Coronavirus : Maintien des législatives et brigade de vigilance, le gouvernement fait le point

Le Premier ministre Dr. Boubou Cissé a animé, jeudi 19 mars 2020, une conférence de presse à la primature pour donner plus d’explications sur les différentes mesures prises par le gouvernement dans la lutte contre la menace du coronavirus au Mali. Il avait à ses côtés pour l’occasion,  le ministre de la Santé et des Affaires sociales, le ministre  des Transports et de la Mobilité urbaine, et celui de la Communication, chargé des relations avec les institutions, porte-parole du gouvernement.

Le Chef du gouvernement a souligné au cours des échanges, que tout le travail qui est en train d’être fait est axé sur la prévention, pour que le virus ne pénètre pas dans le pays, mais qu’au cas où il le serait, éviter une contagion locale.

Dr Boubou Cissé a assuré que le gouvernement est conscient  de notre vulnérabilité lié au fait que « quels que soient les efforts déployés, notre système de santé sera très rapidement saturé si  le coronavirus venait à pénétrer dans notre pays ».

C’est pourquoi,  au-delà de la prévention, le pays  est  en train de se  préparer pour la prise en charge d’éventuels cas confirmés du coronavirus.

« Nous nous souhaitons le meilleur pour le Mali mais nous nous préparons au pire. Un dispositif de prise en charge  est  mise en place à Bamako ainsi que dans les capitales régionales », assure le Premier ministre, en précisant qu’il y a une vingtaine de lits pour la prise en charge disponibles à ce jour, à Bamako, qui va s’étendre à une centaine dans les prochains jours.

Une brigade de vigilance et de sensibilisation

Revenant sur les mesures d’interdictions de rassemblement de plus de 50 personnes, le Chef du gouvernement a insisté sur la sensibilisation des populations et la mise à disposition  d’un certain nombre de moyens de contribution à la prévention, notamment aux grands carrefours de rassemblement, les gares routières, les transports en commun, etc.

« L’idée de mettre en place une  brigade de vigilance et de sensibilisation a été discutée hier (mercredi 18 mars) en Conseil des ministres. Elle serait de recruter une centaine de jeunes gens, peut-être même au-delà du millier pour faire partie de cette brigade qui tournera au niveau des marchés et autres endroits de rassemblements », a déclaré le Premier ministre.

« Nous en appelons à la responsabilité citoyenne de tous les Maliens. Sans cela, ne vous faites pas d’illusion, le virus va pénétrer  dans notre pays et se propager. Il faut que chacun  comprenne cela et  que cela se  traduise dans les attitudes de tous les jours », a t-i insisté.

Maintien des élections législatives

Etant face à une situation  où la vie de la nation doit pouvoir continuer, le gouvernement décide de maintenir les élections législatives dont le premier tour est fixé au 29 mars 2020 sur toute l’étendue du territoire,

« Pour des raisons de survie de la nation, de continuité de l’Etat, à ce jour, nous avons décidé de maintenir la tenue des élections législatives du 29 mars. Ces élections vont se tenir, qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas de cas de coronavirus confirmé », a expliqué Dr Boubou Cissé.

Des précautions spéciales et un dispositif allant de l’encadrement et de la formation des agents concernés par ces élections au respect strict des mesures de prévention préconisées pour les électeurs le jour du scrutin, seront mises en place.

Transport au ralenti

En plus de la suspension des vols commerciaux en provenance des pays à risque, des mesures ont été également prises au niveau des transports terrestres, notamment dans les échanges avec les pays de la sous-région.

« Nous avons à peu près une trentaine de portes d’entrée au Mali et tous ces corridors ont été pris en charge par le ministère de la Santé, avec des  cordons sanitaires, où les mêmes précautions prises au niveau de l’aéroport international Modibo Keita seront appliquées », a indiqué le Ministre des Transports et de la mobilité urbaine, Ibrahim Abdoul Ly.

Mais, étant donné que la quasi-totalité de nos marchandises (Plus de 90%)  provient de l’extérieur, notamment les hydrocarbures et les denrées de première nécessité, il faudrait permettre que ces dernières puissent rentrer dans le pays.

