Libye: Haftar et Sarraj s’engagent à un cessez-le-feu dans un projet de déclaration

Les deux principaux rivaux dans la crise libyenne, le chef du gouvernement de Tripoli Fayez al-Sarraj et l’homme fort de l’est Khalifa Haftar, s’engagent à un cessez-le-feu et à l’organisation d’élections dès que possible, selon un projet de déclaration diffusé mardi par la présidence française.

Ce « document de travail » a été diffusé avant la rencontre entre MM. Sarraj et Haftar prévue dans l’après-midi à la Celle-Saint-Cloud, en région parisienne, sous les auspices du président français Emmanuel Macron.

Selon des sources diplomatiques, les deux frères ennemis se sont accordés sur une déclaration, mais le texte diffusé n’est pas la version définitive, même s’il reprend les principaux points évoqués depuis quelques jours.

Le projet de déclaration, en dix points, réaffirme que seule une solution politique permettra de sortir de la crise libyenne, et réitère la validité des accords de Skhirat, signés en 2015 sous l’égide de l’ONU.

Le cessez-le-feu ne s’appliquerait pas à la lutte antiterroriste, précise le texte, qui appelle également à la démobilisation des combattants des milices et à la constitution d’une armée libyenne régulière.

Il insiste aussi sur la construction d’un Etat de droit en Libye, et au respect des droits de l’Homme.

La Libye est plongée dans le chaos depuis la chute du colonel Kadhafi fin 2011, et plusieurs autorités rivales ainsi que des myriades de milices se disputent le contrôle du territoire.

Fayez al-Sarraj, chef du gouvernement d’entente nationale (GNA), est reconnu par la communauté internationale mais peine à asseoir son autorité depuis plus d’un an. Le maréchal Khalifa Haftar, chef de l’autoproclamée armée nationale libyenne, répond aux autorités de l’est, qui ne reconnaissent pas la légitimité de Sarraj, et ses forces accumulent les gains militaires sur le terrain.

Le maréchal Haftar annonce sa victoire face aux djihadistes Benghazi

Le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’est libyen, a annoncé mercredi soir la «libération totale» de la ville de Benghazi des djihadistes , après plus de trois ans de combats meurtriers.

«Après une lutte continue contre le terrorisme et ses agents, qui a duré plus de trois ans (…) nous vous annonçons la libération de Benghazi du terrorisme. Une libération totale…», a déclaré le maréchal Haftar dans un discours à la télévision.

La Libye est livrée au chaos depuis la chute de l’ex-dictateur Mouammar Kadhafi en 2011. Au cours du printemps 2014, le maréchal Haftar avait lancé une opération qu’il a appelée «Dignité» pour reprendre la ville de Benghazi, bastion de la révolution libyenne de 2011 qui était alors tombée aux mains des djihadistes .

Parmi les groupes armés actifs dans cette deuxième ville de Libye, figuraient le Conseil de la Choura des révolutionnaires de Benghazi, une coalition de milices islamistes comprenant notamment des membres présumés de l’organisation Etat islamique (EI) et d’Ansar Asharia, un groupe proche d’Al-Qaïda qui a annoncé sa dissolution fin mai.

 Hommage «aux caravanes de martyrs»

Dans son discours, le maréchal Haftar a rendu hommage «aux caravanes de martyrs» tués dans les combats contre les djihadistes , ajoutant que Benghazi entrait aujourd’hui «dans une nouvelle ère de paix, de sécurité, de réconciliation (…) et de reconstruction».

Les forces loyales à Haftar avaient annoncé plus tôt dans la journée une importante percée dans les derniers bastions des djihadistes à Benghazi.

L’armée nationale libyenne (ANL) auto-proclamée, par Haftar, avait ainsi annoncé la fin des opérations militaires dans le quartier de Soug al-Hout, ajoutant avoir avancé dans le quartier central d’al-Sabri, selon le général Abdessalam al-Hassi, chef de la cellule des opérations.

Abdessalam al-Hassi avait précisé à l’AFP que les derniers djihadistes étaient cernés dans un petit périmètre du quartier d’al-Sabri et faisaient l’objet d’attaques sur trois fronts, sous une couverture des forces aériennes. Il avait ajouté que l’annonce de la «libération» totale de Benghazi, deuxième ville du pays située à 1000 km à l’est de Tripoli, était imminente. Le maréchal Haftar a annoncé plus tard la «libération totale» de la ville.

Deux autorités se disputent le pouvoir en Libye : un gouvernement d’union nationale (GNA) basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, et des autorités non reconnues basées dans l’est du pays, auxquelles est lié le maréchal Haftar.

Interlocuteur indispensable

Haftar, un ancien dignitaire du régime Kadhafi qui a aussi vécu aux Etats-Unis, est accusé par ses rivaux, en particulier les puissantes milices de Misrata (ouest), de vouloir instaurer un régime militaire en Libye.

Ses ennemis mettent aussi en doute ses capacités militaires. L’ANL a perdu beaucoup d’hommes et a eu du mal à en découdre avec les groupes djihadistes dans l’est, pourtant très affaiblis.

Le maréchal a pu compter sur le soutien de l’Egypte voisine ainsi que des Emirats arabes unis, avant de se rapprocher de la Russie début 2017.

Alors qu’aucun poste ne lui a été attribué dans l’accord politique interlibyen conclu fin 2015 et qui avait abouti à la formation du GNA, le maréchal Haftar s’est imposé comme un interlocuteur indispensable, notamment après s’être emparé de quatre terminaux pétroliers dans l’est, d’où s’exporte la majorité du pétrole libyen.

