Bernard Kouchner à Bamako : Médecin après la mort ?

Ce matin, la salle d’audience de Koulouba était pleine de journalistes à  l’occasion de la rencontre entre ATT et Bernard Kouchner en visite au Mali. Rappelons que la venue de Bernard Kouchner fait suite à  la mise à  mort de l’otage Michel Germaneau, enlévé dans le nord du Mali. Même si l’atmosphère était quelque peu attristée par la nouvelle, la présence du diplomate français paraissait quelque peu incongrue et inopportune. Ce n’est pas la première fois que Paris et Bamako se concertent sur les questions d’otages. Cependant, une question est cruciale. Pourquoi à  chaque prise d’otage français sur le territoire malien, la France n’a t-elle pas systématiquement recours à  la capacité de négotiation des Maliens. Certe, le Mali a disposé de coudées franches dans la libération de l’ex otage français, Pierre Camatte, mais le cas de Michel Germaneau est différent avec l’opération militaire orchestrée sur le sol malien et sans l’aval des autorités. C’est pourquoi, diplomatie de circonstance, diront certains. Si rien n’a filtré de l’entretien que le président ATT a accordé à  Bernard Kouchner, à  sa sortie d’audience, le diplomate français a accordé une petite interview à  la presse. Il s’est dit consterné par la mort, de son compatriote Germaneau, qu’il a qualifié d’odieuse, avant de s’en remettre aux résolutions de la présente rencontre de l’Union Africaine à  Kampala en Ouganda.  » Je deplore notre échec dans le sauvetage de Michel Germaneau. Mais j’ose croire que l’Union africaine condamnera le plus fermement possible ces actes de barbarie qui sévissent depuis un certain dans le désert du Nord Sahara « . Les autorités maliennes ont, depuis un certain temps, affecté un état-major la frontière algéro-malienne composé de Maliens, d’Algériens, de Nigériens, de Mauritaniens) à  Tamanrasset (sud de l’algérie) ». Et Kouchner se dit tout de même confiant en cette troupe qui jouera, l’espère t-on, un rôle important dans la lutte contre les prises d’otage et le terrorisme. Kouchner a aussi déclaré, qu’ATT, lui a confié lors de leur tête à  tête que :  » pour que les opérations de lutte contre le terrorisme soient efficaces, il faut qu’elles soient coordonnées ».

Affaire Germaneau : la force, mieux que le dialogue ?

La voix du dialogue est-elle toujours la meilleure ? L’on se souvient qu’ATT déclarait lors de la libération de Pierre Camatte que c’était d’abord le dialogue, plutôt que le sang versé. Mais les choses sont-elles aussi simples ? Dans le cas présent, il s’agit d’une base d’Al Qaeda, visée par la France, aidée de la Mauritanie. Aucune certitude quant à  la présence de l’otage en ce lieu o๠siégeait une branche particulièrement violente d’Al Qaeda. Malgré tout, les deux pays ont opéré ce coup de force qui s’est soldé par la mort de six hommes du côté des islamistes. Si l’on a le droit de poursuivre des terroristes sur un sol étranger, la moindre des choses est de le faire dans les règles diplomatiques, ici foulées au pied. Il ne reste dès lors à  ATT, écarté de cette opération menée sur son territoire, qu’à  présenter ses condoléances comme il l’ a fait. Cette fois la crise diplomatique pourrait être de son initiative. Mais il ne le fera pas. A partir de là , le président malien risque encore une fois d’en prendre pour son grade… Et son image. Tout comme dans l’affaire Camatte. l’échec d’une opération Qu’est-ce qui a bien pu pousser des forces étrangères à  orchestrer un coup de force contre cette base d’Al Qaeda? l’otage français était sous ultimatum, justifie l’Elysée. «Â Nous devions tenter un coup », affirme t-on. Selon Nicolas Sarkozy, l’opération de jeudi s’inscrivait dans le cadre de la coopération entre la France et les pays du Sahel menacés par Al Qaà¯da. Une action dite préventive. Bien que le groupe islamiste qui détenait Michel Germaneau était dirigé par un certain Abdelhamid Abou Zeid, un homme décrit comme « violent et brutal ». C’’est en effet ce même groupe qui avait exécuté l’otage britannique Edwyn Dwyer en mai 2009, enlevé dans les mêmes conditions que Germaneau. Rien ne prouvait cependant la présence de l’otage sur cette base, et si les islamistes ont perdu des hommes, leur colère en a été décuplée, la violence entraà®nant la violence… Par ailleurs, une thèse affirme que l’otage serait décédé il y a quelques semaines, victime de mauvaises conditions de détention. Finalement, n’aurait-il été qu’un prétexte pour attaquer cette base repérée depuis longtemps par les services secrets français? La lumière reste à  faire sur ce point précis. Les leçons à  tirer La mort de l’otage français Michel Germaneau vient prouver que l’offensive militaire n’était peut-être pas la solution face aux « fous d’Aqmi », des hommes pour qui la mort est une gloire et un sacrifice nécessaire dans l’atteinte de leurs objectifs. Si l’opération militaire qui a eu lieu sur le territoire Malien prouve qu’ATT a été écarté dans cette affaire, elle montre la faiblesse d’un chef d’Etat qui n’a pas de prise sur le cours des évènements. Lutter contre la nébuleuse Al Qaeda, alors que les intérêts des pays concernés par la menace divergent et se concrétisent par des actes rapides, n’est pas chose facile. ATT doit désormais tirer les leçons de cette affaire pour affiner sa politique en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Restent les déclarations officielles, comme celle attendue, lors de l’audience accordée ce mardi à  Bernard Kouchner présent à  Bamako.