« Les dispositions ont été prises au niveau de nos 7 ports de transit, de la Mauritanie, du Sénégal, de la Guinée, de la Cote d’Ivoire, du Togo, du Bénin et du Ghana pour que les marchandises qui sont déjà dans nos magasins au niveau des ports puissent être acheminées assez rapidement et que le transit soit le plus court possible », a confié le ministre Ly.

Pour sa part, le ministre de la Santé et des Affaires Sociales, Michel Hamala Sidibé, est revenu sur trois points essentiels pour combattre la pandémie.

Pour lui, il faut d’abord le leadership, l’engagement politique à tous les niveaux, ce qu’il estime être le cas aujourd’hui,  la nécessaire mobilisation sociale « sans laquelle nous ne pourrons pas gagner face à la pandémie » et enfin la science et les équipements.

« Il faut que chaque citoyen malien prenne conscience que nous ne pouvons vaincre la pandémie du coronavirus  au Mali que si chacun  en fait une affaire personnelle », a –t-il conclu.

Législatives: Campagne électorale, la guerre des affiches

La campagne électorale des élections législatives a débuté le dimanche 8 mars 2020 sur toute l’étendue du territoire national. Dans les rues de Bamako, les affiches s’affrontent entre elles en fonction des communes. Les couleurs sont bien au rendez-vous cette année!

Les plus populaires restent fidèles au drapeau de notre pays le Mali. D’autres par contre pour marquer une différence n’hésitent pas à voyager vers d’autres horizons colorés comme du bleu, du mauve entre autres.

Toujours côté sémiologique, les affiches dans l’ensemble s’efforcent de représenter le malien dans sa diversité et globalité culturelle. Une connotation forte de sens. L’objectif étant non seulement d’interpeller le citoyen, mais aussi de retenir son attention. La pièce maîtresse du puzzle c’est de se sentir proche du candidat à travers cette identité qui retient l’instant d’un moment le regard.

La suite pourrait être d’adopter le candidat tout de suite. Mais n’allons pas trop vite, la campagne vient de commencer et les pas se construisent au compte goutte.

Ensuite vient le côté sémiotique de l’affiche. Là, les slogans et caractères utilisés s’inscrivent aussi dans la logique de la vision de chaque candidat. Une vision qui peut aisément se faire comprendre à travers des messages comme « Ensemble pour le changement », « Le peuple est notre source d’inspiration », « Ensemble nous ferons le Mali », « L’espoir de la jeunesse », « Tous pour le changement ». Des slogans comme ceux-ci et bien d’autres jonchent les rues de la capitale depuis dimanche dernier.

A pied, en moto ou en voiture, il devient presque impossible de ne pas jeter un regard même si il est furtif ou sans intérêt aux affiches des législatives. La campagne est lancée, la guerre des affiches aussi.

Idelette BISSUU

Campagne premier tour des législatives: l’effervescence autour des affiches

La campagne pour le premier tour des élections législatives du  29 mars a débuté, ce dimanche 8 mars. 147 sièges de députés sont à pourvoir. Le mandat des députés qui s’est achevé depuis trois ans tardait à prendre forme avec l’organisation du scrutin notamment à cause de l’insécurité.

Après la liste provisoire publiée le 25 février, la liste définitive des candidatures proclamée par la Cour constitutionnelle début mars a confirmé des candidatures.

Depuis samedi à minuit, les affiches ont pris d’assaut les rues de la capitale. Bamako et les autres régions vibrent au désormais au rythme de la campagne électorale à travers les couleurs des affiches des différents candidats.

Législatives 2020 : Quelles chances pour les candidates à Bamako ?

Elles sont au total 104 femmes à être candidates sur les différentes listes en compétition dans le district de Bamako à l’occasion des élections législatives du 29 mars 2020. Indépendantes ou arborant les couleurs de partis politiques, elles seront appelées à la conquête de l’électorat dans un scrutin où les candidatures masculines sont majoritaires. Si leurs chances de siéger en nombre au prochain Parlement restent limitées, selon certains observateurs, ces candidates croient en leur destin.

Alors que l’ouverture de la campagne est prévue pour le dimanche 8 mars, certaines femmes candidates sont déjà en pré-campagne auprès des populations, sur le terrain. C’est le cas de Mme Assétou Sangaré, Présidente du Parti pour le renouveau et le développement (PRD), candidate en commune IV du District de Bamako. « Nous n’en sommes pas à notre première participation. Les préparatifs vont bon train. Nous y sommes en plein, avec des portes à portes, des réunions et autres activités », confie-t-elle.

