Huicoma : les travailleurs licenciés marchent ce mardi

Ils sont déterminés à  poursuivre la lutte jusqu’à  la satisfaction de leurs revendications. Conscients de la détermination de ces travailleurs, le gouvernement après plusieurs échecs de négociation avec ces victimes de licenciement abusif, a décidé de mettre en place une commission pour examiner leur situation. Le ministre Amadou Abdoulaye Diallo écarté du dialogue Désormais le sort des travailleurs de l’Huicoma seraient entre les mains du ministre de la fonction publique et de la réforme de l’Etat Abdoul Wahab Berthé. Incompétence ou pas, le ministre Amadou Abdoulaye Diallo, ministre de l’industrie et de l’investissement semble écarté dans la recherche de solutions aux problèmes des travailleurs de l’Huicoma. Une note ministérielle est parvenue aux travailleurs licenciés qui ont élu domicile à  la bourse du travail pour la mise en place d’une commission Ad hoc. Cette révélation été faite le samedi 21 novembre 2009 à  la bourse du travail par Bacary Berthé l’infatigable secrétaire général du collectif de soutien des travailleurs licenciés et non licenciés. C’’était lors d’un meeting qui a regroupé plus de 500 personnes y compris des jeunes volontaires de l’APEG et qui se rassemblent dans ces problèmes. Cette commission ad hoc a pour mission d’examiner le plan social, d’intercéder entre le gouvernement et l’UNTM en faveur des travailleurs de l’HUICOMA. A cet effet, elle est chargée de prendre les mesures appropriées en vue de la signature du projet de plan social, identifier les travailleurs bénéficiaires et procéder au calcul des montants dus. Un acte du gouvernement peu rassurant aux yeux des travailleurs parce que des milliers de promesses ont été dites pour la sortie de la crise et qui n’ont abouti à  rien. C’’est pourquoi ,ils maintiennent leur mot d’ordre. 7 points de revendications «Â La reprise sans délai et sans condition de l’HUICOMA par l’état au groupe Tomota, le paiement sans délai et sans condition du plan social conformément à  celui des travailleurs de la CMDT adopté en 2003, la reprise sans délai et sans condition des activités de l’entreprise ; le paiement immédiat des arriérés de salaires des travailleurs qui sont en activité(six mois) et celui des saisonniers ; le versement immédiat des cotisations à  l’INPS, la régulation administrative de la situation des travailleurs (travailleurs arrêtés emprisonnés en juins 2006 et licenciés après ». «Â Cela fait 12 jours de combats de souffrances, d’abnégation en pleine période de froid et nous nous battrons jusqu’à  la satisfaction de nos revendications » a ajouté Bacary Berthé. Pendant ces jours, les travailleurs licenciés ont reçu la visite de plusieurs personnalités en l’occurrence le ministre de l’industrie et de l’investissement : « lorsque le ministre se trouvait en face des travailleurs, il a essayé de les convaincre que le groupe Tomota allait payer deux mois de salaires afin de mettre fin au sit-in… », explique Berthé. Toute chose qui a provoqué l’ire des travailleurs. Tahirou Bah du mouvement des Sans Voix déplore cette situation et qui date selon lui de Mars 1991. Avant d’ajouter que le Mali devient un pays o๠la raison du plus fort est toujours la meilleure. Tirant sur le ministre Amadou Abdoulaye Diallo, Tairou BAH martèle que le ministre a perdu tout sens civique en tenant des propos inapropriés devant des chefs de familles déboussolés. Révélation sur le groupe Tomota Un produit chimique qui entre dans la fabrication des savons aurait été acheté en Chine pour 320 millions de FCFA et facturé à  920 millions de fcfa par Tomota au nom du groupe. Et Tahirou Bah qualifie cet acte de l’opérateur économique de barbare face à  la situation de ses employés. Quant au doyen des manifestants, il a invité les jeunes à  rester motivés dans le combat. Mardi, les femmes viendront s’ajouter aux hommes pour une grande marche pacifique en faveur des licenciés de l’Huicoma.

