« Malikura » : Kadiatou Traoré, une voix du Mali en Amérique

Sociologue de formation, Nientao Kadiatou Traoré est l’une des voix féminines qui porte les couleurs du Mali en Amérique. C’’est en 2006 qu’elle débarque aux Etats-Unis avec sa famille : « A l’époque, J’ai suivi mon mari qui travaillait pour l’USAID, et au bout d’un certain temps, nous avons eu la citoyenneté américaine. C’’est un long processus qui prend à  peu près cinq ans », explique cette journaliste sur le tard. Si elle avoue avoir eu du mal à  s’intégrer au début après avoir tout abandonné au Mali, Kadiatou Traoré affirme être une battante. Le premier challenge, C’’était la barrière linguistique, confesse t’elle. « Je ne comprenais pas l’anglais et lorsque tu ne sais pas t’exprimer, il est difficile de trouver un travail ici ». Kadiatou est donc retournée sur les bancs de l’université pour apprendre la langue de Shakespeare pendant trois longues années. Quelques années plus tard, un master « Business et Administration » en poche, Kadiatou Traoré, s’intègre peu à  peu à  la société américaine et gravit les échelons du monde du travail. Si l’Amérique est ce pays o๠tous les rêves sont possibles, Kadiatou devient la candidate idéale pour animer l’émission « Malikura », un programme initié en 2012 par le gouvernement américain, sur les ondes de la Voix de l’Amérique. « En réponse à  la crise du Nord qui a éclaté au Mali, et face à  l’effritement des règles de bonne gouvernance au Mali suite au coup d’Etat, l’administration américaine a décidé de lancer ce programme pour aider le Mali à  changer son image». l’émission « Malikura », comme son nom l’indique, vise surtout à  aider les Maliens à  retrouver un certain optimisme et à  sensibiliser les jeunes sur les challenges du futur, en renforçant les valeurs démocratiques », explique la journaliste. Laisse moi te conter mon Mali Bien avant le sommet US-Afrique qui vient de se tenir du 4 au 6 Août dans la capitale politique américaine, Kadiatou Traoré a aussi accompagné les six jeunes leaders maliens du programme YALI (Young African Leaders Initiative) invités par le président Obama à  Washington. Pour celle qui vit depuis près de dix ans au pays de l’Oncle Sam, C’’est à  travers l’élection présidentielle de 2012 que les Américains se sont véritablement intéressés au Mali. « Il y a eu un débat mémorable entre les deux candidats (Obama- Romney) et près de 99% des citoyens américains étaient branchés sur leurs écrans ce jour là . Après que l’un des candidats ait promis, s’il était élu, d’aider notre pays à  lutter contre le terrorisme, le nom du Mali était sur toutes les lèvres, raconte Kadiatou, les yeux brillants. Le lendemain de ce débat historique, beaucoup nous ont appelé, ont voulu savoir ce qui se passait au Mali et C’’est ainsi qu’un dialogue s’est installé entre les Maliens et les Américains ». Dès lors, le programme Malikura gagne en audience, écouté par des citoyens avides d’en savoir plus sur ce grand pays du Sahel qu’est le Mali, et bien loin du cliché de «Timbuktu» Et si les Américains désapprouvent le terrorisme depuis les attentats du 11 septembre 2001, sur le plan de la politique étrangère, on reproche à  l’administration Obama de ne pas trop s’impliquer dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Pour Kadiatou, il y a encore une emprise des anciens colonisateurs sur l’Afrique sub-saharienne, du coup les Américains laissent la prérogative aux européens, en particulier la France au Nord du Mali, et se contentent d’appuyer la lutte derrière. Pour Kadiatou, « il est temps que les pays africains s’assument afin de faire face ensemble aux menaces sécuritaires. Les leaders africains doivent également comprendre qu’une capacité extraordinaire existe à  travers les ressources humaines, les femmes et cette jeunesse pleine d’énergie. Il ne leur reste plus qu’à  trouver la bonne stratégie pour faire travailler ces populations là  ». Pour conclure, la journaliste de la voix de l’Amérique, jette un regard lucide sur le continent. Car Kadiatou Traoré est convaincue que personne ne viendra développer l’Afrique à  notre place. Tout selon elle, se joue sur la compétitivité des jeunes africains. « On a nous beaucoup trop aidé et pendant longtemps. Le vrai défi aujourd’hui est de valoriser nos ressources humaines ». ****

