Macron reçoit le président rwandais Kagamé à l’Élysée

Le chef de l’État rwandais est à Paris ce mercredi 23 mai pour une visite de deux jours en France. Une première depuis 2015. Francophonie, Tech entre autres au menu de la visite.

Les deux chefs d’États sont apparus en début d’après-midi devant la presse à l’issue de leur rencontre où ils ont souhaité une reprise progressive de la coopération bilatérale entre les deux pays.

En marge de la rencontre, Paul Kagame a également pris part à un déjeuner avec un panel d’acteurs du numérique dont le patron de Facebook, Mark Zuckerberg et plusieurs hommes d’affaires.

 Le salon « VivaTech », rendez-vous international du numérique  qui s’ouvre jeudi 24 mai dans la capitale française  sera tourné cette année vers l’Afrique avec plusieurs start-up du continent à l’honneur, venant notamment de l’Afrique du sud, du Maroc, du Nigéria, du Rwanda, du Sénégal et de la Tunisie.

Mais ce ne sont pas seulement les questions d’innovation technologiques  qui ont motivé  le déplacement  de Paul Kagame. D’autres dossiers relatifs notamment aux réformes sur le financement des opérations de maintien de la paix et sur l’Union africaine intéressent l’Elysée, le président rwandais étant président en charge de l’UA depuis janvier dernier.

L’éventuelle candidature de Louise Mushikiwabo, la ministre rwandaise des Affaires Etrangères, à la tête de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) a été aussi un autre sujet abordé par les deux présidents. Une candidature très bien perçue par l’Elysée et dont l’objectif est de faire revenir le Rwanda dans la sphère d’influence française. « Elle a toute les compétences requises pour diriger cette institution qu’est l’OIF » a indiqué Emmanuel Macron. L’élection aura  lieu lors du 17e sommet de l’organisation à Erevan les 11 et 12 octobre prochain.

Même si le président français estime que la réouverture de l’ambassade de France à Kigali n’est pas encore à l’ordre du jour, il faut néanmoins souligner un début de décrispation des relations bilatérales entre  les deux pays longtemps envenimées par le génocide de 1994. Signe fort, Macron a annoncé sa présence au prochain sommet de l’Union Africaine début juillet à Nouakchott sous la présidence de Paul Kagame.

Amine Idriss Adoum/ UA : « Sans l’UA, l’Afrique serait moins stable qu’elle ne l’est aujourd’hui »

A Addis-Abeba, la transition s’effectue au pas de charge. L’équipe Zuma a jusqu’au 14 mars pour céder ses bureaux à l’équipe Faki Mahamat, président élu de la Commission de l’UA qui prendra fonction le 15 mars. En attendant cette échéance, nous nous sommes intéressés au fonctionnement de cette grande maison qu’est le siège de l’UA. Interview de Amine Idriss Adoum, Directeur de l’administration et de la Gestion des Ressources humaines.

Votre département est la cheville ouvrière de l’instance continentale. Comment fonctionne-t-il ?

La direction de l’administration a cinq sous-directions qui sont les ressources humaines, les marchés publiques, les systèmes d’information et l’informatique, la sécurité de l’Union et l’administration générale elle-même. Nous sommes au centre du fonctionnement : nous recrutons, nous payons, nous achetons et contractons les services, nous mettons en œuvre les opérations dont les décisions sont prises au niveau des politiques. Nous sommes au début et à la fin de toutes les transactions administratives.

Quel est son effectif ?

Cela dépend des sous-directions: les ressources humaines, ils sont une trentaine, les  systèmes d’information une vingtaine, l’administration centrale elle-même une vingtaine de personnes, les achats et marchés publics également. A la sécurité, il y a une centaine de personnes. Maintenant il y a une centaine de personnel (chauffeurs, etc.) qui nous fait arriver à environ 300 et 400 fonctionnaires cadres mais aussi et surtout fonctionnaires de base. Nous avons un ratio de contrats locaux d’environ 30% de contrats locaux ici en Ethiopie.

On critique beaucoup l’UA, certains l qualifie de gros machin qui n’apporte pas grand-chose dans la vie des citoyens. Vu de l’intérieur, le point de vue est certainement différent ?