Candidate indépendante, en alliance avec le Codem et l’APM en commune VI, Mme Berthé Minian Bengaly mise pour sa part sur sa proximité avec les populations de sa commune. « Je dispose d’une proximité avec la population. On ne se lève pas du jour au lendemain pour être candidat. C’est une conviction qui se développe au fil de la réalité que vous constatez auprès de votre communauté », soutient-elle.

« Je connais les besoins fondamentaux des populations de ma commune et les différentes pistes de solution pour résoudre leurs difficultés », ajoute celle qui est également Présidente d’une association œuvrant essentiellement pour le bien-être des femmes.

Chances limitées ?

Si les candidatures féminines sont en hausse en comparaison avec les précédentes élections législatives, les femmes espèrent également occuper davantage de sièges à l’Hémicycle au cours de la prochaine législature.

« Nous sommes en train de mettre en place des stratégies pour faire beaucoup de communication concernant l’utilité et l’importance de la participation et de l’implication des femmes », affirme Habibatou Nagnouman Traoré, Présidente du Réseau des femmes leaders des partis politiques et des organisations de la société civile.

Selon le politologue Boubacar Bocoum, les chances des candidates ne sont pas très élevées, en raison de la configuration actuelle de la société malienne. « Aujourd’hui, pour être élu député il faut d’abord avoir une bonne capacité financière. Ce n’est malheureusement plus une histoire de conviction ni de programme. En plus, les femmes étant timides en politique et pour la plupart moins étoffées que les hommes en termes de compétences, il n’est pas très évident de les voir siéger en nombre à l’Assemblée nationale », pense M. Bocoum.

Un deuxième aspect de son point de vue, que semble partager Mme Berthé, pour laquelle les femmes ne devraient plus être des compléments sur les listes mais plutôt choisies essentiellement à cause de leurs compétences. « Dans certains cas de figure, il y a des femmes valables, représentatives, sur les listes, mais je déplore le fait que dans d’autres situations des femmes aient été juste prises pour compléter les listes et respecter les quotas », regrette la candidate.

Mais, pour Assétou Sangaré, le genre n’existe pas en matière de politique. « Pour moi, homme ou femme, nous avons  les mêmes rôles dans le développement de notre pays », estime la Présidente du PRD.

Accroitre les chances

« Nous allons organiser  des échanges avec les femmes des communes du District de  Bamako et d’au moins six régions, pour partager des astuces afin d’avoir plus de chances d’être élues », envisage Habibatou Nagnouma Traoré.

Mais, à en croire Boubacar Bocoum, pour que les femmes aient plus de chances d’être élues députées, il faudrait de façon générale mettre l’accent sur l’éducation citoyenne. « Le problème n’est pas celui ou celle qui se propose comme candidat ou candidate, mais plutôt l’électeur qui décide. Il faudrait donc que ce dernier comprenne les enjeux et connaisse les candidats sur lesquels compter et qui sont à même d’amener le pays à évoluer », conclut le politologue.

Germain KENOUVI

Congrès FDP – Malikura : Un Mali nouveau sur les rails ?

Quelques mois après sa création en août 2019, par les soutiens de l’actuel ministre des Réformes institutionnelles et des relations avec la société civile, Amadou Thiam, le nouveau parti politique Forces démocratiques pour la prospérité au Mali (FDP – Malikura) tiendra son premier congrès ordinaire les 7 et 8 février 2020 à Bamako. Un rendez-vous symbolique, pour lancer solennellement ce nouveau-né, dont le leader s’est déjà construit un CV correct.

Le congrès se tiendra au Centre International de Conférences de Bamako (CICB) et verra la participation de militants venus des quatre coins du Mali. De Kayes à Taoudéni, en passant par Tombouctou et Kidal, toutes les régions seront représentées.

Créé dans  le but de renforcer la gouvernance démocratique et de réussir les réformes portées par le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, dans un contexte post DNI, afin d’accélérer le retour définitif de la paix dans le pays, les FDP – Malikura veulent tout mettre en œuvre pour la réalisation de leur vision, qui est de faire du parti l’espoir du peuple malien pour un Mali nouveau.

