qui ne sont pas du secteur qui essaient de saper notre mission. Et ils resteront à quai parce que le train va aller.

Et ceux-là justement que va-t-il en advenir ?

Il y a des moments où il faut prendre des mesures sans états d’âme. Les radios qu’on a fermées, les fréquences sont retirées, point. Il y a des fréquences qui ont été attribuées à des opérateurs qui ne les ont pas exploitées, on les a aussi retirées. Nous allons faire un appel à candidature. Si vous échouez, c’est clos et ceux qui présenteront les meilleurs dossiers seront retenus.

Il va alors y avoir une redistribution des fréquences ?

Non. Ceux qui ont déjà des fréquences ont l’option de la mise en conformité. Vous avez un arrêté ou une autorisation provisoire ? On vous donne, selon le cas, 4 à 6 mois, et vous venez signer la convention en respectant les règles et en payant les redevances. Alors vous gardez votre fréquence, le nom de votre station de radio et vous continuez à travailler. Dans le cas contraire,  on vous retire l’autorisation.

Y aura-t-il un traitement particulier pour les radios confessionnelles ?

Dans les cahiers des charges que nous avons élaborés, il y a des dispositions particulières pour ce type de médias et dans les conventions également. Celles que nous allons autoriser vont respecter ces dispositions. Parce que ça les arrange mais aussi parce que cela leur permet de renforcer leur identité confessionnelle. Tout le monde aujourd’hui fait du confessionnel parce que c’est ce qui rapporte, mais nous n’allons plus permettre à une radio commerciale ou une radio communautaire de le faire. Ce que veulent ces radios, c’est être différentes des autres, et on leur en donne l’occasion. Elles ne vont pas se mêler de politique. Ces dispositions ont fait l’objet de plusieurs semaines de réflexion au niveau de la HAC. Celles qui ne vont pas les respecter, on va les fermer.

On parle beaucoup de radio et de télévision. Qu’en est-il de la presse écrite ?

Quand nous sommes arrivés, on a trouvé une situation qui a été créée par une mesure très simpliste : pour créer un journal, il fallait aller faire la déclaration auprès d’un procureur et c’était tout. C’est une fonction que j’ai remplie pendant 17 ans. Je vous donne l’autorisation et vous allez exercer. Mais moi je ne suis pas du métier. À part la loi de 2000 sur les délits de presse, il n’y avait pratiquement rien. Il y avait un texte qui régissait l’aide à la presse. Mais tout cela a été revu au cours de la session qui s’achève. Nous avons fait des propositions au gouvernement pour encadrer la presse écrite qui est aussi importante que la presse audiovisuelle. Mais l’urgence était aux mesures à prendre pour réguler cette dernière, parce qu’il faut reconnaitre qu’il y a plus de problèmes. D’ici la fin de l’année, il y aura du changement.

Lors d’un récent Conseil des ministres, il a été question du changement des critères et de la procédure pour l’obtention de la carte de presse. Qu’est-ce qui va changer ?

Le texte dont il est question nous a été envoyé par le gouvernement pour avis. Nous avons donné notre avis à un moment où je ne suis pas sûr qu’il ait été pris en compte dans la version qui a été adoptée par le gouvernement. Vous me permettrez donc de ne pas répondre à cette question.

La HAC va-t-elle également réguler les réseaux sociaux ?

On ne peut pas y échapper. C’est un secteur sur lequel il n’y a jamais eu d’approche et ce n’est pas en un clin d’œil qu’on peut trouver une solution. Même pour la presse en ligne, dans l’UEMOA où nous avons regardé, aucun pays n’a véritablement de texte pour la régulation. En Europe, il y a la même situation. Selon mes renseignements, les serveurs des médias en ligne maliens ne se trouvent pas ici, mais à des milliers de kilomètres. Donc demander à une jeune institution comme la HAC d’en faire le contrôle, d’empêcher telle ou telle publication, c’est lui demander l’impossible. Il n’y a pas dix pays au monde capables de faire cela. La réflexion est en cours à la HAC pour qu’on trouve un moyen de réguler.

Quels sont les projets à venir de la HAC ?

Notre priorité est la mise en ordre de l’espace médiatique au Mali. Nous mettrons tout en œuvre pour ce faire. Le deuxième objectif, c’est la régulation de la presse écrite. Nous avons un grand chantier avant la fin 2017. Nous allons organiser une rencontre pour planifier comment nous allons procéder au suivi des médias durant l’année 2018 qui est une année électorale. Nous savons que nous sommes en train de sortir d’une crise et le pays est dans une situation fragile et l’accompagnement de l’espace médiatique est important. Une seule phrase sur un média peut avoir des conséquences incommensurables…