L’Union africaine fait beaucoup de chose pour le continent. Je vais prendre l’exemple de la lutte contre la maladie à virus Ebola. Nous avons réagi avec un tout petit peu de retard et avons été extrêmement critiqué pour cela. Il se trouve que dès que nous avons commencé à déployer nos opérations, nous étions la seule organisation à déployer plus de 1000 membres du personnel médical : médecins, infirmiers, personnel de support au Libéria, en Sierra Leone et en Guinée Conakry. Nous avons mobilisé des ressources financières pour ces opérations. Aucune des personnes que nous avons déployées n’a été contaminée sur place, parce qu’avant de recruter ces volontaires, il y a une procédure rigoureuse de sélection et de formation avant d’aller sur le terrain. Notre gros problème est en fait un problème de communication.

Si vous regardez au niveau des grands programmes et projets de développement au niveau continental, la plupart des projets d’infrastructures sont faits sur la base d’un plan directeur qui a été défini par la commission de l’Union africaine et adopté par les chefs d’Etat. C’est la même chose en termes de développement agricole, des sciences et techniques. Nous sommes une institution politique, nôtre rôle est de définir des plans et les faire adopter. Notre rôle n’est pas de faire des actions sur le terrain comme une ONG, nous ne sommes pas qualifiés pour cela, nous n’en avons pas les compétences techniques. En revanche, nous sommes très bien outillés pour créer des plans au niveau continental et surtout pousser les Etats à les mettre en œuvre. Là où nous sommes aussi très efficaces, mais ce n’est pas très connu, c’est sur les opérations de « paix et sécurité ». La Somalie est plus ou moins stabilisée aujourd’hui grâce à l’Union africaine, nous y avons 22000 soldats sur place. Nous avons également aidé les Etats membres à lancer les opérations contre Boko Haram. La première opération contre le terrorisme au Mali a été lancée par l’UA, c’est la MISAHEL, avant l’arrivée de la MINUSMA. Nous avons fait la même chose en Centrafrique, en Ouganda où nous avons réussi à réduire de façon visible l’impact négatif de l’Armée de Libération de Seigneur (LRA). Nous faisons énormément dans ce domaine et je peux vous assurer que n’eut été la présence de l’UA, l’Afrique serait moins stable qu’elle ne l’est aujourd‘hui.

Ce département est pourtant critiqué pour la lenteur du processus de mise en œuvre de la Force africaine ?

La Force africaine en attente existe bel et bien. Il y a une base logistique qui est en train d’être mise sur pied à Douala au Cameroun. Il ne s’agit évidemment pas d’avoir des soldats qui s’assoient et qui attendent ! C’est en fait un mécanisme de mobilisation qui doit être enclenché quand il y a un problème. Les entrainements sont faits, vous avez dû entendre parler d’Amani 1 et 2, ce sont des manœuvres militaires conjointes qui sont faites dans le cadre de la mise ne œuvre de cette force.

L’actualité de l’UA, c’est la réforme de cette institution. Le président Kagamé a présenté un rapport qui a été adopté par les chefs d’Etat lors du dernier sommet. Est-ce que vous voyez une mise en œuvre rapide des ses recommandations ? Qu’est ce que cela va changer pour le département que vous dirigez ?

Le rapport Kagamé demande aux Etats membres de l’UA de réorienter le mandat de l’institution qui est assez large et très divers. Il demande très clairement de se focaliser sur les questions de paix et sécurité et sur les questions de représentation du continent au niveau mondial. Il demande aussi de réorienter le mandat du NEPAD pour en faire une agence de développement, de mise en œuvre des décisions des chefs d’Etat sur les questions des infrastructures, du développement agricole, d’industrialisation. Cette décision sera mise en œuvre très bientôt. Cela va évidemment avoir un impact sur la manière dont nous travaillons. Ça apporte de la clarté et de la souplesse dans notre travail, parce que quand il s’agit de mettre en œuvre des actions de développement, il n’y a pas besoin de toutes les négociations que nous devons faire quand il s’agit de mettre en œuvre une action politique ou diplomatique. Ceci permettra aussi d’attirer de meilleurs talents au sein de l’UA. Aujourd’hui nous ne sommes pas très attractifs, spécialement pour les meilleurs qui préfèrent le privé, quand bien même nos rémunérations pourraient être plus intéressantes. Le fait de reconcentrer la Commission et d’apporter de la clarté fera la différence et nous rendra plus « sexy ».