Huilerie cotonnière du Mali (HUICOMA) : les effets pervers de la privatisation

Le projet de plan social HUICOMA ignoré Avec la protection des droits des travailleurs licenciés, le projet de plan social, HUICOMA, a été élaboré (avant la cession) par le gouvernement, le syndicat des travailleurs de HUICOMA et la société HUICOMA-SA. Mais, il a été tout simplement jeté à  l’eau, malgré le fait qu’il garantissait des mesures d’accompagnement,d’indemnisation et de réinsertion socio-économique des travailleurs licenciés. En effet, ledit projet de plan social prévoyait explicitement que « l’acquéreur s’oblige à  mettre en place, dans un délai de soixante jours, à  compter de la date de transfert, un plan social négocié avec les travailleurs et acceptable pour le cédant. Ce plan social sera pris en charge par HUICOMA. Plus loin, le même projet de plan social stipule que l’Etat et la société HUICOMA-SA s’engagent à  effectuer le paiement intégral des montants dus à  tous les agents concernés en une seule tranche et au moment de leur licenciement. « Mais, force est de constater, qu’en dépit des dispositions du projet de plan social, depuis la cession de HUICOMA au groupe TOMOTA en juin 2005, aucun plan social en faveur des travailleurs n’a été mis en place jusqu’à  ce jour. l’engagement de maintien de la totalité du personnel par l’acquéreur n’est pas respecté ; encore moins son engagement à  poursuivre la réalisation de l’objet social de l’HUICOMA, en maintenant les 3 usines (Koutiala, Koulikoro et Kita) pendant une durée minimum de 5 ans. Une vie socio-économique en lambeaux La crise qui a engendrée la privatisation de l’HUICOMA a donné lieu au licenciement de plus de 395 travailleurs. La situation précaire des travailleurs licenciés à  Koulikoro (par exemple) a fini par causer d’énormes troubles sociaux. Au plan socio-économique, la baisse vertigineuse du revenu des ménages, s’est fait cruellement ressentir, causant une dégradation du tissu social. Ainsi, nous assure le greffe du Tribunal de Première Instance de Koulikoro : « une soixantaine de foyers ont vu leur union conjugale, partir en fumée. Cela était bien prévisible dans la mesure oà¹, la plupart des chefs de famille (ne travaillant plus), ne pouvaient faire face aux charges familiales. Il faut aussi ajouter certains cas de décès, une vague de déguerpissement dans des maisons louées… Aussi, certains parmi ces licenciés, pour échapper à  la stigmatisation, se sont convertis dans le métier d’extraction de sable(dans le fleuve) en attendant des lendemains meilleurs ». La mauvaise foi des autorités Le premier rôle qui revenait à  l’Etat, était de veiller strictement à  l’application du plan social, deux mois après la cession de l’HUICOMA au Groupe TOMOTA. Ce qui n’a point été fait. Selon le porte-parole du collectif des licenciés, M. Ibrahim Diarra, « à€ aucun moment, nos gouvernants ne se sont souciés de la mise en place d’un plan social au profit des travailleurs qui sont au nombre de 900. Les autorités ne se sont pas préoccupées de la violation de tous les textes en matière du travail et de sécurité sociale (code du travail et code de prévoyance sociale). Pourtant, le droit réclamé par les travailleurs licenciés, ne sauraient être de trop pour l’Etat qui a empoché 9 milliards, suite à  la cession de ses 84,13 % d’actions ». Une gestion défaillante Pendant ce temps, l’HUICOMA, depuis sa cession, subit une véritable descente aux enfers par sa calamiteuse gestion. Aux dires du président du collectif des travailleurs licenciés, Boubacar Samaké, la société se portait économiquement très bien avant la privatisation, contrairement à  ce que nos autorités ont laissé croire. Et mieux, poursuit-il, l’Etat n’a jamais eu la clairvoyance de l’accompagner financièrement. « Aujourd’hui, il est très regrettable de constater que l’HUICOMA coule progressivement vers un avenir incertain », a-t-il déploré. Au grand dam des dispositions prévues dans le protocole, le repreneur (le Groupe TOMOTA) quant à  lui, a bénéficié de la part de l’Etat, d’avantages exceptionnels. Les effets pervers de la privatisation Il s’agit notamment de la diminution du prix de la graine de coton : de 47 500 Fcfa TTC prix HUICOMA avant cession à  12 500 Fcfa TTC, après cession au groupe TOMOTA ; l’exonération sur une période de huit (8) ans…Mais, le constat est aujourd’hui amer puisque : l’HUICOMA est pratiquement à  l’arrêt, après seulement trois années de gestion. Sur le marché, aucun produit de la société n’est présent (huile, savon, aliment bétail et crème karité) et tous les prix ont doublé avec l’arrivée massive de produits étrangers. Les villes industrielles de Koutiala, Koulikoro et Kita sont aujourd’hui des villes mortes, les retombées indirectes de ces unités sur les activités connexes (transports, commerce, location, restauration) étant estompées. Des travailleurs, déterminés à  se faire entendre « Un droit ne se donne pas, mais s’arrache », cet adage semble inspirer la démarche entreprise par le collectif des travailleurs licenciés de l’HUICOMA des suites de sa privatisation. En effet, le collectif s’est plus que jamais assigné le devoir de prendre ses destinées en mains (en restant solidaire), nonobstant les méfaits du grotesque coup bas que lui a infligé le bradage de l’HUICOMA. Ainsi, le collectif des travailleurs licenciés a saisi toutes les autorités administratives du pays impliquées dans la gestion du dossier, et a même adressé une lettre, ouverte au Président de la République (lequel, en son temps, avait donné l’assurance que la privatisation n’interviendrait que lorsqu’un plan social consensuel aura été mis en place) pour lui manifester leur indignation et leur colère. Pour sortir la société HUICOMA de l’ornière, l’Etat devra donc relancer dans le cadre d’une délégation de gestion et mettre les travailleurs licenciés dans tous leurs droits.