« C’est pour continuer notre lutte politique que nous avons décidé de créer ce parti, qui mobilisera les hommes et femmes, les jeunes de l’intérieur et de la diaspora, pour un nouveau départ », indique le ministre Amadou Thiam, leader des FDP – Malikura.

Le parti entend également devenir une véritable référence dans le Landerneau des organisations politiques du Mali, de l’Afrique et du monde, en se positionnant sur la première ligne des combats pour une meilleure participation des Maliens de la diaspora à la gouvernance nationale, avec une représentation dans toutes les institutions de la République.

Objectif législatives ?

Visiblement, les FDP – Malikura ne participeront pas pleinement aux prochaines législatives, puisque le nouveau parti compte présenter des candidats seulement dans quelques circonscriptions.

« Notre congrès se tiendra juste à cinq jours de la date limite de dépôt des candidatures aux élections législatives. De ce fait, nous apporterons notre soutien aux listes des partis signataires de l’Accord politique de gouvernance et concentrerons nos efforts sur les élections post législatives », précise M. Thiam.

Le Comité national d’organisation, présidé par l’Honorable Bakary Diarra, député élu à Sikasso, est à pied d’œuvre pour les derniers préparatifs de ce premier congrès ordinaire, qui s’inscrit dans « un contexte particulier pour le Mali, qui commande une mobilisation nationale autour de l’essentiel ».

Législatives 2020 : Quel poids pour la CMAS de Mahmoud Dicko ?

Lancée en septembre 2019, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’Imam Mahmoud Dicko (CMAS) affiche désormais ses ambitions pour les prochaines échéances électorales, notamment les législatives de mars. Si l’influence et la popularité de l’imam de Badalabougou ne sont plus à démontrer, la CMAS parviendra-t-elle à peser dans les urnes ?

« Nous sommes en train de structurer ce mouvement. Nous avons dit clairement que c’était un mouvement politique, et un mouvement politique ce sont des ambitions politiques. Nous espérons avoir des candidats sur des listes, avec des partis politiques qui partagent nos valeurs », expliquait récemment à RFI Issa Kaou Djim, Coordinateur et porte-parole de la CMAS.

Son implantation d’ailleurs déjà commencé dans les six communes du District de Bamako, avant de s’étendre à l’intérieur du pays. Ne se positionnant ni dans la majorité ni dans l’opposition, le mouvement veut être une troisième voie pour l’électorat, appelé à élire de nouveaux députés pour les cinq prochaines années.

Quel poids ?

Pour Ballan Diakité, chercheur au CRAPES,  la CMAS de Mahmoud Dicko a toutes les chances de battre les partis politiques classiques lors des prochaines élections législatives.

« Un parti politique, c’est une organisation dans laquelle la société ou une partie de la société se reconnait. Mais, quand vous regardez les partis politiques au Mali depuis l’avènement de la démocratie, c’est un échec cuisant. Aujourd’hui, le marasme politique dans lequel se trouve le pays leur est en partie imputable », affirme-t-il.

« Cette situation a donné naissance à une crise de confiance chez les électeurs. Du coup, les yeux sont maintenant tournés vers les religieux, qui sont finalement les seules voix écoutées », ajoute -t-il.

Un avis qui n’est pas partagé par l’analyste politique Salia Samaké, pour lequel la CMAS de Mahmoud Dicko, toute seule, n’a pas de grandes chances de s’imposer lors des élections.

« Je ne crois pas que la CMAS puisse peser lourd aujourd’hui sur la scène politique. L’histoire de Sabati doit donner à réfléchir à tout le monde. En tant que religieux, l’Imam Dicko est incontournable, mais dans l’arène politique il fera face à d’autres facteurs, qui ne seront pas forcément à son avantage », soutient M. Samaké.

« Ils n’ont pas forcément quelque chose de nouveau à apporter, mais ils auront du poids  surtout en fonction des alliances qu’ils noueront avec les autres partis », relativise-t-il toutefois.

Referendum – législatives : L’impossible couplage?

Le ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation propose la tenue couplée des législatives et du referendum le 9 juin. Même si la date n’est pas encore officielle, cette possibilité s’avère être un vrai challenge dans un contexte incertain.  

