Kung-fu Club de Faladiè : Le monastère shaolin

La rencontre du Yin et du Yang, l’éveil spirituel et de la force physique, la concentration du chakra, toutes ces spécificités se trouvent en un lieu à Bamako : le Kung-fu Club de Faladiè.

Force et sagesse, ce sont les deux principes qu’on enseigne au Mande Kung-fu Club de Faladiè. Un « monastère » à la malienne, qui n’en présente pas l’architecture habituelle, mais en possède le cœur. Son histoire est indissociable de celle d’un homme et résume l’avènement du Kung-fu au Mali. Cheick Coulibaly, grand maitre shaolin et pionnier de cet art martial millénaire venu de Chine, a formé « tous ceux qui forment aujourd’hui au Mali ». Taekwondoïste dans une vie antérieure, il s’oriente vers le Kung-fu après un séjour à Dakar (Sénégal). Il décide ensuite de revenir au pays pour enseigner, avant de repartir une nouvelle fois, cette-fois en Côte d’Ivoire, réputée pour son Kung-fu, pour se perfectionner. Le centre, qui a vu le jour en 1991, a formé au moins un millier de personnes, qui pour la plupart rendent pérenne leur apprentissage en transmettant à leur tour leur savoir.

Aujourd’hui, c’est l’un des disciples, de la quatrième génération, de Coulibaly qui tient les rênes. « Nous pratiquons le Shaolin du Nord. Les coups de pieds et les acrobaties sont plus mis en avant que les coups de poing » explique Maitre Mamadou Diassana, ceinture noire 5ème dan. 60 élèves s’entrainent trois fois par semaine, un chiffre assez famélique que Diassana espère voir grossir. « Nous avons beaucoup de ceintures noires au club et toutes ont des disciples. S’ils venaient, nous aurions sensiblement plus de monde ».

« Nous sensibilisons nos membres pour les dissuader de faire recours à la force. Pour se défendre oui, pour aider des personnes en détresse aussi, mais pour le simple plaisir de se battre, pour se jauger, non » ajoute-t-il. Des leçons de self-control qui ne sont pas du goût de tous. « Beaucoup nous disent qu’ils sont là pour apprendre à se battre. Nous leur enseignons que le Kung-fu n’est pas la violence. C’est même tout le contraire » dit Diassana. Le club forme la crème, biberonnée aux exploits de Bruce Lee ou de Jet-Li, avec une motivation particulière pour l’apprentissage de cet art. Plusieurs membres ont participé en 2016 au Togo à la compétition ouest-africaine de Kung-fu Wushu, où le Mali a fini 3ème avec 20 médailles.

 

Kung Fu : Maitre Issa Diallo, entre tigre et dragon

De haute stature, le crâne dégarni par un début de calvitie, son physique imposant fait plus penser à un haltérophile qu’à un maître kung-fu Wushu. Et pourtant il est l’un des plus grands et des plus respectés de la discipline.

Il n’a pas subi d’entrainement intensif dans un temple shaolin situé tout en haut d’une montagne chinoise, n’a pas marché pieds nus sur d’ardents brasiers, ni coupé de feuille d’arbre par la force de son esprit. Non, il n’a rien fait de toutes ces idées préconçues véhiculées par le cinéma asiatique. Mais à 48 ans, Issa Diallo est l’un des grands maîtres de kung-fu Wushu au Mali, un titre qu’il n’aime d’ailleurs pas particulièrement. « Au bout d’un moment on vous catégorise, mais je ne pense pas être arrivé à ce niveau ». « Et puis à cause de ça, je ne peux plus me confronter à qui que ce soit », s’amuse celui dont tous les potentiels adversaires sont ses disciples ou des disciples de ceux-ci. Il est tout de même ceinture noire 8ème dan et pratique cet art martial depuis près de quarante ans. Ces années d’entraînement ont développé chez lui une grande humilité et un culte du respect, à la limite de l’obséquiosité. « Un véritable adepte du kung-fu doit d’abord être discipliné et respectueux, ce sont les bases d’un bon apprentissage », précise-t-il.

C’est à la fin des années 70 qu’il commence la pratique du kung-fu à Bouaké, aux côtés des maîtres Touré, deux jumeaux ivoiriens respectés et intransigeants. « Ils étaient très forts mais pas faciles. Il y a eu des fois où j’ai eu envie de tout plaquer », se souvient-il. Mais l’amour de la discipline et surtout la pression de sa mère l’ont poussé à continuer. « Elle me chassait à coups de balai quand je rechignais à m’entraîner. Elle ne voulait pas que je me repose sur mes lauriers, et me disait toujours que je bénéficierai des fruits de mon engagement ».

Homme hybride L’art du kung-fu emprunte beaucoup à la gestuelle d’animaux spécifiques, dans la manière de porter les coups notamment. « Je les maîtrise tous, mais il y en a certains que j’utilise plus que d’autres », explique maître Diallo. Le tigre, le dragon et la grue sont ses favoris. Toutes ces techniques se caractérisent par une force dans le coup de poing. « Il y a d’autres espèces que je n’enseigne à mes élèves que lorsque j’ai une confiance totale en eux ». Parmi eux, l’aigle et le serpent dont les coups visent les points vitaux et peuvent engendrer d’importantes blessures chez l’adversaire.