Tabaski : L’agenda culturel 2019

Elle aura été un peu longue que prévu, cette année scolaire. L’angoisse des examens passée, place aux vacances pour de nombreux élèves. Le hasard du calendrier fait que les dernières classes ferment leurs portes à quelques jours de la fête de Tabaski.

À l’aune de la célébration, de nombreux événements sont programmés. L’un des plus attendus, du moins celui disposant d’un important arsenal de communication, est celui de Sidiki Diabaté. Le Prince de la kora a fait carton plein ce 12 août 2019 lors de son concert au Stade du 26 mars de Bamako, sous le signe de la « Paix et de la réconciliation ». Un concert où il a honoré et célébré DJ Arafat. Un hommage poignant rendu au Yorobo d’Afrique qui a perdu la vie dans un accident de circulation ce 12 août 2019 à Abidjan en Côte d’Ivoire. L’artiste a assuré lors d’un point de presse en juin que le « concert sera pour le Mali entier ». « C’est un défi que nous allons relever pour montrer au monde qu’il est toujours possible au Mali de se rassembler », a-t-il ajouté. Il devrait être en compagnie de nombreux artistes, dont les noms n’ont pour l’heure pas encore été dévoilés. D’un stade à un autre, le rappeur Young Pô et ses « Tchalé » investiront le stade Modibo Keita, également le lendemain de la Tabaski, pour un show inédit pour l’artiste. La capitale ne sera pas la seule concernée par les réjouissances culturelles. Au Stade Amary Daou de Ségou, le rappeur Gaspi, qui se fait rare depuis quelque temps, promet « d’enflammer » la cité des Balanzans. Trois jours plus tard et quelques kilomètres plus loin, le très célèbre groupe de rap Calibre 27 sera au Stade Barema Bocoum de Mopti pour la « Nuit de la paix ». Dans une région très éprouvée, le show de ces jeunes, dont la dernière vidéo Youtube a atteint le million de vues, est attendu avec beaucoup d’enthousiasme. Près d’une semaine après la fête, mais toujours dans son cadre, la diva Oumou Sangaré sera en prestation au Palais de la Culture pour la sixième édition du « Carrefour Tabaski ».

Détendez vos muscles

Les zygomatiques en l’occurrence. Les musiciens ne sont pas les seuls à vous donner rendez-vous, les humoristes seront aussi de la fête. Confrontation au sommet au Magic Cinéma le lendemain de la Tabaski entre Petit Bandit et Tou Gâté, deux membres de la nouvelle vague. Duo plus inédit, l’association entre la légende de l’humour malien Guimba et son « homonyme » Petit Guimba. Un Guimba show à mourir de rire, à n’en pas douter, le jour de la Tabaski. L’actuelle grande star de la comédie malienne Kanté, sacré meilleur dans son domaine aux Mali Awards, sera le même jour au Palais de la Culture.

 

Instruments : Traditionnel ou moderne ?

Plutôt instruments traditionnels ou disc-jockey? Plutôt Salif Keita ou David Guetta ? Plutôt boite de nuit ou concert acoustique en plein air ? Les déclinaisons à la première interrogation sont nombreuses. On ne discute pas les goûts et les genres.

Certains sont indissociables d’un artiste. Toumani Diabaté sans sa kora serait sûrement une anomalie du décor. « La jeune génération n’est plus aussi sensible, la musique est dépouillée de son sens avec ces sonorités provenant de machines et qui te donnent envie d’une aspirine » assène Malick Kanté, sexagénaire. Se définissant comme une « fine oreille », il regrette le « virage » pris par certains jeunes artistes. Lamine Soumano, compositeur et arrangeur a lui fait son choix. Et pour lui, au final, seul le résultat compte. « On ne naît pas artiste, on le devient. La musique, c’est le sens, le message à véhiculer pour combattre ou encourager une pratique, et ce, d’une manière agréable à l’oreille » explique-t-il. Il regrette toutefois que la technologie ayant facilité l’accès à la musique, des jeunes enregistrent des « albums-corbeille ». Pas de quoi décourager pour autant les aspirants Avicii ou Dj Arafat. « La musique pour moi, c’est juste un plaisir, avec la nouvelle technologie, je fais des sons comme je veux », lance cash Sory Diakité surnommé RMAN. Plus modéré, Josié Dembélé estime que c’est l’environnement actuel qui l’oblige à faire avec le moderne.