« Ce sont  des propositions. Rien n’est définitivement arrêté. Il faut attendre que ce soit définitivement adopté », dit Brahima Coulibaly, conseiller technique au ministère  de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Alors que le temps presse, chez les différents acteurs des réflexions sont engagées pour s’accorder sur les dates des élections législatives et référendaire. « Rien n’est calé complètement, parce que nous sommes avec des partenaires dans la réflexion. Il est trop prématuré de dire ce qu’il y aura », abonde un autre responsable du ministère.

Les deux échéances sont au devant des questions actuelles. Reportées à maintes reprises, les élections législatives doivent se tenir avant la fin du mandat des députés  le 30 juin. Au même moment, le processus de révision constitutionnelle nécessite du temps pour que l’ensemble des acteurs s’accorde sur la forme et le contenu. Le comité d’experts mis en place doit rendre au Président de la République début avril l’avant-projet, pour amendement ou validation, avant que le gouvernement ne le présente à l’Assemblée nationale. Présent à l’ouverture des assises de l’alliance Ensemble pour le Mali (EPM), samedi dernier à l’ex-Cres de Badalabougou, le Premier ministre est très prudent sur le calendrier électoral. « Si le referendum se tient fin avril, la Cour constitutionnelle a deux mois pour le valider, ce qui peut aller jusqu’en juin. Malheureusement, le mandat des députés finit fin juin », fait remarquer  Soumeylou Boubeye Maiga. Selon lui, « s’il n’y a pas d’assemblée, il n’y a pas de referendum, en tout cas au stade actuel », car, explique-t-il, « le comité d’experts va remettre l’avant-projet au Président le 3 avril (…) ». C’est à la suite de cela qu’il sera envoyé à l’Assemblée nationale par le gouvernement, « car il faut une loi constitutionnelle pour aller au referendum », justifie le chef du gouvernement.

Des désaccords à dépasser

Au ministère de l’Administration territoriale siège chaque semaine le Cadre de concertation national regroupant tous les partis politiques, les conseillers techniques de certains ministères et des responsables de la société civile et des mouvements signataires de l’Accord. Cependant, certains partis, comme l’URD du chef de file de l’opposition, boudent les rencontres depuis plus de deux semaines. « Cette date me parait juste, mais certaines choses ne sont pas encore réglées pour l’opposition. Nous ne participons pas au cadre de concertation et, dès lors, nous n’avons pas suffisamment d’éléments pour pouvoir juger », estime Ibrahima N’Diaye, directeur de cabinet de chef de file de l’opposition. Selon lui, la solution  est dans « un dialogue sincère » entre tous les acteurs. « C’est vrai que le mandat des députés arrive à échéance en juin, mais si en même temps d’autres problèmes se posent, il faut les évoquer pour trouver des solutions qui puissent satisfaire tout le monde. Tout ce qui peut réussir, nous le souhaitons », plaide-t-il.

Pour l’analyste politique Boubacar Bocoum, il sera difficile de tenir les deux scrutins en même temps le 9 juin. « Pour le referendum, il y a non seulement le manque de temps, mais aussi de l’impréparation. Le gouvernement n’a pas la bonne méthode pour échanger avec la population », note-t-il. Mais l’exigence de la communauté internationale d’obtenir des résultats concrets dans la mise en œuvre de l’Accord met les protagonistes dos au mur. « Si aujourd’hui cette révision constitutionnelle  s’avère être indispensable pour l’État malien, il est évident que Soumaila Cissé ne pourra que l’accompagner, parce que la communauté internationale met la pression. Mais cela ne changera pas grande chose pour le peuple », précise l’analyste. Il ajoute « si on est en phase avec nos partenaires techniques et financiers,  ils mettront la main à la poche » pour le financement des élections.

Autre problème, en plus de quelques partis qui posent certains préalables à leur retour dans le cadre de concertation, la CMA et la Plateforme, quant à elles, veulent que l’on revienne à la première « formule » de celui-ci.

Scrutin uninominal : faut-il l’adopter pour les législatives ?

Au Mali, le mode de scrutin pour l’élection présidentielle est uninominal.  Alors que pour les législatives, où le nomadisme s’opère à l’approche des échéances, il est plurinominal. Est-il opportun d’adopter ce système pour renforcer la démocratie ?