Il y a des efforts qui ont été faits sous le mandat Zuma. Ils seront donc poursuivis ?

Nous avons commencé la réforme il y a en fait bien longtemps et ces deux dernières années, nous l’avons accélérée. A l’interne, en modernisant notre façon de travailler, nos outils, nos mécanismes de planification. Vis-à-vis de l’extérieur, en essayant d’aller vers le numérique, en nous installant durablement sur les réseaux sociaux, en parlant et en écoutant davantage les gens.

Que retiendrez-vous du passage de Mme Zuma à la tête de la Commission ?

Trois choses. La première, c’est l’Agenda 2063. C’est la première fois que l’Afrique réfléchit et se projette sur 50 ans. C’est extrêmement important. La deuxième c’est son engagement extraordinaire sur les questions de genre. Avec elle, nous sommes à un moment arrivés à une égalité parfaite sur les postes de direction  entre les hommes et les femmes. Certaines collègues ont démissionné, ce qui a faussé un peu les chiffres, mais on devrait pouvoir équilibrer à nouveau d’ici l’année prochaine. Mme Zuma a réussi à convaincre le leadership de cette organisation que les femmes ont tout autant le droit que les hommes d’y occuper des postes de responsabilité. La troisième chose est plus personnelle. Mme Zuma est une personne avec un très fort caractère et qui écoute, avec des standards éthiques incroyablement élevés. C’est incroyable ce que cette femme a fait. Elle n’accepte aucune compromission et cela m’a marqué.

Qu’attendez-vous de son successeur ?

Nous attendons qu’il ait un leadership tout aussi fort, sinon plus, pour pouvoir porter la voix du continent. Qu’il soit irréprochable sur le plan éthique et je pense que le ministre Moussa Faki est connu pour cela. Nous attendons aussi qu’il soit un homme d’action qui soit pro-actif et qu’il continue la promotion des femmes et des jeunes au sen de cette organisation.

Conseil de sécurité de l’ONU: Élection controversée du Rwanda

Le Rwanda a été élu membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations unies lors de sa dernière session ordinaire. Le pays est élu en même temps que l’Argentine, l’Australie, la République de Corée et le Luxembourg pour un mandat de deux ans, qui débutera à  compter du 1er janvier 2013 jusqu’en 2014. Ces membres élus remplaceront la Colombie, l’Allemagne, l’Inde, le Portugal et l’Afrique du Sud, dont le mandat expirera le 31 décembre 2012. Le Rwanda est fortement soupçonné d’alimenter la rébellion à  l’est de la RDC Une élection qui survient dans des circonstances o๠un rapport dénonce le rôle du pays dans le soutien de la rébellion, la fourniture d’armes et munitions aux rebelles actifs dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et à  l’origine de graves violations des droits de l’homme. Lequel rapport a été produit par un groupe d’experts mandatés par les Nations unies. Le texte confidentiel, dévoilé par plusieurs médias révèle que Kigali continue de violer l’embargo sur les armes en fournissant un soutien militaire direct aux rebelles du M23 et en facilitant leur recrutement. Malgré les tentatives de défense du Rwanda et surtout de la ministre des Affaires étrangères rwandaise, Louise Mushikiwabo, la communauté internationale se mobilise et a commencé à  suspendre son aide en faveur du pays de Paul Kagamé, dont le budget dépend à  40% de l’aide extérieure. Formée au début de 2012, le M23 a pris le contrôle de plusieurs districts dans le Nord-Kivu, le long de la frontière rwandaise. Selon Thierry Vircoulon du groupe de réflexion International Crisis Group (ICG), C’’est une nouvelle forme des groupes qui défendent la minorité rwandaphone vivant dans cette partie de la RDC depuis le génocide de 1994. Un bon nombre de ses recrues est constitué d’enfants transformés en enfants soldats.