Mali – Entre grèves et Covid-19 : Les opérateurs économiques pataugent

Les banques sont affiliées à l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM). Du 14 au 18 décembre, elles ont suivi le mot d’ordre de grève de leur centrale syndicale. Cet arrêt de travail de cinq jours a entraîné de lourdes conséquences sur les activités des opérateurs économiques maliens, qui n’entendent plus endurer une telle situation. Et, la Covid-19 s’y mêlant, c’est une fin d’année poreuse qui se profile pour les acteurs de l’économie.   

« Quand un cultivateur trouve qu’il y a beaucoup d’herbe dans son champ et qu’en retour tu lui retires sa daba, alors comment devient le champ ? Il est foutu. Le commerçant, sa daba c’est l’argent. S’il n’arrive pas à y avoir accès, c’est problématique. Durant cette grève, toutes les transactions financières, tout ce qu’il y a comme drainage de marchandises vers le pays, ont été bloqués », caricature Sanou Sarr, Président de la Fédération des PME-PMI du Mali. Il explique que la grève de l’UNTM, suivie par les banques, a fortement contribué au ralentissement des activités des opérateurs économiques. Et c’est pour « ne plus prendre la douleur d’un fouet tapé sur un autre » que neuf faîtières d’opérateurs économiques se sont réunies à la Chambre du commerce, le mardi 22 décembre, pour exprimer leur mécontentement. Elles ont envoyé une demande d’audience à l’Association professionnelles des banques et établissements financiers (APBEF) afin de dégager la voie pour leurs activités en temps de grève. Plusieurs opérateurs économiques en colère proposent déjà de boycotter les banques durant 15 à 30 jours pour se faire respecter. « Aujourd’hui, nous ne pouvons rien faire sans les banques. Les besoins du Mali en termes d’importations et d’exportations en ciment, par exemple, s’élèvent à 80 millions de tonnes par an, soit plus de 8 000 tonnes par jour. Toutes les transactions financières s’effectuent à travers les banques, que ce soit ici, au Mali, ou à Dakar. Ainsi, tout arrêt de travail des banques nous met les bâtons dans les roues », poursuit Lamine Traoré, Président de l’Association des commerçants détaillants de ferrailles et de matériaux de construction du Mali. « Quand un commerçant voyage, il lui est impossible de laisser son argent à la banque. Il lui faut le retirer et le changer en devises étrangères pour que les opérations puissent être faciles. Durant cette semaine de grève, beaucoup ont été incapables d’aller en voyages d’affaires et d’autres sont restés bloqués dans des pays étrangers à cause de problèmes de liquidités pour leurs transactions commerciales », renchérit Ibrahim Maïga, Président de l’Association des commerçants voyageurs du Mali et de la diaspora malienne. Pour Cheick Oumar Sacko, Président du Syndicat national des commerçants détaillants du Mali (SYNACODEM), les banques, ainsi que l’État, sont des partenaires. Cependant, il pointe du doigt l’arrêt des activités bancaires comme un facteur à risques pour les opérateurs économiques. Les banques étant fermées, il leur était impossible de procéder à des versements, ce qui leur a posé un problème de sécurité.

Covid-19 Dans sa riposte contre le nouveau coronavirus, le Mali a décrété l’État d’urgence le 18 décembre dernier. Les rues marchandes, l’une des activités économiques phares, ont été fermées jusqu’au 4 janvier prochain. De quoi en rajouter à la peine des opérateurs économiques, qui avaient déjà beaucoup investi pour l’installation des stands, l’acheminement de l’électricité, la sécurité, etc. « Les commerçants tirent la moitié de leurs revenus des fêtes de fin d’année. Tout était fin prêt pour les rues marchandes et le gouvernement décide de leur annulation, alors que déjà des centaines de millions ont été dépensés. Chaque stand coûte au moins 10 millions de francs CFA pour être opérationnel.

Nous sommes conscients qu’il s’agit de la sécurité sanitaire de la population, mais nous pensons qu’avant d’en arriver là on pouvait réfléchir à d’autres pistes de solutions. Néanmoins, nous respectons la volonté des autorités, mais nous allons demander à ces dernières de réparer, à l’aide du fonds Covid, tout désagrément que cette annulation aura causé », explique Cheick Oumar Sacko.