« Le scrutin uninominal ou scrutin uninominal majoritaire à deux tours est tout simplement un système de vote à partir duquel le candidat qui arrivera en tête du vote  est directement élu au poste à pourvoir ». Ballan Diakité, politologue chercheur au Centre de recherche et d’analyse politique et économique (CRAPES) définit ainsi le concept. La plupart des politiques et citoyens ne maitrisent pourtant pas ce système électoral. « Le mode de scrutin pour l’élection du président de la République est uninominal mais celui des députés est plurinominal », explique Woyo Konaté, docteur en philosophie politique et chargé de cours à l’Université des sciences politiques et juridiques de Bamako.

Malgré la simplicité de ce système,  les acteurs sont divisés sur ses avantages pour la démocratie malienne. « La question du mode de scrutin est un débat crucial dans notre pays », souligne le Dr Allaye Niangaly, spécialiste en contentieux électoral. En plus des pratiques de transhumance politique qu’il faut encadrer, il y a la prise en compte des couches minoritaires.

Scenario improbable Pour Ballan Diakité, le scrutin uninominal est inopportun pour les législatives. « Il permet l’émergence des grands partis et une bipolarisation du champ politique, pénalise les petits partis, et ne favorise par la représentativité des couches minoritaires sociales », soutient-il.

Au Bénin pourtant, qui applique ce système, la majorité présidentielle n’a pas la majorité parlementaire à l’Assemblée et aucun parti n’a le monopole. «  Le camp présidentiel est obligé de coopérer avec les petits partis aussi », révèle Allaye  Niangaly. « Il faut penser à un système de vote qui peut permettre la représentativité de l’ensemble des couches sociales et pour cela il faut le scrutin proportionnel », préconise plutôt Ballan Diakité. Les implications pour ce genre de scrutin sont énormes sur le plan politique et juridique. Le Dr Woyo Kanouté explique ce qui pourrait changer. «Actuellement ce sont les listes pour les circonscriptions mais si c’est le scrutin uninominal, chaque siège sera une circonscription. Donc autant de députés autant des circonscriptions », décortique-t-il.

En plus de ressources financière qu’il faudrait, il n’y a pas des textes juridiques « qui peuvent sanctionner » ceux qui transhument et trahissent leur base électorale. Une disposition prévue dans le projet avorté de révision constitutionnelle.

 

Report des législatives : Voix discordantes

C’était dans l’air depuis un moment. C’est désormais officiel. Les élections législatives sont à nouveau reportées, ouvrant la voie à une prorogation du mandat des députés jusqu’à la fin du premier semestre 2019. Entre respect de la constitution et le climat politico-sécuritaire, les réactions des partis politiques sont partagées.

La Cour constitutionnelle du Mali a donné un avis favorable à la demande de l’Assemblée nationale pour le report du scrutin législatif, constatant non seulement  « le caractère de force majeure des difficultés entravant le respect scrupuleux des dispositions constitutionnelles et légales » mais aussi « la nécessité d’assurer le fonctionnement régulier de l’Assemblée nationale ». L’institution précise cependant que « ladite prorogation doit intervenir au moyen d’une loi organique », selon l’avis N° 2018-02/CCM du 12 octobre 2018, paru dans le Journal officiel de la République du Mali.

Réactions divergentes Face à ce deuxième report des élections législatives, les partis politiques n’ont pas tardé à réagir. Dénonçant une action qui « vise à donner un cadre légal à une action politique destinée à couvrir un vide constitutionnel », Moussa Mara, président de Yèlèma, réitère la position de son parti au maintien de la date constitutionnelle des élections législatives et est donc « opposé par principe au report de cette consultation ». « Le parti Yèlèma rappelle que la situation actuelle du Mali nécessite un dialogue politique inclusif permettant d’aboutir à des solutions consensuelles », peut-on lire dans un communiqué daté du 16 octobre 2018.

Au FARE – An ka wuli, ce report de l’élection des parlementaires est plutôt bien accueilli. D’ailleurs le parti n’avait pas attendu l’officialisation pour se prononcer sur la question. « Le contentieux des élections présidentielles n’étant pas encore vidé et le pays ayant d’autres priorités pour l’heure, on ne peut pas aller aux élections législatives. Aucun Malien ne peut fermer les yeux aujourd’hui sur la situation dramatique que notre pays traverse », constate Bréhima Sidibé, secrétaire général adjoint.