Pourtant, certaines chansons ne sont agréablement audibles qu’avec les instruments traditionnels. Plusieurs artistes témoignent de leur attachement à ces derniers afin de sauvegarder les cultures ancestrales. « Les instruments traditionnels tels le senté, wara, dounouba, tamani ou encore le balafon sont pluridisciplinaires. Ils ont tous un sens », confie Mamou Sidibé. « Mes animations sont différentes de celles des autres, et le public suit » ajoute-t-elle. Cheicknè Sissoko, les considère comme un héritage qu’il doit ventiler partout sur le globe. « Avec mes tamas, je me vois comme un ambassadeur du Mali à travers le monde », nous apprend-il.

Mixer « Il est essentiel que les artistes s’adaptent aux nouvelles réalités et évoluent » plaide Lamine Soumano. Master Soumy a déjà pris les devants. C’est le mélange entre le moderne et le traditionnel qui fait de lui un rappeur authentique. «J’ai eu à visiter certains studios aux États Unis, qui ont beaucoup apprécié ma musique, parce qu’ils arrivent à entendre des sonorités qui n’existent pas chez eux », confie-t-il.

Concert : les Diabaté à la Kora

Issu d’une famille griotte mandingue et héritier de cette tradition, le petit prince de la kora Sidiki Diabaté rejoint l’univers de son père. Cette nouvelle ère avec Toumani marque le début d’une nouvelle carrière musicale. A travers ce duo, Sidiki et Toumani offrent au public un savant mélange de tradition et de modernité. Ils amènent le mélomane dans un nouveau monde musical. Cet album « familial » est un mélange de digital et les beats électroniques apportant un nouveau regard à  la kora. C’’est une véritable relecture instrumentale et acoustique à  quatre mains de morceaux délaissés, oubliés, joués sur des modes peu utilisés. Toumani Diabaté est l’un des maà®tres incontestés de la kora. Il produit une musique qui date depuis des siècles dans laquelle il réaffirme à  la fois cette noble histoire qui permet de relier un public contemporain à  une spiritualité inspirante. Il a été reconnu de par le monde à  travers de nombreuses collaborations avec des artistes de renommée et est détenteur de deux Grammy Awards. Le « petit prince de la kora », son fils Sidiki, est une star au Mali o๠il fait vibrer le C’œur des mélomanes. Il est l’une des valeurs sûres de la musique malienne dont on peut dire aujourd’hui qu’il est une star. Une célébrité qu’il gère, du haut de ses 22 ans, avec humilité et en travaillant sans cesse à  s’améliorer. Avec son ami Iba One, il remplit sans effort les 20000 places du stade Modibo Keita à  Bamako tandis que ses clips passent en boucle sur les chaà®nes de télévision locales. Le petit prince de la kora qui a été doublement récompensé en 2010 a reçu le Hip Hop Awards du meilleur beat maker puis avec son groupe de hip hop GRR, il a remporté l’Awards du meilleur groupe de rap grâce à  sa composition musicale mêlant la musique traditionnelle à  la musique moderne. Malgré son succès au Mali, Sidiki reste un parfait inconnu à  l’international. Gageons que ce duo avec son père sera le petit coup de pouce qui lui ouvrira le marché musical international. RDV donc les 02 et 03 mai à  l’Institut Français de Bamako.