L’ANL n’a pas communiqué un bilan d’éventuelles victimes durant les cinq derniers jours. Le dernier bilan connu faisait état de 48 soldats tués dans les combats au cours du mois de juin dans les combats, selon des sources médicales à Benghazi.

Libye : Le retour des Kadhafi ?

Saif al-Islam Kadhafi, fils de l’ex-raïs libyen, a été libéré par un groupe armé dans l’ouest de la Libye, où il était détenu depuis 2011. Le fils préféré de Mouammar Kadhafi pourrait devenir un acteur non négligeable pour l’avenir de son pays, en pleine dislocation depuis l’insurrection de 2011.

Saif al-Islam Kadhafi, détenu depuis 6 ans dans la ville de Zintan par la milice rebelle Abubakr al Sadiq, en conflit ouvert avec le gouvernement de Tripoli, a été libéré dimanche 11 juin, en vertu d’une loi d’amnistie adoptée par un parlement basé dans l’est de la Libye. L’annonce a été faite par son avocat, Khaled al-Zaidi. Le fils du guide libyen a ensuite été emmené vers une autre ville libyenne dont le nom est tenu secret pour des raisons de sécurité. Libéré, Saif al-Islam n’en est pas moins toujours recherché par les autorités judiciaires de Tripoli, qui l’ont condamné à mort par contumace le 28 juillet 2015, lors d’un procès dénoncé par l’ONU. Son avocat a pourtant ajouté lors de l’annonce de sa libération, qu’il pourrait « jouer un rôle majeur dans la trêve en Libye ». Une déclaration pour le moins mystérieuse, alors que la Libye est en proie à l’anarchie et aux guerres intestines, sous le contrôle variable d’un ensemble complexe de groupes armés et de gouvernements en compétition pour contrôler le pays et ses ressources. Avant l’insurrection en Libye, Saif al-Islam, âgé de 44 ans, était le fils le plus en vue du colonel Kadhafi et a souvent été présenté comme un successeur réformiste.

Nostalgie Les fidèles de Kadhafi en dehors de la Libye ainsi que certains dans l’est du pays, où le maréchal autoproclamé, Khalifa Haftar, s’est rendu maître de toute la Cyrénaïque et de ses raffineries de pétrole, ont poussé à la libération du fils du défunt dictateur libyen. Une éventuelle alliance avec le général Haftar pourrait être envisageable, selon certains observateurs, avec le soutien de l’Égypte, elle-même supplétive des Américains dans ce dossier. D’autres pensent que le fils Kadhafi pourrait aussi se rapprocher du gouvernement de Fayez El-Sarraj à Tripoli. Quoi qu’il en soit, le fait qu’il soit libre, connaisseur de tous les secrets du régime avec les pays occidentaux, et qu’il porte le nom du dernier raïs, font plus que jamais de Saif al-Islam un ennemi à abattre mais aussi un allié convoité. Le retour d’un Kadhafi au pouvoir est désormais une possibilité à ne pas écarter.

 

Libye : après la défaite de Daesh à Syrte, des combats entre acteurs militaro-politiques

En Libye, alors que la défaite infligée à Daesh à Syrte concentre toutes les attentions, les combats entre deux camps politico-militaires à côté du « croissant pétrolier » sont venus rappeler la nécessité d’un compromis entre les différents protagonistes libyens.

Pour nombre d’observateurs, il faudrait un miracle pour remettre de l’ordre dans la situation chaotique qui prévaut en Libye, depuis la chute de Muhammar Kadhafi en 2011. En dépit du soutien de la Communauté internationale, le gouvernement d’union nationale de Faïez el-Sarraj a compris que sa marge de manœuvre est réduite.

Dans la région, ni Alger ni Tunis ne voulait entendre parler d’intervention militaire, estimant qu’il faut d’abord trouver un compromis entre les acteurs politico-militaires libyens engagés dans une interminable bataille pour le pouvoir. Hier mercredi, les affrontements qui ont eu lieu en lisière occidentale du « croissant pétrolier », ont montré à quel point il est difficile d’envisager une sortie du tunnel. Des combats qui ont mis aux prises deux camps politico-militaires : d’un côté des milices de l’est favorables au gouvernement d’El Sarraj, de l’autre l’armée nationale libyenne dirigée par le désormais Maréchal, Khalifa Haftar, bras armé du Parlement basé à Tobrouk, opposé au gouvernement d’union soutenu par les chancelleries occidentales. Deux camps qui symbolisent la partition du pays : la Tripolitaine à l’ouest et la Cyrénaïque à l’est.

Selon des sources officielles, les milices pro-gouvernementales ont attaqué la ville de Ben Jawad, où passe la moitié du brut libyen exporté, mais ont été repoussés par les forces de Khalifa Haftar qui en ont le contrôle depuis septembre dernier, après en avoir chassé une milice alliée au gouvernement d’El Sarraj. Dans son communiqué d’hier, le gouvernement d’El Sarraj a nié une quelconque implication dans les combats.

Ces événements interviennent au moment où Daesh a été mis en déroute à Syrte, ville qu’elle contrôle depuis un an. Même si pour beaucoup d’observateurs, il est difficile de dire que c’est la fin du groupe extrémiste dont des leaders et des combattants se sont retranchés dans le sud du pays.