Le président du Parti pour l’action civique et patriotique (PACP), Niankoro Yeah Samaké, évoque pour sa part  un « mal nécessaire ». « Nous n’encourageons en aucun cas la violation de la Constitution. Mais avec la procédure entamée pour aboutir à la prorogation, il y a eu un compromis politique et cela amène un climat plus apaisé. Nous saluons donc ce compromis entre l’opposition et la majorité », affirme le candidat malheureux à la dernière présidentielle.

Mohamed Chérif Haidara : « Nous ne pouvons pas aller aux législatives sans nous être mis d’accord »

À un mois des élections législatives, leur report est toujours espéré par le Conseil supérieur de la diaspora malienne (CSDM). Son Président, Mohamed Chérif Haidara, nous en explique les raisons.

Vous avez rencontré le Premier ministre pour évoquer le report des législatives. Qu’est-il ressorti de vos échanges ?

Deux choses. Nous lui avons demandé une audience suite à la convocation du collège électoral pour les élections législatives. Dans cette lettre, nous avons demandé un report de 12 à 18 mois afin de prendre en compte les questions en suspens. Nous souhaitons que la communauté des Maliens établis à l’étranger soit érigée en région. Pour ce faire, il faut une révision constitutionnelle, sans laquelle le découpage administratif afin de nous permettre d’avoir des députés sera très compliqué. Il faut donc repousser l’élection et permettre aux Maliens de l’extérieur d’élire leurs députés.

Le Premier ministre lui-même avait demandé un report de neuf mois, ce que la Cour constitutionnelle a refusé. Qu’à cela ne tienne, le message que nous avons transmis au Premier ministre, au chef de file de l’opposition et au médiateur de la République a été que la Constitution est une chose et que la stabilité et la quiétude des Maliens en sont une autre. Nous devons mettre le Mali et les intérêts des Maliens au-dessus de la Constitution. Nous ne pouvons pas aller aux législatives sans nous être mis d’accord sur un certain nombre de points. Aujourd’hui, aussi bien l’opposition que les Maliens de l’extérieur s’accordent pour un report.

Concrètement, comment va se matérialiser cette représentativité ?

Ce n’est pas compliqué. Le Mali est un pays qui a élaboré une Politique nationale de migration (PONAM) copiée par tous les pays de la sous-région. Le Sénégal, qui s’en est inspiré, a aujourd’hui 15 députés issus de sa diaspora. Ils ont même constitué un groupe parlementaire. Si le Sénégal a pu le faire, pourquoi pas nous ?

Le HCME formule les mêmes demandes. Pourquoi ne pas mutualiser vos efforts ?

Le Haut conseil des Maliens de l’extérieur est une association qui a obtenu son récépissé en 1993. Ils ont attendu 16 ans, en 2009, pour avoir un décret d’utilité publique. Mais, jusqu’à aujourd’hui, le HCME s’est comporté comme une association au service du pouvoir en place. Il était avec l’ADEMA, sous ATT il était du PDES et maintenant il est au RPM. Les articles 13, 14 et 17 stipulent pourtant que l’association est apolitique. Mais son président a donné une consigne de vote pour IBK. Cela a décrédibilisé le HCME. Au final, nous serons obligés de travailler ensemble. Chacun présentera ses candidats et une fois à l’Hémicycle nous travaillerons main dans la main pour servir les Maliens établis à l’extérieur.

Amadou Thiam : « Pour l’instant, nous sommes toujours dans l’opposition »

En pleine consultation pour la formation d’une coalition en vue des prochaines législatives, le Président du parti ADP – Maliba, Amadou Thiam, est très confiant dans l’issue du prochain rendez-vous électoral. A la tête du parti arrivé troisième à la dernière présidentielle, il affirme que ces législatives seront une confirmation de l’implantation de sa mouvance politique.

Vous aviez fait preuve de mutisme depuis la présidentielle. Était-ce pour mieux préparer les législatives ?

Oui, nous préparons les législatives. Nous ne sommes pas dans la logique d’un boycott quelconque. Nous prônons l’ouverture à d’éventuelles alliances. Ce sera comme toujours en fonction des réalités sur le terrain. Nous tablons sur le maximum de députés à l’Hémicycle, donc les alliances qui seront en mesure de nous donner cette garantie seront les bienvenues.