Mort de l’otage Michel Germaneau : Message de condoléances du président ATT

C’’est avec une grande tristesse et une profonde indignation que J’ai appris l’assassinat de votre compatriote, Michel GERMANEAU, par le groupe terroriste Al-Qaida au Maghreb Islamique, qui le détenait en otage. Cet acte ignoble et odieux démontre à  quel point ses ravisseurs ont du mépris pour la vie humaine. Le Mali, terre de dialogue et de tolérance, le condamne avec la plus grande fermeté. Le peuple du Mali, ses Institutions et Moi-même exprimons notre compassion et notre douloureuse sympathie à  la famille de Michel GERMANEAU, et lui adressons nos condoléances les plus attristées, ainsi qu’à  vous-même, au Gouvernement et à  l’ensemble de vos compatriotes. Le Mali, résolument engagé dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, rappelle une fois de plus la nécessité d’une coopération sous-régionale franche, entière et diligente. La politique sécuritaire à  mettre en œuvre doit accompagner et soutenir des actions de développement local pour le bien-être des populations de la bande Sahélo-saharienne. En vous renouvelant mes sincères condoléances, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’assurance de ma très haute et amicale considération. Koulouba, le 26 juillet 2010 Le Président de la République Amadou Toumani Touré

Otage français au Mali : visite éclair de Bernard Kouchner au président Touré

C’est une visite pour le moins éclair qu’a effectué Bernard Kouchner à  Bamako, o๠il a été reçu par le président Amadou Toumani Touré. Si l’ultimatum des islamistes de la branche d’Al Qaeda au Maghreb Islamique a expiré le 31 janvier, nul ne sait l’issue du sort de Pierre Camatte, l’otage français, enlevé en décembre à  Ménaka au Nord Mali. Al Qaeda en échange de sa libération demande la libération de 4 de leurs hommes détenus par les autorités maliennes. Cette visite n’avait pas été annoncée et M. Kouchner n’a fait aucune déclaration à  son arrivée à  l’aéroport de la capitale malienne, a constaté le correspondant de l’AFP. Selon un responsable malien requérant l’anonymat, cette visite « de quelques heures » du ministre français des Affaires étrangères devait être consacrée aux « négociations pour la libération de l’otage français » que la branche maghrébine d’Al-Qaà¯da menace d’exécuter. Interrogé à  Paris, le ministère français des Affaires étrangères a confirmé lundi soir que M. Kouchner était arrivé à  Bamako. « Il va y rencontrer le président du Mali », Amadou Toumani Touré, a indiqué le porte-parole du Quai d’Orsay, Bernard Valero. Le chef de la diplomatie francaise a été accueilli par la Ministre de la Promotion de la Femme et de l’Enfant et de la Famille, Maà¯ga Sina Damba. « Le ministre français sera +immédiatement+ reçu par le président malien Amadou Toumani Touré (…) Il est clair que la préoccupation du moment, c’est le sort du ressortissant français. Je veux insister : son sort nous préoccupe », a déclaré le même responsable malien. Le Français Pierre Camatte avait été kidnappé le 26 novembre à  Ménaka, une ville du nord-est désertique du Mali. Al-Qaà¯da au Maghreb islamique (Aqmi), qui retient en otages six Européens au Mali, avait menacé le 10 janvier d’exécuter l’otage français, si quatre de ses combattants (deux Mauritaniens, un Algérien et un Burkinabè) détenus au Mali n’étaient pas libérés d’ici le 30 janvier. Mais Aqmi a finalement repoussé à  une date indéterminée cet ultimatum qui expirait dans la nuit de samedi à  dimanche. « Même si l’ultimatum a été repoussé, il est urgent d’agir », a souligné l’officiel malien interrogé par l’AFP. La menace d’assassinat de l’otage est prise d’autant plus au sérieux qu’Aqmi avait annoncé, en juin, avoir tué, pour la première fois, un otage occidental, le touriste britannique Edwin Dyer. Le rapt de Pierre Camatte au Mali avait été suivi des enlèvements en Mauritanie de trois Espagnols, le 29 novembre, et de deux Italiens, le 18 décembre. Dimanche soir, lors d’une émission organisé par TV5Monde, RFI et Le Monde, le ministre français avait déclaré ne pas avoir de nouvelles de Pierre Camatte. « Je n’en ai pas et si j’en avais, je ne vous les donnerais pas », a-t-il dit. « C’est une affaire extrêmement sérieuse (…) Je resterai discret sur la manière dont cela se déroule mais je ne serai pas discret sur la façon dont le Mali est responsable. Ce n’est pas nous, c’est le Mali », avait-il ajouté. Interrogé pour savoir ce qu’il entendait par cette responsabilité, il avait précisé: « C’est sur le territoire malien que cela s’est produit et c’est un pays souverain. C’est avec eux que nous travaillons. Trois Espagnols ont été enlevés, deux Italiens, c’est un danger extrêmement pressant ». « Il faut bien savoir qu’il y a maintenant un véritable danger, Al-Qaà¯da au Maghreb constitue vraiment un danger partout. Un certain nombre de Français ont été assassinés en Mauritanie, vous vous en souvenez. Essayons donc au mieux d’être utile », avait-il ajouté. « Je fais tout mon possible pour que cet homme échappe à  la mort et soit libéré », avait conclu le ministre français.