Bassékou Kouyaté et Ngoniba nominés aux Kora Awards

Originaire de Garana (à  60 km de Ségou), Bassékou Kouyaté fait partie des meilleures n’gonifôla (joueurs de l’instrument n’goni) de sa génération. De Ségou à  Bamako Il quitte son village pour rejoindre Ségou pendant les années, 1970. De là , il rejoindra la capitale Bamako oà¹, dans les années 80, il intègrera le ray band avec la griotte Naini Diabaté. A cette époque, les joueurs de n’goni n’étaient pratiquement pas connus du grand public puisque, jouant assis et derrière tous. Ils passaient presqu’inaperçus. Bassékou explique : « je trouvais injuste que les guitaristes soient privilégiés sur nous les n’gonifôlaw. Nous, nous étions toujours cachés derrière tout le monde (chanteurs et joueurs d’autres instruments). Je me suis dis qu’il était temps de changer cela et que le public nous voie jouer comme tous les autres artistes ». La magie du Ngoni C’’est ainsi qu’un soir en plein concert, Bassékou s’est levé et st venu au de la scène, son n’goni attaché à  sa hanche. Il commença alors à  jouer pour la première fois de cet instrument, d’une manière dont personne n’avait encore joué. Le jeune ségovien inscrira à  cet instant précis, son nom dans l’histoire de la musique malienne. Il faut préciser que le n’goni fait partie des instruments mythiques de l’histoire ancestrale du Mali (l’époque de Soundiata Keita). Cela paraissait donc révolutionnaire de voir un aussi jeune homme y jouer d’une manière dont personne n’avait encore osé jouer. Ce natif de Ségou âgé d’une quarantaine d’années, est le porte- flambeau de cet instrument traditionnel avec lequel, il a su marier une multitude de musiques d’autres horizons. Il a notamment joué aux côtés de Toumani Diabaté, Ali Farka Touré, Carlos Santana, Bonnie Raitt et d’autres. Plusieurs distinctions pour le bluesman ségovien Grâce à  l’excellente maitrise du n’goni et à  son art de bercer les oreilles les plus insensibles, le griot mandingue obtient de nombreuses distinctions : Deux BBC radio Awards pour la world music en 2008. Il a été primé pour le meilleur album de l’année 2008 avec ‘Ségu blue’ et été récompensé Meilleur artiste africain de l’année. Il a également été nominé avec son groupe, pour les catégories ‘Best African Act’. La même année, il décroche le Tamani d’or de la meilleure vidéo avec ‘n’goni fola’. Bassékou Kouyaté a été fait chevalier de l’ordre national du Mali en 2009. l’artiste a fortement contribué à  la promotion de cet instrument issu de notre riche patrimoine culturel. Il marrie les sonorités traditionnelles maliennes et américaines. En témoigne sa fabuleuse collaboration avec le célébrissime Taj Mahal. Bassékou nominé aux Kora Awards Bassékou Kouyaté et son groupe actuel N’goniba, ont inventés un n’goni basse aux notes plus graves que celle du n’goni traditionnel. l’artiste a rajouté des cordes à  l’instrument afin de multiplier la diversité harmonique du son. Son nouvel album intitulé  » I speak fula », est sorti le 30 septembre 2009. Il parle de la diversité culturelle du Mali, tout en prônant la tolérance entre les peuples. La chanson dont l’album porte le nom, parle des relations entre peulhs et bambaras. Bassékou Kouyaté est nominé pour l’édition 2010 des Kora Music Awards et qui doit se tenir à  Ouagadougou le 4 Avril.