Ces législatives sont très importantes pour votre parti, après votre troisième place à la présidentielle…

Ces législatives seront une confirmation. Déjà, avec les alliances qui s’annoncent et les scores que nous avons fait par endroits, on nous donne favoris pour les législatives. Cela ne pourra être qu’une confirmation des scores que nous avons obtenus durant les dernières élections.

L’opposition vous accuse de ne pas l’avoir soutenue. Quel positionnement adopterez-vous à l’issue des législatives ?

Cette décision sera prise après les législatives. Pour l’instant, nous sommes toujours dans l’opposition politique. Ce n’est qu’après les législatives que nous pourrons parler d’opposition et de majorité. C’est à ce moment que cela va se dessiner. L’Assemblée nationale sera le lieu du débat et du positionnement majorité – opposition et dans deux mois il y aura certainement une reconfiguration de la scène politique malienne, même si cela dépendra aussi du nombre de députés que nous aurons. Quant au chef de file de l’opposition, ce sera le leader du groupe qui aura le maximum de députés au sortir des urnes.

Quelle analyse faites-vous du report des législatives ?

Plutôt du non report. Nous étions dans une logique d’un report de neuf mois. C’est ce que le Premier ministre avait dit à l’époque, c’était sa première proposition. Le temps selon lui, de faire les réformes et de créer des circonscriptions électorales dans les régions du nord. La Cour Constitutionnelle a débouté le Cadre de concertation des partis politiques en disant que les élections devaient se tenir avant fin décembre. Cela a eu pour effet de déconcentrer un peu les partis, qui avaient déjà renvoyé les élections à plus tard. Mais là nous n’avons pas le choix. Nous devons nous y mettre et consolider les acquis que nous avons pu asseoir lors de l’élection présidentielle.

Après la présidentielle, cap sur les législatives

Le premier défi majeur du gouvernement était la tenue de la présidentielle. Après cet épisode réussi, les regards se tournent maintenant vers les législatives, prévues pour novembre 2018. Certains regroupements peaufinent déjà leur stratégie.

L’effervescence du 2ème tour de la présidentielle est encore notable au ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation. Le nom du nouveau Président de la République sera connu dans quelques jours, lors de la proclamation des résultats définitifs par la Cour Constitutionnelle. Mais déjà les échéances de proximité, comme les législatives, sont dans le viseur des politiques.

Dans environ trois mois, les citoyens maliens seront en effet appelés à élire leurs députés. Ce scrutin apparait après la présidentielle comme très important, de par la légitimité qu’offrent les populations à leurs représentants à l’Hémicycle.

Rappel des troupes Si la guéguerre entre les deux finalistes de la présidentielle se poursuit, d’autres ténors politiques se concentrent sur l’avenir. « Nous sommes en train de battre le rappel des troupes pour que les uns et les autres s’engagent dans une dynamique de remobilisation de l’ensemble de la base militante », avertit le chargé de communication de l’Alliance pour la démocratie et la paix au Mali (ADP Maliba). Pour Cheick Oumar Diallo, très bientôt des réflexions seront engagées sur les potentielles listes que sa coalition proposera. « Ces propositions remonteront au Bureau exécutif, qui va les apprécier et qui engagera début octobre la phase des discussions approfondies avec les différentes structures et les alliés qu’elles auront choisis localement », révèle-t-il, très confiant. Avec neuf députés ADP, le porte-parole d’Aliou Diallo ne regrette pas leur présence à la présidentielle. « Nous sommes quand même un peu déçus du fait qu’il y ait eu autant d’irrégularités et de fraudes, mais dans l’ensemble nous sommes très fiers d’avoir pu nous hisser dans le trio de tête final et d’être aujourd’hui une force politique incontournable ».

Imposer le changement Dorénavant, la scène politique réserve du suspense. Parmi ceux qui comptent agir autrement, la Coalition Cheick Modibo Diarra. « Nous sommes en train de concentrer nos efforts sur l’intérieur du pays. Nous faisons des réunions. Nous avons conçu notre programme avant même la présidentielle », affirme Yehia Maiga, son chargé de communication. Sorti quatrième du 1er tour de la présidentielle, le mouvement mise sur les législatives pour semer les graines du changement. « Si on arrive à avoir de bons députés à l’Assemblée nationale, on pourra même imposer des choses au Président de la République et aux ministres dans leur façon de gérer le pays, le grand problème de ces 20 dernières années ».