Kadiatou Konaré :  » La littérature malienne ne me fait plus rêver « 

L’amour du livre Après la création de la maison d’édition : «Â Cauris » en 2001, celle qu’on appelle affectueusement «Â Atou », se bat sur tous les fronts pour rehausser l’image de la femme. C’’est ainsi qu’entourée de femmes convaincues et pleinement engagées pour la cause féminine, elle a réussi à  monter une association dénommée «Â Image au Féminin ». Très courtoise et affable, Atou est ouverte et reste très à  l’aise avec tous ceux qui l’approchent (même pour la toute première fois), et n’hésitent pas à  partager ses convictions avec eux. Elle reconnaà®t être née dans le livre, d’o๠son choix d’être éditrice. Né d’un père homme politique et d’une mère historienne, Kadiatou Konaré a choisi d’emboà®ter le pas aux siens en se positionnant autrement. Aujourd’hui, elle est l’une des grandes figures du monde des lettres Maliens. Du livre à  l’édition Son idée de créer une maison d’édition n‘était pas évidente au départ. La création de Cauris édition est le fruit d’un hasard, raconte t-elle. «Â Je suis tombéE dans l’édition, mais bien avant, je suis tombée dans le livre et j’ai grandi avec. Et tout mon parcours, qu’il soit familial ou scolaire, m’a orienté vers le livre ». Sa toute première œuvre éditée est intitulée : «Â le Mali de talents ». «Â Il y a une petite dizaine d’année, J’ai eu l’idée de faire un livre sur le Mali, mon pays. Au moment ou J’avais beaucoup avancé dans la concrétisation du projet, mon éditeur (un français) m’a opposé son incapacité de parachever le travail. Alors, l’idée m’est toute suite venue de créer moi-même une structure pour le faire. Voilà  comment est né Cauris édition ». Je ne pouvais pas abandonner le projet, vu que J’avais énormément avancé dans sa matérialisation, après avoir engagé une équipe sur le terrain… ». Ainsi, juste après la publication du «Â Mali de talents » en 2001, l’éditrice s’est convaincue de la nécessité de pérenniser la structure, en la mettant au service des œuvres littéraires tous azimut. «Â Editer signifiait pour moi de rendre hommage au livre ». Autant Kadiatou Konaré exerce dans le livre, autant elle fait une large ouverture sur tout ce qui a trait à  l’identité de l’Afrique et du monde. « Dans tout ce que Cauris Edition a eu à  publier, très peu de place était accordé à  la littérature ». l’édition est une chaà®ne de métiers, dans laquelle se côtoient écrivains (ou auteurs), dessinateurs, imprimeurs, photographes, ceux qui font les maquettes, les agents commerciaux… Tout cela reste, bien sur, coordonné par un chef d’orchestre, l’éditeur. Créer des liens entre l’Afrique et le monde, à  travers Cauris Editions l’une des missions que s’est assignée « Cauris édition », C’’est d’être un pont entre le Mali et l’extérieur, entre l’Afrique et le reste du monde. « Cauris édition se veut une passerelle ». En plus de la littérature, Cauris Edition s’investit dans la publication d’autres d’œuvres : les essais, les guides touristiques, bref, tout ce qui contribue à  parler du continent africain ». Par ailleurs, elle reconnaà®t que le Mali est un grand pays de lettres Pour avoir produit des sommités dans le domaine tels que Seydou Badian, Amadou Ampathé Bah, Massa Makan Diabaté… Pour Kadiatou Dramé Cauris Edition se veut un instrument au service de tous. l’éditrice pense qu’on ne peut pas parler d’œuvres littéraires sans prendre en compte les besoins du lectorat.  » Le lectorat malien est entrain de rompre avec les œuvres littéraires, pour des raisons dues certainement au manque de créativité en la matière  » Manque de créativité littéraire Se démarquant de toute forme de jugement, Kadiatou Konaré pose un constat amer sur la littérature de son pays : « La littérature de mon pays ne me fait pas tant rêver. J’en suis frustrée. Car, en réalité, je voudrais autre chose en terme de créativité, d’innovation ». Elle reconnait cependant qu’il est important pour les maliens de lire ce qui est produit à  l’échelle nationale, car C’’est en cela que s’affirme l’identité culturelle. Quant aux frustrations, Kadiatou Konaré dira qu’elles sont d’abord intellectuelles, ensuite matérielles et financières. « Faire des livres, demande énormément de moyens financiers, et malheureusement, C’’est un métier ou la rentabilité n’est pas aussi réelle et évidente. Cauris et le cinquantenaire La structure entend marquer le Cinquantenaire du Mali par des écrits. « Nous projetons de consigner dans des ouvrages les faits marquants du Mali indépendant. Cela me semble urgent. Car l’on ne saurait passer sous silence les 50 ans du Mali ». Des projets de livre sur les grands témoins du cinquantenaire, un dictionnaire du cinquantenaire, les hommes et les femmes qui ont fait le cinquantenaire, des bibliographies sur les pères de l’indépendance, à  savoir Modibo Keita, Mamadou Konaté…sont entre autre projets de « Cauris Editions ». Une maison à  soutenir.