Trois questions à Makan Doucouré, Directeur des études de l’INA

Cette semaine, c’est Makan Doucouré, Directeur des études de l’INA qui se prête au jeu des trois questions de la rédaction relatives à l’industrie culturelle dans notre pays. 

Quelles sont difficultés organisationnelles du milieu culturel malien ?

Au niveau communautaire, ça marche, mais quand on vient au niveau étatique, il y a un problème d’administration, de financement, de compréhension même de la culture. Au Mali, il y a une politique culturelle qui a été élaborée etqui doit être mise en œuvre par une Direction nationale de l’action culturelle. Parfois aussi, le secteur est confronté à une concurrence déloyale entre l’État et le privé. L’État doit préparer les programmes, donner les orientations, financer et demander des comptes aux privés, mais il arrive que l’État soit le maître d’œuvre. Je crois que c’est un problème de compréhension. Le partenariat public – privé existe, mais il faut que les acteurs privés n’attendent pas tout de l’État.

Où en sommes-nous avec la mise en œuvre de la réforme du secteur culturel ?

La mise en œuvre est progressive, mais pas dans tous les secteurs. Le problème, c’est que les entrepreneurs ne sont pas tous dynamiques et attendent beaucoup trop de l’État. Un festival, par exemple, doit être caractérisé par trois principes : culturel, social et économique. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a aussi l’absence d’évaluation de ces projets culturels et le faible budget alloué à la culture.

Quel est l’énoncé de notre politique culturelle ?

Il s’agit aujourd’hui de voir comment conserver cette identité culturelle pour que notre être, notre patrimoine, ne se perdent pas, et comment promouvoir cette culture pour qu’elle génère des profits, à travers les industries culturelles.

Le regard en vidéo d’Ina Dicko Traoré sur la crise malienne

 » Toute seule Je n’ai pas la capacité encore moins le moyen de mettre fin à  cette crise que traverse actuellement mon pays… Mais je sais qu’ensemble mes frères et soeurs maliens on peut y arriver car, seule l’union fait la force… Ainsi, à  l’occasion du 52 ème anniversaire d’indépendance du Mali, j’ai décidé de réaliser cette vidéo qui lui est spécialement dédié , afin de témoigner mon patriotisme tout en invitant mes confrères maliens à  la réunification pour un seul et unique but, celui de faire sortir notre pays du trouve dans lequel il se trouve actuellement ».

Existe t-il un art contemporain au Mali ?

Le milieu de l’art contemporain malien est appréciable dans de nombreux domaines comme la danse, le cinéma, ou la peinture. Les arts plastiques sont tout aussi vivaces mais, le public local ne s’y intéresse pas beaucoup. Cet art reste surtout valorisé en Europe ou aux Etats-Unis. Le directeur du Musée National de Bamako, Samuel Sidibé explique : « la pénurie de lieux d’expositions et l’inexistence d’un marché local, expliquent en partie ce phénomène. l’intérêt porté par les galeries et institutions du nord, a souvent un effet pervers et résulte de l’engouement occidental pour les arts dits primitifs. De fait, ces institutions influencent terriblement l’art contemporain d’Afrique noire et du Mali en particulier. Elles renforcent leurs propres imaginaires et fantasmes sur l’Afrique en sélectionnant des artistes pour une audience internationale. Face à  cette situation, il est capital d’offrir aux artistes africains, l’opportunité de créer localement et développer un public chez eux, d’abord». l’art contemporain africain témoigne d’une relation complexe qui cristallise dans chaque œuvre, des formations de sens, ouvrant la voie à  la construction d’une démocratie à  venir. Quelques artistes hors pairs Artiste visuel, Abdoulaye Konaté est narrateur, historien, auteur et peintre. Il est né en 1953 à  Diré (Mali). Diplômé de l’Institut national des arts (INA) de Bamako et de l’Institut des Arts plastiques de la Havane à  cuba, il est l’actuel directeur du Conservatoire des Arts et Métiers, Multimédia Balla Fasséké Kouyaté , situé sur la colline de Koulouba. Konaté creuse dans l’histoire, en redonnant une valeur à  la culture sahélienne que la modernisation s’attache à  faire disparaà®tre progressivement. Bien qu’il soit reconnu sur la scène internationale pour ses grandes installations textiles et multimédias, C’’est par la peinture que Konaté a débuté sa carrière. A la fin des années 60, il établit son atelier à  Bamako et consacrera son travail à  l’étude de la peinture abstraite, grâce à  la lumière en parallèle à  l’obscurité. Activité qui selon lui « tenait plutôt de l’exploration esthétique ». Konaté n’a jamais nié son intérêt pour l’esthétique pure mais a appris à  les combiner à  une analyse sociale et politique subtile. Diabaté, la référence Artiste plasticien depuis plus de 40 ans, Ismaà«l Diabaté fait partie des précurseurs de l’art contemporain au Mali. Amoureux du dessin depuis l’enfance, Diabaté optera pour l’INA o๠il étudiera les Arts plastiques pendant trois ans. Après sa formation, il enseigne au lycée. Ses sources d’inspiration sont liées au quotidien, à  la vie, aux ustensiles, à  la culture. Il précise « cela ne veut pas dire que je ne m’intéresse pas à  ce qui se fait ailleurs, C’’est juste que je refuse de faire de l’art conceptuel. Diabaté vivra pleinement de son art qu’au début des années 90. Il est désormais connu sur le plan international et expose beaucoup plus en Europe qu’au Mali, car, estime t-il, le public malien ne s’intéresse pas assez à  son travail. Il est l’auteur de la fameuse assiette Diabaté, une création originale, o๠la sauce par un procédé ingénieux, coule sur le riz, l’athiéké ou autre… On peut également citer les sculpteurs Amaiguéré Dolo et Sami Tera, les photographes Malick Sidibé ou Seydou Keita, des figures que l’on retrouve régulièrement dans les festivals ou aux Rencontres photographiques de Bamako et qui sont de véritables ambassadeurs de l’art contemporain malien. l’art contemporain au mali reste un terreau à  exploiter et n’a pas encore dévoilé toutes ses facettes, avec de nombreux artistes dans l’ombre. Le Centre culturel français de Bamako, a l’honneur d’en promouvoir quelques uns, mais surtout, les artistes sont-ils assez soutenus par les autorités culturelles ? Outre la musique, le public malien commence timidement à  s’y s’intéresser, et les expositions se multiplient à  Bamako, notamment au Musée National et il y a bien quelques collectionneurs comme l’Anthropologue malien Filifin Sacko pour acheter des œuvres aux artistes locaux ! Après vingt ans, en Ethiopie, il a posé ses valises à  Bamako pour vivre au milieu du patrimoine local. Ca commence par là  !