Le retour de Toumani Diabaté sur scène à Bamako

La virtuosité du maà®tre de la Kora ne lasse jamais. Tant Toumani Diabaté a la maà®trise de son instrument. Tout est dans l’art, la pose subtile, la prestance sur scène de celui qui apprit à  jouer la Kora depuis l’âge de cinq ans et donna son premier concert à  13 ans. Egrenées avec amour, les notes de Toumani Diabaté, emplirent la salle de l’espace BlonBa de Bamako et touchèrent le coeur d’un public amoureux de musique authentique. Ave le Symmétric Orchestra, le show du BlonBa a duré plus de deux heures et brassé le vaste répertoire de la musique mandingue, comme sait si bien le faire Toumani Diabaté. Sur scène, se sont succédés de nombreux artistes, et les compagnons du griot, qui 7 fois, ont fait le tour de la planète, sur les plus grandes scènes, de New York à  Tokyo, en passant par Londres et Dublin… Il est des êtres exceptionnels, qui ont reçu en don la musique, sans doute pour soigner l’âme des autres. Toumani Diabaté fait partie de ceux là , à  l’instar de Salif Keita, d’Amadou et Mariam ou encore d’Ali Farka Touré, ambassadeurs internationaux de la musique Malienne à  travers le monde. Griot toujours Né d’une famille de griots exceptionnels, Toumani Diabaté est issu de la 71ème génération de joueurs de kora de sa famille. Le plus connu était son père, Sidiki Diabaté né en Gambie, joueur de kora d’une notoriété légendaire dans toute l’Afrique de l’Ouest(1922-1996). Le destin était donc tracé pour Toumani Diabaté, qui très vite a su dompter les notes de cet instrument légendaire, la Kora :  » « Je suis un garçon passionné, ouvert aux divers courants musicaux du monde et dont le rêve ultime reste l’internationalisation des belles sonorités mandingues. », affirme le Mozart de la Kora. Aujoud’hui, sur la planète, il est le meilleur de joueur de Kora et si aucun élève n’a encore dépassé le Maà®tre, il partage volontiers son art et transmet de génération en génération, les secrets de cet intrument virtuose… Le Symmetric Orchestra : entre transmission et innovation Le Symmetric Ochestra est un concept unique : c’est avant tout la reconstitution culturelle de l’Empire Mandingue. l’idée est de réunir différentes vedettes des pays d’Afrique de l’Ouest dans un projet musical o๠chacun puisse s’épanouir.  » L’idée du Symmetric Orchestra, je l’ai toujours eue en tête. l’un des principes de base du Symmetric Orchestra est la rencontre des générations. l’ancienne génération bénéficiait de son expérience de la musique et la nouvelle génération de sa passion effrénée pour la musique. », explique le Maà®tre. Un honneur donc pour des musiciens comme le sénégalais Moussa Niang, ou le Malien Mangala Camara, qui se sont joints à  l’aventure. Le Symmetric Orchestra est donc une rencontre de quinze stars de différentes générations qui sillonnent le monde en tournée, mais aussi la réunion de différents langages sur un même projet (bambara, wolof, malinké,…), C’’est aussi l’apport d’instruments et de musiques issus des pays voisins comme les sabars et le m’balax sénégalais. Ces artistes viennent bien sûr de plusieurs régions du Mali mais aussi de Guinée, du Sénégal, du Burkina Faso, de Côte d’ivoire. Si la musique est universelle, elle véhicule ainsi des valeurs d’Union, de partage et d’espoir autour de Toumani Diabaté, celui qui fédère :  » Je perçois le Symmetric Orchestra comme occupant une place entre l’Ensemble Instrumental National, l’orchestre national du Mali qui a été constitué afin de préserver notre musique traditionnelle, et les orchestres de danse de Guinée et du Mali, tels que le Rail Band et Bembeya Jazz qui ont été créés pour la moderniser ». Tournée ! tournée ! Le dernier opus de Toumani Diabaté en vente chez Mali K7, c’est « Mandé Variations ». à‚près le concert du Blonba, Toumani Diabaté repartira bien sur sur les scènes du Monde, mais il s’accorde une pause à  Bamako, en famille, le temps aussi de célébrer la fête de Tabaski avec les siens. D’ici, là , il accordera une interview à  JournalduMali.com