Islam et charia : lumière sur des pratiques aux antipodes

Qu’est-ce que la charia ? Comment l’appliquer ? En quoi est-elle partie prenante de l’Islam ? Le Mali peut-il vivre sous la Charia ? Charia et laà¯cité peuvent-ils cohabiter ? Le droit des femmes face à  la charia… Autant de questions auxquelles ont tenté de répondre, Moulaye Cherif Haidara, chercheur à  Tombouctou, Ousmane Madani Haidara, leader spirituel du mouvement Ancardine et Alpha Kounta, savant musulman, président du Haut conseil islamique de Tombouctou… Islam, Charia et laà¯cité La dernière religion monothéiste révélée au monde et réunissant plus de 2 milliards de fidèles dans le monde fait l’objet de toutes sortes d’interprétations, amalgames et extrémismes de nos jours. Le terrorisme religieux et la charia sont des pratiques imposées. Au Nord du Mali, occupés par les islamistes d’Ancardine et du Mujao en grande majorité, la charia est devenue la règle de vie ded habitants. « A Tombouctou, la cité des 333 saints, explique Moulaye Cherif Haidara, l’islam est synonyme de confusion. Il faut pourtant clairement faire la distinction entre Islam et islamism. Toujours d’après Haidara, «Â ceux qui occupent la ville sainte n’ont rien à  apprendre aux Tombouctiens en matière d’islam ». «Â Il n’y a d’ailleurs pas de contrainte en Islam», réaffirme le chercheur. l’Islam depuis les temps immémoriaux a toujours été synonyme de science. Le Coran le dit : «Â Ceux qui cherchent la science, cherchent Dieu ». A partir de là , l’Islam doit apporter lumières et sagesse à  ceux qui pratiquent cette religion. «Â Si l’on doit couper une main, puisque la Charia, la loi islamique le demande, il faut des préalables, des preuves, et que le voleur qui a commis le crime avoue sa faute », précise Alpha Kounta du Haut conseil islamique de Tombouctou. Triste cas pourtant que celui de ce pauvre berger d’Ansongo amputé d’une main et puni sans preuves ni procès… On comprend alors que l’application de la charia puisse rebuter les Maliens du nord habitués à  autre chose. Dans un pays laà¯c, la charia peut-elle s’appliquer ? «Â Même la Mauritanie qui est un pays islamique ne l’applique pas », admet un ressortissant du nord. Pour Ousmane Madani Chérif Haidara, le leader spirituel du mouvement Ansar Dine, le Mali n’est plus en paix. Si la charia, qui est un mot arabe, veut dire Loi, Kouddoutz, signifie la punition. «Â l’islam nous est venu du nord, à  Tombouctou. Comment ces gens peuvent-ils vouloir nous apprendre la religion ? », s’interroge Haidara. En revisitant l’époque du prophète PSL, Le guide d’Ancardine explique que C’’est à  partir du moment o๠les «Â cafr » ou «Â mécréants » de Médine ou de la Mecque ont empêché les musulmans de pratiquer leur religion que la guerre sainte a débuté. Une guerre sainte aux antipodes du djihad prôné par les islamistes. «Â Si ceux qui profanent les mausolées saints sous lesquels sont enterrés les saints et compagnons du prophète prétendent détenir la vérité, cette vérité ne fait pas partie de l’Islam ». Islam et politique : les religieux doivent-ils se mêler de la gestion de l’état ? La question a été évoquée lors du débat. D’après Ousmane Madani Haidara, guide spirituel d’Ancardine, les religieux n’ont aucune vocation à  se mêler de la gestion de l’état sauf sur consultation des autorités politiques. Or l’on constate la place croissante que prend le Haut conseil islamique dans la gestion de la crise du nord. «Â Au nord, l’application de la charia est liée à  des questions religieuses, nous sommes habilités à  être des interlocuteurs pour les islamistes », précise un représentant dans la ville de Tombouctou. Aujourd’hui la politisation de l’Islam au Mali s’accroit et les hommes d’Ansar Dine ne reconnaissent le HCI, comme leur interlocuteur privilégié avant les autorités de transition. «Â Face à  une absence d’implication des autorités de Bamako, il est évident que d’autres instances prendront le relais, mais attention le HCI ne fait pas seulement de la politique, mais prend des initiatives comme la société civile, en envoyant des dons et des vivres aux populations du nord », explique un élu de Diré. Si Islam et politique sont intimement liées désormais, la laà¯cité est menacée aujourd’hui. Le Mali tend t-il vers une République islamique ? Femmes et Charia Elles sont nombreuses à  être montées au créneau lors des Assises de l’occupation. La première, Mme Haidara Aichata Cissé, député élue de Bourem. Elle déplore que l’application des nouvelles règles de vie, empêchent l’accès des femmes à  leur commerces et moyens de subsistance : «Â A Bourem, les femmes ne peuvent plus sortir de chez elles, elles ont peur ». Pour sa consœur, Oumou Seck Sall, maire de la ville de Goundam «Â l’Islam permet-il que les femmes soient humiliées comme elles le sont au nord ? ». Et d’expliquer que le maison multifonctionnelle de la ville o๠les femmes analphabètes venaient apprendre le Coran, est occupée par les hommes du Mujao. Pire, ils y ont tout détruit, comme l’espoir que ce lieu procurait aux femmes de la localité. Plus vindicative, Oumou Touré de la CAFO, la coordination des ONG et associations féminines estime qu’avec le coup d’état politique, s’est ajouté un coup d’état religieux. «Â Les femmes ont été les premières à  avoir aidé le prophète PSL à  répandre l’Islam. Alors cette religion peut-elle permettre que des femmes soient maltraitées ? ». A ce sujet, le député El Hadj Baba Haidara de Tombouctou, attire l’attention sur les pratiques humiliantes de viols collectifs orchestrés sur certaines femmes sous couvert de mariage. «Â Le plus inquiétant, ce sont ces enfants à  naà®tre, fruits de relations coupables entre islamistes et femmes violées. Qu’a prévu la religion pour le baptême de ces enfants ? », s’inquiète Mme Sidibé Aminata Diallo, ancienne ministre et membre de la Coalition pour le Mali. Face à  toutes ces questionnements, le chercheur Moulaye Chérif Haidara, a répondu que l’Islam accordait une place de choix aux femmes, mères de l‘humanité. Tout un verset leur est consacré dans le CoranÂ